Source Arib
Les dessous de l’« Affaire Interpetrol » suite :
VERS UN DÉNOUEMENT ROCAMBOLESQUE
L’Etat burundais, sur instigation du 2ème Vice-président Gabriel NTISEZERANA, voudrait faire main basse sur 6 Milliards de francs logés à la BCB comme dépôt de caution de la société INTERPETROL alors que l’affaire n’est pas encore jugée et que de nouveaux éléments fournis par l'Inspection Générale de l'Etat viennent blanchir la société ainsi que les anciens ministres des Finances, M. Athanase Gahungu et Mme Denise Sinankwa.
ARIB.INFO - Correspondance spéciale de Bujumbura - 23/10/2007
Depuis quelques temps, l’ARIB.INFO vous propose une série d’articles résultant de nos investigations sur place autour d’affaires politico-financières qui secouent actuellement le Burundi.
Suite à l’emballement médiatique autour de l’« Affaire Interpetrol », nous avons voulu savoir ce qui se tramait exactement derrière les rideaux, loin des micros et caméras, dans les coulisses. C’est ainsi que nous avons envoyés nos investigateurs sur place pour creuser plus profondément dans ce dossier. Ils ont mis à jour plusieurs ramifications de cette affaire et qui étaient jusqu’ici inconnues du public et que nous appelons : « Les dessous de l’Affaire interpetrol ».
Aujourd’hui, l’ARIB.INFO est en mesure d’informer le grand public, documents à l’appui, sur les tous derniers développements dans cette affaire, et qui prouvent, comme nous l’avions annoncé dès le début, que derrière cette affaire se trouvent en réalité de visées cachées d’un groupuscule mafieux entrain de saigner les avoirs du pays.
Le dossier Interpetrol vidé de toute sa substance
Dans une correspondance datée du 11/10/2007 adressée au Procureur Général de la République, et dont ARIB a pu se procurer une copie et que nous publions en intégralité, l’Inspection Générale de l’Etat revient sur son Rapport de contrôle n°548/426/2007 concernant les paiements faits à la société Interpetrol.
Pour rappel, le Rapport de contrôle n°548/426/2007 signé le 20 juillet 2007 par les Inspecteurs de l’Etat, M. David Baranyanka, Mme Jeanne-Marie Alphonsine Yakira, M. Renovat Nsengiyumva, M. Charles Karorero et M. Symphorien Nizigiyimana, concluait que 14.511.446.134 FBu constitue le montant indûment payé à la société Interpetrol.
Selon ce Rapport , l’Inspection Générale de l’Etat mettait en causes deux anciens ministres des Finances, M. Athanase Gahungu et Mme Denise Sinankwa :
« En 2004, les Ministre des Finances et Directeur Général des dépenses d’alors, MM. Athanase Gahungu et Louis Barampanze ont effectué un paiement au titre du différentiel de change en faveur de la société INTERPETROL, par des bons du trésor totalisant un montant de 7.613.689.524 FBu » et qu’« En février 2007, Mme Denise Sinankwa a émis 3 billets à ordre totalisant un montant de 8.729.796.335 FBu et payé au mois d’avril en faveur de la société INTERPETROL pour lequel on ne voit ni l’objet ni le titre de créance. », disait le Rapport qui concluait : « Après une analyse minutieuse, cette commission a aussitôt émis ses observations en recommandant une justification détaillée de tous les montants perçus, ou alors la restitution au trésor public par la Société INTERPETROL du montant indûment perçu de 14.511.446.134 FBu au besoin par les voies judiciaires. Cette commission recommande également de contraindre l’ancienne Ministre des Finances Denise Sinankwa à venir justifier ces paiements ou contribuer dans leurs remboursements. » (Pour plus de détails : CLIQUEZ-CI)
Et c’est sur base de ce Rapport qu’une instruction judiciaire a été lancée à l’encontre de la société Interpetrol et des personnalités politiques ci-haut citées.
