LE DUEL NKURUNZIZA -RADJABU
Par The Leadership Institute
Burundi news, le 16/05/2008
Beaucoup de gens se demandent réellement ce qui s’est passé dans un mouvement rebelle, devenu parti politique comme le CNDD FDD, pour subir une telle descente aux enfers en trois ans au pouvoir. Pour comprendre cela, Burundi News a procédé à une enquête approfondie sur les faits et a décidé de vous les révéler.
Il est clair que le CNDD FDD, mouvement rebelle, a été marqué par le leadership d’Hussein RADJABU. Pour le comprendre, il suffit de voir les éloges proférés par les uns et les autres, burundais et étrangers, sur cet homme et sa contribution dans la rébellion et par la suite dans le processus de paix et l’avènement de la démocratie. Même NKURUNZIZA n’y échappe pas et à plusieurs reprises, il a vanté les mérites de RADJABU. A quoi est due cette unanimité ?
En de simples mots, RADJABU fut le mobilisateur, le financier et le stratège du CNDD FDD. Il a organisé le mouvement pour lui donner une acceptabilité idéologique et nationaliste. Pourvoyant aux besoins politiques, logistiques et diplomatiques de ce mouvement, il s’est fait respecter par tout le monde dans ce mouvement jalonné pourtant de trahisons et de coups bas.
Cependant, nous pouvons affirmer que certains parmi les leaders de ce mouvement, y compris NKURUNZIZA, ont toujours eu leurs propres ambitions et appétits du pouvoir, à titre personnel et non pour faire avancer un quelconque agenda ou une certaine idéologie. La transformation du mouvement en parti politique allait changer beaucoup de choses au sein du CNDD FDD. RADJABU allait jouer sa dernière carte en organisant les élections et en menant le jeune parti à la victoire. A partir de là, les choses allaient se compliquer avec le réveil des appétits et des extrémismes des uns et des autres.
En effet, au lendemain de la victoire du CNDD FDD, NKURUNZIZA allait sortir ses griffes en exigeant d’être le candidat à la présidence tout en restant président du parti. Il a fallu un bras de fer sérieux entre les deux hommes pour que NKURUNZIZA accepte de se présenter candidat président et de laisser RADJABU prendre la tête du parti. Ce fut le premier échec de NKURUNZIZA dans le duel qui allait les opposer par la suite : RADJABU allait prendre les rênes du parti et mettre en place son agenda de consolidation du parti et de l’idéologie.
NKURUNZIZA ne tarda pas à mettre en jeu son plan B : diabolisation et manipulation des médias contre Hussein RADJABU. Ce dernier, conscient que le pouvoir était dans les mains du CNDD FDD, prit l’option d’encaisser tous les coups soi-disant pour protéger le Chef de l’Etat et tout le système CNDD FDD qu’il avait contribué à mettre en place.
Selon des informations non vérifiées, un premier congrès fut prévu depuis aout 2006, reporté à décembre 2006 puis pour le 24 février 2007. Apparemment, le plan de NKURUNZIZA était préparé d’avance pour se débarrasser de RADJABU et prendre tout le pouvoir au sein du parti. Nul besoin de rappeler les circonstances dans lesquelles le Congres fut organisé. Selon toutes les analyses, NKURUNZIZA n’aurait jamais accepté un congrès dans lequel allait participer RADJABU. L’agenda de ces deux hommes n’était pas le même.
Profitant de la campagne de diabolisation menée avec le concours des medias et des services de renseignement, NKURUNZIZA allait réussir son coup et planifier son entrée à la tête du CNDD FDD avec l’invention du fameux Conseil des Sages. Echec pour RADJABU, diront certains, mais la suite allait prouver que c’est plutôt NKURUNZIZA qui venait de saborder son propre navire. Perte de la majorité parlementaire, chasse à l’homme, alignement de la plupart des bagumyabanga derrière RADJABU : tout cela inquiéta NKURUNZIZA et ses alliés. RADJABU ne s’avouait pas vaincu du tout et menaçait même de faire sombrer le CNDD FDD. En effet, son leadership était encore reconnu par la plupart des cadres du parti. Selon les estimations recueillies ici et là, seuls 36% des congressistes de NGOZI en avaient la pleine capacité légale, et la majorité était constituée de cadres nommés par décret qui devaient participer pour ne pas perdre leurs postes.
D’où la nécessité de planifier un plan C : assassinat par empoisonnement, exil ou emprisonnement de RADJABU. L’emprisonnement fut l’option choisie et la machine se mit en marche. RADJABU fut écroué à la prison de MPIMBA le 27 avril 2008. Depuis cette date, peut-on parler encore d’ECHEC pour RADJABU ? Encore une fois, NON ! De simples faits nous prouvent encore une fois que RADJABU, devenu prisonnier politique, reste gagnant dans ce duel :
- Blocage des institutions depuis le 07 février
- Perte de popularité du CNDD FDD dans tout le pays
- Dysfonctionnement de tout l’appareil de l’Etat
- Installation d’une vraie dictature au sein du parti et dans le pays
- Pas de relance de l’économie burundaise
- Recul des efforts pour ramener la démocratie
En clair, perte totale du pouvoir par le CNDD FDD : la dislocation de ce parti est progressive mais inéluctable. Parallèlement, RADJABU gagne en popularité et se refait un lifting médiatique et politique car les événements ont prouvé que dans tous les cas, il reste populaire dans les masses rurales, tout en gagnant du terrain parmi les intellectuels, et envers et contre tout, il a prouvé ses qualités de leader nationaliste et rassembleur.
Il reste en prison pour des raisons politiques et le CNDD FDD semble mal parti pour gagner en 2010. Les partis d’opposition jubilent et ne manquent pas de profiter des erreurs de NKURUNZIZA. Ce dernier semble engagé dans une aventure solitaire et dangereuse. Non content d’exercer le pouvoir de manière artificielle et dans un désordre sans précédent, il a transformé un mouvement, un parti et un système politique puissant, le CNDD FDD, en un instrument personnel du pouvoir le faisant perdre de sa majorité parlementaire et dépendant aujourd’hui du bon vouloir des petits partis d’opposition. Le parti CNDD FDD est aujourd’hui constitué de « fonctionnaires » soucieux de gagner leur pain quotidien.
NKURUNZIZA a choisi de museler l’opposition pour ne pas montrer ses faiblesses sur le plan de la popularité. Il dirige aujourd’hui le parti CNDD FDD par des menaces à l’ endroit des membres qui osent dire que les choses ne marchent pas. Le CNDD FDD d’aujourd’hui ressemble à l’Uprona, parti Etat, sans aucune assise populaire.
C’est pour cela qu’il est mal barré pour rester au pouvoir en 2010. Dommage quand on pense à tous les bagumyabanga qui se sont donnés pour la démocratie, à tous les jeunes démobilisés manipulés et tous les cadres de ce parti dont l’ambition était de changer les choses dans ce pays. Peut-on être un grand cadre de parti, un grand général dans un système faible ? Dommage car la force du CNDD FDD de 2005 promettait beaucoup d’espoir pour tous les burundais.
Mais en réalité, qui sont les hommes et femmes responsables de la décadence de ce parti ? Nous allons tenter d’y répondre prochainement.