Rédaction : Nous publions un article de notre confrère d'Arib. C'est un article bine documenté et nous tenons à féliciter nos confrères. Cependant, ce site est seul responsable de son opinion et nous laissons aux lecteurs de se faire une idée sur cette question.

LES DESSOUS DE L’« AFFAIRE INTERPETROL »

Enquête-reportage sur le non-dit concernant l’affaire politico-financière qui secoue actuellement la classe politique burundaise.

ARIB.INFO - Correspondance spéciale de Bujumbura - 27/07/2007

Une véritable tempête secoue le monde politique burundais depuis l’annonce mettant en cause l’ex-Ministre des Finances, Mme Denise SINANKWA, qui a ordonné, en mai dernier, à la Banque centrale du Burundi (BRB) de vider 48 comptes spéciaux pour rassembler un montant de 8,6 milliards de Francs burundais aux fins de régler une dette de l'Etat envers la société d'importation des produits pétroliers (Interpetrol).

Depuis, la presse, la société civile, les hommes politiques, l'Inspection générale de l'Etat et le ministère de la Bonne gouvernance sont tous montés aux créneaux pour crier haro sur Mme SINANKWA, qui, après le scandale de la vente du jet présidentiel par son prédécesseur, est présentée au public comme la nouvelle « recordwoman » nationale du détournement des deniers publics.

Des chiffres faramineux sont avancés : on parle maintenant de plus de 23 milliards de francs détournés du Trésor public, mais les tenants et aboutissants de cette affaire restent un véritable mystère pour le misérable « citoyen lambda », car des zones d’ombre planent toujours sur cette affaire aux ramifications insoupçonnées.

Pour y voir un peu plus clair, La Rédaction a dépêché ses investigateurs auprès d’experts financiers et autres acteurs qui ont suivi le dossier de bout en bout – cadres au Ministère des Finances et à la Présidence, hauts fonctionnaires de la Banque centrale BRB et des institutions internationales, ONG, etc. - pour s’enquérir de la situation réelle dans ce dossier et des modalités qui ont entouré ce qui est dorénavant communément appelé l’« Affaire Interpetrol ». Voici le résultat d’une dizaine de jours d’enquête, investigation et recherche.

Au commencement : recommandation expresse de la Banque mondiale

Selon nos sources auprès du Ministère burundais des Finances, tout remonte aux conditionnalités (une dizaine) de la Banque Mondiale pour le décaissement de la deuxième tranche d’appui budgétaire, dont la date limite était le 30 juin 2007. Lors d’une mission de la Banque Mondiale venue pour voir ensemble avec le Gouvernement burundais de l’état d’exécution de ses conditionnalités, celle-ci a constaté qu’il en restait deux non encore remplies, à savoir :

  1. Le Plan d’action des recommandations du rapport définitif de l’audit sur la vente illicite du Jet présidentiel Falcon 50 : à ce moment le Bureau d’audit avait rendu son rapport définitif et avait été invité à proposer un plan d’action de la mise en œuvre de ses recommandations. Il ne restait plus que ce plan soit présenté au Conseil des Ministres pour que le procès verbal du Conseil soit transmis à la Banque Mondiale à Washington, pour que cette conditionnalité soit remplie.

  2. Le Niveau de mise en œuvre de la stratégie d’apurement des arriérés envers le secteur privé ; la conditionnalité consistait à ce que cette mise en œuvre devrait être faite de manière à satisfaire la Banque Mondiale.

Selon les fonctionnaires ministériels, c’est lors de la mise en oeuvre de l’apurement des arriérés envers le secteur privé, tel que demandé par la Banque Mondiale, que va naître l’« Affaire Interpetrol ».

Selon des sources auprès de la Banque Mondiale, c’est pour faire suite aux doléances du secteur privé en vue de l’aider à se relever après la crise que vient de traverser le Burundi que la Banque Mondiale a aidé le Gouvernement burundais à mettre en place une stratégie de payement des arriérés envers le secteur privé : audit d’évaluation des arriérés et mise à disposition des fonds.

