Les dessous de l’augmentation des salaires des fonctionnaires…

 Par The Leadership Institute

Les fonctionnaires burundais sont pauvres au vrai sens du mot, car leur salaire nominal n’a pas changé alors que les termes de change se détérioraient chaque jour depuis des années. Tout le monde s’accorde dessus et il faut au moins accorder son mérite au Président de la République qui a déjà accordé deux augmentations de salaire depuis 2005.

 

Cependant, nous ne partageons pas son approche pour les raisons suivantes :

 

1.      La Fonction Publique doit être assainie pour déterminer avec exactitude non seulement le nombre de fonctionnaires que compte l’Etat, mais aussi pour un audit organisationnel afin d’élaborer une liste de fonctions indispensables pour le fonctionnement de l’Etat, ministère par ministère. Les clientélismes qui ont caractérisé les régimes antérieurs ont produit des emplois inutiles qui augmentent inutilement la masse salariale et il faut un plan et des moyens financiers pour désengorger l’Etat. Ces mesures sont souvent socialement mal perçues mais indispensables pour des finances publiques saines : IL FAUT REDUIRE LE NOMBRE DE FONCTIONNAIRES BURUNDAIS POUR NE GARDER QUE LES EMPLOIS REELLEMENT UTILES. C’est une pilule amère mais qu’il faut avaler tout de même. Le recensement des fonctionnaires en cours, s’il englobe aussi les corps de police et de l’armée servira sûrement à cet assainissement, dans un premier temps.

 

2.      C’est seulement à ce stade que toute augmentation de salaire substantielle peut être envisagée avec l’appui des bailleurs de fonds. Une requête formelle devrait être produite par le gouvernement pour une aide substantielle dans le sens du paiement des salaires des fonctionnaires burundais pendant au moins les trois premières années, en attendant que l’Etat s’organise pour accroître son assiette fiscale et devienne plus autonome dans cet exercice de payer ses fonctionnaires. Notons qu’il est aberrant de parler aujourd’hui de lutte contre la corruption quand on connaît le niveau de revenus de nos fonctionnaires, encore moins de parler de productivité du fonctionnaire burundais. Les salaires des fonctionnaires burundais seraient élaborés par l’Etat et les bailleurs de fonds avec l’implication des représentants des syndicats. Nous pensons que, malgré la bonne volonté du Chef de l’Etat dans ce sens, même 34% ne suffisent pas car ils s’appliquent à des chiffres nominalement trop bas et qui ne correspondent pas du tout au coût de la vie au Burundi. IL FAUT CHERCHER DES SOLUTIONS A LONG TERME AYANT UN IMPACT SUBSTANTIEL SUR LA VIE DE NOS FONCTIONNAIRES DONT LA PRODUCTIVITE EST ATTENDUE DES MILLIONS DE BURUNDAIS EN QUETE DES VOIES ET MOYENS DE SORTIE DU CERCLE VICIEUX DE LA PAUVRETE.

 

A cette question des fonctionnaires, il faut revoir celle de la rémunération pour les hauts cadres politiques. Disons-le, sans faux-fuyant, il est ridicule de payer un Ministre l’équivalent de près de 350 dollars américains, moins que ce qu’est payé un chauffeur du système des Nations Unies. Nous appelons cela l’hypocrisie de l’Etat burundais. Avec cette somme, on espère que ces hommes ou ces femmes vont mener une vie sociale qui correspond à leur rang sans recourir à d’autres moyens ? Bonjour la corruption, surtout que ces mêmes personnes gèrent des ressources énormes et ont un pouvoir énorme sur le partage du gâteau national. Il suffit de regarder avec quelle vitesse le budget des missions à l’étranger est dépensé pour comprendre qu’il existe d’autres moyens de se faire rémunérer par l’Etat. Il faut accorder un salaire décent aux Ministres. Parallèlement, il faut instaurer une politique de rigueur dans la gestion du charroi de l’Etat et des autres avantages accordés à ces  dignitaires (frais de mission, frais de téléphone, frais de carburant etc.…). Il faut raisonnablement bien payer les grands commis de l’Etat pour plus de responsabilité de leur part. A long terme, l’Etat et le peuple se retrouveront gagnants. Une meilleure gestion des ressources de l’Etat va permettre d’allouer ces ressources vers d’autres rubriques plus bénéfiques à la population. A titre d’exemple, si nos hauts commis de l’Etat sont bien payés, l’Etat peut instaurer une politique de vente du charroi de l’Etat en accordant des crédits véhicules à ces personnalités, qui auront les moyens de rembourser. Cette politique peut être élargie aux autres fonctionnaires, ce qui permettra de réduire sensiblement les frais liés au charroi, les frais d’acquisition de véhicules de l’Etat, les frais de mission inutiles à l’étranger etc.…

 

Toute la structure budgétaire de l’Etat doit être revue pour dégager des stratégies plus rationnelles et plus rentables pour le Burundi à long terme. En effet, des efforts substantiels avaient été entrepris pour accroître l’assiette fiscale de manière durable avec l’encouragement de certains opérateurs économiques pour passer du secteur informel vers le formel, donc en devenant des contribuables au vrai sens du mot. Nous rappelons, à cet effet, les efforts de l’ancien Ministre des Finances, Dieudonné NGOWEMBONA, qui a été le premier Ministre des Finances à avoir accordé une réelle importance à cette question d’élargissement de l’assiette fiscale. Une partie non négligeable d’opérateurs informels peut contribuer largement à la disparition du circuit de la corruption si des mécanismes appropriés sont mis en place. En facilitant le circuit d’importation et en fixant les références des prix à l’importation, le Ministère des Finances, devait, avec la collaboration des services de la SGS, assainir le circuit d’importation pour plus de recettes et de transparence.

