QUI EST RESPONSABLE DE L'INSECURITE AU BURUNDI?

Par Gratien Rukindikiza

 Burundi news, le 25 septembre 2007

Le Burundi a connu des périodes sombres de son histoire où l'insécurité était un grand cauchemar, tantôt pour une ethnie, tantôt pour une autre et des fois pour tous les Burundi. Les Burundais se rappellent de 1972, 1993 et 1994. Après le cessez-le-feu avec le CNDD-FDD, il y a eu un ouf de soulagement. Les anciens combattants ont été élus pour ramener la paix et l'ordre dans la pays, instaurer la discipline dans la gestion de la chose publique. Aujourd'hui, le CNDD-FDD a failli à sa mission. L'insécurité est grandissante. Les responsabilités sont nombreuses.

L'absence de désarmement, responsable de l'insécurité

Le pouvoir burundais n'a jamais manifesté une volonté de désarmer la population. Les groupes à désarmer ne sont pas nombreux. Les détenteurs des armes sont surtout les anciens combattants qui les gardent pour des besoins divers. Certains anciens combattants sont sous-traités par le pouvoir pour effectuer des intimidations, des assassinants sélectifs et des gardes non officielles. Ceux qui ont lancé des grenades sur les domiciles de certains députés de l'opposition ont puisé dans leurs stocks moyennant sonnantes et trébuchantes.

Ces anciens combattants constituent le vivier des forces mobilisables par le CNDD-FDD, surtout en l'absence du contrôle de l'armée. Ces combattants disposent aussi des armes enterrées par le CNDD-FDD lors de l'intégration dans l'armée et la police. Désarmer au Burundi passe nécessairement par une récupération des armes enterrées. Elles tombent souvent dans d'autres mains. Une cache d'armes est déjà tombée dans les mains du FNL qui a eu 1 500 armes sans les acheter. Or, ces armes ont été cachées par ceux qui sont au pouvoir. Il est aisé pour ceux qui sont au pouvoir de reprendre les armes cachées afin de contribuer  au retour de la sécurité.

Certains anciens militaires sont partis avec des armes et des grenades. Elles sont utilisées dans certains cambriolages. Les armes qui causent l'insécurité sont le fruit d'un processus de réintégration des anciens combattants et des anciens militaires qui a échoué. Elles sont aussi utilisées par certains comme des leviers politiques en cas de besoin. Elles serviront sans aucun doute lors des prochaines élections de 2010.

Une police désorganisée, sans mission républicaine

La police burundaise est un exemple flagrant de la désorganisation de l'Etat. Elle est dans un état lamentable. Elle n'a pas eu la chance de l'armée qui a bénéficié de l'expérience des anciens FAB au niveau de l'organisation. Confier le commandement de la police à un général qui n'a jamais travaillé ou appris le BAB de la police ou gendarmerie est une erreur. La police d'aujourd'hui a du mal à enrayer l'insécurité, non pas parce qu'elle manque d'effectifs mais parce qu'elle est mal commandée. Elle est aussi au service du parti au pouvoir CNDD-FDD. Aucune enquête ne peut aboutir sans la bénédiction du patron du CNDD-FDD. Le dossier des grenades lancées sur les maisons des députés a été orientée vers une fausse piste par ce même parti. Certaines interventions de la police  sont commanditées directement par le parti CNDD-FDD.

Une dose d'insécurité pour faire taire l'opposition et la société civile

Dans certains pays, faute de pain, le pouvoir nourrit son peuple de peur. Au Burundi, la peur est revenue. Les Burundais ont peur du pouvoir ou surtout de son système officieux de répression des anciens combattants. Les opposants finissent par se ranger afin de ne pas se mettre en danger. Certains sont prêts à oublier les dossiers de malversations moyennant des miettes du petit gâteau et une dose de peur. L'insécurité actuelle sert le pouvoir. Elle risque de durer jusqu'aux prochains élections. Cependant, une insécurité peut mener à tout, même à l'imprévu.

L'insécurité est le signe d'un pouvoir faible ou dictatorial. L'ancien Président Ntibantunganya avait un pouvoir faible et l'insécurité était créée par le système de sécurité. Sous l'ancien Président Buyoya II, l'insécurité a  diminué car il voulait marquer le changement. Il a pu le faire car il maîtrisait le système de sécurité. Sous le régime du Président Nkurunziza, le pouvoir n'est pas aussi fort qu'on le croit. Sa faiblesse est plus interne qu'externe. C'est un pouvoir qui a plusieurs têtes et l'insécurité tire aussi ses sources dans les divergences des politiques contre l'insécurité au sein même des proches du Président de la République.