La Banque Mondiale et le Fond monétaire internationale (FMI) ont ainsi mis dans leurs exigences le payement de ces arriérés : la Banque Mondiale comme conditionnalité de décaissement d’appui budgétaire et le FMI comme mesure préalable dans le programme ; c’était également une des conditionnalités d’aboutissement au point d’achèvement.

En quoi consistait cette stratégie ?

La stratégie arrêtée par la Banque mondiale et le Gouvernement, pour payement des arriérés envers le secteur privé, consistait à payer ces créanciers séparément selon la catégorie :

  1. La première catégorie concernait les créanciers dont le montant par personne était inférieur à 100 millions de francs. Pour cette catégorie, la conditionnalité était de les payer avant le 31 décembre 2006, ce qui a été fait : c’était la conditionnalité de décaissement de la 1ère tranche.

  2. La seconde catégorie concernait les créanciers qui dépassent 100 millions de francs par personne. Pour cette catégorie, il s’agissait de payer 100 millions de Fbu avant le 31 décembre 2006 – ce qui a été fait – et de convertir le reliquat en achat, auprès de la BRB, des obligations de Trésor remboursables à termes à partir du 1er janvier 2007, ce qui traduisait un démarrage de marché financier à Bujumbura.

La BRB provoque le boycott de l’opération

Isaac BIZIMANA

Gouverneur de la BRB

Selon plusieurs créanciers contactés sur place, quand les privés se sont présentés à la BRB munis de la déclaration de créances qu’ils avaient signée avec le Ministère des Finances, la Banque centrale leur a exigé de payer préalablement des fonds supplémentaires. Alors les créanciers mécontents de ne pas être remboursés ont refusé et partant ont boycotté l’opération, car ne comprenant pas, à juste titre, comment ils pouvaient encore dépenser dans cette opération.

Conséquences, ce qui devait arriver arriva : quand la mission de la Banque Mondiale vint s’enquérir de l’état d’avancement de la mise en œuvre des conditionnalités, elle a constaté que la stratégie n’avait pas marché pour les créanciers de plus de 100 millions ; or, c’est le payement de ceux-ci qui pouvait augmenter le niveau de mise en œuvre de la stratégie jusqu’à un niveau qui pouvait satisfaire la Banque Mondiale (environ 80%).

La sentence ne tarda pas à tomber : la Banque Mondiale a alors recommandé de payer ces arriérés pour au moins 12 milliards, pour que ce niveau soit jugé satisfaisant à Washington. En même temps le FMI avait mis dans le programme que les arriérés devaient être mis à zéro au 30 juin 2007.

Pour rappel, la date de dernière échéance du décaissement de la 2ème tranche était le 30 juin 2007 et le montant en jeu était de plus de 55 milliards de Fbu qui était attendu en remplissant ces conditionnalités : soit 25 millions de dollars de la Banque Mondiale et le reste des partenaires bilatéraux qui avaient décidé de faire passer le payement de leur appui budgétaire par la Banque Mondiale, faisant ainsi leurs les conditionnalités de la Banque Mondiale.

Les enjeux de cette conditionnalité

Selon les experts financiers, l’apurement des arriérés envers le secteur privé est un enjeu majeur pour la survie même de l’économie burundaise, car c’est :

  1. une conditionnalité pour arriver au point d’achèvement, c-à-d annulation de la dette prévue pour janvier 2008.

Conséquence : si le Burundi n’y arrive pas, le pays devra recommencer à rembourser les dettes suspendues ;

  1. une conditionnalité de décaissement de plus de 54 millions de dollars, auxquels il faut ajouter 30 millions de dollars de l’Union européenne qui ne décaisse pas un sous sans que la Banque mondiale décaisse.

Conséquence : sans décaissement des aides budgétaires étrangères, le programme du FMI ne peut pas être suivi ; si le programme du FMI n’est pas respecté, aucun bailleur de fonds ne débloque rien d’une part, et d’autre part il faut oublier de voir le pays atteindre le point d’achèvement où les dettes seraient annulées, car tout est lié au programme du FMI ;

  1. un repère structurel dans le programme du FMI : si les repères structurels du FMI ne sont pas respectés, ce dernier n’accepte pas le budget ; or, une révision du budget était attendue après les promesses d’augmentation des salaires par le Président de la République.

