ENCORE LA FAMINE A KIRUNDO!
Par Gratien Rukindikiza
Burundi news, le 05/02/2010
Tout se passe au Burundi comme une répétition de l'histoire. Même les malheurs frappent à un cycle répétitif et le pouvoir ne fait rien pour y remédier. La population de Kirundo se trouve en otage doublement au niveau de la sécurité. La sécurité physique et la sécurité alimentaire. Ceux qui doivent mobiliser les efforts pour développer cette région, la sortir du cycle de la famine, se contentent d'y créer des milices qui empêchent la population de vaquer tranquillement à leurs activités.
Le CNDD-FDD a fait de cette province une province d'expérimentation de ses milices tueurs. La mobilisation de ces jeunes à des activités de déstabilisation de la province prive cette région de la main d'œuvre en bonne santé. De même les bonnes initiatives sont découragées en raison de l'insécurité. Certains fuient cette insécurité mais les autorités les mettent sur le compte de la famine.
Où va l'argent de l'agriculture?
Il y a lieu de se poser la question. Un pays a besoin d'une stratégie alimentaire. Un pays qui ne peut pas nourrir sa population doit nécessairement avoir un autre avantage comparatif par rapport à l'économie mondiale, pouvoir exporter cet atout permettant d'importer à bas prix les vivres en complément de la production locale.
Or, le Burundi n'arrive pas à nourrir sa population. Même le haricot est aujourd'hui importé du Rwanda et de l'Ouganda. Le haricot burundais est devenu plus cher que celui qui vient de l'Ouganda ou du Rwanda. Les politiques de développer de nouvelles variétés de haricot, maïs etc... sont de véritables fiascos et se cantonnent dans les centres de recherche sans stratégie de vulgarisation. Sans une aide directe dans une province donnée ou un bailleur de fonds qui travaille directement sur le terrain, ces variétés sont condamnées à rester dans ces centres de recherche. Pourquoi cultive-t-on à Kayokwe ou Nyabihanga les mêmes variétés de haricots depuis 40 ans alors que le centre de recherche ISABU de Gisozi se trouve à moins de 10 km?
C'est un véritable scandale d'entendre que tous les centres de recherche qui développent les semences sélectionnées de haricots dont la productivité est de 10 fois plus que les autres sont incapables de fournir les semences de la seule zone de Muyebe à raison de 20 kg par ménage.
L'argent destiné à l'agriculture est parti dans les caisses de la Présidence, si non du Président. C'est la fameuse caisse de bonnes œuvres, considérées comme une caisse noire car la Présidence refuse toujours de se soumettre au contrôle d'usage. Il est difficile d'expliquer comment un Président peut s'allouer un budget de 2 millions de dollars pour faire sa campagne et faire des affaires au moment où une région se dépeuple. Il s'agit de nos frères et sœurs qui partent au Rwanda et en Tanzanie. C'est la honte pour le Burundi et surtout celui qui le représente.
Sauver cette région, c'est aussi une autre politique
Si aujourd'hui la priorité c'est se donner les avantages pour les nantis du pouvoir, demain, il faudra que celui qui arrive au pouvoir sache qu'un peuple qui a faim est prêt à tout. Le pouvoir actuel a démontré ses limites dans la compréhension et surtout dans la résolution de ces problèmes. La priorité doit être l'agriculture et l'élevage. Il va falloir trouver des moyens pour irriguer la province de Kirundo. Ce n'est pas l'eau qui manque. La priorité devra aussi concerner les produits qui consomment peu d'eau car cette famine est provoquée par le manque de pluie. Kirundo spécialisé et grenier du pays en matière de haricot jadis peut devenir le grenier de manioc, de bananes, etc....
Et la solidarité!
Je propose en signe de solidarité, que les partis politiques burundais ordonnent à ses ministres, députés, sénateurs d'abandonner les indemnités faramineuses de départ au profit des affamés de Kirundo. Je lance un défi à ces nantis du pouvoir de faire ce geste. Les Burundais sont pris à témoin. Le refus de céder ces indemnités à cette population ne pourrait signifier que ces élus et ministres ne pensent qu' à eux-mêmes. En ce cas, peuple burundais, tu te souviendras de cette indifférence en les sanctionnant au moment des élections. Cette caisse pourrait être confiée aux religieux qui sont sur le terrain pour la bonne gestion.