LE CONGRES EXTRAORDINAIRE DU CNDD-FDD AURA LIEU LE 06 FEVRIER 2007

 

Burundi News le 30 janvier 2007

 

Par Gratien Rukindikiza

 

 

Les choses se précisent de plus en plus dans la crise qui secoue le parti CNDD-FDD depuis exactement deux semaines. Rappelons que quelques jours après le déclenchement de la crise, les partisans de la tenue d’un congrès extraordinaire avaient recueilli plus de 80% des signatures appuyant la tenue d’un congrès extraordinaire. De ce groupe s’est dégagé un comité chargé d’organiser le congrès le 6 février 2007. A la tête de ce comité, le député Léonidas Habonimana, un ancien officier FDD aujourd’hui démobilisé.

 

Dans l’autre camp dit de Radjabu, il s’était formé un autre comité chargé d’organiser un autre  congrès pour le 24 février 2007. Il faut rappeler en passant que dès le début de la crise, toutes les manœuvres ont été essayées visant à ce que ce congrès ne puisse jamais avoir lieu. C’est lorsque le camp de Radjabu a constaté que ce sont surtout les officiers de l’armée et de la police qui sont très virulents contre lui qu’il a compris que l’heure de la fin de la récréation avait sonné et qu’il n’avait aucune chance de stopper le rouleau compresseur qui était en marche pour le broyer s’il continuait à s’obstiner. Il a donc accepté le principe de la tenue d’un congrès et l’a fixé le plus loin possible, question de gagner du temps.

 

Le camp dit de Radjabu avait alors mis sur pieds un comité chargé d’organiser ce congrès le 24 février et dirigé  Martin Mbazumutima, Chef de Cabinet Civil du Président de la République. On comprend facilement comment le Président de la République était contrôlé par Radjabu.

 

Le CNDD-FDD évite de justesse une scission

 

Après que le Ministre de l’Intérieur et de la Sécurité Publique ait tranché en faveur de la tenue d’un congrès « dans les meilleurs délais » et exigé qu’un rapport sur la tenue dudit congrès lui soit soumis « avant le 10 février 2007 », le Président de la République , pour la première fois depuis le début de la crise, vient de prendre une mesure importante visant à concilier les deux camps. Radjabu n'aura pas de prétexte pour créer son propre parti.

 

Il a ordonné les deux camps à former une seule « commission mixte » composée des membres des deux comités ci-haut cités chargée d’organiser ce congrès le 06 février 2007. Ainsi, personne ne dira qu’il s’est mêlé des affaires de partis politiques puisqu’il  intervient dans le sens d’appuyer une décision prise par son ministre qui a toutes les prérogatives légales d’intervenir dans les affaires des partis politiques.

 

C’est ainsi qu’aujourd’hui même,  ce mardi 30 janvier 2007, s’est tenu une première réunion de ladite « commission mixte ». Parallèlement et à la même heure (16h00 de Bujumbura) s’est tenue une autre réunion à laquelle étaient conviés ceux qu’on appelle communément « mandataires politiques », c’est-à-dire les cadres nommés par décret présidentiel à certains postes de responsabilité dans les institutions de l’Etat. Pourquoi les mandataires politiques ? Parce qu’ils sont dans la catégorie reconnue par les statuts du CNDD-FDD comme membres de droit du congrès en tant qu’organe dirigeant du parti.

 

Plusieurs personnes dans la capitale, y compris dans les milieux diplomatiques, avaient peur de la tenue de deux congrès parallèles (l’un le 6 l’autre le 24 février) desquels sortiraient deux leaderships antagonistes, ce qui auraient signifié une scission du CNDD-FDD en deux ailes.

 

Si cette scission devait avoir lieu, cela aurait été dans la logique dans laquelle a toujours évolué le CNDD-FDD avant même qu’il devienne un parti politique. En effet, on se souviendra qu’avec l’éviction de Léonard Nyangoma à la tête de ce qui s’appelait alors le  CNDD  « tout court » il s’est formé deux ailes : l’aile CNDD-FDD dirigée par Jean-Bosco Ndayikengurukiye mais dont on sait que c’est le même Radjabu qui tirait les ficelles et dirigeait en réalité le mouvement, et l’aile CNDD dirigée encore aujourd’hui par Léonard Nyangoma. Plus tard, l’aile CNDD-FDD s’est scindé en deux autres ailes : l’aile dirigée par Radjabu-Nkurunziza et l’aile dirigée par Ndayikengurukiye et devenue plus tard le parti KAZE-FDD.

 

Il semble fort bien que ce scénario soit aujourd’hui évité et que le CNDD-FDD vient d’éviter une scission. Ceci avec l’acceptation des partisans de Radjabu de travailler dans une commission mixte dont l’agenda et l’ordre du jour sont connus à l’avance. En effet, le congrès aura lieu le 6 février et non  le 24 février comme prévu. Le point principal à l’ordre du jour est le changement des personnes à la tête du parti, à commencer par le Président du Parti, El Hadj Hussein Radjabu.

