LE POUVOIR DU PRESIDENT NDAYIZEYE VIRE VERS LA DICTATURE

 

Par Gratien Rukindikiza

 Burundi news, le 17 juin 2005

L’Afrique n’a pas de chance. Avant la conférence de La Baule en France sur la démocratisation de l’Afrique, les africains étaient dirigés par des dictateurs militaires ou militaro-civils. Le vent de l’Est ne pouvait pas épargner l’Afrique. Le Président Mitterrand était catégorique, démocratiser ou subir les sanctions de l’occident. Il y a eu des élections dans plusieurs pays. Certains dictateurs ont pu se reconvertir en faux démocrates. L’arrivée au pouvoir des anciens opposants a sonné comme une révolution. Les africains ont crié victoire et  ont cru que la démocratie allait s’installer dans leurs pays.

Les nouveaux Présidents issus de l’opposition  n’ont pas tardé à endosser les habits des nouveaux dictateurs. Au Burundi, l’arrivée au pouvoir du Président Ndadaye a suscité un changement chez les burundais. Il n’ a pas eu le temps de mettre en pratique sa doctrine démocratique. Le coup d’Etat du 21 octobre 1993 a mis fin à la jeune démocratie. Tous les pouvoirs qui ont suivi celui de Ndadaye ont été dictatoriaux. Le Président Ntibantunganya a, paradoxalement, subi la dictature de la part de l’armée qui dirigeait en réalité le pays. Il a dirigé le Burundi avec une peur de l’armée qui nourrissait les ambitions de reprendre le pouvoir. Le retour de Buyoya a été interprétée comme une punition au peuple burundais. Buyoya a dirigé d’une main de fer en appliquant les méthodes de Mobutu. La documentation emprisonnait les opposants ou ceux qui ne voulaient pas servir le pouvoir. Cette même « police présidentielle » se chargeait même d’éliminer physiquement certaines personnalités gênantes. Il y a lieu de citer les assassinats de plusieurs officiers, du Dr Kassy Manlan, représentant de l’OMS, etc…

Le Frodebu a repris le pouvoir au cours d’une passation de pouvoir entre Buyoya et Ndayizeye. Le Président Ndayizeye a eu la chance pour accéder à ce poste. Il a été malin pour faire croire à Minani qu’il sera son homme et  à Buyoya qu’il continuera à défendre ses intérêts. Les liens entre Ndayizeye et Buyoya datent de longtemps. Depuis l’exil de Minani, Buyoya s’est intéressé à Ndayizeye et ce dernier a été invité plusieurs fois à la Présidence dans le bureau de Buyoya avant même qu’il ne soit vice-Président. D’après un conseiller de Buyoya au moment de la Présidence de Buyoya, Ndayizeye a rendu des services à Buyoya moyennant des sonnantes et trébuchantes en liquides. Les relations entre les deux hommes ont été au point mort quand Buyoya a appris que c’était Ndayizeye qui renseignait burundi bureau, le site installé à ce moment en Allemagne. C’est à partir de ce moment que les ennuis ont commencé jusqu’en prison. Comme Buyoya maniait le bâton et la carotte, Ndayizeye est devenu l’homme fréquentable par Buyoya. Il l’a facilement accepté à la vice-Présidence et Minani ne voulait pas tomber dans le piège  de la transition qui bloque les deux Présidents qui ont dirigé la transition.

Ndayizeye est devenu Président. Il a d’abord gardé la machine de Buyoya notamment les conseillers militaires. L’homme qui devait diriger la deuxième tranche de la transition a été attiré plus par les défauts du pouvoir que les qualités. Qu’est-ce qu’il a fait pour le peuple burundais ? Certains diraient la paix. Je crois que non car les militaires et les FDD avaient déjà signé la paix officieusement une année avant. Les chefs politiques ont entériné un accord déjà appliqué sur le terrain. Je me rappelle des propos de ce chef du CNDD-FDD à qui je demandais pourquoi ils ont accepté cet accord. Il m’a répondu que sur le terrain, l’accord était déjà appliqué sur le terrain et qu’il ne valait pas la peine de ne pas signer.

Quant à l’amélioration du niveau de vie des burundais, je crois sincèrement que le « burundais » a amélioré sensiblement son niveau de vie. Il s’est enrichi, il a construit des immeubles, déposé de l’argent au Luxembourg au moment où nous cotisions pour sauver nos frères et sœurs de Kirundo et de Muyinga menacés par la famine. Ce « burundais » est bien sûr le Président Ndayizeye.