Avec une telle situation on comprend l’importance d’une telle conditionnalité : elle met en jeu l’avenir économique du pays tout entier.

Une Ministre sous pression

Denise SINANKWA

Ancien Ministre des Finances

Selon de témoignages dignes de foi, la Ministre Mme Denise SINANKWA ayant les Finances dans ses attributions s’est vite retrouvée toute seule à devoir prendre ses responsabilités, devant de tels enjeux qui la tenaillaient, puisque les autres responsables de l’Etat dans ce genre de dossiers, à savoir la présidence et la 2ème vice-présidence, étaient soit occupés à autre choses : blocage au Parlement, crise au sein du parti au pouvoir CNDD-FDD ; soit préoccupés par leur propre situation, spirituelle, sportive ou financière...

En plus de la pression en termes d’enjeux qui s’exerçait sur la Ministre des Finances, ses anciens collaborateurs déclarent qu’il y avait une autre pression de temps ; il fallait remplir les conditionnalités avant le 15 juin 2007 pour que la Banque Mondiale à Washington puisse valider avant le 30 juin 2007, date butoir.

Un 2ème Vice-président bien inerte

Gabriel NTISEZERANA

2ème Vice-président de la République

Selon des informations recoupées de plusieurs sources dont de sources proches de la présidence, la Ministre des Finances a dû demander, par écrit, un Conseil des Ministres extraordinaire ayant pour objets : (1) l’analyse du budget révisé, ainsi que (2) les conditionnalités. Selon son entourage, Mme SINANKWA voulait ainsi mettre le Gouvernement devant ses responsabilités, tellement elle avait l’impression d’être soumise toute seule sous cette pression de tels enjeux.

Seulement, elle ne put convaincre son Chef hiérarchique direct, qui assure la coordination du domaine économique et social, et qui n’est autre que le 2ème Vice-président de la République, M. Gabriel NTISEZERANA.

Conséquence : la présidence n’organisera un Conseil de Ministres extraordinaire que pour le seul point concernant le plan d’action des recommandations du rapport définitif de l’audit sur la vente illicite du Jet présidentiel Falcon 50.

Plusieurs observateurs de la vie politique burundaise ont soulevé plusieurs questions concernant l’attitude de M. NTISEZERANA à ce moment : le 2ème Vice-président a-t-il jugé ces points de si peu d’importance que cela ne valait pas la peine de les étudier urgemment ? N’a-t-il rien compris sur les enjeux en présence ? Ou alors quelles autres motivations pouvaient le guider ?

Plus tard on comprendra les raisons de l’attitude du 2ème Vice-président NTISEZERANA dans ce dossier.

Payer …à tout prix

Poursuivant les recommandations de la Banque mondiale, la Ministre des Finances s’est alors mise à payer les créances, son soucis étant d’atteindre 12,5 milliards de Fbu, explique son entourage. C’est ainsi que parmi les gros créanciers, on retrouve la société Interpetrol, par laquelle va venir le scandale, et une certaine institution financière jusqu’ici non encore divulguée au grand public, à savoir … l'Interbank Burundi (IBB), dont l’Administrateur Directeur Général est un certain Callixte MUTABAZI.

Pour atteindre les 12,5 milliards de payement, les services du Ministère des Finances nous ont expliqué qu’ils voulaient procéder comme suit : 8 milliards pour Interpetrol, 2,5 milliards à IBB et 2 milliards pour les autres créanciers.

Concernant le payement des 8 milliards à Interpetrol, c’est le calcul de ce différentiel de change qui fait actuellement débat, certains estimant que c’est sur base d'un faux document présenté par Interpetrol que Mme SINANKWA a procédé au payement, d’autres que c’est sur base d'un faux rapport d'une commission d’experts mise sur pied à cet effet.