Dernier revirement en date
C’est donc par cette correspondance du 11/10/2007, dont copie a été adressée au Président de la République et aux deux Vice-présidents, que l’Inspecteur général de l’Etat, M. Edmond BIZABIGOMBA, revient sur les conclusions du Rapport ci-haut cité et demande au Procureur Général de la République de tenir compte de nouveaux éléments avant de clôturer le dossier en instruction. Se basant sur des informations issues de ses nouvelles investigations, l’Inspection générale de l’Etat estime dorénavant que :
« 1. Concernant le paiement fait par le Ministre Athanase GAHUNGU, les explications, les précautions prises dans l’étude des réclamations faites par la société INTERPETROL et contenues dans les documents produits par la défense et dont copies vous ont été réservés méritent une attention particulière, et semblent globalement acceptables au vu des différentes Commission Gouvernementales qui se sont occupés du litige, y compris la Commission, qui, à l’époque, avait été désignée par son Excellence Monsieur le Ministre d’Etat en charge de la Bonne Gouvernance. » [NdlR : Ce dernier est l’actuel Chef de l’Etat Pierre NKURUNZIZA] (Pour les arguments de la défense du Ministre GAHUNGU : CLIQUEZ-CI)
Ainsi, l’ancien Ministre Athanase GAHUNGU semble tiré d’affaire, puisque il vient d’être « blanchi » par l’Inspection Générale de l’Etat. Quant à l’ancienne Ministre Denise SINANKWA, il y a lieu de penser que son cas va prendre le même cheminement, puisque l’Inspection Générale écrit à l’adresse du Procureur Général de la République :
« 2. Concernant les paiements effectués par la Ministre Denise SINANKWA, nous voudrions vous informer que des documents pertinents nous ont été fournis après notre rapport préliminaire, et que par conséquent, ils n’ont pas été tenus en considération par la mission de contrôle. Ils sont donc encore sous analyse, nous vous fournirons un rapport y relatif après les investigations approfondies que nous sommes occupé à mener, afin de vous permettre de clôturer le dossier en instruction dans vos services en parfaite connaissance de cause. » (Pour les arguments de la Ministre SINANKWA, cfr Interview qu’elle a accordé à ARIB.INFO le 29/07/2007 : CLIQUEZ-CI)
Selon donc les dernières conclusions en date de l’Inspection Générale de l’Etat, toutes les accusations lancées à l’encontre des anciens Ministres GAHUNGU et SINANKWA seraient sans fondements, et le dossier « Interpetrol » serait dorénavant vide, puisque basé essentiellement sur le précédent Rapport de cette même Inspection générale de l’Etat. Ainsi, au vu des derniers développements dans le dossier, l’instruction judiciaire de cette affaire se dirige tout droit vers un « non-lieu ». Les deux personnalités, qui n’ont eu de cesse de clamer leur innocence, seraient ainsi « réhabilitées » (Gusubizwa Umutamana).
Mais voilà, les nouvelles conclusions de l’Inspection Générale de l’Etat risquent d’avoir des conséquences inattendues pour le pouvoir en place, aussi bien sur le plan politique que sur le plan financier. En effet en réhabilitant les deux anciens Ministres, l’Inspection générale de l’Etat vient de signifier que les paiements faits par eux à la société INTERPETROL n’avaient rien d’illicite et que toutes les tracasseries judiciaires qu’a connu depuis cette société sont sans fondement.
Rappelons que suite au premier Rapport de l’Inspection générale de l’Etat (qu’elle vient elle-même de remettre en cause) et sur instigation du deuxième Vice-président de la République, M. Gabriel NTISEZERANA, la société INTERPETROL a vu ses avoirs (camions, immeubles, etc.) saisis et ses comptes bancaires bloqués (nous y reviendrons). En outre, plus grave encore, le 2è Vice-président NTISEZERANA en profitera pour suspendre unilatéralement tous les contrats qui liaient cette société avec l’Etat.
