ET SI L'ECONOMIE ETAIT LA GRANDE FAIBLESSE DE NKURUNZIZA

 Burundi news, le 25/12/2016

Par Gratien Rukindikiza

Le Burundi vit une période difficile après le fameux troisième mandat illégal de Nkurunziza en avril 2015. Depuis ce mois, beaucoup de Burundais ont été tués, d'autres blessés, en prison et d'autres en exil poussés par le pouvoir dictatorial de Nkurunziza. Plusieurs pays occidentaux ont suspendu leur aide accordée au Burundi. Ces dons représentait plus de la moitié du budget de l'Etat burundais. Le pouvoir de Nkurunziza devait s'adapter. C'est ce qu'il tente tant bien que mal.

La situation actuelle catastrophique

Un Etat est infaillible quand son peuple ne dispose plus de moyens monétaires. D'une façon ou d'une autre, un Etat finit par fouiller les poches des citoyens pour les dépouiller. La misère du peuple n'est pas le problème de plusieurs pouvoirs.

Au niveau monétaire, le Burundi a vu sa masse monétaire chuter de 197 milliards de devises compensée par une hausse des dettes publiques de 228 milliards de francs bu dont 139 milliards en bons de trésor. Moins il y a de rentrées de devises, moins il y a de masse monétaire en contrepartie créée. Pour compenser, l'Etat frappe la monnaie de singes à travers ces bons de Trésor qui ne seront pas remboursés. Il s'agit des agrégats macroéconomiques. La balance de paiement extérieur accuse un déficit de 263 milliards toujours en comparant 2016 par rapport à 2015. Les avoirs extérieurs ont baissé de 58 % à la BRB et de 20 % dans les banques commerciales.

Le budget du Burundi est à l'image de la situation actuelle. Il renforce l'endettement du pays à travers les bons de Trésor auxquels il fera recours. La dette burundaise est de 1 911 milliards de francs bu dont 61.50 % de dette intérieure surtout du fait de l'effacement de la dette extérieure il y a quelques années. Les recettes intérieures annuelles sont estimées à 600 milliards de francs bu en situation actuelle. Par ailleurs, le gouvernement a décidé de fouiller dans les poches des Burundais à travers plusieurs taxes qui se mettront en place en 2017. Des taxes sur certaines importations, des taxes sur la consommation des produits comme  l'essence, la téléphonie, le sucre etc....

L'Etat burundais n'a pas encore épuisé ses moyens parce que les Burundais arrivent toujours à remplir l'assiette fiscale de l'Etat. La téléphonie va rapporter 16 milliards, le carburant 13 milliards et la bière 1 milliard. Gandhi a vaincu les anglais, non pas par les armes mais par le boycott des produits taxables des anglais. Les Burundais doivent comprendre qu'ils feront avec les moyens de bord.

Le peuple vit à l'heure des épreuves difficiles. L'inflation alimentaire est de plus de 9 % alors que la pression fiscale augmente. Rien qu'avec l'augmentation des taxes, ce taux sera à plus de 12 %. L'économie tourne au ralenti et on demande aux Burundais de payer plus.

Les sociétés paraétatiques devront déposer leurs fonds à la BRB, adieu les banques commerciales

L'Etat burundais en manque de liquidités a trouvé un maillon faible de la chaîne monétaire. L'INSS, la Mutuelle, la Socabu etc... collectent l'argent du public dans le but de distribuer à terme et survenance d'un évènement prévu dans le contrat. De ce fait, ces sociétés amassent beaucoup de fonds. Elles sont les premiers épargnants du pays. Leurs fonds créent des crédits à l'économie et font tourner les banques commerciales burundaises.

En demandant aux sociétés paraétatiques de retirer leurs fonds des banques commerciales pour les mettre à la BRB, l'Etat burundais vient de porter un gros coup de poignard aux banques en particulier et à l'économie en général. Cela signifie que les banques vont manquer de liquidités. Surtout, ce retrait ne peut pas se faire dans un délai aussi court sans provoquer la panique sur le marché interbancaire. Les banques qui ont plus de liquidités de ces entreprises seront dans le collimateur des autres. La BRB serait obligée de renflouer les banques commerciales par le biais du marché de jour à jour. Elle ne pourra pas suivre le mouvement sans fabriquer la monnaie de singe. Il sera difficile aux banques commerciales de prêter à moyen terme avec de l'argent du jour au jour. Même si on dit que les crédits font les dépôts, il y a toujours un besoin d'un minimum de dépôts. Les particuliers s'appauvrissent, les entreprises privées manquent de consommateurs et les affaires ne sont pas les meilleures. Or, ce sont ces agents économiques qui devraient alimenter les liquidités bancaires. En l'absence des fonds de ces entreprises paraétatiques, les banques vont restreindre les crédits à la consommation et aussi à l'investissement. Cette mesure pourra provoquer des faillites en cascade.

D'une pierre deux coups, l'Etat punit en quelque sorte les banques commerciales qui rechignent à acheter les bons de Trésor alors que ceux à terme ne sont pas remboursés par l'Etat. Ces banques craignent l'asphyxie et le financement de l'Etat par le biais des bons du Trésor à la place du financement du secteur privé. L'Etat en profite aussi pour varier les sources de financement. Les bons de Trésor commencent à peser dans le budget et le gouvernement se tourne vers les avances de la banque centrale la BRB. L'Etat ne peut pas demander des avances aux banques commerciales. Par ailleurs, en demandant les avances à la BRB alors que la BRB ne collecte pas les dépôts, le système bancaire devient une machine à fabriquer l'inflation; voire la fin du système monétaire burundais fiable internationalement. L'Etat alors choisit de mettre la cagnotte de ces entreprises à la BRB et de puiser dans la cagnotte qu'il ne remboursera pas. Adieu les pensions et les remboursements de la mutuelle et des assurances. Ce n'est pas le problème de l'Etat du moment où il arrive à payer les fonctionnaires, les policiers et militaires.

Demain, l'Etat burundais va puiser dans les caisses de pensions en passant par les avances de la BRB. Demain, les pensionnaires ne pourront plus être payés au nom de la crise. Demain, celui qui rouspectera sera traité de rebelle ou ennemi de la nation.

La situation budgétaire du Burundi entrainera sans aucun doute le pays dans une situation pire que celle du Zimbabwe. L'économie sera le grand problème de Nkurunziza plus que son opposition.