L’entourage de la Ministre avance que Mme SINANKWA ne pouvait que se fier au rapport des experts et rappelle qu’il y a un autre intervenant dans cette opération et qui est la Banque centrale (BRB), qui est le dépositaire des licences d’importations et des factures.

Le non-dit sur l’IBB, la vraie raison qui a mis le feu aux poudres

Callixte MUTABAZI

ADG de l’Interbank Burundi (IBB)

Selon nos sources, le payement des 8 milliards à Interpetrol s’est effectué « normalement » sans que personne, ni à la 2ème Vice-présidence, ni à la Bonne gouvernance, n’y trouve rien à redire. C’est au moment du règlement des opérations de remboursement des arriérés et de recouvrement fiscal de l'Interbank Burundi (IBB) que ce petit monde s’est mis à s’agiter. Et pour cause !

D’après les personnes proches du dossier, c’est le non-dit sur l’IBB qui a tout déclenché. Ainsi, d’après nos sources, au moment du calcul du différentiel de change pour l'Interbank Burundi (IBB), les services des Finances ont relevé que l’Etat devait bien 2,5 milliards à l’IBB, mais que cette dernière devait à l’Etat 2,7 milliards d’après le contrôle fiscal de 2006. Selon nos informateurs, c’est cette dernière somme qui serait à la base des déboires actuels de Mme SINANKWA.

En effet, lorsque la Ministre des Finances a entamé la procédure de retenue des 2,5 milliards, le Directeur des Impôts et le 2ème Vice-président de la République voulaient s’y opposer, estimant que l’IBB ne devait plus rien à l’Etat et qu’elle pouvait donc percevoir les 2,5 milliards.

Il est intéressant ici de noter que le 2ème Vice-président Gabriel NTISEZERANA travaillait chez Inter Bank Burundi avant d’être nommé Gouverneur de la BRB puis 2ème Vice-président de la République. Idem pour le Directeur des Impôts nommé en février 2007, et qui n’était autre que le Conseiller fiscal de l’IBB lors du contrôle fiscal de 2006, à ce moment il n'avait pas contesté la somme des 2,7 milliards que doit l’IBB à l’Etat, mais c’est au moment il a la responsabilité de recouvrer les deniers publics en tant que Directeur des Impôts, qu’il met en avant l’intérêt de son ancien patron, IBB, au détriment de celui de l’Etat qui l’emploie actuellement. Drôle de fonctionnaire !.

Selon nos sources les relations entre la Ministre SINANKWA et le 2ème Vice-président NTISEZERANA se sont détériorées depuis l’« Affaire BCB-Belgolaise ». Pour rappel, l’ADG de l’Interbank Burundi, M. Callixte MUTABAZI, derrière lequel se trouve en réalité l’homme d’affaires rwandais Tribert RUJUGIRO, avait déjà voulu acquérir, avec l’appui du 2ème Vice-président Gabriel NTISEZERANA et du Gouverneur de la BRB Isaac BIZIMANA, les actifs de la Belgolaise dans la BCB, sans succès car les Belges veillaient au grain.

Selon des informations concordantes, cette opération qui a capoté aurait pu rapporter 1 million de dollars de commission au 2ème Vice-président Gabriel NTISEZERANA. Ce dernier s’était en outre octroyé une prime de fin de carrière de 200 millions quand il a quitté la BRB pour la 2ème Vice-présidence, contre l’avis de la Ministre des Finances, qui essaiera aussi de s’opposer, mais en vain, lorsque le 2ème Vice-président NTISEZERANA fit nommer sa propre épouse comme Directeur-adjoint des Douanes.

En outre, la Ministre SINANKWA voulait supprimer l'agence de l'IBB située au sein du Ministère des Finances, et qui fait que l'argent des contribuables passe d'abord par l'IBB - institution privée qui fait des intérêts dessus - avant que les contributions n'arrivent au Compte du Trésor public.

Selon les observateurs, le duo Callixte MUTABAZI & Tribert RUJUGIRO a su placer ses hommes aux points stratégiques des Finances burundaises : à la 2ème Vice-présidence, à la Banque centrale, à la Direction des Impôts et à la Direction des Douanes. On comprend aisément que la Ministre des Finances était devenue gênante pour eux.

