Burundi news, le 24/06/2010

 

 

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                                                                                               Bujumbura, le  22 juin 2010

                                                                      

           LETTRE OUVERTE A :

                                                          A Son Excellence le Président de la République du                                                                                    Burundi, Avec les assurances de notre plus haute                                                                                  considération 

                                       à Bujumbura

 

Transmis copie à :

 

-          S.E  Yoweri KAGUTA MUSEVENI, président de la République Ougandaise ;  Avec les assurances de notre plus haute considération ;

-          S.E Jakaya KIKWETE MRISHO Président de la République Unie de Tanzanie ; Avec les assurances de notre plus haute considération ;

-          S.E. Paul KAGAME , Président de la République Rwandaise ; Avec les assurances de notre plus haute considération ;

-          S.E. Jacob ZUMA , Président de la République Sud Africaine ; Avec les assurances de notre plus haute considération ;

-          S.E Joseph KABILA KABANGE, Président de la République Démocratique du Congo ; Avec les assurances de notre plus haute considération ;

-          S.E. MWAI KIBAKI, Président de la République du Kenya ; Avec les assurances de notre plus haute considération ;

-          S.E. BAN  KI  MOON, Secrétaire Général des Nations-Unies ; Avec les assurances de notre plus haute considération ;

-          S. E. Jean PING, Président de la Commission  de l’Union Africaine ; Avec les assurances de notre plus haute considération ;

 

 

     Objet :       Inconstitutionnalité  et illégalité de l’élection

          Présidentielle à candidature unique

et des élections communales du 24 mai 2010.

 

Excellence Monsieur le Président,

 

Nous  avons  l’honneur  de vous faire parvenir nos avis et considérations  sur  la situation  juridique actuelle engendrée  par la non- observation et la violation  flagrante  de la Constitution et la loi électorale par la   CENI  en rapport avec les dernières élections du 24 mai 2010 et  aussi avec l’élection présidentielle à Candidature unique en cours. Nous nous  adressons  encore  à Vous  en votre qualité de garant de la bonne  marche et du bon fonctionnement  des Institutions de la République  en vous demandant  par la même occasion de daigner intervenir le plus rapidement possible pour redresser la situation politique actuelle  avant qu’il ne soit trop tard. Vous le pouvez, Excellence Monsieur le Président,  pourvu  que vous puissiez   mettre en œuvre l’article 95 de la Constitution  pour le fonctionnement régulier des Institutions dans  l’intérêt supérieur  de la Nation.

 

I.     Pertinence de la question.

 

1.    Invoquer la loi dans les affaires politiques n’est pas chose aisée mais  de toute manière,  les responsables politiques doivent se mettre d’accord sur le minimum de consensus   proclamé dans la Constitution à l’article 48 qui dispose que « les droits fondamentaux doivent être respectés dans l’ensemble de l’ordre juridique, administratif  et institutionnel. La Constitution est la loi suprême. Le législatif, l’exécutif et le judiciaire doivent la faire respecter ».  

 

2.    La  CENI est la fille ainée de la Constitution, elle vient dans l’ordre des institutions avant le pouvoir exécutif, l’Institution législative et autres, c’est dire que  la  place qu’occupe la CENI  est une place privilégiée dans l’organisation des élections et elle a  une grande responsabilité car la Constitution, en son article 91 alinéa (f),  dispose entre autres  que la CENI  est chargée de « veiller, en appliquant des règles appropriées,  à ce que les campagnes ne se déroulent de manière à inciter à la violence ethnique ou de toute autre manière contraire à la présente constitution ». C’est donc  à la CENI que revient le rôle d’organiser les élections et  les campagnes  relatives à ces dernières. Bien  organisées,   elles donnent  la confiance  et la crédibilité aux pouvoirs qui en sont issus ;   mal organisées par contre,  elles inoculent un germe destructeur dans les pouvoirs qui en sont issus. La CENI  a donc l’obligation de résultat, elle doit mettre en œuvre  tous les moyens en sa possession pour arriver aux bons résultats.

