Québec city,
Pierre Claver Niyonkuru
Ce que nos dirigeants n’ont pas compris.
Je ne suis pas trop vieux pour donner des leçons de morale, ni trop sage pour être un bon conseiller dans le domaine moral, mais je crois être assez outillé pour pouvoir faire des constations, peut être très minimes, qui peuvent tout de même contribuer aux débats entre Burundais.
En effet, le Burundi est un pays qui a eu la malchance de ne jamais avoir des dirigeants qui pensent à bâtir un bon avenir pour ses filles et fils.
Je suis de ceux qui croient que le politique a pour, entre autres, rôle fondamental d'organiser le vivre-ensemble collectif. Un vivre ensemble ou différentes catégories sociales acceptent de partager le destin, de faire l’histoire ensemble. Pour y arriver, il faut réunir tous les éléments nécessaires. Ce n'est pas un travail facile mais une mission possible si toutes le forces de la République sont mises ensemble. Malheureusement, les dirigeants burundais, les uns après les autres, ont su écarter les autres. Tenez!
Micombero, obsédé par l’idée de la supériorité des Himas par rapport aux autres Burundais, après son coup d’État contre la monarchie, il a voulu écarter des affaires, non seulement la famille monarchique, mais il a également voulu exterminer les Hutus en commençant par les plus instruits.
Bagaza avait un autre système : se rassurer que les non-hima sont maintenus dans une position de faiblesse. C'est ainsi qu'aux gens de Rumonge, il recommandait de pêcher et d'exploiter au maximum le lac Tanganyika, à ceux du Nord, de cultiver la café et à ceux de Rutovu, d'étudier et de s'enrôler dans l'armée pour défendre la «patrie» le moment venu. En fait, il tenait à ce que l’activité économique continue tout en veillant à ce que le pouvoir reste dans les mains des siens.
Le major président, peut être après une longue observation, est arrivé avec sa nouvelle formule d'unité nationale. Buyoya 1 nous parlera d'unité nationale tout au long de son règne et nous n'avons eu, ni la continuité des projets de développement entamés par Bagaza, ni l'unité nationale qu'il n'arrêtait pourtant pas de nous chanter. On se rappellera que Buyoya 2 est venu pour piller le pays tout en nous faisant croire qu'il venait finir la guerre, guerre qu'il n'a jamais finie. Il est intéressant de remarquer que notre cher major président venait toujours, du moins selon ses déclarations, comme un envoyé, un sauveur de la Nation.
En 2005, quand le CNDD-FDD est arrivé aux affaires, beaucoup de Burundais ont pensé que des problèmes comme la corruption, l'injustice, la pauvreté allaient trouver de solution. L'une des raisons de cet espoir étant que, ces anciens rebelles ayant vécu avec la population pendant dix ans, ils étaient mieux placés pour savoir la misère de la population et en trouver des solutions. Malheureusement, ils n'ont pas tardé à nous décevoir, nous avons vite remarqué que seuls les acteurs venaient de changer, mais pas les scènes! La corruption, le favoritisme, l'injustice, la violation des droits de l'Homme, la promotion de l'incompétence et d’autres maux allaient atteindre leur plus haut niveau.
Ils ont mis en application la logique selon laquelle, quand l'esclave arrive à occuper la place du maître, il fait exactement ce que celui-ci faisait. Quelle est la différence entre les autres régimes que nous avons tant combattus et celui que nous subissons actuellement? Rien, sauf que sous Bagaza, le Burundais, du moins ceux dont la politique n'était pas une préoccupation, pouvait manger.
Jean Charles Nkangani, à travers ses articles et Willy Nyamitwe, à travers son journal Intumwa, n’arrêtent pas de nous chanter les gloires du régime CNDD-FDD, ils se disent peut être que les Burundais sont dupes. Qu’ils aillent demander à l’UPRONA et au FRODEBU! Dans trois ans, si rien de concret n'est fait, le verdict populaire va tomber et vous serez dans l'opposition comme Pancrace Cimpaye, Léonce Ngendakumana et d'autres. De toute façon, pensez d’abord à vous réconcilier avant de parler d'un autre mandat.
