LETTRE AU MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES FRANCAIS

 Burundi news, le 25/05/2015

 

Forum des Diasporas Burundaises                                                            Suède, le 21 mai 2015

(Belgique, France, Norvège, Royaume-Uni et Suède)

            FODIB

E-mail : fodib14@yahoo.fr                                                                                                                

                                                                                                                                                                            

                                                                                              À S.E. Laurent FABIUS

                                                                                           Ministre des Affaires Etrangères

                                                                                               de la République Française

                                                                                                                      à

                                                                                                                Paris

 

Excellence Monsieur le Ministre,

Par la présente, nous membres de la Diaspora Burundaise rassemblés au sein du FODIB (Forum des Diasporas Burundaises en Europe) , touchons sur la sonnette d’alarme et recourons à  votre Haute Autorité pour que la France déplore , comme d’autres états l’ont déjà entrepris, l’état des populations civiles du Burundi qui subissent aujourd’hui des violences graves de la part des corps étatiques de répression dont la Police Nationale et une partie de l’Armée Nationale vouée au président Nkurunziza et non-étatiques  constitués par la Milice Imbonerakure du parti au pouvoir, le CNDD-FDD. La situation s’avère très grave et mérite votre rapide réaction avant qu’il ne soit trop tard. 

En effet, Excellence Monsieur le Ministre, un bref rappel du fil des événements trace l’ horreur fulgurante  qui règne dans notre pays le Burundi à cause du président Nkurunziza qui veut à tout prix se maintenir au pouvoir en briguant un 3ème mandat contraire à la Constitution et aux Accords d’Arusha chers à toute la population burundaise qui les a durement négociés après un bain de sang.

1.      Dans le souci de prévenir une crise potentiellement grave, la Communauté tant nationale qu’ internationale y compris le Haut-Commissaire pour les Droits de l’Homme s’est relayée auprès du président Nkurunziza  pour le convaincre de ne pas prétendre à un autre mandat inconstitutionnel, un mandat de tous les dangers. Rien n’y fut .

2.      En date du 25 Avril 2015, le parti au pouvoir, le CNDD-FDD a organisé un congrès pour plébisciter Pierre Nkurunziza, comme candidat du parti aux élections présidentielles de juin 2015 pour un troisième mandat 

Dès le lendemain de cette candidature, des manifestants ont envahi la rue y trouvant des policiers et miliciens Imbonerakure pré-positionnés et prêts à en découdre avec des civils non armés en tirant des balles réelles sur des manifestants. Les manifestations ont continué jusqu’aujourd’hui exigeant le retrait du 3ème mandat de Nkurunziza. Près d’une trentaine de manifestants pacifiques

ont déjà rendus leur âme par des balles réelles tirées par les policiers appuyés par les miliciens Imbonerakure. Chaque jour, des manifestants sont tués,  blessés ou emprisonnés et d’autres citoyens qui s’opposent au troisième sont accusés de tous les maux et sont arrêtés . Ceci n’est rien d’autre qu’un crime contre l’humanité.

 

3.      La situation délétère qui prévaut dans l’arrière-pays a entraîné une forte fuite de la population vers le Rwanda, la Tanzanie et la République Démocratique du Congo ; d’autres ont fui la capitale Bujumbura pour se réfugier à l’intérieur du pays , d’autres continuent à fuir ou rester dans la clandestinité pour sauver leur vie. Actuellement plus de 130.000 burundais ont déjà fui le pays. Comme le malheur ne vient jamais seul, on signale déjà une trentaine de morts de choléra dans un camps de réfugiés. Il est grand temps de réagir.

4.      Un plan d’élimination physique  des opposants au 3ème mandat conçu par les services de renseignement du président Nkurunziza  avait été dénoncé dernièrement et prend effet. Et voilà, sans tarder, un premier leader de l’opposition, le Président du parti UPD, Feruzi vient d’être lâchement assassiné touché par plusieurs balles tout près de son domicile avec son garde du corps par des personnes en uniforme de la garde présidentielle. Quelle horreur ! La liste est longue. Au même moment , Nkurunziza continue à l’aise sa campagne électorale  dans le cadre de sa course à lui seul pour les élections communales, législatives et présidentielles, comme si rien n’était. Quel cynisme !