Quand le choléra a frappé le Burundi sous la présidence de Bagaza, des fonds ont été versés par l’OMS ( Ces fonds sont maudits, ils ont emporté la vie du Dr Manlan !!). Les connaisseurs ont expliqué qu’au Burundi, une seule personne avait attrapé le choléra (Je demande pardon à ceux qui ont perdu les leurs à cause de ce fléau). Ainsi, la personne a utilisé  les fonds de l’OMS. Le ministre de la santé, militaire, a détourné  tout seul l’argent et donc il était considéré comme le seul à avoir attrapé le choléra.

L’histoire rattrape le Burundi. Buyoya et sa femme ont été les seuls à attraper la malaria qui a décimé le Burundi. Voilà de nouveau, le Burundi est menacé par un fléau de la pauvreté. Une seule personne se soigne de cette pauvreté. Non seulement, il se soigne seul mais aussi il emprisonne toute personne qui dit qu’il est malade.

Notre Président Ndayizeye a remis les habits de dictateur. Le journaliste Ndikuriyo a été emprisonné sur l’ordre de Ndayizeye pour avoir dit qu’il est déprimé en raison de la défaite du Frodebu. Les conseillers du Président ont oublié de dire à notre ami Ndikuriyo qu’il a été se faire soigner en Belgique. Il aurait complété son article avec le motif de la visite privé au Luxembourg. Il aurait aussi mis dans son article les négociations secrètes avec Buyoya. Qu’est ce qu’ils racontent beaucoup ces conseillers du Président ou même le Président lui-même, plutôt son entourage !

Le citoyen Ndayizeye, car il est avant tout citoyen devant la loi, ne connaît pas la procédure judiciaire. Quand un journaliste fait une diffamation, la personne concernée porte plainte ou demande à publier un démenti. Je demande alors l’autorisation pour tous les burundais de pouvoir mettre à la documentation tout journaliste qui  dit le contraire de ce que chacun peut penser. Il n’ y aura plus de journaliste au Burundi et il faudra ouvrir des goulags dans tout le pays. Le citoyen Ndayizeye est devenu Président sans le consentement de ceux qu’il dirige. Il n’a pas été élu. Il n’a aucun mandat du peuple burundais. Il devrait alors utiliser son pouvoir avec modération. S’il considère la documentation nationale comme sa police personnelle, il peut la payer de sa poche et non des impôts des burundais.

Il ne faut pas s’appeler Mobutu ou Général, colonel ou major pour être dictateur. Le Frodebu, je crois savoir qu’il signifie le Front pour la démocratie au Burundi, devrait se battre contre la dictature du Président Ndayizeye. A défaut, ce parti risque de connaître encore une fois une sanction populaire par les urnes. L’emprisonnement de ce journaliste est un pas important et non des moindres dans la consolidation de la dictature du Président Ndayizeye. Le Frodebu est aussi responsable de ce manquement. Minani doit savoir qu’il s’écarte de plus en plus du pouvoir chaque fois que les membres de son parti abuse du pouvoir.

Si le journaliste Ndikuriyo reste emprisonné, le Président court le risque de voir des publications qui le gênent sur les sites burundais domiciliés à l’étranger. Je suis convaincu qu’il n’en sortira pas vainqueur. Ce ne sont pas les informations qui manquent. Lorsque la guerre est déclarée aux médias, les journalistes disposent de l’arme de la plume et du micro. Toutes les dictatures ont échoué. Ce n’est pas celle du Président Ndayizeye qui va réussir. Un dictateur peut se tromper. Il a le droit de se corriger. Si les burundais ferment les yeux sur les détournements des fonds à un niveau élevé, ceux qui sont épargnés doivent en tenir compte.

La dictature est par définition l’ennemi du peuple. Il appartient au peuple burundais de sanctionner cette dictature par une sanction contre le Frodebu. L’ennemi du peuple ne peut pas diriger un peuple. Ce dernier a compris et je le félicite.

Nous sommes tous des Ndikuriyo. Si le pouvoir veut faire un procès aux médias, il n’a qu’ à nous assigner en justice. Un procès contre Ndikuriyo seul est un faux procès. Ndikuriyo paie en réalité le travail des journalistes qui ont empêché le Frodebu de frauder. Au lieu de remercier le travail de la presse, la dictature donne une leçon à la presse. Le Président Ndayizeye a confirmé ce que Ndikuriyo a écrit. La réaction du Président est en réalité normal pour un dictateur déprimé. En réalité, Ndikuriyo a gagné. Le  Burundi ne peut pas se permettre d’être dirigé par un dictateur. Si le dictateur est déprimé, bonjour les dégâts !