Maître Prosper NIYOYANKANA           Bujumbura le 17/11/2008

Avocat Conseil

Chaussée Prince Louis RWAGASORE

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B .P. 3178 Bujumbura II

BUJUMBURA-BURUNDI

 

A Son Excellence Monsieur le Président de la République ET Président du Conseil Supérieur de la Magistrature avec les assurances de ma Plus Haute Considération

à

 BUJUMBURA

 

 

 

Objet : La violation de la loi dans la détention des  Députés Hussein

RADJABU, MPAWENAYO Pasteur, NKURUNZIZA Gérard et les autres détenus KAGABO Evariste, BIRORI Nestor, HARAGAKIZA Jean Marie, NYABENDA Jérémie alias Hassan.

 

 

Excellence Monsieur le Président de la République,

 

J’ai l’honneur de recourir à Votre Plus Haute autorité pour Vous demander, en Votre qualité de Magistrat Suprême, Président du Conseil Supérieur de la Magistrature et Garant de l’Indépendance de celle-ci, de faire respecter, par la plus haute juridiction de la République du Burundi, la Cour Suprême, les garanties constitutionnelles et la loi, et de façon impersonnelle, à l’égard de l’Honorable Hussein RADJABU, Député à l’Assemblée Nationale et Président du Parti CNDD-FDD, des Députés MPAWENAYO Pasteur et NKURUNZIZA Gérard d’un côté et d’autres détenus dans la même affaire que l’Honorable Hussein RADJABU cités en objet de l’autre.

 

En ce qui concerne l’Honorable Hussein RADJABU, le recours en sa faveur a trait à deux affaires que Vous connaissez parfaitement bien plus que tout autre dans la mesure où elles ont occupé l’opinion et de l’actualité depuis plus d’une année ; il s’agit, d’une part, de l’affaire RTC 619 pendante devant la Chambre de cassation de la Cour Suprême qui l’oppose au Ministère de l’Intérieur pour son acte posé en faveur de la tenue du Congrès du CNND-FDD tenu à NGOZI le 7.02.2007 et, d’autre part, de l’affaire pénale enrôlée à la Chambre judiciaire Section d’Appel de la même Cour sous le numéro RPSA 29 dans laquelle il est poursuivi d’atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat et de Vous avoir outragé.

 

Je recours, en leur faveur, à Votre Haute autorité parce que la loi est par essence impersonnelle, impartiale, générale et que, j’ose le croire, même les Députés Hussein RADJABU, MPAWENAYO Pasteur, NKURUNZIZA Gérard et les autres peuvent naturellement être sujets de protection de la part de la loi (art. 22 de la Constitution).

 

1.     Le fondement constitutionnel de mon recours.

 

Excellence Monsieur le Président, le présent recours se fonde sur les dispositions constitutionnelles tant en ce qui concerne les Députés précités que les autres détenus parce qu’ils sont tous sujets de droits fondamentaux proclamés par la Constitution au même titre que les autres citoyens peu importe les charges qu’ils ont ou pas dans l’appareil étatique. Les droits constitutionnellement garantis sont par essence inaliénables, imprescriptibles et ne peuvent en aucune manière faire l’objet de renonciation ou de violation impunie par quiconque, Président de la Cour Suprême ou n’importe quel citoyen.

 

 Vous n’avez eu de cesse, à travers Vos discours et messages à la Nation, dire tout haut que nul n’est au-dessus de la loi.

 

En effet, le cri que je lance à Votre Excellence pour le compte de toutes les personnalités ci haut citées, hier respectées mais aujourd’hui traînées dans la boue  et livrées au mépris, ainsi que les autres détenus s’inscrit dans cet ordre et Votre Excellence ne saurait, sans le risque d’encourager la violation des garanties fondamentales, supporter ou ignorer que leurs droits soient foulés aux pieds parce que la Cour suprême se place impunément au-dessus de la loi.

 

La disposition de l’article 95 de la Constitution Vous interpelle dans ces termes « Le Président de la République, Chef de l’Etat, incarne l’unité nationale, veille au respect de la Constitution et assure par son arbitrage la continuité de l’Etat et le fonctionnement régulier des institutions… » (art.95).

 

Veiller au respect de la Constitution, dans toutes ses dispositions, même celles qui défendent les personnalités ci avant, est donc la première interpellation de Votre excellence et le premier des fondements de mon recours auprès de Votre Excellence car cette charge que la Constitution Vous Confie constitue un rempart pour tout citoyen burundais contre l’impunité de l’arbitraire commis à l’encontre de ces derniers.

