LA BANQUE MONDIALE, LA DECEPTION ET LES MASSACRES AU BURUNDI
Burundi news, le 22/10/2010
Par Gratien Rukindikiza
La mondialisation touche aussi les pays pauvres. L'information circule à une vitesse extraordinaire. Internet est une véritable révolution. Des cadavres sortis de la Rusizi sont dans les rapports des institutions internationales quelques jours après. Un véritable cauchemar des dictatures africaines.
La ministre des finances du Burundi a dû regretter sa place au Sénat quand elle s'est retrouvée à Washington dans les bureaux du simple conseiller de la Banque Mondiale.
Qu'est -ce qui s'est passé? Pourquoi la Banque mondiale a-t-elle fermé les portes? Quel impact des massacres généralisés actuels au Burundi sur ces problèmes de fonds?
Le cauchemar à la Banque Mondiale
Une délégation triée sur les volets conduite par la ministre des finances s'est rendue à Washington. Le dossier avait été étudié dans les hautes instances du Burundi. La priorité était le déblocage des fonds de la Banque Mondiale. Ces fonds ouvrent la porte des autres financiers en vertu des accords du club de Paris.
A l'arrivée de la délégation burundaise à la Banque Mondiale, un dossier avait circulé sur le Burundi. Personne n'était au courant au Burundi. Les services de renseignements étaient occupés à tuer du FNL. Ce dossier expliquait que le Burundi est explosif et qu'il peut être considéré comme étant en guerre. Contrairement aux attentes, selon ce dossier, le Burundi s'enfonce dans l'insécurité et les massacres continuent. Le dossier précise même l'origine de cette insécurité en nommant une personne que Burundi News ne désignera pas. Le Burundi est classé parmi les plus pays risqués au monde comme la Somalie.
La délégation burundaise n'a pas été reçue par les décideurs de la Banque Mondiale. Le conseiller qui l'a reçue leur a demandé de rentrer au Burundi et que la Banque Mondiale les contactera au besoin. Une façon diplomatique de leur dire qu'ils ne sont pas les bienvenus à la Banque Mondiale. La ministre des finances aurait dû déjà constater que la mission burundaise de la Banque Mondiale a réduit son effectif.
Massacres généralisés dont les conséquences sont ignorées par le pouvoir
Un officier de l'Armée burundaise, parmi les hauts gradés que compte l'Armée, me disait que les radios ou les ligues des droits de l'homme ne disent pas la vérité sur les massacres. Si réellement la vérité était dite, les Burundais n'en reviendraient pas. Au Burundi, les cadavres retrouvés sont une infime minorité. La police surtout et la Documentation tuent les opposants, les simples militants de la base du FNL, du MSD et de l'UPD dans la région d'Imbo. Certains sont arrêtés et tués. D'autres sont tués directement. Certains sont enterrés à la va vite, d'autres sont jetés dans des rivières. Plusieurs officiers ont déjà mis en garde les policiers à propos de ces massacres.
Les massacres organisés et exécutés par la police constituent ni moins ni plus un crime contre l'humanité sans prescription. Le Burundi est en train de vivre l'équivalent de Ntega Marangara en terme de morts. La vérité fait froid au dos. Des témoignages de la Police et de l'Armée parlent de véritables hécatombes. Demain il sera tard pour alerter, dénoncer ces massacres. La Banque Mondiale a ses sources d'information. Ce sont ces cadavres qui pénalisent le Burundi.
Le commissaire de police Ndakugarika est devenu le bourreau de l'Imbo
Le général de la police Ndakugarika, directeur adjoint de la Police, reçoit les ordres directement du Président Nkurunziza. D'après la direction de la Police, Ndakugarika ne dépend pas de son chef hiérarchique ou de son ministre, mais du Président lui-même. Ce Ndakugarika organise des massacres au niveau inquiétant. Les commissaires de police qui reçoivent des ordres de massacres de sa part se croient les plus protégés juridiquement au Burundi. C'est ainsi que le commissaire de Cibitoke qui a assassiné Jackson devant plusieurs témoins est toujours à son poste.
Ndakugarika est devenu le plus grand boucher, plus que la Documentation. Donner un nom à ces massacres après une semaine d'enquêtes est aussi responsabiliser. Ce qui se fait aujourd'hui ne restera pas impuni. Si la justice burundaise est tétanisée, il y a une autre justice à la Haye qui peut faire ce travail.
Et l'argent?
Le pouvoir burundais a choisi le camp du double perdant. Il massacre ses concitoyens et les portes se ferment pour financer 51 % de son budget. La ministre des finances n'aura même pas besoin de s'arracher les cheveux devant les cadavres de la Rusizi qui l'ont empêché de faire son travail. Elle devra aller négocier Ndakugarika et son patron pour arrêter les massacres. A défaut, sa place au Sénat est toujours vacante comme Rufyikiri aussi. Une première car les sénateurs sont remplacés quand ils sont nommés par décret à un autre poste.
La ministre des finances est encore maître de son ministère. Elle a gardé son directeur de cabinet Ndayikeza, qui avait mis les pieds dans les plats du dossier Interpetrole. Ce n'est pas le décret de nomination de son nouveau directeur de cabinet imposé qui a inquiété la ministre des finances. Et d'ailleurs, elle a refusé de le signer et elle garde le statu quo. Qui connaît celui qui dirige le Burundi derrière le rideau?
Un diplomate disait que le pouvoir burundais est inexistant. Chacun garde un bout. Négocier avec Nkurunziza n'est pas suffisant. Les blocages peuvent rester. C'est pour cela que la corruption est trop chère au Burundi. Du temps de Radjabu, un contact avec lui réglait la question. Aujourd'hui, il faut rencontrer le Président. Pour débloquer le problème, il faut arroser son cabinet, ses conseillers, le ministre concerné etc... Un système fait pour mordre sa queue.
Ceux qui fuient les massacres pour rejoindre la rébellion seront les dirigeants de demain. Ceux qui font les massacres aujourd'hui hypothèquent l'avenir de leurs enfants et de tout le Burundi.