SINDAYIGAYA, ALIAS GATAYERI, LE FNL ET LE POUVOIR

Par Gratien Rukindikiza

 Burundi news, le 14 mai 2006

Le cours des événements  au Burundi est imprévisible. En 2002, les Burundais croyaient retrouver le chemin de la paix avec les accords entre le gouvernement et le CNDD-FDD. Certains avaient minimisé le FNL et sa force militaire. Les accords signés entre l’ancien Président Ndayizeye et Rwasa du FNL ont vite volé en éclat ; l’armée accusant le FNL d’avoir violé le cessez-le-feu et le FNL accusant l’armée d’avoir rompu le cessez-le-feu.

Le CNDD-FDD a gagné les élections de 2005 et il est au pouvoir. Le FNL reste toujours dans les maquis. Tout laissait penser qu’un accord de paix serait comme une lettre à la poste. Or, les négociations deviennent plus problématiques que prévu. Le CNDD-FDD ne semble pas disposé à négocier avec le FNL. Les habitants de Bujumbura rural,  Bubanza et Cibitoke sont sacrifiés car ils subissent la guerre au quotidien alors que le CNDD-FDD avait promis la paix au cours de sa campagne électorale de 2005.

Diviser pour mieux régner. Ce principe est souvent utilisé par plusieurs pouvoirs et les colonisateurs en ont tiré profit. Pour éviter de vraies négociations, le pouvoir burundais du CNDD-FDD a tenté de diviser le FNL sans succès malgré les moyens mis en œuvre.

Sindayigaya, alias Gatayeri, était l’adjoint à Rwasa au sein du FNL. Il avait démissionné pour motif personnel. Son départ s’est fait dans la sérénité.

Quelques mois après, il a été récupéré par le pouvoir. Deux émissaires du pouvoir, et pas les moindres,  sont allés à Kigoma en Tanzanie  pour le rencontrer afin de lui demander de créer une dissidence du FNL pour évincer Rwasa. Au départ, il était hésitant. Sans troupe et armement, il ne pouvait pas promettre l’impossible. Tout a été arrangé. Quelques hommes anciens FNL, les tenues des militaires du bataillon para et  de l’armement récupéré sur le terrain ont permis  à Sindayigaya de rentrer à Bujumbura pour se proclamer chef du FNL sur la radio RPA et sur le site Umuco.

Il restait à convaincre les membres du FNL qu’il était réellement le chef du FNL. Ceux qui ont vu sa photo habillé en tenue des parachutistes du 1 er bataillon de Bujumbura ont compris que c’était du montage. Certains observateurs politiques se demandaient dans quel quartier de Bujumbura était hébergé l’hôte du gouvernement.

Autoproclamé chef du FNL , Sindayigaya devait alors arrêter la guerre conformément à ses promesses. Il s’est révélé incapable d’agir sur les opérations du FNL. Les membres du FNL ont refusé de le suivre. Il a alors organisé à Kanyosha un congrès extraordinaire d’un parti qu’il a appelé FNL. Le congrès avait besoin de la sécurité pour éviter les attaques du FNL. C’est l’armée burundaise qui s’en est occupée et les journalistes étaient sur place. On s’imagine mal Rwasa tenir un congrès à Kanyosha en invitant des journalistes sans se soucier d’être arrêter par l’armée. Au cours de ce congrès, Sindayigaya a été élu pour diriger une rébellion qu’il a préféré appeler le FNL.

Aujourd’hui, le FNL se bat sur le terrain et Sindayigaya n’a pas d’hommes sur le terrain. Pourtant, il veut négocier avec le pouvoir, son protecteur. Le pouvoir tient aussi à négocier avec lui. Comme les négociations sont du donnant-donnant, que peut offrir Sindayigaya ? Rien.

Après le congrès sous la protection de l’armée, un autre fait insolite est la rencontre d’un des adjoints de Sindayigaya avec le ministre Sud-Africain de la sécurité, médiateur dans le conflit burundais à Bujumbura  au cours de cette semaine.

Sindayigaya n’a pas été à la hauteur de sa tâche. Il a été incapable d’évincer Rwasa à la tête du FNL malgré les moyens mis en œuvre. La paix burundaise passe par de vraies négociations avec celui qui commande la dernière rébellion encore active sur le terrain. Ce n’est pas tous les jours que la politique de diviser pour régner donner des résultats escomptés.