Le résultat de cette décision fut la pénurie de carburant au Burundi, et la hausse des prix qui s’en suivirent inévitablement. Mais cet acte de sabotage de l’économie nationale par celui-là même qui devait la sauvegarder était tout sauf irréfléchie. En effet, le 2è Vice-président NTISEZERANA va par la suite octroyer les licences d’importation des produits pétroliers à une société kenyane et à des fournisseurs rwandais.
Si l’instruction se clôture dans le sens des nouvelles conclusions de l’Inspection générale de l’Etat, la société INTERPETROL pourrait, et on ne voit pas pourquoi elle s’en priverait, attaquer l’Etat burundais pour rupture abusive de contrats et lui réclamer des sommes colossales en dommages et intérêts. On se doute bien que ce n’est pas le 2è Vice-président NTISEZERANA qui va payer. Nous reviendrons plus loin sur cette personnalité politique sans scrupules.
Dans sa dernière correspondance, l’Inspection Générale de l’Etat semble déjà vouloir anticiper la réaction de la société INTERPETROL puisqu’elle propose que :
« 5. Enfin, au vu de la nature de certains documents déjà en notre possession et des modes de règlement des litiges prévus par des contrat signés entre le Gouvernement et INTERPETROL, il nous paraît utile et conforme à la légalité et à l’intérêt général, d’envisager de soumettre l’examen des dettes croisées entre cette société et l’Etat, à un “Panel d’Arbitrage” qui pourrait statuer à huis-clos. Ainsi, il serait donné aux parties, la pleine liberté de discuter sans réserve de tous les aspects délicats du dossier, dans le respect du droit et de la morale publique. »
Une affaire dans l’affaire
Mais la correspondance de l’Inspection Générale de l’Etat cache en réalité une autre affaire dont l’enjeu serait la survie financière du pays, dont la santé est déjà dans un état désastreux. En effet dans sa correspondance, l’Inspection Générale de l’Etat écrit :
« 3. Dans l’entre-temps cependant, nous avons noté avec satisfaction que les intérêts de l’Etat étaient sauvegardés par la constitution de garanties de deux natures : D’abord, six milliards de nos francs logés sur un compte bloqué “Ministère de la Justice-Parquet Général” à la Banque de Crédit de Bujumbura (B.C.B.), puis des immeubles, le tout totalisant un montant couvrant les sommes en discussion. »
De quoi s’agit-il ? Nous avons déjà relevé que, suite au premier Rapport de l’Inspection générale de l’Etat et l’instruction judicaire enclenchée contre la société INTERPETROL, celle-ci a vu ses avoirs (camions, immeubles, etc.) saisis et ses comptes bancaires bloqués. Ses comptes étant logés à la Banque de Crédit de Bujumbura (BCB).
Pour faire lever les saisies bancaires de son client INTERPETROL, la BCB s’est porté caution solidaire à concurrence d’un montant maximum de 6 Milliards de Francs burundais envers le Ministère de la Justice-Parquet Général de la République.
C’est ce « magot » qui fait aujourd’hui l’objet de convoitise de la part de l’Etat. En effet, toujours dans cette correspondance du 11/10/2007, l’Inspection Générale de l’Etat écrit :
« S’agissant du montant de 6 milliards précisément, et eu égard aux discussion en cours entre le Gouvernement du Burundi et les deux Institutions de Bretton-Wood, nous sommes informés que cette garantie a fait l’objet d’un accord entre toutes les parties intéressées.
Il serait, dès lors, envisageable de lui réserver un autre sort suivant les vœux de la Banque Mondiale et du Fond monétaire International, à condition d’obtenir l’accord d’INTERPETROL avec lequel on pourrait négocier la contre-partie.
