L'ETAT, L'INSS ET LES PROBLEMES DES PENSIONS DES EX REBELLES

Burundi news, le 21/02/2012

Par Gratien Rukindikiza

L'intégration des rebelles dans une armée ou une police ne pose pas seulement des problèmes au niveau technique. Ces rebelles entrent dans une armée ayant une carrière professionnelle. Certains rebelles arrivent après 3 ans ou 5 ans de rébellion avec un grade de colonel au moment où les militaires de carrière ayant le grade de colonel viennent de passer 25 ans dans l'armée. Ce problème ne se pose pas dans des pays où la rébellion arrive à chasser du pouvoir une armée régulière. Ce fut le cas au Rwanda.

Au Burundi, l'armée et la police se retrouvent avec environs 50 % d'anciens rebelles et 50 % d'anciens militaires et policiers. Un problème inattendu se pose aussi, c'est celui des pensions. Un colonel qui doit partir à la retraite après 10 ans de service du fait qu'il soit entré dans l'armée après 10 ans de rébellion n'a pas en principe cotisé assez pour avoir une retraite normale. Or, l'INSS ne peut verser que ce qu'il a reçu.

Les conclusions d'une étude et la faisabilité

L'Etat s'est retrouvé confronté à ce problème. Des études ont été faites pour la mise au même niveau pour le même âge et même grade. Il ressort que l'Etat doit payer en tout 21 983 510 597 frs bu.

Le ministère de la sécurité publique doit payer pour cette mise à niveau 7 280 198 169 frs bu, le ministère de la défense nationale doit payer 11 132 870 262 frs bu pour les FDN et 3 570 442 166 frs bu pour les démobilisés militaires et les retraités. Pour les retraités, la base de calcul est le dernier salaire atteint avant l'interruption de la carrière en ajoutant les annales.

Les deux ministères ne peuvent pas payer en totalité ces montants. Un accord non encore signé stipule que les montants seront payés sur 8 ans avec un taux d'intérêt de 3 %. Un taux très bas par rapport au marché car l'INSS pourrait gagner 4 fois plus en achetant que les bons du Trésor. Le capital à rembourser étant 21 983 510 597 frs bu, les intérêts seront de 5 278 042 543 frs bu. Le montant total sera de                 27 259 553 140 frs bu. Par an, les deux ministères devront payer 3 407 444 143 frs bu.

Une convention non signée mise en  application fait perdre des milliards à l'INSS

Un projet de convention d'affiliation à postériori de certains membres du corps de défense et de sécurité qui est dénommé actuellement "Projet de convention de paiement des cotisations et de majoration de retard par l'Etat et des prestations par l'INSS en faveur de certains membres du corps de défense et de sécurité" n'est pas encore signé alors qu'il est demandé à l'INSS de le mettre en application. Les représentants des salariés de l'INSS contestent cette façon de faire et ont écrit une lettre datée du 01/02/2012 au président du conseil d'administration de l'INSS. Ces représentants demandent la signature de la convention comme préalable et condition sine qua none et le versement de la 1 ère tranche du montant dû par l'Etat. Ces salariés ne demandent que le suivi à la lettre de la convention. Il est mentionné en son article 10 de la convention non encore signée que l'INSS ne débloquera la première partie de la pension qu'après le versement de la première tranche de l'Etat. En cas d'interruption de versement de la part de l'Etat, l'INSS suspendra les versements de la partie de pension revenant à l'Etat.

La police a dégainé la première à coup de confusions

En dehors de cette convention, le ministère de la sécurité publique doit à l'INSS 1 977 741 952 frs bu. L'INSS attendait ce montant pour que le ministère respecte les obligations de tout employeur.

En date du 27/12/2011, le ministère de la sécurité publique a versé 1 863 203 439 frs bu sur le compte de l'INSS sous un ordre 16605/2011 dont l'objet était intitulé comme suit : "Régul cot. des anciens retraités et actuels". L'objet est tout sauf clair. La confusion semble être entretenue sciemment. Les anciens retraités sont des gens qui ne sont plus retraités; donc morts. Est-ce que le ministère cotise pour des retraités fantômes? Probablement que l'ordre serait pour les cotisations en faveur  des retraités et des actifs.

Le montant se rapproche de ce que ce ministère doit à l'INSS au titre des cotisations pour les policiers en activité. Or, ce ministère demande à l'INSS de commencer à verser les prestations en fonction de la fameuse convention non signée. Cela reviendrait à dire que le ministère ne paiera que les remboursements et intérêts sur le principal des affiliations à postériori et suspend ses cotisations pour les actifs. L'INSS se retrouve dans une situation délicate. Selon la convention, il doit verser les majorations des pensions si le ministère rembourse selon la convention. Il ne peut pas mettre fin à ces versements du fait de la suspension des versements trimestriels des policiers. 

Le vrai problème qui se pose est de savoir si l'Etat a réellement le budget pour payer ces majorations. Au cas où l'Etat n'aurait pas les moyens de mettre en place ces pensions, l'INSS serait obligé de suspendre ces versements. Pour des raisons politiques et sécuritaires, les suspensions sont exclues. Ce système mettrait en péril les retraites des autres salariés et même l'INSS pourrait mettre la clé sur sa porte. Espérons que l'Etat a tout prévu. Et les policiers fantômes qui rodent dans les listing de paie de la police!