 

Le second socle de mon recours réside dans cette assurance constitutionnelle que « Le Président de la République » en collaboration avec le Conseil Supérieur de la Magistrature » que Vous présidez « est le garant de l’indépendance de la Magistrature » (art. 209 al. 3 et 210de la Constitution).

 

La troisième assise de mon appel à votre Excellence tient au fait que Vous incarnez certes l’Exécutif mais avez la plus haute autorité sur le Pouvoir Judiciaire dans cette mesure où « Le conseil Supérieur  de la Magistrature [que vous présidez] veille à la bonne administration de la justice » (art. 210).

 

En outre, « Le Conseil Supérieur de la Magistrature [vous] assiste  et [votre] Gouvernement dans «  le suivi de la situation du pays dans le domaine judiciaire et dans celui des droits de l’homme ; … » (art. 213 de la Constitution). Vous les nommez aux différents postes de responsabilité et vous les démettez chaque fois qu’il Vous plaît de le faire.

 

Enfin, la quatrième justification constitutionnelle de mon recours à Votre Excellence est que l’article 48 recommande que « Les droits fondamentaux doivent être respectés dans l’ensemble de l’ordre juridique, administratif et institutionnel… Le législatif, l’exécutif et le judiciaire doivent la faire respecter… » (art.48 de la Constitution). Ainsi, du moment que Vous êtes le Chef de l’Exécutif et Magistrat Suprême, Vous êtes, tout compte fait, la seule autorité qui puisse donner l’ordre même au Pouvoir Judiciaire de respecter la loi et particulièrement la Constitution.

 

Excellence Monsieur le Président, sous ce quadruple aspect, j’estime, en ma qualité d’Avocat du Député Hussein RADJABU à la fois dans les affaires RTC 619 et RPSA 29, du Député MPAWENAYO Pasteur  dans la cause RPS 68 et du Député NKURUNZIZA Gérard ainsi que les autres détenus plus haut cités, que le recours est légal et régulier et que donc il sera sans nul doute reçu et analysé avec la meilleure de votre attention.

 

I.                   Pour le Député Hussein RADJABU.

 

Excellence Monsieur le Président, le Député Hussein RADJABU a été et est victime du manque de neutralité de la Cour Suprême et particulièrement de sa Présidente et sans aucun doute de l’immixtion dans cette affaire par le parti CNDD-FDD.

 

En effet, il est partie dans deux affaires RTC 619 et RPSA 29 qu’elle gère en dehors de toute loi pour des raisons que l’on peut imaginer mais qui, au demeurant, sont de nature à refuser à l’Honorable Hussein RADJABU, le droit à la protection de la loi.

 

a.     De la cause RTC 619

 

Excellence Monsieur le Président, le Député Hussein RADJABU a été destitué, à mon avis et au regard de la loi, en toute illégalité de la Présidence du Parti CNDD-FDD par le Ministre de l’Intérieur qui, pour y parvenir, a convoqué et organisé, sous le couvert du Secrétaire Général du Parti Monsieur Manassé NZOBONIMPA en lieu et place des organes du CNDD-FDD, le Congrès de NGOZI et sa destitution y a été entérinée. On ne cessera de le décrier dans la mesure où cet acte du Ministre de l’Intérieur a violé les prescrits de l’article 80 de la Constitution et ceux des articles 11 et 37 de la loi régissant le fonctionnement de Partis Politiques. 

 

Puis-je rappeler à Votre Excellence, que sur la voix des ondes, le Ministre a révélé à la presse et au bout  du compte à l’opinion que Vous deviez voyager et que le congrès devait se tenir avant le 10.02.2007, usurpant par là même les prérogatives légales et statutaires des organes  du parti CNDD-FDD en l’occurrence l’article 21 du Statut et les articles  162,164 et 169 du Règlement Intérieur du Parti.

 

Comme la loi le lui permettait, l’Honorable Hussein RADJABU a tenté de faire restaurer ses droits par la Justice et a saisi la Chambre Administrative de la Cour suprême, compétente en cette matière en vertu de la loi du 23/06/2003 portant organisation et fonctionnement des partis politiques, mais il ne savait pas que celle-ci n’avait aucune indépendance par rapport au Parti CNDD-FDD car l’influence de celui-ci a eu raison de la loi.

 

L’instruction par cette Chambre a non seulement violé la loi mais également elle l’a méconnue dans le seul et unique dessein de ne pas contrarier les décisions du congrès de NGOZI  car si elle avait conclu dans le sens de l’illégalité de ces derniers, bien que les faits et la loi soient de ce côté-là, elle aurait renié Votre élection à la Présidence du Conseil des Sages. L’arrêt a été prononcé dans le sens de la confirmation du congrès décrié.

