AJUSTEMENT STRUCTUREL IMPOSE OU CHOISI ?

Par Gratien Rukindikiza

 Burundi news, le 21 août 2005

Les pays en voie de développement sont sous perfusion. Outre la dette qui les tient par le cou, les déséquilibres économiques sont souvent les prétextes des institutions financières issues des accords de Bretton Woods, appelées communément les institutions de Breton Woods, pour s’ingérer dans les politiques économiques des pays concernés.

La Banque Mondiale et le Fonds monétaire international ( FMI) sont devenus les gendarmes des politiques économiques des pays en voie de développement. Pire, ils sont devenus les décideurs et planificateurs de ces  politiques. En sachant que ces institutions roulent pour les puissances occidentales, il va de soi qu’elles ne permettent pas que ces puissances soient concurrencées.

Les deux institutions, au nom de l’ajustement structurel, un terme des bureaucrates qui a fait des ravages, ont redéfini le mode de fonctionnement des pays en voie de développement en général et au Burundi en particulier.

Le FMI a imposé de mauvaises solutions à de vraies questions

Au Burundi, la balance commerciale était déficitaire. Le déficit budgétaire de l’Etat dépassait les limites, l’inflation et le ralentissement économique poussaient les décideurs à chercher des solutions miracles. Comme le pays avait besoin, vers la fin des années 80, des devises pour les importations, la Banque Mondiale et le FMI en ont profité pour poser des conditions qui étaient présentées comme des solutions clé en main pour redresser l’économie. Les dirigeants du FMI faisaient une campagne au Burundi auprès des politiciens, des intellectuels et des cadres pour expliquer le « bien-fondé » de ces mesures miracles.

Je me souviens qu’au cours de l’année 1986, un haut dirigeant du FMI était venu à l’ISCAM pour  expliquer ces mesures aux futurs officiers. A la fin de son exposé, je suis intervenu en démontrant que ces mesures comportaient plus d’inconvénients que d’avantages pour le Burundi. Le Monsieur était furieux et n’a pas caché sa colère en disant ceci : «  Monsieur, si tous les burundais étaient  comme vous, on vous laisserait dans vos problèmes et on partirait avec notre argent ». Au mess des officiers où il était invité à prendre un verre avec les officiers encadreurs de l’ISCAM, il aurait dit à propos de moi, d’après un officier présent, que «  il faut surveiller cet officier car c’est un communiste ». J’espère que ce n’est pas sur recommandation de ce Monsieur que j’étais surveillé.  

Ces mesures du FMI ont été une calamité pour le Burundi. Des fonctionnaires ont été licenciés pour réduire le déficit de l’Etat alors que le train de vie de l’Etat restait le même. Les services sociaux ont été réduits sous forme de réduction de  budgets des hôpitaux, des écoles etc… La monnaie a été dévaluée plusieurs fois, des barrières douanières ont baissé, etc… Bref , il fallait moins d’Etat. Au bout de quelques années, la Banque Mondiale et le FMI ont dû reconnaître l’échec de leur recette miracle et ont mis en place un volet social pour amortir le choc de ces mesures improductives. Ces mesures n’ont pas créé les emplois, le déficit de l’Etat n’a pas été réduit, l’économie n’a pas redémarré. Par ailleurs, les burundais sont devenus plus pauvres qu’ avant. Les exportations attendues n’ont pas suivi. Les mesures préconisées, élaborées dans les bureaux de Washington ne correspondaient pas à la réalité du Burundi. Comme tout remède, le but recherché était noble, les moyens étaient discutables. L’Etat était taxé de mauvais gestionnaire. Il fallait laisser l’économie se réguler sans interventionnisme. Les mesures préconisées étaient  les suivantes :

-         Réduire la fonction publique, soit licencier une partie des fonctionnaires ;

-         Réduire les barrières douanières ;

-         Dévaluer la monnaie et libéraliser la marché de change;

-         Réduire la masse monétaire par une diminution du crédit à l’Etat et aux entreprises publiques ;

-         Hausse des taux d’intérêts ;

-         Réduire la part du budget alloué aux services sociaux etc…

Etant le gros employeur, l’Etat a créé un nouveau chômage, celui des fonctionnaires, ayant une formation et une expérience de fonctionnaires. Le déficit de l’Etat n’a pas été réglé pour autant. Culturellement, le chômage en cette période était une calamité. Au-delà des chiffres et du respect des conditions du FMI, les dirigeants devaient respecter le cadre social du pays. C’était aussi augmenter la misère des burundais, diminuer les revenus et donc la consommation.  Ceux qui n’étaient pas licenciés consommaient modérément par  manque de confiance dû à un avenir incertain.

