L’interview d’Adolphe NSHIMIRIMANA passé à la loupe…
Par The Leadership Institute
Le 17 février 2008
Adolphe NSHIMIRIMANA, le patron des services de renseignement burundais nous intéresse à plusieurs égards car nous voyons en cet homme le symbole du mal burundais.
C’est à ce titre que nous avons relu et ré-analysé ses propos sur www.burundirealite.org. Etant un membre des services secrets, il devrait savoir que donner des interviews est dangereux car cela permet parfois de révéler sa personnalité et de trahir sa profonde pensée. Mais est-il réellement un professionnel du renseignement ou un professionnel en quoi que ce soit sauf en « tueries diverses » ?
Voici notre diagnostic :
1. Est-il un militaire, un responsable du renseignement ou un politicien :
A cette question, il nous fournit la réponse lui-même : « Tous ceux qui m’ont accusé sont manipulés par certains politiciens qui, à tout prix, veulent le pouvoir ». Les politiciens qui veulent le pouvoir au Burundi s’attaquent à lui car c’est LUI qui détient le pouvoir, donc c’est un politicien malgré qu’il occupe ce poste parce qu’il a été nommé par décret et ne dispose d’aucun mandat populaire. Ainsi, si vous voulez le pouvoir, il faut accuser ADOLPHE : c’est lui qui le détient. Ridicule quand on sait qu’un simple décret le met à la rue. Il a encore dit : « Comme je vous l’ai déjà dit M. le Journaliste, il y a des politiciens avides du pouvoir qui sont en train de manipuler les gens ». Accuser Adolphe ou même le démettre de ses fonctions ne signifie nullement « diaboliser le CNDD FDD » à moins qu’il soit un membre du CNDD FDD, ce qu’il nie. Qui trompe qui ? De toutes les façons, le CNDD FDD est un mouvement politique et les fautes lourdes commises par Adolphe NSHIMIRIMANA, patron des services de renseignement, ne sont pas imputables au parti. « C’est notamment ceux qui ont perdu les élections de 2005 qui veulent tout faire pour diaboliser le parti au pouvoir CNDD-FDD », a-t-il dit. Il n’a donc pas à se cacher derrière le CNDD FDD pour se protéger des attaques dues à sa propre dérive. Mais il a peut-être raison de dire cela : ce qu’il fait, il le fait en complicité avec le Président de la République qui, de son côté, est Président du Conseil des Sages du CNDD FDD.
2. Son rôle dans la guerre du mouvement CNDD FDD :
Il n’a pas menti sur ses années dans le maquis car il y est entré effectivement en 1996 fuyant les bombardements de Kamenge. Il a donc dit la vérité quand il parle de 12 ans au combat. Cependant, ce n’est pas lui qui a déclenché la guerre contre l’armée de l’époque. Quand il dit : « Ils doivent tout faire pour me diaboliser car ils ont peur de moi pour avoir mené la guerre pendant plus de douze ans et rester en vie. J’ai déclenché le combat contre l’armée burundaise de l’époque.. ». Nous n’y voyons que de la vantardise pour une guerre qui était communément appelée celle du « peuple », lequel peuple qu’il est en train de tuer aujourd’hui. En effet, hier c’était une guerre contre l’armée mono ethnique, et aujourd’hui QUI TUE LES CITOYENS BURUNDAIS ? C’est le pouvoir, par le biais de ce même Adolphe NSHIMIRIMANA et le PALIPEHUTU FNL. Malheureusement, ce sont les populations hutus qui avaient lutté pour l’avènement d’une armée « nationale » pour les protéger, qui paient le prix fort aujourd’hui et qui succombent sous les tueries et autres violences perpétrées par des éléments manipulés de la Police Nationale du Burundi ou des agents des services de renseignement. Comment peut-il oser dire que ceux qui le diabolisent ont peur de lui ? C’est un langage de quartier car lui-même n’avait pas eu peur de combattre l’armée burundaise qui avait des moyens et des militaires bien formés. N’eut-été les sacrifices de ceux-là même qu’il malmène aujourd’hui (les populations), il n’aurait pas survécu. Enfin, il n’est pas le seul à avoir mené la guerre qui se déroulait, comme lui-même le dit, sur le plan militaire et politique (négociation). Enfin, répétons-le, le CNDD FDD n’a pas gagné la guerre.
3. Le Burundi vit une instabilité politique : Alors que le Président de la République et le Président du parti CNDD FDD se relaient sur les ondes nationales et internationales pour dire que TOUT VA BIEN, le chef des services de renseignement lui, explique l’insécurité dans le pays dans les termes suivants : « Les armes qui purulent dans la population ainsi que l’INSTABILITE POLITIQUE font que les malfaiteurs de toutes sortes en profitent pour continuer à semer la désolation. » C’est vraiment révélateur de voir comment les responsables d’un tel niveau se contredisent à ce point. Les journalistes de Burundi Réalités auraient dû lui demander de quel genre d’instabilité politique il veut parler. Ca aurait été intéressant de voir sa réponse.
4. L’image des services de renseignement est ternie : le mot de la fin a été : « Au personnel de la Documentation, je dis qu’il faut travailler de façon à redorer leur image. ». Cet aveu est de taille car il révèle l’objectif de l’interview. En effet, l’interview constitue un « coup de pub pour redorer son image », à la Jean Marie RURIMIRIJE, un proche d’ailleurs de la rédaction de Burundi Réalités. Il est vrai que la complicité qui règne entre Jean Marie RURIMIRIJE et Adolphe NSHIMIRIMANA étonne plus d’un, y compris le Président NKURUNZIZA, malgré les apparences. Jadis un proche d’Hussein RADJABU, Monsieur RURIMIRIJE semble aujourd’hui filer le parfait amour avec le patron des services de renseignement, lesquels sont pointés du doigt dans le montage pour accuser RADJABU d’atteinte à la sûreté de l’Etat. Nous décrions ce comportement d’un homme d’affaires qui semble hanté par la proximité du pouvoir, quelle que soit la nature de ce pouvoir. Il est vrai qu’en politique, « il n’y a pas d’amis mais des intérêts », mais RURIMIRIJE est-il un homme politique ? Qu’il le dise clairement et endosse pleinement la responsabilité des dérives de ses « amis politiques », au lieu de négocier sous la table des interviews pour les barbouzes du pouvoir. Mais pour les hommes d’affaires burundais, nous pensons que leur intérêt à long terme n’est pas de monnayer les accointances politiques mais plutôt de soutenir les partis politiques en se basant sur leur idéologie et leur programme de société. Une dictature ne pourra jamais offrir des conditions favorables à leurs affaires, donc est contraire à leurs intérêts. Quant à redorer l’image de la documentation, ce ne sera JAMAIS possible sans mettre fin à l’impunité et sans des mesures pour professionnaliser les services de renseignement, ce que Adolphe NSHIMIRIMANA ne peut faire pour deux raisons : d’une part, il est mouillé dans les actes de tueries, de violences et de tortures et, d’autre part, nous ne pensons pas qu’il ait les capacités suffisantes pour réformer son service et l’adapter aux nouvelles réalités du Burundi démocratique.