L’affaire Lubelsky : la Belgique et le CNDD-FDD avalent leur langue, et les bandits prennent la clé des champs.

lundi29 janvier 2007
 

Source : Burundi bwacu

 

Par Emmanuel Bamenyekanye, Pharmacien.

lundi 31 octobre 2005.

Au moment où j’allais écrire les lignes qui suivent, je me suis rappelé qu’au Burundi la plupart de nos familles survivent avec moins d’un euro par jour, et que le salaire mensuel d’un enseignant de l’école primaire ne dépasse pas les 30 dollars. Je me suis alors demandé si les hommes qui nous ont dirigés jusqu’ici ont un coeur semblable au mien, car, s’il en était ainsi, ils auraient certainement honte de rouler dans de grosses voitures de luxe, de prendre de l’embonpoint et de passer des nuits tranquilles dans les villas huppées de la Capitale ou des centres urbains, pendant que leur peuple meurt de faim et reste emprisonné dans les hôpitaux pour factures impayées. Pour ma part et convaincu moi aussi que la peine de mort du délinquant ne rend pas justice à la victime, j’estime que les gens coupables du pillage des maigres ressources de notre Etat déjà saigné à blanc par une longue guerre dont elle a du mal à sortir, ne devraient pas seulement être dénoncés jusque dans les lieux de culte et sur les places du marché. A mon avis, les pouvoirs publics devraient impérativement les obliger à réparer le tort qu’ils ont sciemment infligé à notre peuple, en les condamnant à des travaux d’intérêt public jusqu’à l’épuisement total de la valeur due, et en les privant de l’exercice de leurs droits civiques pour une durée correspondante à la gravité de leur forfait. Malheureusement, force est de constater que la plupart de ceux par qui le malheur s’est abattu sur notre pays continuent à faire la belle vie soit à Bujumbura, soit dans les coquettes capitales de ce monde, dans l’indifférence générale et peut-être aussi grâce à la complicité au moins du silence des responsables de la chose publique. Nous prenons à témoin de notre grande déception l’exemple déjà connu de l’affaire Lubelsky.

Le dossier en question a débuté vers la fin des années 60 avec le retrait d’une licence d’exportation à un homme d’affaire belge, Mojses Lubelsky, licence qui concernait l’exportation de l’or et du diamant. Pour avoir résilié unilatéralement le contrat, le Burundi s’est vu condamné par la cour Internationale de Paris à une amende de 800.000 dollars avec 5 % d’intérêt par an. Le dossier est resté en veilleuse pendant presque 40 ans.

Le CNDD-FDD là-dedans ?

Depuis qu’il a refait surface en 2003, les plus hautes instances de notre pays ont été consultées et/ou informées, depuis la Présidence de la République jusqu’à l’Ambassade du Burundi à Bruxelles, en passant par le Ministère de la Bonne Gouvernance et de l’Inspection Générale de l’Etat dont le titulaire est devenu aujourd’hui Président de la République. En même temps, grâce surtout à la pression des médias, à la ténacité de la Cour des Comptes ainsi qu’à l’implication de l’Observatoire de l’Action Gouvernementale et de l’OLUCOME, l’opinion publique a cru un moment que les responsables présumés de ce détournement d’argent allaient être interpellés par la justice. Malheureusement, c’était sans compter avec la perversité de notre Procureur Général, toujours et inconditionnellement fidèle à ses parrains, ceux-là même qui avaient subtilisé cette énorme somme d’argent, au grand dam de nos populations affamées. Entretemps, il y a eu l’arrivée des nouvelles autorités issues des dernières élections, et tout le monde croyait qu’elles allaient tout faire pour mettre la main sur ces criminels connus de tout le monde. Mais à notre grande surprise, nous venons d’apprendre qu’avant de se volatiliser dans la nature, le Ministre des Finances de l’époque, Monsieur GAHUNGU Athanase, aurait approché l’Hon. Radjabu Hussein, le président du CNDD-FDD aujourd’hui au pouvoir, pour lui « expliquer » la situation. C’est ainsi que Mr. Gahungu a pu sortir du Burundi en toute tranquillité, un certain jour de Septembre, presque dans le même avion qui transportait le Président de la République en personne et sa suite à destination de New York où il devait participer à l’Assemblée Générale de l’ONU. Quand nous avons lu la nouvelle publiée en primeur sur le site www.burundinews de Gratien Rukundikiza nous n’en croyions pas nos yeux. Comme pour tester la véracité de nos infos et ou l’efficacité du Gouvernement Nkurunziza, il sera suivi un peu plus tard par ses complices Toyi Salvator et Ndayizeye Domitien avec un transit à Bruxelles où nous avons en vain tenté de les joindre pour avoir leurs versions des faits. Nous ne tarderons pas à savoir si leur voyage ne s’inscrivait pas à étudier avec Lemaire de la Belgolaise la suite à réserver au procès intenté par Monsieur Sahabo Privat contre Mr Glecer, héritier de Lubelsky pour n’avoir pas honoré ses engagements. L’histoire vécue au quotidien continue à nous montrer que même les autorités actuelles ont redoublé d’ardeur contre les voleurs de poules et de chèvres, pendant que les bandits fossoyeurs de la Nation continuent à trinquer et à savourer les rentes des biens volés, vautrés et rieurs, dans les villas huppées de la Capitale ainsi que dans les salons des plus belles villes d’Amérique ou d’Europe, avec la complicité plus que certaine de certains milieux occidentaux.