Dans le cadre du prolongement de l’esprit d’entente qui avait guidé le placement des 6 milliards en garantie, une Convention pourrait alors être conclue rapidement pour nous tirer de la situation qui menace la santé financière du pays. » (Pour l’intégralité de cette correspondance : CLIQUEZ ICI)
En un mot : L’Etat burundais voudrait faire main basse sur les 6 Milliards logés à la BCB comme dépôt de caution de la société INTERPETROL alors que l’affaire n’est pas encore jugée. Du jamais vu dans les anales judiciaires.
Et pour mener à bien ce véritable « hold-up », l’Etat prétend agir « suivant les vœux de la Banque Mondiale et du Fond monétaire International » alors que, comme nous le verrons plus loin, la position de Washington sur ce dossier est claire : que la justice burundaise fasse son travail et que les choses soient clarifiées par cette voie.
Quand l’Etat joue à « Qui veut gagner des Milliards ? »
Ainsi dit, ainsi fait : moins d’une semaine après cette correspondance, le 17 octobre 2007 exactement, le Procureur de la République écrit à la BCB pour lui demander de virer les 6 Milliards de dépôts de garantie judiciaire pour la société INTERPETROL vers un compte ouvert à la Banque centrale (Banque de la République du Burundi – BRB).
En effet, dans sa lettre adressé à l’Administrateur Directeur Général de la BCB, le Procureur Général de la République, M. Elysée NDAYE, lui annonce que « le greffier loge les sommes déposées à titre de cautionnement sur le compte n°1110-099 intitulé “compte d’attente frais de recouvrement Justice” ouvert à la BRB » et lui demande « de virer le montant de 6 milliards précédemment logé sur le compte 201-0021835-57 ouvert en vos livre, et déposé par la société Interpetrol à titre de cautionnement, sur le compte ci haut indiqué ouvert à la BRB. » (Pour l’intégralité de cette lettre : CLIQUEZ ICI)
Au cours de nos investigations, pour en savoir un peu plus sur ce compte et ses 6 Milliards qui semblent avoir aiguisé l’appétit de certains, nous avons pu consulter plusieurs documents y référant, et dont nous publions en intégralité. D’après ces documents, force est de constater que la demande du Procureur va non seulement à l’encontre de la loi qu’il est sensé faire respecter, mais aussi que le Procureur Général de la République est entrain de contredire un accord qu’il a lui-même passé avec la BCB. Car en effet, voici la genèse de la création de ce compte :
1. En date du 16 juillet 2007, pour faire lever les saisies bancaires de son client INTERPETROL, la BCB écrit au Ministère de la Justice-Parquet Général de la République concernant un « Acte de cautionnement n°13.388 ». Extraits de la lettre :
« Nous, la BANQUE de CREDIT de BUJUMBURA S.M., conformément aux instructions de notre client INTERPETROL, déclarons par la présente se porter caution solidaire à concurrence d’un montant maximum de BIF 6.000.000.000 (6 Milliards se FRANCS BURUNDAIS) envers le MINISTERE de la JUSTICE-PARQUET GENERAL de la REPUBLIQUE.
Cet acte de cautionnement entrera en vigueur à la réception des levées de saisies du 19 et27 juin 2007 (lettres Ministère de la Justice-Parquet Général n°s 552.10/175/2007 du 19-6-2007 et 552.10/183/2007 du 27-6-2007) et s’éteindra automatiquement le 31 décembre 2008.
Toutefois, si à la fin de cette période, les enquêtes n’ont pas encore écartées la responsabilité de notre client, le cautionnement pourra être prolongé, chaque fois que de besoin, pour autant que la demande de prolongation nous soit parvenue avant le 30 novembre de l’année suivante.