En réduisant les barrières douanières, l’Etat burundais a ouvert au marché burundais des produits compétitifs de la sous –région. Ainsi, plusieurs produits burundais sont devenus plus chers que les produits importés. L’objectif était de rendre les produits burundais compétitifs.  Or, rien n’a été fait pour réduire les coûts de revient de ces produits. A défaut d’exporter les produits burundais et à force d’importer, la balance de paiement creusait son déficit alors que l’objectif était inverse.

La dévaluation de la monnaie a rendu cher les produits importés. Faute des produits burundais de substitution, surtout après la faillite de plusieurs sociétés soumises à la concurrence étrangère, les burundais étaient obligés de payer chers les produits de consommation courante comme le savon. Le pouvoir d’achat a considérablement diminué.

Le gouvernement a diminué sa part dans l’investissement. Or, le secteur privé était presque inexistant. Faute d’investissement, le pays n’avait aucune chance de relancer son économie.

La hausse des taux d’intérêt dans un climat économique morose n’était que tirer sur une ambulance. Les entreprises qui voulaient tenter de se relever ne pouvaient pas s’adresser aux banques d’autant plus que les taux dépassaient la moyenne de la rentabilité nette. 

La réduction des budgets sociaux a été une erreur monumentale du régime car le dernier recours de la population pauvre était l’Etat. Or, il venait de rendre son tablier dans les domaines où il était le seul à intervenir comme la santé, l’éducation etc….

Et après ?

Je viens de faire le tableau d’un ajustement structurel imposé par le FMI et la Banque Mondiale. Il a été un échec cuisant et  a ruiné plusieurs peuples des pays en voie de développement y compris le Burundais. Après ces politiques d’ajustement structurel, il convenait d’appeler certains pays «  Les pays en voie de sous développement ».

La politique d’ajustement structurel a été l’objet de plusieurs séminaires des économistes, banquiers, ministres etc…Pourtant, ils n’ont pas dénoncé ces mesures comme il le fallait.

Aujourd’hui, le Burundi sort d’une longue période de guerre et d’une absence d’Etat. Un nouveau parti vient de gagner les élections et aura les mains libres pour diriger le pays. Les burundais verront des hauts fonctionnaires avec un langage spécial défiler à Bujumbura avec des solutions clé en main. Probablement qu’ils auront les cartes de visite du FMI ou de la Banque Mondiale. Faudra-t-il accepter leurs propositions, plutôt leurs exigences ? Tout dépendra de la solution de rechange. Je tenterai d’apporter une autre vision de l’ajustement structurel et même conjoncturel en franchissant même certains tabous et certaines théories monétaristes.

Le nouveau gouvernement aura la mission principale de relancer l’économie. Il aura quelques outils macroéconomiques à sa disposition à savoir les taux d’intérêts, le taux de change, l’endettement public etc…

Par ailleurs, l’économie burundaise a besoin d’un ajustement structurel et conjoncturel. Le pays vit au dessus de ses moyens. La machine à créer la richesse nationale et l’emploi est en panne. Des déficits de l’Etat ne servent qu’à financer les frais de fonctionnement au détriment de l’investissement.

Au-delà du terme d’ajustement structurel ou conjoncturel, l’objectif principal est la relance économique du pays qui devra générer des emplois, des richesses et de la stabilité économique du pays.

Que faire des déficits de l’Etat ?