 

Le pourvoi a été, comme il se devait, formé contre l’arrêt depuis le 23.04.2007, et le représentant de l’Etat du Burundi a produit le mémoire en réplique depuis  le 15 juin 2007, et il était dans les délais, mais le dossier a arbitrairement été gardé par la Présidente de la Cour dans ses tiroirs et jusqu’à ce jour, aucun acte, allant dans le sens de l’instruction du pourvoi, n’a été posé. Cela s’explique par le fait que la cause oppose l’Honorable Hussein RADJABU au CNDD-FDD qui est à la tête du Pays depuis Août 2005.

 

Cependant, j’estime que la loi étant ce qu’elle est par rapport à tout le monde et à l’ordre social et que nul n’est au-dessus de la loi comme Vous n’avez eu de cesse à le proclamer à travers Vos discours, l’instruction de l’affaire RTC 619 procèderait de cette idée heureuse et salutaire de maintenir la loi au-dessus de tous.

 

Ainsi sous ce rapport, je Vous prie, en Votre qualité de Président du Conseil Supérieur de la Magistrature dont la mission est de veiller à la bonne administration de la justice (art. 210 plus haut cité) (une justice impartiale, rempart contre l’arbitraire d’où qu’il vienne et peu importe son auteur), d’ordonner à la Chambre de Cassation de la Cour Suprême, ou plutôt à la Présidente de Celle-ci, de tout mettre en œuvre pour que le pourvoi que nous avons formé contre l’arrêt RAP 32 de la Chambre Administrative de la Cour Suprême soit instruit et définitivement vidé car une année et bientôt sept mois d’attente constituent un déni de justice qui est par ailleurs réprimé par la loi du 25.02.2005 régissant la Cour suprême.

 

Excellence Monsieur le Président, l’article 1er de la loi du 25.02.2005 régissant la Cour Suprême prévoit que « la Cour Suprême est la plus haute juridiction de la République du Burundi » et qu’à ce titre elle doit être le modèle de toutes les autres juridictions dans l’application de la loi.

 

Il s’entend, Excellence Monsieur le Président, que le modèle que préconise cette loi est naturellement le bon, celui qui respecte la loi et les droits fondamentaux car les articles 48 et 60 précités de la Constitution l’y obligent dans le même sens par ailleurs et avec la même intensité que l’article 209 de la même loi fondamentale quand elle dispose que « Dans l’exercice de ses fonctions, le juge n’est soumis qu’à la Constitution et à la loi ». Se soumettre à la Constitution et à la loi signifie pour la plus haute juridiction de la République rendre justice à l’Honorable Hussein RADJABU conformément à l’article 38 de la Constitution qui proclame que « Toute personne [y compris l’Honorable Hussein RADJABU] a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit entendue équitablement et à être jugée dans un délai raisonnable. » Une année et près de sept mois est un délai déraisonnable et arbitraire.

 

II.                 Pour tous les Députés Hussein RADJABU, MPAWENAYO Pasteur et NKURUNZIZA Gérard.

 

a.     Les Députés Hussein RADJABU et MPAWENAYO Pasteur.

 

Excellence Monsieur le Président, les Députés Hussein RADJABU et Pasteur MPAWENAYO ont partagé les mêmes malheurs par rapport à la violation consciente de la loi pour leur priver sciemment de sa protection.

 

Les poursuites engagées contre eux ont privilégié l’arbitraire parce qu’il y avait un objectif à atteindre, celui de se débarrasser une fois pour toutes, d’anciens amis  et compagnons de lutte devenus, par la force des ambitions, des ennemis politiques.

 

Excellence Monsieur le Président, la force de l’arbitraire a emprunté la voie judiciaire parce que la justice a été dépouillée de sa place dans la structure de l’Etat, en tant que  Pouvoir Judiciaire impartial, pour devenir un instrument de répression au service du Pouvoir Exécutif et du Parti CNDD-FDD. Il en a malheureusement été de même du Pouvoir Législatif qui a précieusement prêté main forte en levant illégalement l’immunité parlementaire au député Hussein RADJABU.

 

1.     Pour l’Honorable Hussein RADJABU.

 

De la levée de l’immunité de l’Honorable Hussein RADJABU.

 

Excellence Monsieur le Président, en principe, les Députés sont protégés de tout arbitraire par l’immunité que la Constitution leur garantit en son article 150 et que le Règlement Intérieur de l’Assemblée Nationale a érigé en rempart contre les poursuites intempestives de la justice ou sur commande de l’Exécutif.

