SCANDALES, DEMAGOGIE ET CONFUSION DANS LA PROPAGANDE DU CNDD DE NYANGOMA

Par Gratien Rukindikiza

Le 11/03/2005 (Burundi News).

L’ancien ministre de la fonction publique et de la réinsertion des réfugiés du Président Ndadaye est rentré pour préparer sa campagne législative et présidentielle. Il était resté plus de 10 ans à l’étranger où il avait dirigé la rébellion sans jamais mettre les pieds au Burundi. Les combattants se plaignaient de l’entendre seulement à la radio sans le voir sur le terrain. C’est une des raisons de son limogeage à la tête de la rébellion.

Nyangoma est rentré avec l’objectif de mettre de l’ordre dans son parti. Il a aussi pour mission de faire une alliance avec Ndayikengurukiye et Nzojibwami, tous de la même famille. Par ailleurs, sa première décision a été une non-décision. Dans la campagne sur le référendum sur la constitution, Nyangoma n’a pas pu dire s’il fallait voter oui ou non. Beaucoup de ses militants ont compris que le message signifiait NON. Nyangoma n’a pas voulu assumer le NON car il aurait dévoilé la faiblesse de son parti. Un score de 8 % à partager entre l’Uprona, le Parena, Raddes etc…aurait mis les points sur les I sur la faiblesse du CNDD-Nyangoma.

Le peuple burundais avait besoin d’un bon conseil. Les burundais n’ont pas tous lu ce texte fondamental. Un vrai politicien doit savoir assumer ses choix. Soit la constitution est valable et on appelle à voter OUI, soit elle ne l’est pas et on appelle à voter NON. Dans les deux cas, il faut donner des explications.

 Nyangoma a dit à une radio burundaise qu’il aurait félicité le peuple burundais s’il avait voté NON. Un proche de Nyangoma me disait qu’il était difficile qu’il se prononce d’autant plus qu’il avait subi des pressions pour appeler à voter NON. 

Après 10 ans d’exil et compte tenu des échéances électorales, Nyangoma n’avait pas d’autres choix que de rentrer. Il devait rentrer ou disparaître du paysage politique burundais. En effet, un politicien absent pendant ces échéances aura très peu de chances de se maintenir en tant que chef d’un parti politique jusqu’aux prochaines échéances électorales dans 5 ans. Nyangoma a choisi alors de rentrer. Son mouvement CNDD était sur une pente glissante depuis que son représentant au Burundi, Nephtali, avait été emprisonné suite à l’arrestation à son domicile du fameux Eugène Bitaryumunyu, bandit de grands chemins, qui affirmait travailler pour le CNDD de Nyangoma. Ce scandale politique a entaché, à jamais, la réputation de Nyangoma. Il a assumé que Bitaryumunyu était son homme, ce qui veut dire que les délits de droit commun comme la banditisme, les attaques à main armée, le gangstérisme, etc. étaient commis au nom du CNDD, et donc de Nyangoma.

Un autre scandale politique est venu récemment entacher un parti déjà affaibli, le CNDD Nyangoma. Mais cette fois-ci, le scandale est venu de l’étranger, plus précisément au Canada. En février dernier, le Représentant du CNDD en Amérique du Nord,  Fidèle Ndayisenga, aurait roué de coups de poing, des gifles, -tenez-vous bien- , une dame burundaise dont nous ne voulons pas révéler l’identité car c’est une épouse exemplaire, une mère de famille respectée dans son entourage. Mais selon plusieurs sources concordantes, le mari de la dame que le Représentant de Nyangoma en Amérique du Nord a littéralement massacrée est aussi un membre influent au sein de ce noyau du CNDD au Canada-USA.

Ce scandale a divisé ce noyau à jamais et cela risque de se répercuter sur tout l’ensemble du CNDD, car le CNDD était jusque-là essentiellement financé par ses militants d’Amérique du Nord.

A la base de ce scandale se trouverait, comme dans le cas de Bitaryumunyu, une affaire d’argent . Il semble en effet que la dame qui a été tabassée dénonçait, entre autres, des dépenses non justifiées d’argent de  Fidèle Ndayisenga et de la  femme qu’il avait placée à la tête d’une organisation culturelle dénommée Centre Culturel Burundais au Canada (CCBCA) à titre de Directrice de cette organisation. Le centre en question avait des promesses de subvention et les deux complices  voulaient écarter les autres membres, sans doute pour avoir une part plus juteuse.

Ndayisenga devrait comparaître bientôt devant la cour pour répondre des accusations criminelles. Quant au dit centre culturel, les burundais du Canada qui ont été choqués par ce scandale l’appellent ironiquement, Centre de Kick-boxing Burundais du Canada.

Le programme politique et économique du CNDD Nyangoma commence à être connu. Au cours d’une rencontre avec les cadres de son parti dans les provinces du Nord Ouest, Nyangoma a indiqué que les salaires des enseignants du primaire sont bas.

Je cite un article paru sur le site Arib.info, proche de Nyangoma « Il a donné l'exemple d'un enseignant qui gagne vingt mille francs burundais et qui ne peut pas joindre les deux bouts du mois. Selon Monsieur NYANGOMA, un enseignant devait gagner au moins cent mille francs burundais par mois. »

Un enseignant devait gagner au moins cent mille francs burundais par mois! Celui qui dit cela a été ministre de la fonction publique, donc chef du personnel du gouvernement burundais. Étonnant, il n’a même pas eu l’idée de doubler les salaires des enseignants à cette époque. Cette question n’a jamais été à l’ordre du jour de l’ancien syndicaliste en tant que secrétaire général adjoint de l’UTB, affiliée UPRONA et nommé à ce poste par l’ancien Président Pierre Buyoya. Il aurait dû alors proposer les augmentations de salaires au Président Ndadaye en 1993 au moment où il était ministre de la fonction publique.

En 1993, Nyangoma s’est occupé principalement de la gestion calamiteuse du dossier des terres de Rumonge. Je rappelle que le Président Ndadaye a été obligé de suspendre cette politique de son ministre Nyangoma.

Sur le plan économique, multiplier par 5 les salaires des enseignants revient aussi à multiplier par 3, 4 voire 5 les autres salaires du public. Comme les salaires occupent une bonne partie du budget de l’Etat, le gouvernement devrait alors quadrupler le budget. Où trouver l’argent ? Nulle part, la Banque mondiale ne peut pas accepter de financer les dépenses de fonctionnement comme les salaires. L’économie est faible et les impôts ne peuvent pas être multipliés par 4 sans risque d’une asphyxie économique au moment où les entreprises doivent être compétitives au niveau de la Sous région. Recourir à la planche à billet pour doubler ou quadrupler le budget reviendrait  à dévaluer automatiquement la monnaie de plus de 400%. L’inflation (hausse généralisée des prix) serait telle que les burundais regretteraient le temps d’avant les augmentations des salaires. Cette masse monétaire ne servirait ni à l’investissement, ni à l’épargne. Compte tenu de l’inflation, elle servirait à consommer la même quantité de produits et services, sans une valeur ajoutée au niveau de l’économie.

Cette propagande démagogique vise à conquérir rapidement un terrain perdu depuis son limogeage à la tête de la rébellion par Ndayikengurukiye en 1998. Le peuple n’a pas besoin de mensonges. Son respect passe par des messages de vérité. Nyangoma est lui-même convaincu que ses promesses sont irréalisables. A quoi sert alors de mentir au peuple?