Aucun pays au monde ne peut fonctionner sans déficit. Les déficits ne sont pas nécessairement mauvais pour un pays. Les déficits de l’Etat ne génèrent pas nécessairement une inflation. Pourquoi l’endettement des particuliers et des entreprises ne génèrerait-il  pas une inflation alors que celui de l’Etat en serait responsable ? Ce sont surtout des idées reçues en matière monétaire. Par ailleurs, comme tout endettement, il doit répondre à un besoin ponctuel et non permanent. Un ménage qui gagnerait 100 000 frs Bu et qui consommerait 150 000 frs Bu en s’endettant chaque mois de 50 000 frs Bu serait incapable de rembourser. Il lui faudra alors un ajustement de la structure de ses consommations. De même, l’Etat ne peut pas financer son budget ordinaire à coup d’emprunts. Cependant, un emprunt d’investissement rentre dans un cadre normal d’autant plus que ces investissements augmenteront la richesse nationale. L’Etat peut financer une relance économique par une création monétaire sous forme d’emprunt sans provoquer une inflation. La logique monétariste dirait que toute création monétaire par l’Etat provoquerait une inflation.

 Les exemples démontrent que les emprunts de l’Etat n’ont pas provoqué des inflations. Nous pouvons donner les exemples de l’Allemagne de 1933, les Etats Unis de 1938, le Japon de 1974 et les Etats-Unis de 1982 et de 1993 qui ont impulsé leurs relances avec des emprunts sans inflation.

Si l’Etat s’endette pour augmenter les salaires sans augmenter la production, il va de soi que l’inflation sera au rendez-vous. La demande augmentera sans que la production s’adapte.

Les taux d’intérêt et l’inflation, quelle cohabitation ?

Le taux de base bancaire  au Burundi est de l’ordre de 14%. Les banques accordent des crédits aux entreprises au taux de 24%. La Banque Mondiale octroie des crédits au Burundi via l’IDA destinés à financer le secteur privé au taux de 0, 75%. Les chiffres parlent de soi. La structure de l’économie burundaise profite aux banques, en premier lieu la banque centrale (BRB), qui empochent des profits énormes sur les prêts. Une banque gagne plus de 10% sur chaque prêt. Une banque française gagne 1% sur chaque prêt à long terme si l’emprunteur a bien négocié. Il va de soi que l’économie burundaise ne profite pas du système bancaire. C’est ce que la loi française appelle l’usure qui est punissable par la loi.

A supposer que le taux d’inflation détermine les taux d’intérêt, il y a une marge de baisse des taux d’intérêt pour l’emprunteur de l’ordre de 8%.

Toutefois, les taux d’intérêt ne dépendent pas de l’inflation. Certaines autorités bancaires de plusieurs pays notamment l’Union Européenne au niveau de la BCE(Banque centrale européenne) ont adopté comme ligne directrice de lutte contre l’inflation tout en négligeant la croissance et l’emploi. Par ailleurs, les taux augmentent et baissent sur décision des technocrates de la BCE. Aujourd’hui, le taux directeur est de 2%. Compte tenu de l’état de l’économie européenne, ce taux vient d’être maintenu pour la deuxième fois après une baisse successive de plus 8% à 2%. Cette baisse n’a pas entraîné l’inflation. Elle n’était pas non plus due à une baisse de l’inflation.

Le Burundi peut alors baisser et  réglementer les taux d’intérêts aux particuliers et aux entreprises. Le Burundi doit innover pour créer de nouvelles richesses. Il vient de sortir d’une guerre de 10 ans et le pays est complètement laminé.   Il faut un signal fort pour relancer la croissance, sortir des sentiers battus. Il faut que l’Etat mette de l’ordre pour relancer l’économie. Les taux d’intérêt devraient  baisser  jusqu’au plus 5% de taux directeur ou taux de base bancaire(TBB). Le particulier pourrait alors avoir un prêt à 7 ou 8%. Le taux de 16% deviendrait alors un taux d’usure.