 

Cependant, quand il a fallu arrêter et détenir l’Honorable Hussein RADJABU, le Procureur Général a été utilisé pour faciliter cette action et par un soit disant rapport qui ne contient rien de ce qui est exigé par ces dispositions, à savoir les faits constitutifs de l’infraction, les circonstances dans lesquelles elle a été commise ainsi que les preuves, le Bureau de l’Assemblée Nationale a, de façon légère, levé la prestigieuse protection constitutionnelle du Député Hussein RADJABU pour le livrer pieds et poings liés à la justice au mépris des prescrits des articles 150 de la Constitution précitée et 13 et 14 du Règlement Intérieur de l’Assemblée Nationale.

 

La preuve la plus éloquente est la manière dont il a été convoqué par ce Bureau ; la façon la plus musclée a rendu son arrestation et détention faciles. En effet, au lieu de lui envoyer les convocations par la voie habituelle, il a fallu que le même Bureau, sous pression des auteurs de l’arrestation, passe par la Police de sécurité intérieure, le Colonel NIKIZA David.

 

A deux reprises, ce dernier a fait le déplacement, tardivement et sciemment, pour lui remettre les convocations en l’espace de quelques heures, à telle enseigne que la dernière lui a été envoyée après 18 heures le 26.04.2007. Toutes  lui sont parvenues en dehors des heures auxquelles il devait comparaître, il n’y a pas répondu et le Bureau a mis en application ce qu’il prévoyait déjà dans ses convocations : le livrer à la Justice.

 

Excellence Monsieur le président, le Bureau a pris une décision qui a et aura fragilisé l’institution législative du Burundi et par conséquent tout le système politico administratif du Burundi et particulièrement les Députés en première ligne puisque chaque décision fait en principe jurisprudence.

 

L’Honorable Hussein RADJABU a été arrêté dans ces conditions et écroué à la Prison de MPMBA le 27.04.2007 au mépris de toute disposition légale et réglementaire. Son arrestation est irrégulière et la Cour prolonge sa détention sans motif alors qu’elle devrait instruire l’affaire et par voie de conséquence le libérer.

 

2°. De son isolement à la Prison.

 

Excellence Monsieur le Président, l’Honorable Hussein RADJABU a également été victime d’une violation que personne n’a jamais voulu endosser la paternité. Aussitôt arrêté, il a été isolé dans sa cellule à la Prison de MPIMBA pendant près d’une année sans aucun égard à la loi. En effet, le délai d’isolement le plus long prévu par les lois burundaises est de 15 jours mais il doit avoir été ordonné par le Magistrat instructeur. Or, dans le cas d’espèce, ni le magistrat, ni le Directeur de la Prison personne n’a reconnu avoir décidé cet isolement. Mais nous avons appris que la mesure a été décidée par le Service National des Renseignements qui n’a aucune compétence en cette matière étant donné qu’il s’agit d’un corps de police comme les autres.

 

Pendant cet isolement, il a été privé de toute visite de sa famille et même à son Avocat mais heureusement, ce dernier a été par la suite, autorisé à le voir et à communiquer avec lui. On note que son isolement violait inéluctablement les prescrits des articles 47 et 80 de l’Ordonnance Ministérielle portant Organisation et fonctionnement des Etablissements Pénitentiaires.

 

3°. De la perquisition illégale du 18.05.2007.

 

Excellence Monsieur le Président, dans le but de parachever la violation des droits les plus élémentaires du Député Hussein RADJABU, le Parquet Général de la République a ordonné une perquisition sur demande du Président du CNDD-FDD, Jérémie NGENDAKUMANA. Le mandat de perquisition prescrivait à la police de saisir tous les biens détournés par l’Honorable Hussein RADJABU.

 

Ainsi conçu, le mandat faisait en toute apparence référence à un dossier pénal ouvert par le Parquet Général pour détournement mais en réalité pas si ce n’était que la lettre du président du CNDD-FDD, le mandat lui-même ne portait même pas de numéro du dossier pour ainsi dire que la  perquisition du 18.05.2007 a été opérée sans dossier et par conséquent illégalement.

 

Ce qui a le plus surpris c’est qu’elle a été suivie de la confiscation de tous les  véhicules se trouvant sur les lieux alors qu’ils appartenaient à d’autres personnes privées qui en avaient et en ont même des preuves de leur appartenance.

 

La requête adressée, depuis le 21.05.2007, à la Cour Suprême à l’effet de les récupérer n’a pas eu de succès puisque la même Présidente de la Cour l’a gelée. Jusqu’à ce jour, elle est gardée dans son cabinet malgré des lettres de rappel auxquelles elle n’a pas donné de suite, une année et près de sept mois après.