Cet acte de cautionnement ne pourra être exécuté que sur présentation d’un jugement coulé en force de chose jugée, càd non plus susceptible d’aucun recours à concurrence du montant arrêté par la dernière juridiction de fond et dans la limite du cautionnement (6 milliards de bif). » (Pour l’intégralité de la lettre : CLIQUEZ ICI)
2. Dans sa lettre n°552/273 du 21 août 2007, le Procureur Général de la République demande à la BCB de virer le montant de 6 milliards BIF au crédit du compte n°1110-090 du Ministère de la Justice auprès de la Banque de la République du Burundi (BRB).
3. Dans sa lettre du 24 août 2007, la BCB écrit au Procureur Général de la République dans ces termes :
« Dans l’intérêt mutuel de toutes les parties, nous vous suggérons de loger ces fonds de garantie dans un compte “Ministère de la Justice-Parquet Général de la République” à ouvrir en nos livres dès réception de l’original de notre acte de cautionnement n°13.338 du 09.07.07 pour annulation.
Le montant ainsi constitué sur ce compte à ouvrir en nos livres ne serait exigible par le Ministère de la Justice que sur présentation d’un jugement coulé en force de chose jugée, càd non plus susceptible d’aucun recours à concurrence du montant arrêté par la dernière juridiction de fond et dans la limite du cautionnement (6 milliards de bif).Cet engagement serait irrévocable. » (Pour l’intégralité de cette lettre : CLIQUEZ ICI)
4. Dans sa lettre du 24 août 2007, le Ministre de la Justice et Garde des Sceaux, Mme Clotilde NIRAGIRA, écrit au ministre des Finances lui demandant l’autorisation pour la BCB d’ouvrir ce compte :
« Par la présente, nous avons l’honneur de vous demander d’autoriser à la Banque de Crédit de Bujumbura l’ouverture d’un compte “Frais cautions Justice” au nom du ministère de la Justice.
Ce compte servira à loger un montant de SIX MILLIARS DE FRANCS BURUNDAIS (6.000.000.000 FBU) représentant la caution donnée par la Société INTERPETROL dans le cadre de l’instruction du dossier RMPG 585/N.E au parquet de la République. » (Pour l’intégralité de la lettre : CLIQUEZ ICI)
5. Dans sa lettre n°558.10/277/2007 du 24 août 2007, le Procureur Général de la République écrit à l’ADG de la BCB et marque son accord pour l’ouverture de ce compte auprès de la BCB :
« En réponse à votre lettre de ce matin par laquelle vous nous suggérez de loger les fonds de garantie dans un compte “Ministère de la Justice-Parquet Général de la République” à ouvrir en vos livres dès réception de l’original de l’acte de cautionnement n°13.388 pour annulation, j’ai l’honneur de porter à votre connaissance que je marque mon accord.
Je vous confirme par la même occasion de façon irrévocable que le montant ne sera exigible par le Ministère de la Justice-Parquet Général de la République que sur présentation d’un jugement coulé en force de chose jugée dans les limites de six milliards de BIF. » (Pour l’intégralité de la lettre : CLIQUEZ ICI)
6. Ce même 24 août 2007, la BCB va procéder au versement d’un montant de six milliards de francs burundais au compte n°2001-0021835-57/BIF ouvert en ses livres au nom de « Ministère de la Justice-Parquet Général de la République ». (Voir Bordereau N°252241 : CLIQUEZ ICI)
Au vu de toute cette abondante correspondance, on est en droit de s’interroger sur les raisons de la demande actuelle du Procureur Général de la République alors qu’il a lui-même confirmé « de façon irrévocable » que le montant ne sera exigible par le Ministère de la Justice-Parquet Général de la République que sur présentation d’un jugement coulé en force de chose jugée dans les limites de 6 milliards de francs burundais. C’est-à-dire que la BCB n’allait débiter ce compte, qu’à la faveur de l’exécution d’une décision de justice définitive entre le Ministère Public et la société Interpetrol. Or, l’opération que le Procureur Général de la République demande à la BCB de faire, dans sa lettre du 17 octobre 2007, est en contradiction totale avec sa lettre n°558.10/277/2007 du 24 août 2007, puisque l’affaire, qui est encore en instruction, n’est pas encore passée en jugement.
