DOSSIER INTERPETROL : CONFUSION DES SERVICES AU MINISTERE DES FINANCES

Burundi news, le 25/10/2010

Par Gratien Rukindikiza

Au Burundi, les dossiers économiques se succèdent mas ne se ressemblent pas. La durée de la médiatisation des dossiers dépend aussi de l'enjeu et des personnes qui suivent de près ces dossiers. Des coups bas ne sont pas écartés pour accéder ou garder un marché. Un dossier considéré comme réglé réapparaît d'une façon ou d'une autre. Le dossier Interpetrol bat le record de la longévité pour un dossier impliquant une société privée et un ministère de l'Etat burundais.

Une commission d'arbitrage composée par les intéressés du dossier

Après des mois, voire une année de méfiance et d'interdiction d'opérer au Burundi, Interpetrol a été autorisé de reprendre ses affaires d'autant plus que les approvisionnements en carburant posaient un problème. L'Etat et Interpetrol ont conclu un accord pour nommer une commission paritaire chargée d' étudier les dettes croisées et tirer une conclusion. Cette commission a tranché et Interpetrol devait rembourser 776 128 928 Fbu. Le procureur général de la République a pris acte de ce rapport et a classé le dossier sans suite en invitant Interpetrol à régler les 776 millions de Fbu.

OBR, à la croisée des chemins sans issue

Le 23 août 2010, le chef de cabinet au ministère des finances, Ndayikeza, a demandé à OBR de procéder aux vérifications des remboursements des montants dus par Interpetrol et d'arrêter le solde réel restant dû et clôturer définitivement le vieux dossier. Dans cette même lettre, le chef de cabinet précise déjà les montants à vérifier.

Le 1er septembre 2010, l'OBR répond au cabinet des finances que, suivant ses investigations, la société  Interpetrol doit plus de 9 milliards aux douanes et 0 francs burundi aux impôts d'une part, et que d'autre part, il n'a pas vu de trace de paiement des 32 milliards dont objet de la lettre du chef de cabinet. Paradoxalement, le même OBR affirme que la société Interpetrol doit plus de 40 milliards dans le tableau en annexe, tout en reconnaissant que les 32 milliards ne sont pas des recettes non recouvrées.

Le 15 septembre 2010, la ministre des finances,  fraîchement revenue du Sénat après une interruption d'un mois, écrit une lettre pour demander de recouvrer le montant par toutes voies légales et réglementaires.

Le 25 septembre 2010, à la grande surprise, l'OBR donne à la société Interpetrol une attestation de non redevabilité.

Que comprendre? L'OBR ne précise pas si Interpetrol a réglé les 40 milliards ou si Interpetrol ne devait pas cet argent; donc l'OBR devait présenter ses excuses. Il serait étonnant que Interpetrol puisse payer les 40 milliards en 25 jours.

Confusion des dossiers ou volonté de compliquer les dossiers?

En demandant à l'OBR de vérifier le remboursement fait à Interpetrol, le directeur de cabinet au ministère des finances a fait une erreur. L'OBR ne s'occupe pas des paiements des factures mais des recettes. De ce fait, il aurait au moins saisi les services des dépenses. En remettant en cause la conclusion du procureur général de la République, le directeur de cabinet aurait saisi la justice, au nom des intérêts de l'Etat burundais, pour contester les conclusions de classement sans suite.

A la question de justifier le remboursement fait à Interpetrol, l'OBR répond par une fausse réponse. Il s'agit de justifier ou non le remboursement. Or, l'OBR dit ne pas trouver de traces de remboursement de la dette d'Interpetrol de 32 milliards.   Les 32 milliards viennent d'un rapport fait par un cabinet d'audit international qui a été contesté par plusieurs sociétés pétrolières burundaises car il ne les a pas interrogées. Ce qui est aussi frappant, c'est le refus de consulter les chiffres au ministère des finances concernant les factures présentées par Interpetrol pour dégager la véracité du rapport. En espérant que la comptabilité soit bien tenue, le solde du débit et crédit n'est pas aussi compliqué à comprendre que l'astronomie.

Interpetrol a été remboursé 8 milliards de francs Bu sur présentation de factures. Certains ont parlé de double paiement, voire triple. Une commission a déjà fait un rapport. Personne n'arrive à expliquer si les 32 milliards concernent une autre dette née depuis 2009; donc qui n'a rien à voir avec le remboursement fait par l'ancienne ministre des finances Denise Sinankwa. A lire la lettre de l'OBR, il s'agit d'une dette d'Interpetrol. Un trop payé concernerait le service des dépenses  qui paie et non l'OBR qui s'occupe  des recettes.

Pourquoi ce flou permanent sur ce dossier?

Certaines personnes profitent du flou qui entoure ce dossier pour l'agiter à tout moment pour préserver ou accéder à leurs intérêts. Ce dossier est au centre d'une lutte interne au parti au pouvoir. Il serait souhaitable que ce dossier soit expliqué clairement, avec des données pour que les Burundais comprennent si les intérêts de l'Etat ont été lésés ou pas.

Le solde des dettes croisées d'Interpetrol évolue chaque mois. Il est impératif de trancher définitivement sur le remboursement fait à une certaine époque et les dettes actuelles. La communication n'a pas été le fort dans ce dossier; ce qui laisse les portes ouvertes à toutes les rumeurs, interprétations, magouilles, marchandages etc...