Excellence Monsieur Ministre,

D’emblée,  nous constatons  avec amertume que la France semble privilégier la  protection de  ses ressortissants  et soutenir  plutôt le président Nkurunziza soit disant que le flou de la Constitution sur les mandats est à son avantage .

 

Nous déplorons que la population est  en train de mourir à cause d'un 3ème mandat que toute la communauté internationale , à l'exception de certains gouvernements comme le gouvernement français , a clairement dénié à Pierre Nkurunziza. 

 

Nous  affirmons qu’aucune considération ni aucun calcul géostratégique ne peuvent aller dans le sens contraire des intérêts du peuple . Le déni de la démocratie à travers la violation de la constitution et l'enterrement des accords d'Arusha signés dans le sang ne sauraient être encouragés par un pays comme la France, terre des droits de l'homme et surtout terre de La Baule où est née la démocratie africaine. 

 

Toutefois, nous adressons nos félicitations et remerciements au  Parti Socialiste français pour sa position claire contre le troisième mandat de Nkurunziza, tout en le priant de faire pression sur son gouvernement pour ne pas transgresser sur un principe démocratique quel que soit le calcul politique ou stratégique.   Nous nous posons aussi des questions, entre autres, pourquoi la France champion mondial de de la liberté d’expression,  se taise quand elle voit un gouvernement burundais saccager  et bruler toutes les radios et télévisions privées ,  fait des menaces  et des  convocations inopportunes des journalistes.

 

Se référant à l’histoire non lointaine, nous rappelons aux  français que le génocide rwandais de 1994 aurait pu être évité si la France y avait mis toutes les précautions nécessaires et n’avait pas soutenu le régime rwandais de l'époque.  Que cette histoire de complicité ou de non-assistance à des personnes en danger ne se répète pas pour notre pays, le Burundi. 

 

Les peuples africains sont entrain de prendre en mains leurs destinées et la France ne devrait pas prendre le chemin allant contre le cours de l'histoire. 

Excellence Monsieur le Ministre,

De tout ce qui précède, nous demandons avec ultime insistance à la France

a)      de clarifier sa position par rapport au  troisième mandat et de se positionner comme d’autres pays notamment la  Belgique à propos de l'aide en cas du refus catégorique du président Nkurunziza. Et sur ce, de faire respecter les accords d’Arusha, en exigeant de manière inconditionnelle à Mr. Nkurunziza de se retirer de la course vers un troisième mandat.

b)      d’exiger au pouvoir actuel de Bujumbura de  libérer tous les prisonniers politiques actuels et anciens d’enterrer le plan d’élimination des opposants au 3ème mandat

 

c)      de montrer l’exemple, à l’instar de la Belgique ,  en suspendant les budgets prévus pour soutenir les élections au Burundi et surtout les budgets destinés à l’aide de la police burundaise dont les actes de barbarie envers les manifestants pacifiques se sont déroulés devant les caméras du monde entier. Nous insistons également  sur l’impératif nécessité de constater que les élections tel que prévues en cette période de mai et juin ne sont ni réalistes ni réalisables.

d)     d’exiger l'arrêt immédiat des massacres, des arrestations et des tortures.  Dans un blackout total, tous les opposants à ce troisième mandat risquent d’être éliminés sur tout le territoire burundais par les « Imbonerakure », milice de Pierre Nkurunziza sous l’oeil complice de la police et  certains militaires à la solde du régime de Bujumbura.

e)      d’exiger le respect de la liberté de manifester, le respect de la liberté de la presse , la réouverture des radios-télévisions privées et la libération de tous les manifestants arrêtés et de tous les prisonniers politiques tant actuels qu’anciens. La liberté et le droit à des informations objectives et variées sont un des signes prometteurs  d'un état de droit que le régime de terreur à Bujumbura est en train de ternir.

 

Comptant beaucoup sur votre bonne compréhension de la situation très précaire qui prévaut actuellement dans notre pays le Burundi et sur votre prompte réaction afin de contribuer pleinement à sauver des vies humaines avant qu’il ne soit trop tard, veuillez bien , agréer , Excellence, Monsieur le Ministre, l’expression de nos franches reconnaissances.

 

Pour le FODIB

Oscar Butare, Président