Par Gratien Rukindikiza

 Burundi news, le 15 mai 2005

Quand ils ont tué le Dr Kassy Manlan, représentant de l’OMS au Burundi, ils croyaient que l’affaire de détournements des fonds destinés à l’achat des médicaments était enterrée. Les commanditaires, soit le pouvoir en place de Buyoya et les assassins croyaient que personne ne remontera à la vraie piste. La meilleure façon a été de  confier les enquêtes aux vrais assassins et d’intimider les journalistes qui enquêtaient sur ce crime. Le procureur général Ngendabanka avait tout fait pour détourner la justice de la vraie piste. Sous la pression internationale, les vrais assassins ont été traduits en justice et viennent d’être condamnés. Seul le commanditaire court toujours. L’ancien Président Buyoya n’a pas encore comparu devant la justice. Les manœuvres ne font que commencer.

A la mort du ministre de l’intérieur,  Simon Nyandwi, le Président Ndayizeye était en Belgique en mission officielle. Il venait de terminer sa mission officielle et n’est  pas rentré à l’enterrement comme nous l’avons écrit sur ce site. Outre sa visite privée  au Luxembourg, le Président a rencontré l’ancien Président Buyoya.

Au cours de cette rencontre, les deux hommes ont discuté des arrangements pour éviter des ennuis judiciaires à l’ancien Président Buyoya notamment le dossier Kassy Manlan et les malversations financières. Il a été convenu que le procès devrait être clôturé avant que Buyoya ne soit cité à la barre.

La deuxième stratégie consistait à nommer le procureur général de la République Ngendabanka, alias Foti, au poste d’ambassadeur à New York. Selon les dernières informations, le Président s’apprête  à le nommer ambassadeur à New York. Ainsi, le dossier Kassy Manlan qu’il a suivi seul serait enterré après la condamnation à mort des assassins qui ont exécuté bêtement les ordres d’en haut. Ce dossier a été instruit par le seul procureur général malgré son importance. Il s’agirait aussi d’éviter que le procureur général craque sous la pression et accepte de dévoiler le fameux rapport de l’OMS qu’il détient, probablement comme le Président. Ce rapport est devenu un grand secret. Il accuse l’ancien Président Buyoya. Le Président doit tout faire  pour lui éviter des ennuis à son ami Buyoya.

Cette affaire devrait être confiée à Colombo qu’on voit dans les films. C’est une affaire à rebondissements. Les enquêteurs assassins condamnés à mort, les enquêteurs muets, aveugles, le procureur général qui menace les journalistes de prison s’ils ne lâchent pas l’affaire, bref, une affaire dans une République bananière. Le dernier rebondissement est la volonté exprimée par les condamnés à mort qui croyaient à une promenade de santé et qui se retrouvent réellement condamnés. Ils ont l’intention de dévoiler tout en appel et dénoncer le commanditaire en la personne de Buyoya. Les familles et les avocats font pression  sur les condamnés afin d’atténuer leurs peines. Les condamnés se sentent aussi trahis par Buyoya qui leur avaient promis de garder la ligne de défense avant de trouver une solution. La solution est tombée sous forme de peine de mort.

La course contre la montre a déjà commencé. Selon les souhaits de Buyoya, il faut que l’affaire soit complètement clôturée avant le départ de Ndayizeye. En cas de victoire du CNDD-FDD, il pense qu’il ne pourra pas échapper à la  justice. Cette victoire commence à inquiéter même le Président de la République qui croit toujours à un miracle pour rester au pouvoir et garder ses intérêts. L’union fait la force. L’ancien Président Buyoya aurait été sollicité pour une probable action par le Président Ndayizeye d’après les informations provenant d’une personne bien informée. Seraient-ils tentés de bloquer l’éventuelle victoire du CNDD-FDD ? L’histoire le dira mais leur force se réduit du jour au lendemain.