En baissant les taux d’intérêt, les entrepreneurs auraient alors la porte ouverte pour investir et donc créer de nouvelles richesses. Les particuliers pourraient alors accéder facilement au crédit. L’Etat pourrait aussi emprunter à des taux intéressants. Dans la phase de la reprise de la croissance, l’Etat aura un rôle majeur d’autant plus que le secteur privé est presque inexistant. Il ne faudra pas s’attendre à une reprise de l’économie en l’absence des investissements de l’Etat. Il devra reprendre les grands travaux pour injecter l’argent dans la population afin celle-ci ait confiance et commence à consommer.

Le Burundi est comme un malade qui a atteint la phase critique. Tous les moyens sont bons pour le sauver. Il lui faut un véritable Etat major de crise. Les économistes doivent inventer, éclairer sans se laisser enfermer dans des théories monétaristes étudiées à une certaine époque.

Après la crise de 1929 aux Etats-Unis, le gouvernement de l’époque était démuni. Les usines fermaient, la production agricole était versée dans la mer alors que les gens mourraient de faim. Le gouvernement a nommé une équipe d’éminents économistes qu’ils ont nommé « New-Deal ». Il fallait redémarrer l’économie pour sauver le pays. La solution proposée était de remettre les américains au travail. En dehors des entreprises privées ruinées, seul l’Etat pouvait investir. Le « New-Deal » a proposé que l’Etat embauche les gens pour une politique de « creuser les trous pour les reboucher ». Par la création monétaire, l’Etat a embauché les gens à « travailler pour travailler » sans aucune finalité de production, juste pour que le travail soit payé au lieu de payer les gens sans travailler. Le pays en a profité aussi pour se réarmer. Comme les gens étaient payés, ils ont repris la consommation et il fallait que l’offre suive. Les entreprises ont repris la production et pour satisfaire la nouvelle demande, elles ont embauché les salariés de l’Etat occupés à travailler sans produire. Ainsi, au bout de 6 mois, il ne restait plus de salariés de la politique de «  creuser les trous pour les reboucher ». Les entreprises avaient repris la production et les ménages reprenaient la confiance et donc la consommation. Le « New-Deal » a rempli sa mission et les Etats-Unis relançaient la croissance de cette façon. Dans les 10 années qui ont suivi, l’économie américaine est devenue très solide jusqu’à pouvoir financer et équiper les Européens aux prises avec Hitler.

En 2002, une crise grave a frappé le Japon. Des gouvernements sont tombés faute d’apporter des solutions efficaces à la crise. La solution trouvée a été de baisser les taux à 0 % pour que la consommation, les investissements et la recherche reprennent. Cette mesure spectaculaire a permis la reprise de l’économie japonaise. Aujourd'hui, les japonais sont parmi les premiers si non les bons payeurs au monde en tant que clients. C’est un signe d’une économie de bonne santé même si on peut y mettre le facteur culturel comme les allemands au niveau du respect des engagements.

Revenons sur le Burundi. Il est dans la situation des Etats-Unis de 1929. Il est dans une situation pire que celle du Japon de 2002.

Pour répondre à la crise, les taux d’intérêt devront baisser. L’Etat burundais devra aussi lancer les grands travaux sans arriver au principe de « creuser les trous pour les reboucher ». L’Etat peut par exemple construire des routes reliant les chefs-lieux des provinces comme Mwaro-Gitega, Gitega-Muyinga, refaire la route Bujumbura-Gitega en introduisant une autoroute à 4 voies. L’Etat pourrait aussi construire de petites entreprises de transformation afin de  les vendre après le lancement sous forme d’actions dans  une bourse naissante.

Dans tous ces travaux, le mot d’ordre pourrait être de « consommer burundais ». Il est possible de construire une autoroute avec plus de 60 % de produits locaux. Je ne suis pas ingénieur mais les ingénieurs doivent créer, innover. Le lancement des grands travaux devra être planifié en tenant compte de la place des sous- traitants burundais et en limitant au maximum les in put importés. Ces travaux fourniront du travail aux burundais et d’autres pourront créer des sociétés pour sous-traiter certains travaux.

