Un lecteur de Burundi News
Burundi news, le 02/07/2009
Londres, 07.06.2009
HIERARCHIE DES CRIMES AU BURUNDI
Le débat suscité par le parti au pouvoir pour criminaliser les homosexuels au Burundi doit interpeller les citoyens parce que c’est important pour les libertés fondamentales. Pourquoi un sujet qui a toujours laissé indifférents les Burundais vient-il aujourd’hui perturber l’ordre juridique et politique ? Quelle est donc la cause de cette soudaine poussée de vertu de la part des gens dont on sait pourtant qu’ils se sont rendus coupables des pires crimes ? Dans la brousse où ils étaient terrés, faute de combattre victorieusement les Forces armées Burundaises, les uns ont posé des bombes anti-char pour les bus, les autres ont tué au hasard des innocents sur les bords des routes, ou encore d’autres ont violé sans vergogne les femmes de tous âges, y compris des gamines impubères. Vol à main armée était ou est toujours un mode de vie dans ce pays pour les anciens rebelles de toutes tendances.
D’autre part, voilà donc un régime qui a poussé la corruption à un niveau grotesque, où on vend l’avion présidentiel en faisant justifier par un des ministres du gouvernement que c’est le droit des dirigeants puisqu’ils ont été élus par le peuple pour disposer à leur guise des biens de la Nation. Voilà un régime qui invente des procès à ses adversaires politiques, y compris dans son propre camp, en ridiculisant ouvertement la police et toute la magistrature de ce pauvre pays dont on ne saura jamais quand il sortira de la guerre civile. Qui assassine des prisonniers désarmés avant de les jeter dans la rivière.
Par contre pas une larme pour ces pauvres albinos que l’on massacre dès la tombée de la nuit pour revendre les parties de leurs corps avec un joli bénéfice aux sorciers de la région. Parmi les images atroces qui reviennent à la mémoire, comment oublier le reportage sur cette gamine de six ans ou cette femme de quarante ans tuées par les hommes en armes devant leurs parents impuissants ? Et comme conclut rituellement le porte-parole de la Police Nationale, les enquêtes continuent. Sans jamais aboutir.
Et c’est le moment qu’a choisi le Président, devenu entretemps membre influent d’une des sectes qui pullulent au Burundi depuis des années, pour lancer dans ses discours une campagne de dénigrement non seulement des homosexuels, voués à être condamnés à de lourdes peines de prison, mais également des fonctionnaires hétérosexuels qui s’adonnent aux jeux de l’amour pendant les heures de service. Car pour lui, il y a également crime, même pour des adultes consentants, lui qui souhaiterait faire retourner les Burundais au fondamentalisme religieux le plus borné du passé récent. Il s’agit ici d’une intrusion intolérable dans la sphère privée des citoyens.
Dans la Constitution actuelle, le Burundi a opté pourtant pour un système politique laïque, avec une nette séparation de l’Eglise et de l’Etat. Comme le soulignait l’ancien premier ministre canadien, Elliot Trudeau, le rôle de l’Etat n’est pas de s’occuper de ce qui se passe dans les chambres à coucher de ses citoyens. Il faut donc rappeler sans cesse cette définition d’un homme politique français du 19è siècle qui donne la meilleure illustration de la laïcité. Devant l’Etat laïque, affirme-t-il, les croyances et les cultes sont libres ; devant l’Etat souverain, les Eglises sont sujettes. En d’autres termes, l’Etat doit être neutre vis à vis des religions.
Au lieu de discourir sur des sujets qui concernent la morale individuelle des citoyens, nous exigeons du Président d’assurer la sécurité de tous, en nettoyant notamment les ripoux du corps de la Police dont une partie des méfaits dans le pays lui sont imputables. Nous lui demandons de nettoyer les écuries d’Augias d’une Administration publique corrompue jusqu’à la moelle qui entrave tout projet d’investissement ou qui a déjà mis à terre les entreprises publiques les plus prospères.
Nous lui demandons également de gouverner, puisqu’il a été élu pour cela. Et de garder pour lui le rôle de prédicateur qui ne concerne que sa conscience et celle de ses fidèles, et non celle des Burundais. A Dieu ce qui est à Dieu, et à César ce qui est à César.
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