 

Enfin, la décision d’accroître les taxes diverses pour pallier au déficit budgétaire important pour 2008, lui-même occasionné par l’impératif d’augmentation des salaires, cache un revers important : l’aggravation de l’inflation dans une économie déjà touchée par la hausse des produits pétroliers.

 

Quant à la mesure d’augmentation des taxes sur les produits comme la cigarette et les boissons alcoolisées importées, il faut la saluer mais reconnaître qu’elle ne sera effective que si l’Etat introduit l’usage des vignettes fiscales sur les cigarettes (locales et importées) ainsi que les boissons alcoolisées importées.

 

L’usage des vignettes fiscales permettra d’augmenter réellement les recettes sur ces produits en supprimant totalement la vente sur le marché des produits de contrebande. Tous les autres pays de la sous région ont introduit ce système. Au Rwanda voisin, la cigarette rapporte au trésor rwandais le double de ce qu’elle rapporte au fisc burundais pour des niveaux de taxation et des volumes de consommation presque identiques.

 

C’est dire que le Trésor public burundais perd énormément avec la contrebande y compris par le fabricant local de cigarettes, qu’est la Burundi Tobacco Company (BTC). Nous soupçonnons même ces opérateurs nationaux d’animer des lobbies au niveau du Ministère des Finances pour freiner l’introduction de l’usage des vignettes fiscales. Dans le monde entier, l’alcool et la cigarette sont les produits dont la fraude est la plus pratiquée et l’introduction des vignettes fiscales, même en Europe, est apparue comme la solution pour contrer cette fraude. Les fonctionnaires du Ministère des Finances le savent pertinemment et nous posons la question : pourquoi le Burundi n’a pas encore introduit l’usage des vignettes fiscales ? Il y a anguille sous roche, et à moins que cette question ne soit mise à jour par le FMI, nous ne voyons pas les choses changer car ces vignettes fiscales viendraient compromettre les intérêts de certains opérateurs qui sont prêts à tout, y compris la corruption, pour que la situation reste inchangée et continuent à sucer le Trésor burundais de milliards de francs burundais.  

 

L’objectif à long terme est d’accroître les recettes de l’Etat par une politique de reconstruction nationale et de création de richesses afin d’atténuer la dépendance de l’Etat vis-à-vis des bailleurs de fonds, en ce qui concerne le budget ordinaire de l’Etat tout au moins.

 

Des mesures importantes doivent être prises dans un cadre stratégique impliquant toutes les compétences internes et externes. L’Etat doit mettre tout son poids derrière les projets liés aux réformes économiques, comme le projet PAGE ou d’autres, pour des résultats pratiques et applicables sur les questions stratégiques suivantes :

 

 

 

-          la réforme visant à créer l’Office Burundais des Recettes

-          la réforme du secteur de passation des marchés, par l’introduction de l’Office des Marchés Publics

-          les réformes de la Fonction Publique

-          le cadre stratégique de développement et de promotion du secteur privé

-          l’amélioration du climat des affaires et la promotion des investissements

-          la réhabilitation des infrastructures économiques

-          la privatisation des entreprises publiques

-          la diversification de l’économie burundaise par la promotion d’autres créneaux de compétitivité pour accroître nos recettes d’exportation.

-          l’élaboration d’un plan stratégique impliquant tous les aspects transversaux du développement économique (éducation, recherche, accès au crédit, intégration régionale etc.).

-          la réforme des secteurs caféicoles et théicoles.

 

Comme vous le voyez, tout ce chantier demande un leadership engagé pour le donner le cap et faire avancer la Nation dans cette voie. Au Burundi, la Constitution accorde des pouvoirs énormes au Président de la République qui est, en fait, le véritable animateur de l’action gouvernementale. Mais la réalité du Burundi actuel est toute autre. Le Président NKURUNZIZA semble briller par son absence de la scène politique et économique si ce n’est pour promettre des miracles absurdes à un peuple désespéré, ignorant les vrais défis de la reconstruction économique. Ainsi, il promet des stades, des aéroports internationaux, un nouveau palais présidentiel et distribue des sommes d’argent à qui il veut, sa façon à lui de s’attaquer à la pauvreté, sans oublier les milliers d’arbres fruitiers. Tel est le style NKURUNZIZA.

 

Mais pouvait-on attendre quelque chose du Président NKURUNZIZA ? Un homme, un supposé leader politique qui répète à tout bout de champ qu’il n’avait jamais pensé devenir Président de la République, est un homme qui n’a jamais eu une vision de leadership de ce pays. GATERETSE-NGOGA Frédéric disait, le leadership doit s’arracher ou se mériter, mais pour le cas de NKURUNZIZA, le leadership lui a été parachuté et n’attendons pas de lui qu’il soit un LEADER. Dommage pour le Burundi et les burundais qui devront encore attendre des années (démocratie oblige) pour prétendre à un quelconque changement de son quotidien.

 

A ce titre, nous osons espérer que cette fois-ci, le Président NKURUNZIZA n’aura pas le culot de se présenter aux élections en 2010 et demander aux burundais de le mettre sur le fauteuil présidentiel car même pour le premier mandat, ce n’est pas, d’après lui, le peuple ou son parti qui l’ont mis comme Président : C’est Dieu seul qui l’a mis sur le fauteuil présidentiel mais qui, malheureusement, ne lui a pas dit quoi en faire, c’est-à-dire comment TRAVAILLER ET DEVENIR UN VERITABLE LEADER.