 

II.  Système politique et  les élections au Burundi .

 

3.    Aux termes de l’article 75 de la Constitution, le système politique Burundais est multipartite et  les élections  consacrées par l’article 87 doivent être l’expression de ce multipartisme. Celles-ci   doivent être  libres, transparentes et régulières (article 87) et aucun parti ou coalition de partis ne peut en être exclu, car la Constitution  dispose  que « les partis politiques et  les coalitions de partis politiques  doivent promouvoir la libre expression du suffrage et participent à la vie politique par des moyens pacifiques ». A cet effet,  et pour cela,  la Commission Electorale garantit la liberté, l’impartialité et l’indépendance du processus électoral (article 89).

 

III.                      Rôle de la CENI dans le présent processus électoral.

 

4.    Au vu de l’attitude de la CENI  à l’égard des plaintes des  partis politiques de l’opposition contre les violations de la loi électorale,  on doute de la volonté de la CENI de jouer pleinement son rôle.  Le président de la  CENI a l’habitude de dire souvent qu’il y a eu des erreurs certes, mais  que les erreurs commises sont sans importance pour  pouvoir  mettre en péril les résultats des élections.  Et pourtant, si le législateur a insisté sur certaines dispositions, c’est qu’il entendait que celles-ci puissent être  respectées sous peine d’annulation partielle ou totale des élections suivant l’étendue de la violation.  Les Romains disaient : « Dura lex, sed lex » (la loi est dure mais c’est la loi). On peut citer à titre d’exemple la violation de l’article 66 de la loi électorale qui dispose entre autres que   ne sont pas pris en compte dans le dépouillement et sont considérés comme nuls: (…) 3° les bulletins trouvés sans enveloppes ou dans des enveloppes non réglementaires. Quelle est  la solution si un bulletin est glissé dans une enveloppe non réglementaire ?

 

5.    Le mot réglementaire  a son sens car la loi électorale en son article  37 prescrit que  le vote a lieu sous enveloppe cachetée et paraphée ;  c’est celle-là l’enveloppe réglementaire. Et si le législateur  a insisté sur cela, c’est qu’il voulait prévenir des tricheries et /ou  des bourrages éventuels des urnes.

 

6.    Serait-il superflus de poser à la CENI la question de savoir combien   d’enveloppes cachetées et paraphées ont porté les  bulletins de vote ? Et si aucune  enveloppe n’était ni cachetée ni paraphée, la conséquence fait que les bulletins glissés dans de telles enveloppes étaient nuls et de nul effet. Quelle serait  alors  la sanction si tous les bulletins sont nuls sur toute l’étendue de la République ?  La loi étant ce qu’elle est,   dure comme elle devrait l’être, les élections devraient être annulées. Mais la  CENI n’a pas osé annuler les votes et ce manque de courage  hypothèque  sa propre crédibilité.  La CENI n’étant pas un organe politique, sa seule raison justificative de sa crédibilité est de faire respecter la loi règlementant les élections. 

 

 

 

 

 

IV.                      Légalité du retrait des partis d’opposition.

7.    Voici le tableau  de  quelques dispositions de la loi électorale qui,  à  des degrés divers, ont entaché la régularité du vote.[1]

IRREGULARITES

DISPOSITIONS VIOLEES

RESPONSABLE DE VIOLATION

INSCRIPTION AU ROLE

1

Délivrance de la carte d’électeur jusqu’au jour du scrutin.

Art 16 du CE[2]

CENI

2

Autorisation de voter sur présentation d’un document non reconnu par le CE (récépissé). 

Art 16 du CE

CENI

CAMPAGNE ELECTORALE

3

Poursuite de la campagne électorale en dehors de la période et des heures fixées.

Art 25 du CE, dernier alinéa.

CENI

4

Distribution de l’argent, de la nourriture, des habits, des ustensiles de cuisines à des fins de propagande.

Art 33 du CE, premier alinéa.

CNDD-FDD+CENI

5

L’utilisation des biens et des moyens de l’Etat ou d’un organisme public à des fins de propagande.

Art 33 du CE, deuxième alinéa

CNDD-FDD + CENI

6

Le port des emblèmes du parti ou du candidat sur les lieux du scrutin.