Je pense qu'il est décevant de voir une personne comme monsieur Nkanganyi, après toutes les années qu’il a savouré la démocratie canadienne, défendre un régime qui monte des coups d’Etat de toutes pièces dans le but de torturer des paisibles citoyens!
Qu’est ce que nos dirigeants n’ont donc pas compris? Qu’est ce qui fait que les Burundais se battent constamment? Qu'est ce qui fait que nous ne sachions pas vivre une paix collective? C'est simple, nous avons faim ! A mon avis, un dirigeant qui veut rester longtemps au pouvoir, qui veut en finir avec les guerres burundo-burundaises, devra remédier la famine.
En effet, dans ce pays de Nyaburunga, seuls ceux qui font la politique peuvent aspirer à un avenir meilleur parce que justement les politiciens gèrent et ainsi ils peuvent voler et s'enrichir facilement.
Si dans les pays développés, un fonctionnaire qui gagne 50 000 $ par an doit faire 30 ans de service pour finir de payer une maison de 200 000$, au Burundi, un politicien qui a un salaire de 400$ par mois, paye plusieurs maisons dans 1 an! Voilà pourquoi tout le monde veut faire la politique et surtout être membre influent du parti au pouvoir.
Prions et travaillons, travaillons et prions
«Dusenga dukora, dukora dusenga», nous disait Peter Nkurunziza lors de son investiture en tant que nouveau président de la République du Burundi. Il a raison notre cher président, le Burundi a besoin des gens qui travaillent pour en finir avec cette misère qui fait rage. Le problème est que le président lui même est entouré des menteurs, des voleurs, des fainéants, des incompétents, qui veulent s’enrichir vite sans travailler. Voilà ! «Mister» Nkurunziza devra faire un bon ménage dans son entourage et y placer des travailleurs pour développer ce pays.
Quant à la prière, je proposerais qu’elle soit strictement privée. Les Burundais payent très cher pour mettre leur président dans le confort, s’il veut prier, c’est son droit, mais qu’il attende la fin des heures de bureau pour prier chez lui. A mon avis, faire une prière avant toute rencontre où participe le président, c’est ne pas respecter le caractère laïc de la République du Burundi.
Notre président est obsédé par l’idée de se passer pour un président différent des autres parce qu’il prie. Personnellement, j’ai de la peine à le croire ! Comment le croire alors qu’il a déjà juré au nom de Dieu qu’il était en possession des preuves crédibles montrant que Ndayizeye et ses coaccusés avaient préparé un coup d’Etat contre le régime CNDD-FDD, l’histoire n’a pas tardé à montrer que Nkurunziza et son Administration avaient menti. Dernièrement, dans une réunion avec les dirigeants de son parti, Nkurunziza a encore une fois juré au nom de Dieu qu’il ne connaissait rien de l’affaire Falcon 50. N’est ce pas difficile à croire qu’un chef de l’Etat a laissé son avion se vendre sans qu’il en sache quelque chose ?
Invitation
Je voudrais, avant de terminer, inviter tous les Burundais d’apprendre à considérer tous les politiciens comme des menteurs, parce que c’est ça la triste réalité du monde politique. Malheureusement, on ne peut pas se passer d’eux, car des décisions doivent être prises mais ne perdons pas beaucoup de temps en les écoutant. Travaillons dure pour améliorer nos conditions et préparons un bon avenir pour nos enfants.
En tout cas, si l’histoire nous apprend quelque chose, c’est que l’avenir de justice, de paix et de liberté au Burundi ne dépendra pas de la bonne volonté des dirigeants, mais du peuple burundais. Ainsi, l’avenir de la démocratie burundaise repose-t-il sur le peuple burundais, Hutus, Tutsis et Twa, et sur l’émergence de la prise de conscience de ce qu’il faut faire pour créer un Burundi réellement nouveau. Seul un travail dur anoblira les Burundais !