 

Il ne reste maintenant qu’à souhaiter que Hussein Radjabu, qui n’a pratiquement plus de chance de se retrouver à la tête de ce parti, ait un sursaut de bon sens en acceptant le verdict de la volonté populaire.

 

Qu’est-ce qui a mis le feu aux poudres ?

 

Lors de la réunion de cet après-midi à laquelle étaient conviés tous les mandataires politiques, sans exclusion de part leur appartenance à tel ou tel camp, il a été soulevé beaucoup de questions. Premièrement,  Richard Nimbesha, sénateur de Bubanza, qui dirigeait la réunion, a insisté pour demander à tous les participants présents et non présents à la réunion de ne pas rejeter telle ou telle personne du fait qu’elle n’a pas signé la pétition en faveur de la tenue de ce congrès.

 

Il a tenu à demander à ceux qui se sont farouchement opposé publiquement, en l’occurrence les sept membres de l’exécutif burundais (6 ministres et la Deuxième Vice-Présidente de la République ) qu’ils peuvent changer d’opinion en signant la pétition, que c’est leur droit d’avoir choisi le camp qu’ils croyaient le meilleur pour eux, mais que rien n’empêche qu’ils peuvent toujours changer d’opinion aujourd’hui. Il a donné pour exemple Inakanyana qui venait d’appeler pour exprimer son désir de rejoindre le courant en faveur du changement au sein du parti.

 

La question principale qui a été posée par plusieurs participants à la réunion consistait à savoir pourquoi ça a pris si longtemps pour réaliser qu’un changement était nécessaire. En d’autres termes, quel a été le déclencheur principal en plus des causes lointaines qui étaient bien connues, notamment l’appropriation du parti par une seule personne qui avait formé autour de lui un petit cercle mafieux.

 

Tout d’abord, il y a le dossier de la vente du Falcon 50 avec le limogeage par le Président de la République du ministre de la planification et ancien ministre des finances, M. Dieudonné Ngowembona, qui a tout de suite pris le large quelques 24 heures après sa mise en disgrâce. La plupart des militants ont tout de suite compris que le ministre Ngowembona n’a pas agi tout seul et que le détournement des quatre millions de dollars n’a été possible qu’avec la bénédiction de nul autre que Hussein Radjabu. Si au moins le magot avait servi à gonfler la trésorerie du parti. Mais lors de la présentation du bilan financier du parti le 24 décembre en Assemblée Générale à Gitega, il n’y avait aucune trace d’un tel montant, même pas sous une rubrique masquée.

 

Qui a décidé l'arrestation des journalistes et des faux putschistes?

 

Au mois d’août 2006 le Président de la République avait reçu les responsables des médias à Gitega et donné des garanties qu’aucun journaliste ne sera jamais arrêté du fait de sa fonction de journaliste et encore moins qu’aucune radio ou organe de presse ne sera jamais fermé. Immédiatement après et contre toute attente et à la surprise de tout le monde, on a assisté à l’emprisonnement systématique des journalistes, sans comprendre pourquoi.

 

En réalité, c’est Hussein Radjabu qui aurait ordonné ces arrestations, pour contrarier le Président Nkurunziza dans le but de le rendre impopulaire.

 

Il en est de même avec le dossier des « présumés putschistes ». Il a fallu plusieurs mois pour que le Président Nkurunziza comprenne que les preuves fournies au Général Adolphe Nshimirimana, patron du Service National de Renseignement (ex documentation) provenaient en réalité des « services secrets de Radjabu » qui avait chargé certains de ces hommes de main (on parle de Willy Nyamitwe et Jean Petit), pour concocter un pur montage. Ce montage a conduit à l’emprisonnement sans preuve de deux anciens dirigeants du Burundi, l’ex-Président de la République , Domitien Ndayizeye et son Vice-Président Alphose Marie Kadege.

 

Dans le dossier des présumés putschistes, les fabricants du montage sont allés encore trop loin dans leur tentative de régionaliser le conflit en impliquant des hautes personnalités proches des présidents rwandais (James Kabarebe) et ougandais.  Tout cela, tout comme l’emprisonnement de ces anciens dignitaires du pays, n’avait d’autre but que rendre impopulaire la personne de Pierre Nkurunziza tant sur le plan national que sur la scène régionale ou internationale. Nul besoin de signaler que Pierre Nkurunziza bénéficie de l’appui total de toute la population, toutes ethnies confondues alors que le mécontentement se focalisait contre Radjabu qui avait le véritable pouvoir.

 

Pour la première fois sans doute, le Président Nkurunziza a exprimé son ras-le-bol en prenant des décisions d’intérêt national sans consulter Hussein Radjabu. C’est ainsi que le limogeage de Dieudonné Ngowembona a été sa propre décision  et Hussein Radjabu l’aurait appris par des médias comme tout le monde comme  la libération des journalistes et des présumés putschistes.

 

Au cours de la réunion de cet après midi, les participants ont été littéralement foudroyés d’apprendre que Radjabu ne recevait les Commissaires Généraux qui acceptent d’obéir à ses ordres et de coopérer dans ses magouilles de pillage et de détournement systématique, non seulement au sein du parti, mais aussi au niveau de l’Etat dont il avait un contrôle quasi absolu. A suivre…