Art 35 du CE

CNDD-FDD (ex.Conseiller du Gouverneur de Kayanza) + CENI complice

OPERATION DE VOTE

7

L’autorisation du scrutin au delà de 18 heures

Art 36 du CE

CENI

8

Utilisation des enveloppes non cachetées et paraphées pour le scrutin

Art 37, premier alinéa, et 55.

CENI

9

Utilisation des isoloirs qui n’assurent pas le secret du vote.

Art 39, premier alinéa

CENI

10

Les mandataires des partis politiques et des indépendants n’ont eu les lettres d’accréditation  que la veille ou le jour du scrutin sans aucun contrôle..

Art 41 du CE

CENI

11

Les mandataires ont le droit de faire inscrire leurs observations dans les PV. Ils doivent avoir une copie de ces PV. Or à certains endroits, la Police les ont chassé au moment du dépouillement. Or les PV ne sont toujours pas disponibles.

Art 42, 48 et 62alinéa 3 du CE

CENI

12

Modifications des résultats de vote. La CENI a publié des résultats en omettant le nombre des voix nulles ou des abstentions.

Art 42 du CE

CENI

13

Les mandataires sont pris en charge par la CENI. Certains ont travaillé jour et nuit  sans  manger.

Art 43 du CE

CENI

14

Utilisation de l’ancre « indélébile » qui s’effaçait au premier nettoyage.

Art 55,  alinéa 6

CENI

15

Les bulletins non utilisés n’ont pas été décompté. D’où l’absence des PV.

Art 60 et 61 du CE

CENI

DEPOUILLEMENT

16

Les urnes noires n’ont pas été dépouillées, tandis que les urnes blanches l’ont été en absence des mandataires des partis politiques. D’où l’absence des PV de dépouillement.

Art 62 du CE

CENI

17

Le dépouillement n’a pas suivi immédiatement après la clôture du vote et au lieu où s’est déroulé le scrutin.

Art 63, 64, 65 du CE

CENI

18

Manipulation des chiffres par la CENI. En effet, les bulletins nuls ne sont pas comptabilisés parmi le nombre des votants alors qu’ils doivent obligatoirement apparaître.

Art 66, 67, 68 du CE

CENI

19

 Découverte des urnes encore sous scellés après la proclamation des résultats par la CENI

Art 69 du CE

CENI

20

Après le dépouillement, le président du bureau de  vote proclame le résultat à haute voix et PV en est dressé. Cela  n’ a pas été fait.

Absence des PV du scrutin plusieurs jours après la proclamation des résultats. alors que  les PV devaient être donnés aux mandataires le même jour.

Art 70, 71 du CE

CENI

         

 

8.    Devant toutes ces irrégularités  qui crèvent les yeux, la CENI est restée insensible,  opposant plutôt aux plaignants  le même discours que les violations  ont été mineures et ne pouvaient aucunement  influencer les résultats de  vote. Comment la CENI, arbitre impartiale, a pu savoir si ces manquements n’ont pas influencé les résultats  du vote au moment où l’on trouve des urnes bourrées non dépouillées après la proclamation des résultats.  Les violations de la loi étaient tellement nombreuses que la bonne foi aurait suggéré de recommencer les élections.

 

9.    La CENI persistant dans  l’erreur  a découragé les Partis d’opposition qui n’avaient plus rien à espérer d’elle. Celle-ci  ne pouvait plus accomplir sa mission sans respecter  la loi.


 

V.                Inconstitutionnalité de la candidature unique  et de la campagne  solitaire pour l’élection  présidentielle.

 

10.                        Après avoir validé des résultats qui étaient nuls au regard de la loi,  ne  fût-ce qu’en vertu de l’  article 66  de la loi électorale, la CENI vient encore de valider une candidature unique pour les présidentielles en violation de l’esprit et de la lettre de la Constitution. Celle-ci instaure le multipartisme dans le pays en son article 75 ;  elle  reconnaît les coalitions des partis politiques pendant la période électorale (article 81) et assure que ces coalitions doivent promouvoir la libre expression du suffrage  et participent à la vie politique par des moyens pacifiques (article 79).

