Burundi news, le 17/06/2010

Point de vue: Appel urgent aux « vrais bashingantahe »!

 

Par BIRIHANYUMA Grégoire

 

L'impasse dans laquelle le Burundi est en train de s'enliser depuis la date fatidique du 24/05/2010 est très préoccupante. Ne nous faisons pas d'illusions: seuls les filles et fils de notre nation en détiennent des solutions pour en sortir, et non une quelconque « communauté internationale » dont ni les intérêts ni les enjeux  ne correspondent aux nôtres, compte tenu du climat détestable du moment. C'est nous qui souffrons, la communauté internationale ne réglera pas notre problème à notre place.

 

Au rythme où avancent les événements, l'heure n'est plus aux tergiversations, ni aux palabres creuses, mais plutôt aux propositions concrètes de sortie de cette crise qui risque de détruire notre nation, si nous n'y  prenons garde. Et ce ne serait dans l'intérêt ni du parti présidentiel, ni dans celui de l'ADC-IKIBIRI, encore moins dans celui du peuple burundais, actuellement tétanisé par le différend politique entre la CENI et les partis d'opposition. Mais où sont donc passés nos intègres  « bashingantahe »? Bien entendu, je parle des vrais et non de ceux qui se sont autoproclamés tels!

 

AYONS L'HUMILITE ET LA SAGESSE DE DEMANDER  AUX VRAIS BASHINGANTAHE DE NOUS RAMENER LA PAIX, ET LA PAIX SERA GARANTIE!

 

Notre culture traditionnelle a toujours préconisé le dialogue en cas de conflit, mais aussi l'arbitrage rendu après une écoute attentive et impartiale des protagonistes. Il était même admis que la partie jugée fautive soit condamnée à payer un dédommagement symbolique, sous une forme ou une autre, pour être réhabilitée dans ses droits. C'était du temps où la justice fonctionnait à la grande satisfaction de tous! Il est sans doute urgent de revenir aux fondamentaux de notre culture séculaire dont les régimes politiques qui se sont succédé depuis l'abolition de la monarchie, ont fait table rase. D'où l'origine de nos malheurs.....Pourquoi nous priver des services et des compétences dont  la nation a à sa disposition, compte tenu des dividendes attendus pour tous?

 

AHARI ABAGABO NTIHAGWA IBARA!

 

En 1972, un malheur s'est abattu sur le Burundi. Il aurait pu être évité ou rapidement dissipé si nos braves  « bashingantahe » avaient été consultés pour jouer leur rôle. Hélas, ils en ont été empêchés par le régime politique de l'époque issu du putsch orchestré par Monsieur SIMBANANIYE Arthémon et le capitaine MICOMBERO Michel qui avaient renversé la monarchie,  sans consulter le peuple. Des milliers et des milliers de Burundais, majoritairement d'ethnie Hutu, mais pas seulement, ont été décimés dans l'indifférence générale de la « communauté internationale ».

 

Certaines personnes qui prétendent être des « bashingantahe » aujourd'hui étaient complices avec le pouvoir tyrannique, à l'époque de la tragédie. Par conséquent, elles sont mal placées pour donner des leçons de bonne conduite aujourd'hui. Du reste, à ma connaissance, les vrais « bashingantahe » n'étaient pas autoproclamés, mais plutôt investis publiquement  par leurs aînés dans la fonction, après une certaine période de « stage de probation ». Leur probité était le critère numéro un pour mériter le titre d'ubushingantahe.

 

De surcroît, ils devaient avoir montré leur capacité à s'occuper d'une épouse et des enfants d'une même famille. Les vieux célibataires en étaient exclus. Leur intégrité morale était telle que, en cas de conflit à  trancher, leur verdict était sage et respecté, comme cela se constate encore aujourd'hui sur nos collines. Le fait que ces « bashingantahe » soient, en majorité, vierges de culture occidentale n'enlève rien à leur droiture. Tout au contraire. C'est donc de ces précieuses personnalités respectables et respectées, que doit venir la solution à l'impasse politique et sociale actuelle. Le moment est venu de les réhabiliter, plutôt que d'attendre que l'hypothétique « communauté internationale » vienne à notre secours! D'autant plus que le rôle joué dans l'observation du déroulement du scrutin incriminé est fortement controversé.....