En outre, et comme par hasard, les nouvelles exigences du Procureur Général de la République interviennent au moment où les enquêtes menées par l’Inspection Générale de l’Etat tendent à écarter la responsabilité d’INTERPETROL, et donc aboutiraient automatiquement à la libération de sa caution. Quelles sont les visées réelles du Procureur Général de la République et pour qui agit-il en réalité ?
Un manipulateur de l'ombre tire les ficelles
Ses questions prennent tout leur sens quand on apprend que ce même 17 octobre 2007, au moment où le Procureur Général de la République exige, contre toute logique judiciaire, la caution mis en dépôt par INTERPETROL à la BCB, l’affaire a pris une nouvelle tournure, plus politique celle-ci.
En effet, ce 17 octobre 2007, M. Venant KAMANA, Ministre à la Présidence chargé de la Bonne Gouvernance, de l’Inspection Général de l’Etat et de l’Administration locale, a écrit à l’Inspecteur Général de l’Etat, pour lui exprimer son « Indignation provoquée par [sa] lettre du 11/10/207 adressée à Monsieur le Procureur Général de la République du 11/10/207 ».
Dans sa lettre, le Ministre KAMANA écrit :
« C’est avec surprise et indignation que nous venons de lire en copie votre précitée.
En effet, la correspondance que vous venez de produire provoque des blocages liés à la contradiction que l’Inspection vient de connaître et au blocage de l’initiative heureuse que le Ministère de la justice était en train d’initier.
La contradiction consiste à réfuter le caractère pénal des différents paiements indus liés au différentiel de change pour une même période en privilégiant un panel d’arbitrage.
Nous espérons que le Procureur Général qui nous lit en copie ne serait pas distrait par cette tergiversation de l’Inspecteur Général de l’Etat.
Le pénal tenant le civil en état, nous aimerions d’abord que le dossier du différentiel de change soit tranché et que l’étude des dettes croisées puisse suivre après. » (Pour l’intégralité de la lettre : CLIQUEZ ICI)
Cette lettre du Ministre ayant l’Inspection Générale de l’Etat dans ses attributions soulève plusieurs questions, aussi bien dans la forme que dans le fond.
En effet, aura-t-il fallu 6 jours (du 11/10/207, date de la lettre de l’Inspecteur de l’Etat au Procureur Général de la République, au 17 octobre 2007, date de la lettre d’« indignation » du Ministre à l’Inspecteur Général de l’Etat) pour que le Ministre KAMANA se rende compte de la « bourde », si bourde il y a eu, commise par un service sous son autorité, dans un dossier aussi sensible que l’« Affaire Interpetrol » ?
Pour le fond, s’il s’avère réellement, comme le suggèrent les nouvelles conclusions de l’Inspection Générale de l’Etat, que les paiements faits à la société Interpetrol n’avaient rien d’illicite, le dossier serait vidé de toute sa substance aussi bien au pénal qu’au civil. Alors pourquoi le Ministre tient à tout prix à désapprouver et à démolir les conclusions de l’Inspection Générale de l’Etat ?
Faut-il comprendre que ce service échapperait à son autorité et serait sous les ordres directs de quelqu’un d’autre ? Car il est surprenant de voir un Ministre envoyer une lettre d’« indignation » à son subordonné, en lieu et place de lui infliger des sanctions, si faute il y a eu. La lettre du Ministre KAMANA ressemble, à certains égards, à une couverture au cas où les choses ne tourneraient pas comme prévu.
Il est aussi intéressant de noter la simultanéité, le même jour du 17 octobre 2007, des réactions du Ministre chargé de l’Inspection Général de l’Etat et du Procureur Général de la République, comme s’il y avait eu concertation entre eux.