D'après un cadre du ministère des Finances, la Ministre a eu « le courage politique de dire stop », autrement dit d’arrêter, une nouvelle fois, le cours d’une opération rondement menée par le trio Callixte MUTABAZI - Tribert RUJUGIRO - Gabriel NTISEZERANA, avec l'appui d'Isaac BIZIMANA. C’est à ce moment que subitement le scandale a éclaté, comme un tonnerre, tellement fort que la Ministre a dû suspendre ce payement de l’IBB.

C’est ainsi que le dossier Interpetrol va descendre dans la rue, et que l’affaire prit de l’ampleur, on entendit alors parler du décaissement des milliards pour la société Interpetrol et de la fermeture des comptes spéciaux que certains n’hésitent pas à nommer comptes « sociaux ».

Des comptes spéciaux …très spéciaux

Le scandale entourant l’« Affaire Interpetrol » va atteindre son paroxysme lorsque le grand public va apprendre que Madame SINANKWA « a osé » fermer 48 comptes spéciaux pour rassembler le montant de 8,6 milliards aux fins de régler Interpetrol, des « comptes vitaux » comme ceux du fonds National VIH/SIDA, de la participation aux soins de Santé, du programme élargi de vaccination, du fonds spécial carburant, du fonds spécial d’urgence, du fonds stock stratégique, du fonds de la gestion des catastrophes, du fonds spécial sucre, etc.

Selon nos investigations, durant les années de crise le Burundi n’était pas éligible au financement international destiné au développement, il ne bénéficiait que de l’aide humanitaire. A une époque pareille, les structures et institutions ont été déréglées, ce qui a été accentué par la période de l’embargo. Pour les besoins de la cause, quelques comptes spéciaux, autour de 300, ont été ouverts ici ou là.

Et contrairement à ce qui se dit actuellement, ils ne sont pas uniquement « sociaux », loin s’en faut ! La gestion de tels comptes échappait, et échappe toujours, au budget de l’Etat. On les retrouve essentiellement au niveau de la Présidence, des Vice-présidences et de quelques ministères et services publics.

Triple motivation pour la fermeture des comptes spéciaux

Selon les agents du Ministère des Finances que nous avons pu contacter, il y avait dans le chef du Ministre SINANKWA trois motivations qui l’ont poussée à fermer ces comptes :

  1. Le respect de la loi : selon la loi sur la comptabilité publique, « Le Ministre des Finances est l’unique ordonnateur national ».

Conséquence : cette forme de gestion de comptes hors budget est « illégale » si on se réfère aux lois existantes au Burundi concernant la gestion des finances.

  1. Amélioration de la gestion des finances publiques : le soucis d’unicité du budget, c-à-d que tous les fonds soient gérés de manière qui facilite la transparence et par les institutions légalement reconnues à cet effet.

Selon des experts financiers, dans le monde entier y compris au Burundi, la Loi indique clairement que la gestion des Finances doit être faite au Ministère des Finances. Les Finances doivent être légalement gérées au Ministère des Finances comme l’Enseignement est géré au Ministère de l’Education par exemple.

  1. Rassurer les bailleurs de fonds : en tant que donateurs, ils doivent se rassurer qu’ils peuvent suivre la gestion des fonds publics.

Selon des informations recueillies auprès d’ONG oeuvrant sur place, après la crise le Burundi s’est ouvert à la coopération multinationale et bilatérale : un programme de réformes économiques a été mis sur pied avec l’appui du FMI ; le Burundi a été éligible à la facilité PPTE ; la Banque Mondiale a adopté une stratégie d’assistance au Burundi, de même que l’Union européenne et partant la reprise de la coopération s’installait.

Selon nos sources, les bailleurs de fonds ont aidé le Burundi à mettre sur pied des mécanismes d’assainissement de la gestion des Finances publiques, on nous a souvent cité, à titre d’exemple, la mise en place du « Système de gestion des Finances publiques (SIGEFI) », instrument informatique logé au Ministère des Finances et qui suit l’exécution du Budget.

