ASSASSINAT DE DEUX EUROPEENS A KIREMBA, CRIME D'ETAT?
Par Gratien Rukindikiza
Burundi news, le 04/12/2011
L'actualité de cette semaine a été dominée par un fait juridique impliquant un africain. L'ancien Président ivoirien Laurent Gbagbo a été déféré devant la Cour Pénale Internationale CPI basée à la Haye aux Pays Bas. Ce transfert à la Haye devait servir de leçon à plusieurs Présidents africains. Un proverbe africain dit que quand la barbe de ton voisin prend feu, il faut penser à mouiller la tienne. Les crimes contre l'humanité continue. Au Burundi, ils sont devenus monnaie courante et sont commis par le pouvoir en place. On peut citer les assassinats de Muyinga, les massacres généralisés des militants du FNL, le carnage de Gatumba etc....
Un médecin italien et une sœur croate assassinés à Kiremba : Les faits
Le 27 novembre 2011 à 20 hrs 30, deux jeunes garçons sont entrés en escaladant un mur de l'hôpital gardé par quatre policiers. Paradoxalement, deux des quatre policiers étaient absents et les deux présents n'ont rien vu. A l'intérieur, les deux jeunes garçons ont arrêté un médecin italien, une sœur italienne et une sœur croate. La sœur croate a été tuée sur le champs par un tir du fusil fal des deux garçons en leur possession. Après avoir entendu les coups de feu, les policiers ont voulu intervenir. Les deux malfaiteurs ont obligé le médecin italien et la sœur italienne de les conduire en voiture vers Marangara où une ambulance de Kirundo était censée les attendre. C'est au cours d'une fusillade avec les policiers que le médecin italien a été tué par les balles des policiers. Les deux malfaiteurs ont été arrêtés au cours de cette nuit.
Précipitation de la justice suspecte
Quand elle prend des mois pour étudier un dossier, la justice burundaise a jugé sans attendre. Les deux garçons n'ont même pas eu le droit de recourir à un avocat. Ils devaient être jugés avant de parler à une personne extérieure à la magistrature. Que voulait cacher la justice? Cette précipitation nous a poussé à enquêter pour savoir comment des élèves du lycée de 20 ans pouvaient commettre un tel forfait. Ils avaient quitté l'école quelques mois avant.
Le mobile du crime ou le motif du commanditaire
La sœur croate était accusée par les services de renseignement de livrer des médicaments aux combattants du FNL de Rwasa. Vrai ou faux, c'est le motif avancé par les deux condamnés à perpétuité ou tout simplement le motif qui leur a été communiqué par le commanditaire. Au nom du pouvoir, ces jeunes avaient la mission d'assassiner cette sœur croate, d'après les condamnés.
Le donneur d'ordre en la personne du député Nzigamasabo, alias Gihahe
D'après nos informations, Gihahe connaît un de ces garçons à Bwambarangwe. En effet, Gihahe habite en commune Busoni mais il a acheté la terre à la famille d'un de ces deux garçons à Bwinyi en commune Bwambarangwe. En venant faire couper ses régimes de bananes, il a approché le jeune garçon pour lui parler des opérations au nom du pouvoir. Le jeune garçon a reconnu hors tribunal à une personne tierce qu'il a été à Cankuzo, participer à ces opérations d'assassinats politiques avec Gihahe. Ce n'était le premier coup réalisé ensemble et le jeune garçon avait confiance.
Selon l'inculpé, Gihahe lui a proposé la mission d'assassiner la sœur croate du fait qu'elle aiderait les rebelles de Rwasa. En contrepartie, il aurait cinq milliards de francs bu; soit 3 millions d'euros. Face à l'importance de cette somme, le jeune lui a demandé d'où est-ce qu'il trouverait cet argent. Gihahe lui a répondu, selon le même jeune, que c'est le Président Nkurunziza qui donnerait l'argent car c'est lui le vrai commanditaire de ce crime. Gihahe lui a dit qu'il entre sans rendez-vous à la Présidence. Cela est confirmé par plusieurs témoins. Sa mission principale est la violence. S'il entre sans rendez-vous chez le Président, c'est qu'il reçoit des ordres de mission de violence.
Le jeune a recruté un autre à qui il allait donner quelques deux milliards de francs bu. Pour ce garçon, le crime était un job très bien payé, ni moins, ni plus. Quand il a été arrêté, il n'a jamais cessé de demander que Gihahe soit présent pour lui donner son argent. Il a dit que Gihahe est venu près de l'hôpital pour discuter de la faisabilité. Un des jeunes garçons a affirmé que certains policiers les ont vus au moment où ils étaient ensemble.
La justice a promis d'interroger Gihahe. Un connaisseur du système à qui je demandais quand les assassins de Léandre Bukuru seront arrêtés, il m'a répondu que le pouvoir ne peut jamais se condamner. Celui qui a commis le crime était en mission commandée. De même, Gihahe ne sera jamais interrogé car il dépendrait du Président quand il est dans le cadre de Safisha.
La volonté de tuer les coupables avant la justice et l'histoire de son fusil
Les deux jeunes ont demandé au médecin italien des les conduire à Marangara où une ambulance les attendait. Gihahe leur aurait promis qu'une ambulance les prendrait à partir de Marangara. Ainsi, ils pourraient passer facilement les contrôles de police pour retrouver une planque. Ce qui est étonnant, la police connaissait l'itinéraire que le véhicule conduisant ces jeunes devait emprunter. Cela signifie qu'il y avait des policiers qui savaient que ces jeunes tenteraient de regagner Marangara. Alors, le crime était connu par certains policiers. En plus, les tirs nourris de la police sur le véhicule transportant ces deux criminels et leurs deux otages démontrent bien que la volonté de la police n'était pas d'arrêter mais de tuer les deux assassins au lieu de les traduire en justice où ils risquaient de tout révéler.
De source policière, le médecin italien a été tué par des tirs de la police et non des deux criminels. La balistique aurait pu le démontrer d'autant plus que la cartouche du kalachnikov de la police et celle du fal des deux garçons ne sont pas de même forme. Le président de la cour a dû reconnaître qu'il n' y a pas eu d'étude balistique pour savoir quelle arme a tué le médecin italien.
L'arme du crime contre la Croate, le fal, ne provient pas de la Tanzanie contrairement à ce qu'affirme la police. Cette arme avait servi à Cankuzo lors du safisha dirigé par Gihahe à Cankuzo. Ce fusil provient du stock des armes appartenant aux Imbonerakure, la milice du CNDD-FDD.
Les bienfaiteurs sont assassinés à Kiremba. C'est le petit peuple qui perd. Les nantis du pouvoir se font soigner à Bujumbura, même à l'étranger. Si les hôpitaux sont mal entretenus, cela ne pose des problèmes qu' à ceux qui ne peuvent pas aller se faire soigner à l'étranger. Même pour l'accouchement, Madame Nkurunziza s'est rendue en Afrique du Sud.
L'objectif du pouvoir est d'éloigner tout témoin étranger des crimes contre l'humanité qui se commettent au Burundi surtout pour les expatriés opérant à l'intérieur du Burundi. Demain, un génocide se commettra sans témoin. Les Burundais ont raison de constituer un mouvement insurrectionnel même armé. C'est la seule arme qui reste pour sauver la nation. A moins que Nkurunziza change radicalement. A ceux qui croient aux miracles d'y croire.