LE PALIPEHUTU FNL ET SA DEMONSTRATION DE FORCE

Par Gratien Rukindikiza

 Burundi news, le 19/04/2008

En politique, il ne faut jamais vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué. Le pouvoir du CNDD-FDD disait du FNL écrasé, miné par des désertions etc... Le FNL était décrit comme un mouvement en perdition, sans force militaire. Encore une fois de plus, il vient de démontrer qu'il est toujours présent, qu'on le veuille ou non.

L'attaque du 17 avril 2008 sur toutes les positions militaires du flanc Est de la ville de Bujumbura, à Gihanga et à Kayanza a démontré que ce mouvement garde toujours son organisation et sa combativité. Cette attaque est une leçon pour le pouvoir qui refuse de négocier. Ce 18 avril, d'autres attaques ont eu lieu à Gatumba, Musaga et Kanyosha.

Un FNL à ne pas négliger

Le FNL a déjà des années d'expérience dans la rébellion. Ceux qui les traitent d'Imihimbiri se trompent. Il n' y aura pas de paix sans le FNL et il n' y aura pas d'élections sans le FNL. Le pouvoir de Nkurunziza le sait et le fait exprès. Sans l'accord de paix avec le FNL, le Président Nkurunziza veut se maintenir au pouvoir sans élection d'autant plus que le peuple burundais en a marre de lui et n'a pas l'intention de voter pour lui.

La force de frappe du FNL a étonné beaucoup d'observateurs et d'officiers des FDN. Le FNL a perdu 10 combattants et  les FDN ont perdu 6 alors que l'armée était au courant de l'attaque. L'attaque du FNL est différente de celles du CNDD-FDD. Ce mouvement s'attaque aux positions militaires alors que le CNDD-FDD  attaquait plus les cibles civiles que militaires. On retiendra les bombes lancées sur la ville de Bujumbura et les mines posées dans les quartiers résidentiels.

Un faux prétexte du pouvoir

Le FNL réclame à juste titre le vote au parlement d'une loi d' amnistie  stipulant bien qu'il s'agit du Palipehutu FNL. Le pouvoir refuse cette condition. Au nom de la paix, les députés ont soutenu la volonté du FNL mais le CNDD-FDD s'y oppose. Allons-nous laisser nos militaires mourir au nom de cette intransigeance absurde du CNDD-FDD? Il est étonnant de constater que le CNDD-FDD refuse au FNL ce qui lui a été accordé quand il était dans les maquis.

Le pouvoir a peur de perdre le contrôle d'une partie de l'armée et de la police avec l'entrée dans ces institutions du FNL. La nouvelle donne politique du stratège Rwasa inquiète. Il est le seul dirigeant de la rébellion  à avoir résisté aux problèmes internes pour se maintenir à la tête de son mouvement malgré les centaines de  millions de francs bu utilisés par le pouvoir pour le réduire à néant. Sa longévité n'apaise pas les inquiétudes de ceux qui veulent rester seuls maîtres du Burundi.

Une conférence pour séduire les Rwandais

Les généraux ex FDD sont  malades du Rwanda. "Je t'aime, moi non plus". C'est la nouvelle chanson pour une danse à distance des généraux burundais et des généraux rwandais. Le général Adolphe Nshimirimana n'a pas hésité, dans le cadre de ses mensonges permanents, de dire aux démobilisés et aux cadres du CNDD-FDD que des jeunes ont été envoyés par le parti MSD chez Nkunda au Congo pour s'entraîner. Selon ce général, ces jeunes reviendraient au Burundi pour s'attaquer au pouvoir en faisant jonction avec les démobilisés. Un pur mensonge! Pour convaincre ses interlocuteurs sceptiques, il a sorti sa dernière carte en affirmant que le général rwandais James Kaberehe l'a conduit au Congo chez Nkunda et il aurait pris des photos de ces jeunes. Notre rédaction a contacté un haut responsable rwandais des renseignements qui a nié catégoriquement. Il nous a dit que ces généraux devraient d'abord régler leurs problèmes avant de s'immiscer ou de créer d'autres problèmes régionaux. Il a déploré la médiocrité de la direction burundaise allant jusqu'à envoyer des négociateurs dans l'East Africa sans connaître aucun dossier.

Le général Godefroid Niyombare a tenu une conférence de presse avec la ministre de l'information et porte parole du gouvernement. Un duo qui a étonné plus d'un. Niyombare est le chef d'Etat major adjoint de l'armée. Celui qui parle au nom de l'armée est le ministre de la défense nationale ou le porte parole de l'armée ou son adjoint. Le chef d'Etat major peut aussi s'exprimer mais il ne le fait jamais. Pouvons-nous en déduire que Niyombare a pris la place de quelqu'un d'autre? Il va de soi qu'un ministre aurait fait une conférence avec un autre ministre; donc celui de la défense. Niyombare serait-il entrain de jouer dans la cour des grands pour montrer qu'il peut assumer la place qu'il a tant convoitée?

Le général Niyombare a aussi étonné sur sa façon de parler. On aurait pensé à James Kabarehe qui parle ou un autre officier rwandais. Pour séduire les Rwandais, autant parler comme eux. Heureusement que les catholiques ne parlent plus le latin. Niyombare s'est exprimé en kinyarwanda, ponctué de termes anglais comme s'expriment les Rwandais, anciens réfugiés en Ouganda. Un clin d'oeil aux généraux James Kabarehe et Kagame. Ainsi, en parlant des FNL, Niyombare parlait de negative forces et il a insisté sur le terme. Une façon de se faire entendre sans interprète, sauf que Kagame et James comprennent le français même s'ils n'en parlent pas.

Le général Niyombare en a fait trop. En parlant de "negative forces", il oublie que le CNDD-FDD était rangé dans les forces négatives aussi. J'ignore qu'il était d'accord avec cette classification. Dans ses efforts d'impliquer le Rwanda dans la lutte contre le FNL afin d'éviter un accord de paix, la ministre de l'information s'est fait le loisir de donner une leçon d'armement. Elle connaît les armes du FNL et sait bien que les armes utilisées provenaient du stock des FDL! Elle aurait bien fait de dire que le CNDD-FDD prêtait des armes aux FNL pour faire d'attaques sur la capitale avec les mortiers 82 mm. D'après nos informations, l'armée burundaise n'a pas arrêté de FDLR dans ces combats et elle n'a pas non plus saisi des armes provenant des FDLR. Certaines informations confidentielles dans l'armée laissent supposer que le FNL a tiré avec des katioucha bi tubes. Ces informations proviennent des observations de l'origine du feu. Des informations à prendre au conditionnel. L'armée n'était pas au courant de l'existence de ces armes très efficaces au FNL. A-t-il acquis ces armes avec l'argent versé pour libérer les otages ou avec l'argent de la Documentation pour corrompre certains cadres du FNL? L'ironie de l'histoire, c'est le pouvoir du CNDD-FDD qui arme le FNL avec leurs erreurs. Notre rédaction avait révélé la grande trouvaille du FNL qui avait permis d'acquérir 1 500 armes dans la forêt de Kibira où les FDD les avaient cachées en attendant une autre guerre en préparation.

A défaut des négociations, le FNL n'a qu'un seul choix

En l'absence de bonne volonté du pouvoir, le FNL n'a pas beaucoup de choix. Le pouvoir veut le réduire à néant au lieu de négocier. Les attaques du FNL ne feront que relancer les négociations. C'est la seule façon de faire pression sur le pouvoir pour le ramener à la table de négociation. Il est dommage qu'on revienne à la situation de guerre alors que le FNL avait montré sa bonne foi en demandant ce qui est  possible.