CONFERENCE DE PRESSE ANIMEE CONJOINTEMENT PAR LES PARTIS
POLITIQUES PARLEMENTAIRES SUR LE CADRE LEGAL DES ELECTIONS
Mesdames, Messieurs les Journalistes,
Distingués Invités,
Mesdames, Messieurs,
Pour la toute première fois, nous animons ensemble cette conférence de
presse comme partis politiques parlementaires pour des raisons que nous
voudrions mettre en exergue dès l’entrée du jeu.
Premièrement, il est une question ces derniers jours qui domine les débats
aussi bien dans la rue comme dans les média de tous ordres, mais surtout qui
reste préoccupante pour nous en tant qu’acteurs politiques : il s’agit du
projet du cadre légal des élections en particulier le code électoral qui
oppose le parti au pouvoir et les autres partis politiques.
Deuxièmement, la volonté du gouvernement de faire cavalier seul dans un
processus électoral qui appelle la participation de tous les citoyens
répartis dans les partis politiques agréés au Burundi ne peut manquer
d’inquiéter.
Mesdames Messieurs les Journalistes,
Distingués Invités,
Mesdames, Messieurs,
Vous vous en souviendrez que tous les partenaires nationaux et
internationaux, y compris les Nations Unies, le Gouvernement du Burundi, la
Société civile burundaise ainsi que les partis politiques, avaient organisé
ensemble au cours de ces derniers mois, de vastes consultations à travers
notamment le Projet « Cadre de dialogue » dont les Nations Unies et le
Burundi sont partenaires. C’est ainsi qu’une table ronde regroupant tous les
Partis politiques, y compris le parti au pouvoir, la société civile, le
clergé, les anciens Chefs d’Etat, les experts nationaux et internationaux
sur le thème de la transparence et de l’intégrité du processus électoral, a
été organisée récemment à Bujumbura.
A l’issue de toutes ces consultations de haut niveau, des recommandations
convergentes ont été faites et ont abouti à la confection d’un document
synthèse qui donne les principales orientations de ce que devrait être le
contenu du code électoral burundais pour les élections prochaines. Tous ces
partenaires avaient exprimé une grande satisfaction à l’endroit de ces
conclusions.
A la grande surprise de tous ces partenaires nationaux et internationaux, le
projet de code électoral, qui vient d’être présenté au Conseil des Ministres
en date du jeudi 09 juillet 2009 par le Président de la République du
Burundi s’écarte complètement de l’esprit et de la lettre du document
produit au terme de la table ronde susmentionnée.
Pour ne mentionner que quelques-uns, ces écarts préjudiciables touchent
notamment dans les dispositions suivantes : Articles 55, 96, 103.
1. Contrairement à ce que prévoit la Constitution de la République du
Burundi dans ses articles 96 et 103 qui fixent les mandats des Institutions
électives de la République et déterminant de facto les périodes électorales
de ces Institutions, le Projet de code électoral présenté au Conseil des
Ministres déclare dans son exposé des motifs que l’ordre des élections est
inversé par rapport à ce qu’avait prévu la Constitution. Au terme de cette
proposition du Président de la République du Burundi et de son parti
politique le CNDD-FDD, les prochaines élections au Burundi devraient
commencer par les élections présidentielles, quitte à ce que les autres
scrutins suivent.
Sur cette question, nous rappelons que nous légiférons non pas sur base des
élucubrations et des intérêts politiques d’un parti politique, mais sur base
des intérêts de tout un peuple, et dans le strict respect de la loi
fondamentale du Burundi. Autrement dit, chercher à changer l’ordre des
scrutins relève d’une volonté coupable d’imposer aux Burundais un point de
vue visant à chambarder et détourner le processus électoral au profit du
seul Parti au pouvoir. Nous rappelons que les mandats vont se terminer dans
l’ordre suivant :
Les conseillers communaux ;
Les députés ;
Le sénat ;
Le Président de la République.
Par conséquent, c’est dans cet ordre que les institutions de la République
doivent être pourvues et non l’inverse.
Il n’existe donc aucune justification valable de changer cet ordre en dehors
de la volonté du Parti au pouvoir d’imposer le cadre de direction du pays du
sommet à la base.
2. Quant au type de bulletin, ledit projet de loi en son article 55
réintroduit l’usage des bulletins de vote multiples alors que tous les
acteurs politiques, la société civile ainsi que la communauté internationale
ont clairement recommandé l’usage d’un bulletin de vote unique pour mettre
fin à l’usage du terrorisme et de la force sur les électeurs qui ont été
constatés au cours des élections de 2005.