 

11.                        La Constitution garantit la libre expression (article 31), elle garantit la liberté d’association et de coalition (article 32 et 81) et elle interdit de soumettre quiconque à des mesures de sûreté si ce n’est pour des raisons d’ordre public ou de sécurité de l’Etat (article 42). Or sur terrain la CENI et le Ministre de l’Intérieur ont  muselé  la Coalition des partis politiques d’opposition au nom, non pas de l’ordre public ou la sécurité de l’Etat,  mais  bien  de la facilitation de la campagne aisée  d’un seul parti CNDD-FDD qui ne devrait souffrir d’aucune contradiction.

 

12.                       Et pourtant, la Constitution exclut de façon formelle l’ élection présidentielle à candidature unique . En effet, l’article 102 alinéa 3 dispose que   «  seuls peuvent se présenter au second tour du scrutin les deux candidats qui ont recueilli le plus grand  nombre de suffrages au premier tour. En cas de désistement de l’un ou de l’autre des deux candidats, les candidats suivant se présentent dans l’ordre de leur classement après le premier scrutin ». D’après cet article la constitution exige au moins  que la compétition électorale au premier tour oppose deux candidats.

 

13.                        Alors que la Campagne électorale doit être organisée par la CENI suivant la constitution en son article 91 littera f, la CENI a laissé faire le  Ministre de l’Intérieur qui  a  édicté  des mesures  d’interdiction de manifestation et d’expression  aux partis d’opposition   pour favoriser une   campagne à sens unique. En guise d’exemple nous rappelons  la rencontre du 8 juin 2010 tenue par  le Ministre de l’intérieur Edouard Nduwimana  à l’intention des Gouverneurs de Provinces. Serait-il trop oser si l’on disait que la CENI a pris fait et cause pour le CNDD-FDD ?

 

Cette campagne solitaire viole aussi la loi électorale en ses articles 25 à 31.


 

VI.             Illégalité d’une campagne électorale solitaire.

 

14.                        La campagne électorale solitaire  d’un seul parti, ne répond nullement à la définition d’une campagne électorale telle qu’elle est stipulée par le code électorale. En effet l’article 25 du code électorale dispose que la campagne électorale est l’ensemble  des opérations de propagande précédant une élection ou un référendum et visant à amener les électeurs à soutenir les candidats en compétition ou à se prononcer sur une question qui leur est soumise par voie de consultation…. ». Cela veut dire en clair qu’il  ne peut y avoir compétition  qu’entre deux ou plusieurs candidats ou alors il s’agit d’un simple référendum.

La CENI devrait donc appeler les choses par leur nom et ne pas appeler « campagne électorale  » quelques activités politiques faites en marge de la loi. A la limite, on pourrait parler de «  plébiscite » mais celui-ci n’est prévu  ni par la Constitution ni par la loi électorale du Burundi.

 

15.                        La raison avancée par la CENI pour accueillir la candidature  du parti unique   serait  que la loi électorale n’a ni prévu ni empêché  la campagne électorale avec une candidature unique. Cependant,  si le législateur n’a pas songé à organiser la campagne  à parti unique,  c’est sûrement parce qu’il était inconcevable à l’époque de l’étude de la loi électorale  que cette hypothèse se produise, tellement  la démocratie  était en marche.  En ne légiférant pas le cas d’espèce, c’est que  le législateur l’avait trouvé simplement aberrant. Il faut plutôt que  la CENI puisse  en tirer  les conséquences  de droit,   s’arrêter et réfléchir avant d’avancer dans le vide juridique. Il faut soit  arrêter la compétition soit chercher le consensus  sur la façon de gérer  cet événement  résultant de la  non observation de la loi.

 

16.                        En  acceptant  de nager dans le vide juridique,  la CENI  s’est substituée au législateur pour amender cette loi, alors qu’elle   n’a pas les pouvoirs législatifs ;  la Constitution  dit que la CENI doit appliquer des « règles appropriées » c’est -à -dire  des règles existantes (article 91) et non  des règles à inventer dans le but de favoriser le Parti au pouvoir. Or le favoritisme est vigoureusement  condamné par la Constitution qui dispose que « toute restriction d’un droit fondamental doit être fondée sur une base légale, elle doit être justifiée par l’intérêt général ou pour la protection d’un droit fondamental d’autrui »( article 47 de la Constitution).