Dans le cadre de ce processus d’amélioration de la gestion des Finances publiques, les bailleurs de fonds ont recommandé au Gouvernement burundais, qui l’a accepté (voir les lois  de Finances publiques 2006 et 2007), que les comptes spéciaux gérés ailleurs soient fermés et que les fonds soient rapatriés sur le Compte Général du Trésor Public, afin que la gestion soit suivie au même titre que les autres fonds publics.

Que deviennent les activités financées par ces comptes fermés ?

Selon des agents du ministère des Finances, les activités qui sont financées par ces comptes restent valables, le seul changement est que les opérations passent par le compte général du trésor, par le budget et soient enregistrées dans le SIGEFI.

Selon nos informateurs, le Gouvernement burundais s’est engagé, depuis 2006, à fermer ces comptes à travers les lois de Finances 2006 et 2007. Selon des sources dignes de foi, le Ministre des Finances de l’époque avait déjà fermé 80 comptes spéciaux en 2006 et cela n’a pas posé de problèmes.

En 2007, la Ministre des Finances SINANKWA continue à fermer et commence par 50 et c’est le tollé général qui l’empêche de continuer. Pourquoi ? S’interroge certains observateurs. Le Gouvernement voudrait-il se raviser ?

Le compte 1110/017 du Fonds spécial carburant : un compte très sensible

Selon nos investigations, la fermeture de ces comptes spéciaux met mal à l’aise certains Ministres qui veulent se conforter dans cette gestion opaque en dehors du circuit normal, en dehors des contrôles éventuels, en dehors des exigences légales.

Selon les connaisseurs des rouages politico-financiers de l’Etat, la fermeture du « compte spécial carburant » par Mme SINANKWA équivalait à un « suicide politique ». Selon plusieurs sources concordantes, c’est sur ce compte que transitent mensuellement les fameux 80 000 dollars du pétrole nigérian. De BUYOYA à NKURUNZIZA, en passant par NDAYIZEYE, ce compte était la chasse gardée du Président de la République, et géré par son homme de main. Hier c’était Pancrace CIMPAYE pour NDAYIZEYE, et actuellement c’était Isaac BIZIMANA pour NKURUNZIZA. « En faisant ça elle a dépassé les bornes », grogne-t-on du coté de la présidence.

« Quelle que soit la personne qui occupe le poste de Ministre des Finances, celui-ci doit continuer à fermer ces comptes spéciaux jusqu’au dernier », estime un fonctionnaire de la Banque Mondiale, selon qui, vu que le Burundi bénéficie d’appuis budgétaires, les donateurs ont raison d’exiger de la transparence dans la gestion des fonds qu’ils mettent à disposition du pays, et ce dans le propre intérêt du Burundi, précise-t-il.

L’enquête se poursuit.

Nos investigations sur ce dossier sont loin d’être terminées, et à ce stade de nos enquêtes plusieurs questions, conséquentes à cette affaire, restent sans réponses :

-          Où se situent les responsabilités en termes de prise de décision ?

-          Quel est le rôle exact du Gouverneur de la BRB, Isaac BIZIMANA dans cette affaire ?

-          Les Président et 2ème Vice-président de la République sont-ils tout aussi responsables que les Ministre et gouverneur de la BRB dans l'affaire ?

-          Madame Denise SINANKWA serait-elle devenue le nouveau bouc émissaire ?

-          Le dossier date de 2000 déjà. Qui d'autres des pouvoirs précédents pourraient avoir à répondre de cette affaire ?

-          A quand une enquête sur les agissements du trio Callixte MUTABAZI - Tribert RUJUGIRO - Gabriel NTISEZERANA., et ses ramifications ?

-          Y’a-t-il l’ombre d’une chance pour que le Burundi revoie la couleur de l’argent détourné ?

-          Les augmentations de salaires promises pour fin juillet 2007 seront-elles tenues ? Rien n’est moins sûr puisqu’elles dépendent de la révision du budget et ce dernier du décaissement des 12 milliards qui aurait dû avoir lieu avant le 30 juin 2007.

-          Etc.

Dossier à suivre …