INCERTITUDES ELECTORALES FUTURES

Par Gratien Rukindikiza

Burundi news, le 13/04/2009

Les élections de 2010 s'annoncent comme les élections de 1993 mais avec quelques différences. Ceux qui étaient au pouvoir ne pouvaient s'imaginer un seul instant qu'ils pouvaient perdre avec leur machine politique et même militaire. Ceux qui aspiraient au pouvoir ne pouvaient pas concevoir leur avenir politique en cas de défaite électorale. La paix burundaise était au prix de la victoire des deux forces en présence.

Aujourd'hui, le CNDD-FDD ne conçoit en aucune façon une perte électorale. Ce n'est même pas dans les rêves des cadres de ce parti. Pourtant, celui qui prépare la victoire prépare d'abord l'échec. L'opposition politique ne peut non plus s'imaginer de rester dans l'opposition après les élections de 2010. Les deux parties sont préparées pour la victoire. Qu'en est-il du peuple? Sa victoire sera celle de celui qui ramène la paix, la justice et l'impunité.

Qui peut sauver le CNDD-FDD?

Le CNDD-FDD est au stade du parti Uprona en 1993. Ce n'est qu'un arbre qui cache les failles internes, les faiblesses de ce parti et l'érosion de son électorat. Le CNDD-FDD n'a pas été élu que par ses militants mais surtout par  des millions de Burundais qui croyaient en lui pour ramener la paix, la justice sociale etc.... Ce sont ces millions qui ont été déçus. Ce parti a commis l'erreur de vouloir contenter quelques militants au détriment du peuple, de protéger les fauteurs de troubles, de violence contre ces mêmes Burundais qui ont voté pour le CNDD-FDD.

Les cadres du CNDD-FDD ont compris que la pente est rude. Face aux difficultés, c'est la division. Des luttes internes font rage. Certains se haïssent à mort et n'hésitent pas de monter des coups bas inimaginables. Le CNDD-FDD a compris que sa popularité est mince et compte sur une supposée popularité du Président de la République. Or, le peuple acclame toujours le Président par respect. L'ancien Président Buyoya en sait quelque chose. Les avocatiers plantés sont devenus le sport favori du Président de la République. Les régions rivalisent aussi dans l'arrachage de ces avocatiers. Cela montre l'impopularité de cette campagne électorale avant le départ. Les cadres du CNDD-FDD pensent qu'ils pourront remonter la pente si les élections commençaient par les présidentielles. Une erreur monumentale, en cas de défaite électorale, le CNDD-FDD pourrait subir le sort de l'Uprona de 1993. Or, ce qui fait la force d'un parti politique n'est pas la Présidence mais le Parlement. Le CNDD-FDD a beaucoup perdu avec la Présidence de Nkurunziza. Il a entraîné ce parti dans sa chute. La période est terminée où le Président se cachait sous l'ombre du président du CNDD-FDD, Hussein Radajbu, qui doit regretter cette couverture.

Que fera l'opposition pour gagner?

Dans tous les cas, à part les petits partis créés tout récemment par les "achetés" du Frodebu, le CNDD-FDD ne pourra pas faire une alliance avec d'autres partis politiques. Tout parti qui tenterait de faire cette alliance perdrait ses militants. Les Burundais  ont besoin de renvoyer le CNDD-FDD du pouvoir. La balle est dans le camp de l'opposition. Elle doit mériter le pouvoir. Elle doit montrer qu'elle est capable de relever le défi. Ce défi est une alliance populaire pour le salut national. Cette alliance peut avoir plusieurs formes, se faire à plusieurs niveaux. Elle doit être capable de s'adapter aux différentes stratégies du CNDD-FDD. Faut-il présenter plusieurs candidats aux présidentielles si les élections présidentielles commencent avant les autres ou faut-il présenter 2 ou 3? Faut-il favoriser les avantages comparatifs pour soutenir celui qui est en position de force dans telle ou telle région? Le tout est à concevoir.

Un mauvais calcul

Si le CNDD-FDD se dit que les élections s'annoncent mal et qu'il envisage la violence et la peur, rien n'interdit aux partis de l'opposition de s'organiser et de montrer qu'ils sont capables de s'opposer à cette violence. Certains parlent des démobilisés. Je pense qu'ils n'ont pas compris qu'il y a deux types de démobilisés ayant une force égale ou inégale. Il y a les anciens rebelles et les anciens militaires de l'armée. Il y aura bientôt les anciens rebelles du FNL. Celui qui voudra faire la mayonnaise avec ces ingrédients risque d'avoir des surprises. C'est l'histoire de celui qui a nourri un python et qui a fini par être avalé par le python.

Dans tous les cas, la violence ne paie pas. Celui qui la déclenche ne sait pas s'il peut s'en sortir vivant. Les Rambo n'existent qu'au cinéma. En plus, qui a la volonté aujourd'hui de se battre pour défendre les quelques centaines de villas érigées avec les fruits de la corruption et des détournements? Pourquoi des milliers de combattants du CNDD-FDD sont-ils morts en rébellion? Pour un tel résultat? Je ne crois pas.