 

17.                        De surcroît ,   la Constitution prescrit à la CENI de veiller à ce que les coalitions de partis puissent  s’exprimer librement devant le peuple appelé aux urnes de l’ élection présidentielle soit pour la soutenir soit pour la désavouer car l’article 79 de la Constitution  dispose que «  les partis politiques et les coalitions  de partis politiques doivent promouvoir la libre expression du suffrage et participent à la vie politique par des moyens pacifiques ».

 

18.                        Ainsi,  ni dans la Constitution,  ni dans la loi électorale rien n’empêche les autres partis qui n’ont pas présenté de candidats, de s’exprimer lors d’une campagne électorale par des moyens pacifiques. A ce propos l’article 29 du code électoral  sur lequel  la CENI et le Ministre de l’intérieur s’appuient pour empêcher les partis d’opposition de faire campagne est mal interprété puisqu’il autorise  plutôt à tous les partis reconnus  de se lancer dans les campagnes électorales. Cet article est ainsi libellé : « Seuls les partis régulièrement constitués, leurs candidats ainsi que les candidats indépendants régulièrement inscrits sont autorisés à organiser des réunions électorales ». D’après le dictionnaire ‘Le  Petit Robert’, éd. 2003,  ce qui est  régulièrement constitué est ce qui se trouve dans une situation légale.

 

VII.          Organes habilités à organiser les élections.

 

19.                        Il n’appartient pas  au Ministre de l’Intérieur de réglementer le déroulement de l’élection présidentielle d’autant plus que le Ministre de l’Intérieur est  bénéficiaire des avantages qu’il édicte.  C’est ce favoritisme que la Constitution a voulu bannir en mettant en place la CENI et en proclamant  son indépendance (article 90).

 

20.                        A la limite,  pour cette compagne à candidat unique, la CENI aurait dû faire recours aux  dispositions régissant  le référendum. Elle n’aurait trouvé, peut-être pas toute la solution,  mais tout au moins des débuts de solution, car il y a beaucoup de similitudes entre le référendum et la candidature à parti unique. Les deux sont votés par une même  alternative de « oui » ou de « non ».

 

21.                        La loi électorale dans ses dispositions relatives  au  référendum  dispose que «  celui-ci prend la forme d’une question posée aux électeurs qui y répondent par ‘oui’ ou ‘non’.  L’inscription sur  les listes électorales ainsi que toutes les phases  du scrutin se déroulent conformément aux dispositions du titre II de la  loi électorale (articles 204 et 205).

 

22.                        Or la campagne électorale traitée  dans le Titre II  sous les articles 25 à 35 n’exclut aucun parti ni aucune coalition de partis, n’en déplaise au Président de la CENI. Il y est dit  que la propagande électorale se fait par de discours, messages lus, chantés ou proclamés publiquement, affiches, distribution de circulaires,  réunions et voies de  presse ainsi que par tout autre signe du parti ou du candidat. Ici rien ne dit que le parti doit être candidat aux élections (article 26).

 

23.                        L’article 30 dispose que la propagande électorale est libre sous réserve du respect de l’ordre public  et de l’observation des prescriptions  légales sur les réunions publiques.  Seules des déclarations injurieuses ou diffamatoires à l’endroit des partis politiques ou des candidats sont interdites (article 32). Ici aussi rien n’exclut les partis qui ne sont pas candidats.

 

24.                        Rien donc n’interdit à la coalition politique d’opposition de faire des manifestations politiques pacifiques lors de ces campagnes.

 

25.                        Il  est donc dommage que la CENI ait laissé le Ministre de l’intérieur le soin d’interdire des manifestations électorales prévues et autorisées par la loi ; c’est cela qui fait douter de son indépendance et qui réconforte  la coalition des partis d’opposition à demander sa démission.

 

VIII.       Avantage de privilégier le dialogue.

26.                       En cas du  silence de la loi,  la seule  solution pour la sortie d’une crise, car il faut bien  parler de crise, est le dialogue entre partenaires politiques pour s’entendre sur les règles du jeu. Les barrières  à ce dialogue  sont l’amour propre qui amène à la non-acceptation des critiques,  la peur du lendemain de la fin du mandat présidentiel et la peur des dépenses supplémentaires.

