Burundi news, le 01/03/2017

INSTRUITES ET INSTRUITS HONNÊTES DU BURUNDI LEVEZ-VOUS !

Par Ndavugasimvura

Aujourd’hui, les Barundi,  toutes générations confondues, surtout les instruits devraient réfléchir sur leurs passé et présent politiques pour mieux préparer l’avenir et léguer un meilleur Burundi aux générations futures. Pour amorcer cette réflexion, analysons notre passé, puis notre présent pour en tirer des leçons concernant l’avenir.

Notre pays fut une monarchie jusqu’en 1966. Les  quatre dynasties se succédaient (Ntare, Mwezi, Mutaga, Mwambutsa). Un futur roi naissait avec un épi de sorgho. A l’époque, les Barundi y ont cru. Le roi régnait jusqu’à sa mort naturelle. Cependant, lorsque des calamités frappaient le pays, elles étaient attribuées au roi régnant. Ce dernier pour sauver le pays,  se suicidait. C’est ce qu’on appelait kwiha ubuki.

La rencontre du Burundi avec l’Occident engendre, entre autre, l’école. Ceux qui sortent de cette dernière ont d’autres visions du pouvoir. La concurrence entre eux et la situation socio-économique de l’époque donne au tuteur colonial l’occasion de les diviser.  Les vocables Abahutu et Abatutsi changent de sens également. Ils n’ont plus le sens économique mais deviennent des ethnies. Sans hésiter, les instruits s’y engouffrent. En effet, l’égoïsme de certains de ces instruits a primé sur les intérêts nationaux. Ils ont transposé leurs divisions jusqu’au fin fond de nos collines. De plus, les solutions qu’ils trouvent pour s’exclure mutuellement du pouvoir sont les assassinats et l’impunité. Voilà comment nos instruits font entrer le Burundi dans son Histoire moderne.

En novembre 1966, un coup d’Etat militaire chasse la vieille monarchie et la première république naît. Elle s’implante avec les tares citées ci-haut tout en ajoutant d’autres dont le régionalisme. La gestion de cette république n’apaise pas les tensions. L’année 1972 est une calamité : des milliers de hutu sont tués, des tutsi également. Là, l’antagonisme hutu-tutsi atteint le sommet. Même devant la mort, la solidarité humaine a peu joué :   les tutsi auraient dû se lever comme un seul homme et défendre les hutu ;  ces derniers n’ont pas fait mieux.  Et comme par hasard, l’impunité joue encore malgré des milliers de morts.

En 1976, un autre coup d’Etat arrive et nous voilà en deuxième république. Cette dernière s’attèle au développement économique mais ne démine pas le cancer de l’ethnisme. Tout continue comme si ce problème n’existait pas et il était même dangereux d’en parler. Malgré le développement économique, une autre division politique basée sur les clans s’installe. Ce qui est frappant, c’est que, ce qui certes est une réalité sociale au Burundi devient un élément de ralliement pour dominer les autres. Pendant la deuxième république, on raconte à voix basse que tout était dirigé par des personnes originaires de Bururi ; que l’armée est composée uniquement des gens de cette même province. En 1987, cette deuxième république cède la place à la troisième par un autre coup de force.

La troisième république arrive dans une période où le mot démocratie n’est plus un tabou en Afrique. D’ailleurs, dans certains pays, des conférences nationales sont organisées pour lancer les bases de la démocratie. Le Burundi ne reste pas en arrière. Les attaques de Ntega, de Marangara et de 1991 accélèrent le mouvement. Une nouvelle constitution reconnaît le multipartisme. Des élections sont organisées en juin 1993, les partis politiques sillonnent le pays pour battre campagne. On note la prédominance de l’ancien parti unique l’Uprona et le Frodebu. Voilà que malgré qu’il y ait des militants hutu et tutsi dans chacun de ces partis, l’Uprona est qualifié de tutsi et le Frodebu de hutu. Les vieux démons réapparaissent et on nous promet que, quel que soit le gagnant, il y aura la guerre. Et chacun y va avec des slogans provocateurs : Ako kari akarimi, ikinyamwanira,…

Les élections donnent le Frodebu gagnant. Le Président hutu élu est de Muramvya, province concurrentielle de celle de Bururi où étaient issus les trois présidents des républiques. Il est assassiné en octobre 1993 et nous voilà plongés dans la guerre promise. Elle ne s’arrêtera qu’après mille et une négociations entre instruits qui ont fondé les partis. Une fois de plus, les instruits ont défendu leurs intérêts immédiats. Ils se sont partagé les postes en pourcentage.

Une nouvelle constitution voit le jour avec une mise en place de nouvelles institutions démocratiques en 2005. Quel enthousiasme quand le président élu est installé. Les Barundi y croient, ils pensent que les hommes politiques ont réglé leurs contentieux et que le pays allait renouer avec la voie du progrès et de la paix. D’ailleurs, Le Burundi est cité comme exemple de réussite de gouvernance parmi les pays sortant des guerres. Cependant, tout n’était pas limpide : la liberté d’expression étant retrouvée, les médias annonçaient régulièrement des assassinats des militants du parti FNL, des membres de la société civile…  La bonne gouvernance perdait pied : corruptions, clientélisme,…

Mais voilà qu’en 2015, le pays retourne à la case départ. Il replonge à nouveau dans un désordre total suite à l’annonce de la représentation du président élu en 2005. Nos instruits s’étaient convenus qu’aucun président n’irait au-delà de deux mandats. Et voilà le pouvoir dit « hutu » échoue aussi comme les pouvoirs « tutsi » à bâtir la démocratie et l’unité dans le développement. Aujourd’hui, la misère est palpable et les aléas naturels n’arrangent pas les choses.

Nous pouvons crier haut et fort le slogan qui dit que «  Ntihica ubwoko hica intwaro mbi » (traduction libre : ce n’est pas l’ethnie qui tue mais les mauvais dirigeants).

Instruites et instruits honnêtes du Burundi, levez-vous. En effet, le constat est que nos hommes politiques hutu et tutsi ont baigné dans une culture politique de médiocrité. Le temps des meilleurs hutu et tutsi d’entre vous est venu. Qu’ils se lèvent. Oui qu’ils se lèvent et proposent une voie de sortie de ce cercle infernal. Qu’ils défendent le pluralisme politique, la liberté d’expression et d’entreprendre. Instruites et instruits honnêtes Barundi, il ne faut pas laisser le terrain à ceux qui nous ont conduits là où nous sommes. Le tournant dans lequel le pays est doit être négocié par vous, les autres le conduiront dans un ravin, l’expérience des 20 dernières années nous l’a prouvé plus d’une fois.

Instruites et instruits du Burundi, que les meilleurs d’entre vous se réunissent et mettent sur pied un programme de développement à nous présenter en 2020. Ce programme doit indiquer les points forts d’amélioration du niveau de vie des citoyens, de notre système d’enseignement, de création d’emplois, …

Oui instruites et instruits, le temps est venu de ne plus être spectateur mais d’être actif. Si vous ne forcez pas l’allure, personne ne le fera à votre place et les choses resteront encore tel qu’elles sont. Vous léguerez aux futures générations pleurs et misère. Au point où  les hommes politiques d’aujourd’hui en sont, les seules choses qui vaillent à exiger : le vrai pluralisme politique et la liberté d’expression. Le reste découlera de ce binôme.

Il n’est jamais trop tard pour bien faire et nous comptons sur vous.