LE BURUNDI SORT DE LA CPI ET L'AFRIQUE DU SUD SUIT
Burundi news, le 23/10/2016
Par Gratien Rukindikiza
Il y a des conflits qui déjouent tous les pronostics. Il y a des pays qui sont dirigés par des hommes dépourvus de toute logique. Il y a des gens qui peuvent être plus barbares que les animaux sauvages. Ces gens prient tous les jours et on a l'impression que l'impunité est garantie par ces fausses prières.
La barbarie qui sévit au Burundi au service de Nkurunziza afin d'asseoir son pouvoir a dépassé les limites. Ses services ont la carte blanche pour torturer, tuer et violer pourvu qu'ils le fassent contre les opposants. La justice burundaise est morte. Elle n'est plus le recours des citoyens. La justice de la sous- région est incapable face à l'horreur burundaise. La cour pénale internationale (CPI) semble la mieux indiquée pour juger les crimes contre l'humanité qui se commettent au Burundi.
CPI et le dossier burundais
La Cour Pénale Internationale juge les individus ayant commis des crimes contre l'humanité, les actes de génocide, les crimes de guerre et les crimes d'agression. Seuls les Etats qui ont signé et ratifié le statut de Rome du 1er juillet 2002 sont tenus de coopérer avec la CPI pour des enquêtes et des arrestations des présumés coupables. Le Burundi est signataire de ce statut de Rome et est tenu de coopérer. Le récent rapport des experts indépendants de l'ONU a accéléré la volonté de sortir de la CPI. Le pouvoir de Nkurunziza a compris que les personnes visées par le rapport sont susceptibles d'être traduites poursuivies par la CPI.
La sortie de la CPI n'est pas une surprise pour plusieurs observateurs. Ce qui est étonnant est le retard du pouvoir pour commencer les démarches de cette sortie. Les conseillers de Nkurunziza ont mal joué. S'il était sorti de la CPI dès le mois de mai 2015 quand les policiers ont commencé à tirer sur les manifestants, le pouvoir de Bujumbura aurait pu échapper à l'obligation de coopérer avec la CPI car le Burundi car il n'était pas encore sous les enquêtes préliminaires de la CPI. C'est juste en ce moment que Nkurunziza choisit tardivement la sortie. Le Burundi est tenu de coopérer pendant une année après l'annonce de la sortie. C'est justement cette année que la CPI va accélérer ses enquêtes et les mises en examen de plusieurs responsables burundais.
Contrairement à ce que plusieurs burundais pensent, la sortie de la CPI n'empêche pas la CPI de continuer ses enquêtes ou de poursuivre. Le Président soudanais Omar Béchir est poursuivi par la CPI alors que son pays n'a jamais adhéré au statut de Rome. Les responsables burundais seront toujours poursuivis pour les crimes commis avant et après la sortie de la CPI.
Le Burundi ne sera pas l'exemple des autres pays car c'est un mauvais élève en matière des droits de l'homme. Et pourtant l'Afrique du Sud vient de suivre ou attendait ce moment.
L'Afrique du Sud sort aussi de la CPI pour d'autres raisons
L'affaire d'arrestation demandée du Président Soudanais en Afrique du Sud ne suffit pas au Président Zuma d'expliquer cette procédure de sortie de la CPI. D'autres raisons expliquent cette demande de sortie. Pour préparer cette sortie, le Président Zuma a effectué la première visite d'un Président Sud-Africain au Kenya. Ce n'est pas n'importe quel pays car c'est le pays dirigé par le seul pays en Afrique dont le Président est poursuivi par la CPI et qui a accepté de coopérer après des négociations.
Si le Président Zuma a voulu être solidaire avec le Burundi, il s'est trompé de casting. Plusieurs observateurs s'imaginent que le Président Zuma va répéter un autre massacre des mineurs à Marakana.
Le Président Zuma a beaucoup de problèmes dans son pays. Il a plongé le parti au pouvoir l'ANC qui n'est plus majoritaire dans plusieurs villes du pays.
L'ANC a perdu lors des élections municipales du mois d'août dernier les villes de Pretoria, de Port Elisabeth et n'arrive pas à conquérir la ville du Cap dirigée par l'opposition de l'Alliance Démocratique. L'ANC perd la majorité absolue dans son fief Johannesburg. Il doit affronter la montée du jeune parti de Julius Malema.
Le Président Zuma doit affronter la fronde en interne pour des dossiers de corruption notamment la rénovation de sa villa avec les fonds du budget de l'Etat. Le scandale du limogeage du très compétent et intègre ministre des finances Pravin Gordhan a affaibli énormément Zuma. Même le parti communiste, allié du pouvoir, n'a pas manqué de mots pour dire du mal du pouvoir de Zuma. Le Président Zuma est accusé de favoritisme au profit de la famille indienne Gupta. Cette famille aurait proposé un poste de ministre des finances à un membre de l'ANC moyennant des avantages dans les affaires. Il est très difficile de Zuma de se protéger des autres scandales ou poursuites de la justice pendant les quelques mois de la fin de son mandat. Le Président Zuma tente d'exister en dehors des scandales.
L'homme qui a décrédibilisé la fonction présidentielle en Afrique du Sud comme Nkurunziza l'a fait au Burundi n'a pas d'autres choix que de créer la diversion. La sortie de la CPI est destinée à l'opinion intérieure en Afrique du Sud. Il s'agit de créer un problème à l'extérieur pour faire taire la fronde en interne, faire oublier les grèves à répétions des mineurs et des étudiants.
La CPI existe pour le bien des peuples et des dirigeants respectueux des droits de l'homme.