 

27.                       Les membres de la CENI ont peur que l‘on dise qu’ils ont échoué dans leur mission et malheureusement c’est une évidence, mais  ils ne doivent pas s’en offusquer car l’erreur est humaine ; c’est persévérer dans l’erreur qui est insupportable et diabolique.  La CENI ne peut, contre vents et marées, vouloir continuer les échéances alors qu’elle n’a plus la confiance des partenaires politiques parce qu’elle est considérée comme premier responsable du mal qui est arrivé. Le président de la CENI fait erreur lorsqu’il croit que son travail est purement technique alors que son œuvre a un impact hautement politique. Il faut plutôt qu’il sache présenter sa démission ; c’est là un  signe de grandeur politique.

 

 

28.                       Le parti au pouvoir CNDD-FDD devrait  accepter l’annulation des élections communales du 24 mai 2010 et le report des  élections.

 

29.                       Nous les partis de la coalition ADC -IKIBIRI acceptons  que les  institutions restent en place  le temps qu’il faudra pour s’entendre sur un calendrier des prochaines échéances qui se feraient en temps raisonnable mais à bref délais.

 

30.                       La peur des dépenses supplémentaires peut être apaisée par l’organisation des élections à peu de frais avec les moyens dont la CENI dispose actuellement.  Une seule échéance comportant les communales  et  les législatives peut suffire pour dégager les députés et les conseillers communaux moyennant les arrangements législatifs  nécessaires.

 

31.                       L’avantage de ce scrutin unique  est d’épargner les moyens financiers et humains et de redonner de la confiance dans les institutions. Le matériel est déjà sur place, les fonds à utiliser sont ceux prévus pour  législatives ; ce qui est un avantage financier certain. Les  présidentielles et les sénatoriales se dérouleraient  ultérieurement.

 

32.                        Tout le monde y gagnerait  et le peuple burundais y gagnerait d’avantage par des élections apaisées, acceptées, libres et régulières. Il y gagnerait la paix et le développement car,  pour sûr, seule la paix est le gage du développement durable.

 

VIII.                Conclusions.

33.                       On ne peut pas dire que les élections qui ont violé tant de dispositions de la Constitution et de  la loi électorale soient régulières ; on ne peut pas dire non plus  qu’une candidature unique suivie d’une campagne solitaire puisse être constitutionnelle.

 

34.                       Les violations faites à la loi et surtout à la Constitution de la République sont des violences au même titre que les autres, elles sont même plus à craindre que les violences physiques parce qu’elles violent  l’état de conscience  des citoyens et conduisent à l’état de non droit. L’état de non droit est la pire des choses qui puissent  arriver à une nation parce qu’elle conduit à la dictature  qui détruit les  filles et  fils du Pays.

 

35.                       Vous devez œuvrer, Excellence Monsieur le Président,  pour la paix et la Démocratie  et c’est aussi un principe constitutionnel  qui dispose que «  tout burundais a le devoir de contribuer à la sauvegarde de la paix, de la démocratie et de la justice sociale » (article 73 de la Constitution). 

Veuillez agréer,  Excellence Monsieur le Président, les assurances de notre plus haute considération.

 

Partis signataires : ( voir la liste en annexe)

 

C.P. I. à :

 

-       CENI ;

-       Assemblée Nationale ;

-       Sénat ;

-       Missions diplomatiques et consulaires ( toutes).

-       Organes observateurs des élections du 24 mai 2010.

-       Medias (tous)

 

 


 

 

Partis signataires de la lettre ouverte adressée au Président de la République par l’ADC-IKIBIRI en date du 22 Juin 2010 :

 

 

-       ADR-URUNANI RW’IMVUGAKURI ;

 

-       CDP ;

 

-       CNDD ;

 

-       FEDS-SANGIRA ;

 

-       FNL ;

 

-       MSD ;

 

-       PARENA ;

 

-       PIT ;

 

-       PPDRR ;

 

-       RADEBU ;

 

-       SAHWANYA-FRODEBU ;

 

 

-       UPD-ZIGAMIBANGA ;

 


 

[1] Source : mémorandum des partis de l’opposition réunis dans l’ADC- ikibiri

[2] CE= code électorale