Il n’est pas sûr que le taux d’inflation  augmente car l’augmentation des revenus correspondra plus ou moins avec l’augmentation de la production. Si le taux d’inflation augmente, elle ne sera pas néfaste pour l’économie car l’Etat pourra récupérer sa mise par la TVA( taxe sur la valeur ajoutée). La reprise économique pourra occasionner un déficit de la balance de paiement.  Il appartiendra à l’Etat d’orienter la consommation des citoyens vers les produits de substitution, produits localement et de protéger la production locale.

Quelle inflation combattre ?

La grande partie de l’inflation burundaise est ce qu’on appelle l’inflation importée. C’est une hausse des prix liée au prix du pétrole qui s’est envolé et aux produits chers importés. Comme il y a le transport, l’énergie pour les usines, les coûts de revient des produits augmentent aussi. L’Etat burundais n’a pas les moyens de contrôler cette inflation, à moins de redistribuer la plus value fiscale liée aux taxes sur la TVA et les autres taxes des hydrocarbures.

En 2003, la moyenne était de 10, 70%, en 2004, la taux de 8, 30%. En 6 mois de 2005, l’inflation atteint 17, 73 % en raison du prix du pétrole qui a augmenté. Cette inflation n’est pas la priorité gouvernementale. Une partie disparaîtra avec la relance de la production, y compris agricole. La priorité est la croissance. Si celle-ci génère une inflation galopante, il appartiendra au gouvernement d’appliquer la politique de Stop and Go pour ralentir le rythme et corriger les aléas de cette croissance économique.

Ajuster les dépenses de l’Etat au profit de la croissance et des secteurs sociaux

Le Burundi sort de la guerre. Le FNL continue son dernier combat. Il est temps alors de réduire le budget militaire au profit de l’investissement sans oublier le secteur social. Revoir certaines dépenses sans sujet tabou. Pourquoi payer des jetons de présence aux députés payés déjà uniquement par le fait qu’ils soient présents dans la salle de réunion ? Pourquoi un député est-il payé, y compris les jetons de présence, plus de 600 000 frs alors qu’un ministre gagne moins de 400 000 frs ? Pourquoi payer des frais de missions de 5 jours pour des missions d’une durée d’une heure ? C’est le cas du vice-Président Ngenzebuhoro qui a eu une mission de 5 jours avec une délégation de 4 personnes pour une réunion d’une heure à l’Unesco. La mission aurait été accomplie normalement par l’ambassade du Burundi en France. 

Il n’est pas normal que les hauts cadres de l’Etat disposent de voitures de fonction en dehors du travail. Le Burundi est pauvre. Un ministère peut avoir des voitures qui sont au service du ministère et non des individus. Les voitures Mercedes dernier cri des ministres et autres dignitaires n’ont rien à envier aux voitures des ministres français. Pourquoi un ministre ne peut-il pas rouler en voiture japonaise ?

La remise de la dette pour un montant de 50 millions de dollars par an est une belle cagnotte. Par ailleurs, l’affecter qu’au secteur social est un piège qui va enfermer le pays dans la même spirale de la dette. Une partie devrait servir à l’investissement pour être rentable. On ne peut financer en permanence le secteur social qu’avec des investissements qui génèrent une rentabilité à court ou à moyen terme, directement ou indirectement.

Le Burundi peut recentrer les ambassades. Au lieu de maintenir des ambassades où les diplomates s’ennuient à longueur de la journée, le Burundi peut ouvrir deux ou trois ambassades en Europe avec des missions précises de commerciaux. Un ambassadeur, un secrétaire chauffeur et un conseiller en même temps chargé de mission économique peuvent suffire.

La réforme du système de cotisation sociale et de la fiscalité du Burundi pourrait rapporter beaucoup aux caisses sociales et à l’Etat.

Les prêts à long terme , moteur de la croissance, ne sont pas au rendez-vous

Le  paradoxe burundais fait que les banques ont un excédent de liquidités monétaires mais manquent de fonds pour octroyer des prêts à long terme. Il n’y a presque pas de prêts pour une durée de 15 ans. Cela en raison d’un manque d’une épargne stable à moyen ou long terme. Les banques ne peuvent pas  risquer leur stabilité en recourant au principe de la transformation qui consiste à octroyer des prêts à long terme avec des fonds déposés à court terme. L’excédent de liquidités provient des fonds de l’ONUB et des ONG . Ces organismes étrangers peuvent retirer leurs fonds d’un moment à l’autre. On a vu dans plusieurs pays des forces des Nations unies plier bagages un mois ou plusieurs mois avant la fin de leurs missions.

