UN GOUVERNEMENT A REMANIER LE JOUR DE SA NOMINATION
Burundi news, le 13 juillet 2007
Par Gratien Rukindikiza
Le ridicule ne tue pas. En politique, le mur des honneurs protège contre la honte, la faiblesse et l’inaptitude aux actes de diriger. Un gouvernement est désigné avec beaucoup de sérieux. Il ne se désigne pas à la légère. Jamais, nulle part ailleurs, un ministre pourrait être nommé sans être consulté.
Le Burundi est l’exception. Le Président vient de nommer un gouvernement sans consulter même ceux qui doivent y entrer. D’autres noms sont changés le jour même, voire l’heure même de la sortie du décret de nomination du gouvernement.
Des démissions déjà du gouvernement
Comme je l’avais annoncé, l’Uprona n’a pas donné les noms. C’est le 1 er vice-Président a donné sa liste. En conséquence, le Dr Yves Sahinguvu nommé ministre de la santé, qui n’a pas été consulté, vient de refuser d’entrer dans le gouvernement. C’est ce qu’on appelle l’Abracadabrantesque.
Karenga et Immaculé Nahayo, proches de Radjabu, refusent aussi d’entrer au gouvernement, selon des sources non encore confirmées. Ils n’auraient pas été consultés. Faut-il rappeler les anciens ministres ?
Le Président est obligé de former un autre gouvernement. Comment pourra-t-il expliquer ce couac?
Je t’aime, moi non plus
La séduction envers les pro Radjabu ne donnera pas des fruits car c’est l’amour à sens unique. Les signes d’apaisement du Président ne rassurent pas les pro Radjabu tant que Radjabu reste en prison. Ils attendent des signes forts. L’entrée dans le gouvernement est un leurre.
Une rumeur parle de la prochaine libération de Radjabu pour que ses députés votent en faveur du Président de la République.
Il y a lieu de se demander pourquoi Radjabu reste en prison s’il n’a aucune accusation de corruption. S’il est accusé de tentative de reprise de rébellion, il pourrait même plaider coupable comme un certain Nkurunziza Pierre. Il a été en rébellion et il est devenu Président de la République. Or, les dossiers de corruption concernent aussi les hommes du pouvoir. Aucune personnalité n’est condamnée par un dossier de corruption.
L’art de mécontenter tout le monde
Le Président de la République vient de réussir là on ne l’attendait pas. Il a mécontenté tous les grands partis avec la nomination du nouveau gouvernement.
Le CNDD-FDD n’en revient pas. Le retour de Karenga et de Madame Nahayo sonne comme un coup dans le dos de ceux qui se sont impliqués dans le limogeage de Radjabu et de Nahayo. Les militants qui ont cru que l’ère de Radjabu a changé ne décolèrent pas. D’après certains témoignages, la décision du Président est incompréhensible. La question qui se pose est de savoir qui est encore avec le Président de la République. Certains pensent qu’il est surtout avec les footballeurs de Alléluia et ceux qui prient avec lui.
Le Frodebu ne reconnaît pas les membres du gouvernement revendiquant leur appartenance à ce parti. Ils ont refusé d’y entrer ; donc il joue l’opposition. Sans le Frodebu et les députés de Radjabu, le pouvoir est minoritaire.
L’Uprona n’a désigné personne pour entrer au gouvernement. Le Dr Yves Sahinguvu vient de refuser d’y entrer. Certains parlent même de l’implication de l’ancien Président Buyoya qui aurait donné des conseils au Président sur sa demande. Il aurait suggéré ces deux noms des Upronistes à savoir Njoni et Sahinguvu.
Un gouvernement sans avenir
Un remaniement est automatique car il faut remplacer ceux qui vont refuser ou qui ont déjà refusé d’y entrer. Cependant, sans un soutien du Parlement, ce gouvernement peut entraîner celui qui l’a nommé.
Ce gouvernement était attendu depuis plus de deux mois. Il a été l’objet des spéculations. Un gouvernement est une surprise. Plus les rumeurs d’un remaniement durent, plus la formation et l’acceptation de ce gouvernement se compliquent. C’est ce qui vient d’arriver à ce gouvernement. Ceux qui devaient être limogés par le Président sont d’abord ses conseillers. Ils ont fait tout sauf donner des conseils au Président.