Mais qui tirent les ficelles dans cet imbroglio politico-judiciaire ? Selon plusieurs informations qui se recoupent, toutes ces magouilles visant les six milliards de francs de caution mis en dépôt par INTERPETROL à la BCB, sont téléguidées depuis les plus hauts sommets de l’Etat, aujourd’hui empêtrés dans des dossiers de malversation sans précédent et dans l’incapacité totale d’honorer leurs promesses et obligations financières.
Depuis des mois d’investigations sur « Les dessous de l’Affaire Interpetrol », toutes les indices convergent vers un homme : Monsieur le 2è Vice-président NTISEZERANA, dont les agissements dans ce dossier sont plus que troublants.
NTISEZERANA : Mission accomplie ?
Comme déjà relevé plus haut, l’Etat prétend vouloir agir ainsi « suivant les vœux de la Banque Mondiale et du Fond monétaire International » alors que les informations qui nous arrivent de Washington disent le contraire.
Pour distraire l’opinion (qu’il croit dupe) qui attend la réalisation des précédentes promesses toujours non tenues, le 2è Vice-président NTISEZERANA vient ainsi de dénicher une nouvelle trouvaille : faire croire que le FMI exige qu’Interpetrol verse préalablement, à on ne sait qui, 6 milliards sur le compte de l’Etat à la BRB. Il essaie d’induire en erreur encore une fois les autorités sur ce dossier.
Pour le 2è Vice-président NTISEZERANA, tous les moyens de se dépanner sont bons car, selon des sources concordantes, il tente même de manipuler en vain quelques agents du FMI en leur promettant (“ubuki ategeka”) quelque intervention pour leur promotion personnelle ou quelque voie de sortie personnelle dans ce dossier marécageux.
En effet, la position de Washington sur ce dossier est claire : que la Justice burundaise fasse son travail et que les choses soient clarifiées par cette voie, nous ont confié des fonctionnaires du FMI. Pour eux, si la Justice constate qu’il y a eu malversation économique, qu’elle applique la loi, sinon, qu’elle innocente qui de droit. Comment alors pourraient-ils demander qu’Interpetrol verse à l’Etat quoi que ce soit alors que le dossier n’est pas encore traité au niveau de la Justice, s’interrogent-ils ? Demander une telle chose serait faire le jugement en lieu et place de la Justice burundaise, ce qui serait, selon eux, contraire aux principes du FMI qui ne peut pas se substituer à la Justice nationale. Les représentants de la Banque Mondiale qui sont venus au Burundi ont dit et écrit la même chose.
Personne n’ignore que la Banque Mondiale (BM) et le Fonds Monétaire International (FMI) sont des institutions soeurs, la preuve en est que les assemblées annuelles qui sont entrain de se dérouler à Washington ont lieu en même temps et au même endroit. Le FMI a en charge, entre autres, le suivi et le maintien de l’équilibre économique du monde. Au Burundi, il nous aide à mettre en oeuvre un programme de réformes économiques, non pas à se substituer à la Justice burundaise.
Pendant ce temps, selon des sources concordantes, la Ministre des Finances du Burundi est humiliée à Washington, où les autorités de la BM et du FMI sont fermes sur leurs conditionnalités avant le décaissement de l’appui budgétaire de 25 millions de dollars américains :
1. Dossier Falcon 50 : ils attendent les actions qui suivront les résultats de l’enquête parlementaire ;
2. Paralysie des institutions : ils attendent la reprise effective du fonctionnement des institutions.
3. Financement du budget 2007, si révisé, pour y insérer l’augmentation des 34% des salaires et des autres dépenses : ils veulent qu’elle leur démontre chiffres à l’appui où se trouvent les sources de financement.
Voilà les principaux dossiers sur lesquels les institutions de Bretton-Wood veulent des explications convaincantes de la bouche de la Ministre des Finances du Burundi. A-t-elle de véritables arguments ? Selon des sources proche du dossier, ils n’ont, jusqu’ici, pas été satisfaisants auprès de ses interlocuteurs.