Et la Belgique ?

En nous référant par exemple à notre posting d’Août 2005 sur www.abarundi.org , nous avions informé le lecteur que, au terme de nos propres investigations, les comptes des sieurs Ndayizeye Domitien, Gahungu Athanase et Toyi Salvator, respectivement Président de la République, Ministre des Finances et Gouverneur de la Banque de le République du Burundi au cours de l’interminable période de transition, étaient sous surveillance, et que les autorités belges n’attendaient qu’une demande formelle de la part du Gouvernement burundais pour entamer une action contre eux. D’aucuns, y compris les concernés eux-mêmes, n’ont pas cru à notre information. Pourtant de source diplomatique et digne de foi, nous venons d’apprendre que la Belgique par le biais de son Ambassade à Bujumbura a procédé à la vérification de notre information et qu’elle en est arrivée aux mêmes conclusions que nous. Fort évidemment, notre démocratie naissante encore tatillone n’a pas encore fait la demande officielle auprès de l’autorité compétente du Royaume de Belgique pour que celle-ci procède au blocage des comptes des concernés, cela d’autant plus que l’opération a été facilitée par une Banque belge - la Belgolaise - sous les auspices de Mr. Lemaire. Avec cela, les pays démocratiques occidentaux si respectueux du droit chez eux continuent de fermer les yeux sur des crimes graves comme le détournement d’un million d’euros par trois individus, dans un pays qu’eux-mêmes se plaisent à classer parmi les plus pauvres de la planète. Et ceci n’a pas manqué de nous rappeler que ces mêmes pays naguère défenseurs implacables du droit et de l’équité gardent un silence de mort sur les circonstances et les responsables de l’assassinat, en quelques mois seulement, de trois Chefs d’Etat encore en fonction. De même, pour des actes aussi crapuleux que le génocide, les crimes de guerre et la violation systématique de tous les Droits de la personne humaine, nous retrouverons à la barre, en qualité de boucs émissaires, à Arusha, Bujumbura, Kigali ou Bruxelles, de pauvres religieux ainsi que quelques professeurs d’Universités souvent ignares, en lieu et place des véritables responsables politiques et militaires de ces forfaits.

Et la Communauté Internationale alors ?

Nous remarquons aussi avec une tristesse mêlée d’angoisse que le Vatican, le Burundi, l’Eglise Catholique dans son ensemble ainsi que son Irlande natale se sont empressés de reléguer aux oubliettes l’assasssinat au Burundi du Nonce Apostolique Mgr Michael Aidan Courteney, à la fin de Décembre 2004. Ce qui ne fait que conforter les assassins de tous bords dans leur dessein de continuer à tuer, car ils savent qu’ils ne seront jamais inquiétés par aucune justice humaine. Concernant enfin l’assassinat à Bujumbura du Dr Kassy Manlan, Représentant de l’OMS, celle-ci et la Côte d’Ivoire sa patrie d’origine se sont tus dans toutes les langues, au sujet de cette mort dont les coupables ne seront probablement jamais connus. Mais encore une fois, cela prouve en suffisance la complicité de la Communauté Internationale et des pays occidentaux en particulier, avec les criminels patentés qui opèrent impunément dans notre pays, au vu et au su de tout le monde.

Emmanuel Bamenyekanye.