GATAYERI VICTIME DE SA COLLABORATION AVEC LE POUVOIR BURUNDAIS

Par Gratien Rukindikiza

En politique, il n’y a pas d’amis, il n’y a que des intérêts. L’allié d’aujourd’hui est l’ennemi de demain. Le meilleur politicien est celui qui sait préserver certains œufs, sans les mettre dans le même panier. Une alliance a ses limites. Dès lors que toutes les cartes sont abattues, il ne reste que la soumission.

Au commencement, il y avait le FNL Palipehutu de Rwasa. Le CNDD-FDD, ancien mouvement rebelle,  arrivé au pouvoir ne voulait plus négocier avec celui à qui il avait prêté ses mortiers 82 mm pour bombarder la ville de Bujumbura. Son alliance tactique sur le terrain notamment dans Bujumbura rural devenait une lettre morte. Le CNDD-FDD a agi comme la fille qui se marie le samedi et qui demande aux filles célibataires venues la voir le lendemain comment elles ont fait pour rester toujours célibataires et refusant même de les écouter.

Le pouvoir de Radjabu, ancien président du parti CNDD-FDD, avait refusé de négocier avec Rwasa, le chef du FNL Palipehutu, encore en rébellion. Radjabu lui-même disait qu’il comptait négocier avec Rwasa après la capitulation de ses troupes. C’était sans connaître Rwasa.

Créer une marionnette pour évincer Rwasa

Radjabu avait alors pensé à un membre de la direction de la rébellion du FNL Palipehutu, Monsieur Jean Bosco Sindayigaya, alias Gatayeri. Celui-ci a été approché en Tanzanie par Radjabu. Il lui a été difficile de l’accepter.

Les preuves à l’appui. Gatayeri à gauche et Radjabu à droite

 

Pour annoncer la nouvelle, Gatayeri est venu à Bujumbura. Le pouvoir lui a prêté des anciens rebelles démobilisés et des tenues militaires. Quand il a rencontré les journalistes, il portait une tenue militaire flambant neuve avec un béret rouge du 1 er bataillon para. Tout paraissait beau pour une pièce de théâtre. La mise en scène a été pilotée par l’entourage de Radjabu.

Gatayeri, citoyen de Bujumbura aux frais du pouvoir

Drôle de chef de rebelles qui habite dans la ville de Bujumbura, qui circule dans des véhicules des proches du pouvoir et qui est protégé par le pouvoir. Ce n’était qu’un secret de polichinelle que Gatayeri était dans la ville de  Bujumbura.

La communication de Gatayeri était supervisée par la Présidence de la République car Willy Nyamitwe, conseiller à la Présidence de la République,  était le conseiller direct en communication de Gatayeri. Au deuxième rendez-vous avec les journalistes, Willy Nyamitwe était avec Gatayeri, selon ceux qui étaient présents.

La chute de Radjabu n’a pas donné de leçon à Gatayeri

Le limogeage de Radjabu à la présidence du parti s’est accompagné d’une purge de ses sympathisants dans les services de renseignement et au pouvoir. Radjabu ne pouvait que sous traiter Gatayeri à ses frais pour d’autres buts. Lâché par le pouvoir (Le pouvoir revenu dans les mains du Président Nkurunziza, car il faut le reconnaître, il n’était qu’une marionnette aux mains de Radjabu), Gatayeri est devenu la cinquième colonne de Radjabu dans le dispositif de son mouvement rebelle.

Les hommes de Radjabu se réclamaient de Gatayeri pour ne pas être démasqués. Radjabu aurait alors une rébellion dans la forêt et une dissidence au Parlement et au Sénat. Il savait bien que le pouvoir n’oserait pas le toucher. Son arrestation a été une douche froide pour Gatayeri. N’étant pas habitué au maquis, il est resté à Bujumbura sans ignorer que les services de renseignement pouvaient l’arrêter au moment voulu.

Gatayeri a commis une erreur politique et stratégique. Il aurait dû continuer à travailler avec le pouvoir pour négocier une sortie par la grande porte. Un poste politique aurait tout arrangé.

Gatayeri, une erreur de casting du pouvoir

Le choix de Gatayeri est une véritable erreur de casting. Il s’est révélé incapable d’inquiéter Rwasa et peu d’hommes l’ont suivi. Il a coûté cher au pouvoir sans rapporter grand-chose.

Aujourd’hui en prison, Gatayeri est un problème politique. C’est une création de Radjabu et des services de renseignement. Il a fait son job jusqu’en 2006. Sera-t-il accusé de sa collaboration avec le pouvoir ou de sa collaboration avec Radjabu ? S’il est accusé d’avoir collaboré avec Radjabu, ne faudra-t-il pas aussi mettre en prison tous ceux du gouvernement qui ont exécuté les ordres de Radjabu  alors que ce même Radjabu  n’avait aucun pouvoir de l’exécutif ?

Tous les dissidents de Rwasa finissent par transiter en prison. Gatayeri rejoint Mugabarabona. Rwasa est devenu finalement le chef politique et militaire le plus ruse et un grand stratège. Malgré l’armada lancée contre lui, ses troupes sont toujours là et il se permet de circuler dans Bujumbura rural et Bubanza.