La BRB, banque centrale, ne peut même pas intervenir sur le marché monétaire, l’open market, car les banques n’ont pas besoin d’acheter des liquidités. La banque centrale a un rôle à jouer pour réguler le marché dans le cadre de l’encadrement du crédit. Le Burundi ne peut pas se permettre de laisser libre la fixation des  taux d’intérêts au moment la relance économique manque de moyens financiers.

La banque centrale, en collaboration avec le ministère des finances, devrait mettre à la disposition des banques des fonds à long terme sans intérêts pour permettre le financement des prêts à long terme.

Si le pays manque de financement à long terme, il aura hypothéqué son développement stable et les activités économiques tourneront autour du négoce sans production. La BRB peut prêter à l’Etat à long terme avec un moratoire de remboursement de 5 ans sans intérêt. Si cet argent est destiné à la production, cette dernière entraînera une relance en chaîne de la production qui comblera le surplus monétaire pour ralentir la progression de l’inflation.

De toutes les façons, compte tenu de l’état actuel de l’économie, tout est à essayer. Les théories monétaires classiques comme  nous les avons apprises ne répondent pas au cas d’école qu’est le Burundi.

Un développement financé par la Banque Mondiale ou le FMI, une pure utopie

Ceux qui pensent que le Burundi peut financer son développement avec les fonds de la Banque Mondiale ou du FMI se trompent lourdement. Le Burundi doit privilégier un développement local, avec des moyens nationaux. L’argent ne manque pas au pays. La fiscalité est à changer, le système social aussi peut rapporter de l’argent pour l’économie.

Au niveau fiscal, les burundais ne comprennent pas pourquoi les députés, les sénateurs ne paient pas d’impôts. Pourquoi les députés et pas les ministres, pourquoi pas les médecins, les généraux, les colonels, les caporaux, les commerçants ? Bref, tout revenu doit supporter la contribution nationale sous forme d’impôts. Quand un français n’est pas satisfait du service public, il rétorque souvent qu’il paie les impôts et il en est fier. Au Burundi, celui qui paie l’impôt devrait être fier et personne ne devait y déroger.

La réforme des retraites et du système de santé procurerait à l’économie des capitaux à long terme qui manquent pour financer le développement. Je ne préconise pas les fonds de pensions américaines, mais ces fonds sont devenus le véritable pouvoir mondial. Dans tous les pays développés, les fonds destinés à financer les retraites constituent plus de la moitié de l’épargne à long terme.

Moralité, en définitive

Le Burundi n’a pas besoin d’un ajustement structurel défini par la Banque Mondiale et le FMI. Il a besoin d’un véritable électrochoc pour relancer son économie comme  la baisse des taux d’intérêt, l’emprunt de l’Etat au profit des grands travaux. L’objectif n’est pas le contrôle de l’inflation mais la relance de l’économie pour dégager une valeur ajoutée qui servira à  financer le secteur social. Les burundais ne peuvent pas attendre de l’étranger le financement de la relance de l’économie ou de  la réforme du secteur social. Aucune banque étrangère, aucune communauté internationale ne financera le Burundi pour réformer le secteur de la santé.

Le Burundi est riche mais sa richesse est mal exploitée et mal répartie.  L’argent ne manque pas au pays. Il manque des idées, une véritable révolution et un patriotisme. La corruption représente 40 milliards de francs Bu, la remise de la dette est de 40 milliards de francs Bu. Théoriquement, en luttant efficacement contre la corruption, le gouvernement aura 80 milliards de Francs Bu de plus sur son budget, un montant qui peut être affecté à la relance économique, à la réforme du système de santé et à augmenter les salaires des fonctionnaires de l’Etat.