Pour beaucoup d’observateurs, le 2è Vice-président NTISEZERANA est entrain d’essayer de détourner l’attention de l’opinion et de son chef pour qu’ils ne se souviennent pas de ses précédents mensonges. Il y a quelques temps, il a pris la décision d’augmenter les prix des produits de première consommation, ce qui a fait flamber l’inflation au Burundi et a accentué davantage la pauvreté du citoyen lambda.
A ce moment, le 2è Vice-président NTISEZERANA avait dit aux Burundais que c’était la volonté du FMI, malgré que celui-ci continuait à dire que cette décision était de la seule responsabilité du Gouvernement. Maintenant, après l’augmentation des prix, où sont les dividendes promises en faveur du petit peuple ? A l’époque, nous vous avions dit que ces décisions ne visaient que l’intérêt personnel du 2è Vice-président NTISEZERANA. Certains nous avaient rabattu les oreilles que la fameuse augmentation des salaires de 34%, promise depuis le mois de mai, allait avoir lieu en septembre 2007. Nous sommes en octobre et rien n’a toujours été fait dans ce sens !
Les faits nous donnent actuellement raison : même si ces 34% d’augmentation des salaires étaient octroyés aujourd’hui, ils ont déjà été largement bouffés par ces hausses des prix. Il faut que le 2è Vice-président NTISEZERANA explique aux Burundais les vraies mobiles de ses décisions, qui n’ont eu pour effet que de les appauvrir encore plus.
En effet, depuis le mois de juillet 2007, le 2è Vice-président NTISEZERANA a personnellement pris en charge toutes les questions relatives aux volets économique et social. Le plus souvent il se substitue aux ministres ou alors ceux-ci reçoivent des injonctions qu’ils doivent exécuter aveuglément, même s’ils sont ridiculisés (ministres du Commerce, des Finances, des Travaux publics....), pourvu que les intérêts personnels du 2è Vice-président NTISEZERANA soient sauvegardés. L’intérêt national constitue le dernier de ses soucis.
Dans le domaine économique, le 2è Vice-président NTISEZERANA a eu le talent de ruiner le pays en trois mois :
- les bailleurs de fonds, qui venaient de démontrer leur confiance au pays lors de la table ronde, en plus des autres multiples conventions et accords, lui ont tourné le dos ;
- en trois mois, il a doublé le taux d’inflation, il a chambardé et déstabilisé le secteur bancaire, il a réduit de moitié le pouvoir d’achat du Burundais, c’est à dire que celui-ci a été appauvri deux fois; tout cela pour son intérêt personnel.
Dans le domaine social, le 2è Vice-président NTISEZERANA a été capable de réunir toutes les conditions pour déclencher un mouvement social tous azimuts : grèves à répétition dans tous les secteurs, mais cette ébullition ne l’empêche pas de se concentrer essentiellement sur ses affaires personnelles, comme nous l’avons décrié depuis le mois de juin. Pendant ce temps, le Chef de l'Etat, Pierre NKURUNZIZA, est inscrit aux abonnés absents.
Dans nos prochaines livraisons nous reviendrons sur les visées réelles de M. NTISEZERANA et les raisons de son acharnement contre Interpetrol et la BCB, ainsi que les forces de l'ombre qui le soutiennent. Car après avoir obtenu la mise à l’écart de Prime NYAMOYA de cette banque, le 2è Vice-président NTISEZERANA semble avoir reçu une nouvelle mission : couler la BCB ! Ce qui expliquerait pourquoi il veut détourner les six milliards de leur fonction première de cautionnement, vers on ne sait quelle destination. Et tout cela, au profit de qui ?
Nos investigations continuent car nos sources ne sont pas encore taries (« Amariba ntarakama ! », dixit Domitille KIRAMVU). Dossier à suivre