 

Je demande solennellement au parti présidentiel de faire honneur à notre culture et, partant, d'accepter l'arbitrage du conflit actuel par un conseil des « vrais bashingantahe » composé selon les critères à trouver en concertation avec les partis qui contestent les résultats du scrutin du 24/05/2010. Ne perdons pas de vue que le peuple exige d'exercer le rôle d'arbitre en dernier ressort. C'est pour cela que les dits « bashingantahe » doivent provenir de ses rangs de façon la plus démocratique qui soit.

 

Refuser une telle proposition équivaudrait à GUKENGERA ABAGABO, ce qui choquerait, à juste titre, tout Burundais qui respecte notre noble culture. La démocratie mérite bien les services des « bagabo » au sens culturel de ce terme. Je ne doute pas que le CNDD-FDD mesure sa responsabilité en cas de pourrissement de la situation actuelle.

 

AGASOZI K'INTAHANURWA KAHIYE  ABAGABO BABONA!

 

Revenons un instant sur la crise politique et sociale actuelle qui oppose le parti présidentiel à l'ADC-IKIBIRI. Si chaque partie campe sur sa position, nous allons droit dans le mur! Le CNDD-FDD avait pris les armes pour combattre les putschistes de 1993. Personne ne comprendrait que le même parti refuse un arbitrage des « bashingantahe » qui sont neutres  et dont le verdict doit s'imposer à tous les protagonistes.

 

Un tel arbitrage aurait plusieurs avantages dont celui, principal, de désamorcer la tension que tout le monde sent en phase ascendante, chaque jour davantage. Mais, en plus, il donnerait au monde une leçon de SAVOIR COMPTER SUR SES PROPRES RESSOURCES HUMAINES au lieu d'attendre, de l'extérieur, une aide qui, généralement, arrive toujours trop tard. « Aide-toi le ciel t'aidera »!

 

Puisque le CNDD-FDD est convaincu d'avoir gagné loyalement les élections du 24/05/2010, il ne fera que conforter, voire amplifier son score en cas de recommencement du même scrutin. Nul ne peut prétendre détenir le monopole de la vérité.

 

Par ailleurs, le Président NKURUNZIZA s'honorerait en acceptant d'attendre le résultat arbitral des dits « bashingantahe » avant d'accepter la compétition avec d'autres candidats pour la course à l'élection présidentielle, comme initialement prévu. J'imagine qu'il serait lui-même plus serein de savoir qu'il ne sera pas accusé d'instaurer un monopartisme d'un autre âge.

 

En tant que retraité de la politique, je pense que le peuple burundais est un peuple fier, assoiffé de démocratie, de justice, de paix et de développement économique.

 

Seul un régime démocratique, car pluraliste, peut nous sortir du sous-développement pour rejoindre le club des pays où il fait bon vivre en paix. Quelle Burundaise ou quel Burundais  ne rêve pas d'un tel paradis? Faisons de notre pays ce paradis en question: nous en avons les moyens, à condition que nous le voulions.

 

Le Burundi, pays démocratique, voilà le rêve de tous  dont le reste du monde pourrait nous envier. Seul ce type de régime politique garantit une vraie justice pour tous, ainsi que le respect des droits de l'homme dont nous avons tous soif et besoin.

 

Je formule le voeu de le voir se matérialiser grâce à la sagacité de nos illustres « bashingantahe » dont l'heure de la réhabilitation a sonné! Il était temps. Que personne ne permette à qui que ce soit de ramener le peuple burundais en arrière. Il n'a que trop souffert. Mais il a déjà goûté aux délicieux fruits de la démocratie qu'il ne pourrait plus accepter un régime politique différent.

 

J'en appelle à toutes / tous mes compatriotes (aussi bien du parti présidentiel que de l'ADC-IKIBIRI) de placer les intérêts de notre patrie au-dessus des intérêts personnels en ces moments difficiles. J'en appelle au peuple, seule source de tout pouvoir légitime,  de contraindre pacifiquement toute la classe politique à accepter, de bonne grâce et inconditionnellement, la médiation salutaire de nos illustres  et impartiaux  « bashingantahe ».

 

Quant aux forces de police et de sécurité qu'elles se rappellent  la neutralité qui doit toujours rester la leur en toutes circonstances . Ne sont-elles pas au service  des contribuables qui leur garantissent leur solde?

 

Si demain ma voix n'est pas entendue, j'aurai au moins contribué à ramener la paix qui, me semble-t-il, est en train de vaciller! Ne le permettons pas, mais ne perdons pas de temps! Demain il pourrait être trop tard......