Nous revenons avec insistance à cette question d’autant plus que sur terrain
nous constatons que les opérateurs à la solde du parti au pouvoir donnent
déjà des consignes aux citoyens de rentrer des isoloirs électoraux avec les
bulletins de vote des autres partis pour montrer que les électeurs ont bel
et bien voté CNDD-FDD.
Si nous avons utilisé les symboles des partis en 1961 lorsque nous avions
moins d’instruits il devrait être plus aisé de les utiliser en 2010. De
même, si au KENYA, au CONGO, en AFRIQUE DU SUD et ailleurs, l’on utilise le
bulletin unique, pour quoi ne pas utiliser au Burundi où le taux
d’alphabétisation rivaliser avec les pays sus-mentionnés.
De surcroît, le bulletin unique reste économique, exige moins de manœuvres
pour l’électeur et occasionne moins de fraudes. Autant l’on ne se trompe pas
avec les billets de banque qui ne sont que signes autant l’on ne saurait se
tromper avec des symboles de leurs partis politiques qui vont leur être
enseignés.
3. Revenant sur l’arbitrage des élections, l’article 3 du même texte propose
que les missions, la composition, le mandat, l’organisation et le
fonctionnement de la Commission Electorale Nationale Indépendante soient
déterminés par un décret présidentiel alors que la table ronde et tous les
autres partenaires politiques susmentionnés avaient recommandé que cette
importante Commission soit gérée par une loi pour éviter que la commission
soit à la merci des pressions diverses du Gouvernement au pouvoir.
4. Le même projet de code électoral introduit une majoration de 500% de la
caution des candidats présidents de la République. Celle-ci passe de trois
millions à quinze millions de francs burundais. Cette majoration n’a jamais
été évoquée nulle part au cours de ces nombreuses consultations ; elle cache
mal une démarche d’exclusion des candidats potentiels, compte tenu de l’état
de délabrement de l’économie nationale et de l’amenuisement des revenus des
contribuables n’ayant pas puisé impunément des caisses de l’Etat.
Aussi, ce projet de code électoral introduit-il de nouvelles règles de
répartition de sièges des Députés et de cooptation qui visiblement
s’écartent de l’esprit inclusif prôné par l’Accord d’Arusha.
C’est pourquoi nous dénonçons publiquement ces manœuvres frauduleuses et
cette violation systématique de la constitution, en même temps qu’il choisit
délibérément de passer outre la volonté du peuple et des partenaires tant
nationaux qu’internationaux clairement exprimés à travers les consultations
susmentionnées.
Convaincus que les prochaines échéances électorales constituent une étape
décisive dans la consolidation de la démocratie, la stabilisation des
institutions, de la paix et la sécurité dans le pays, nous en appelons à
toutes les forces vives de ce pays à ne pas tolérer pareille escroquerie,
mais à rester vigilantes, dans le calme et sérénité, et à refuser
énergiquement ce diktat du parti au pouvoir.
Au gouvernement du Burundi, et au parti au pouvoir, principalement à
l’endroit du Chef de l’Etat garant du respect des lois en générale et de la
constitution en premier lieu, nous disons que le moment n’est pas au
bricolage des lois, et qu’ils seront les seuls comptables à tout désordre
pré ou post électoral qui en résulterait.
A la communauté internationale, spécialement aux pays et institutions qui
ont accompagné notre cher pays dans sa difficile et longue sortie de crise,
nous réitérons nos remerciements et les exhortons à donner des signes clairs
au gouvernement du Burundi contre cette dérive, et à redoubler de soutien à
l’endroit des forces politiques et de la société civile déterminées à
refuser que le parti au pouvoir replonge le Burundi dans l’instabilité et le
chaos politique.
Enfin, aux militants et sympathisants de nos partis politiques respectifs,
nous adressons nos vifs remerciements pour la détermination, l’esprit de
concorde national et participation citoyenne dont ils ne cessent de faire,
et les exhortons à travailler de concert face aux usurpateurs des acquis
démocratiques.
En conclusion, nous, partis politiques parlementaires, déclarons que nous
sommes farouchement opposés à un projet de loi si biaisé, si truqué et qui,
de toute évidence, va replonger le pays dans l’insécurité et l’instabilité
politique, dans l’anarchie et le chaos hypothéquant ainsi ce que les
burundais ont construit, avec le concours de la Communauté Internationale
quinze ans durant.
Fait à Bujumbura, le 22 Juillet 2009
Les partis animateurs de la conférence
Pour le parti Sahwanya-FRODEBU :
Pour le parti UPRONA :
Pour le parti CNDD :
Pour le parti MRC RURENZANGEMERO :