 

Excellence Monsieur le Président, j’ai été, moi-même, son Avocat, arrêté et détenu pendant six heures de temps parce que j’avais soulevé toutes ces irrégularités et que la Police était confrontée à une question de légalité de leur acte et la plainte que j’ai déposée pour arrestation et détention arbitraire, tortures et coups et blessures n’a pas encore été clôturée par le Parquet Général près la Cour d’Appel depuis pratiquement le même temps, une année et près de sept mois.

 

 

Le gel du dossier RPSA 29 par la Présidente de la Cour Suprême.

 

Excellence Monsieur le Président, après avoir été condamné gratuitement à 13 ans par la Chambre Judiciaire de la Cour Suprême, le Député Hussein RADJABU a interjeté appel contre l’arrêt avant même qu’il ne lui soit notifié parce que nous avions remarqué que la Cour avait une mauvaise intention de faire traîner l’instruction de l’affaire.

 

En effet, nous avions noté que d’abord la Cour avait violé l’article 130 du code de procédure pénale en dépassant les délais du délibéré prévus par le même code, ensuite la dactylographie de l’arrêt prenant du temps alors que, même s’il est écrit sur des dizaines de pages, il ne devait pas, pour une Cour consciente de son rôle dans la stabilisation de la paix sociale, être dactylographié en plus d’une semaine.

 

Enfin, nous avions constaté que la Cour avait l’intention de jouer le partenaire de la politique, nous avons déclaré à la Cour que nous interjetons appel contre l’arrêt dans l’état de la procédure et la Cour l’a enrôlé sous le numéro RPSA 29. Il ne restait qu’à instruire l’appel par elle. Les condamnés ont été par la suite notifiés de la décision mais depuis plus de 6 mois nous attendons une date d’audience. Cela pourrait signifier sans nul doute que la Cour n’a pas l’intention de connaître de l’appel et cela constitue donc un déni de justice encore à charge de la présidente de la Cour Suprême qui gèle le dossier dans son tiroir jalousement.

 

2.     Pour le Député Pasteur MPAWENAYO.

 

Excellence Monsieur le président, le Député Pasteur MPAWENAYO a été également victime de la violation parfaitement consciente de la justice et de l’Assemblée Nationale ainsi que, sans nul doute, du parti CNDD-FDD et des organes qui en sont issus au motif qu’il s’est aussi inscrit en faux contre le congrès illégal de NGOZI. Il a subi le même sort que le Député Hussein RADJABU et n’a jamais été autorisé à bénéficier de la protection de la loi. Il a, dès le début de cette affaire à charge de l’Honorable Hussein RADJABU, été poursuivi en même temps que lui dans la même affaire. Il a été cité en Justice par le Parquet Général  de la République dans le cadre de l’affaire RPS 66.

 

Etant donné qu’à cette époque il était encore Député et bénéficiait par voie de conséquence de la protection des dispositions des article 150 de la Constitution et 13 et 14 du Règlement Intérieur de l’Assemblée Nationale, la Cour a hésité à le poursuivre et a requis du Procureur Général de la République de se conformer à la loi. L’immunité parlementaire n’ayant pas été levée sur demande du Parquet Général, la Chambre judiciaire de la Cour Suprême ne pouvait pas instruire les charges que le Ministère Public avait retenues contre lui sans autorisation du Bureau.

 

Le Parquet Général d la république a tenté de  rééditer la même illégalité que dans le cas de l’Honorable Hussein RADJABU mais à cette époque le Bureau a réservé une réponse négative à la requête. L’instruction de ces charges a été, de ce fait, suspendue en ce qui concerne le Député Pasteur MPAWENAYO.

 

Mais bénéficiant de l’exclusion illégale des 22 Parlementaires de l’Assemblée Nationale, le Parquet Général de la République , résolu à violer impunément la loi, a signé un mandat d’arrêt, pour les mêmes faits contre le Député en question.

 

Et, pour bien organiser la violation des règles de procédure et l’habiller d’un semblant de légalité, alors qu’il est, en principe, chargé de « surveiller l’exécution des lois » et de « veiller à l’application de la Loi pénale dans toute l’étendue de la République » (art. 29 du code de procédure pénale), le Procureur Général de la République a ouvert un autre dossier dans ses registres sous le RMPG 515 bis/ NC alors que celui par lequel il avait saisi la Cour Suprême par son acte d’accusation remis au Député Pasteur MPAWENAYO, et dans lequel il était poursuivi aux côtés de l’Honorable Hussein RADJABU portait le numéro RMPG 515/ NJB/NC. Celui-là même qui était inscrit sous le numéro RPS 66 et qui avait été suspendu par la Cour Suprême en raison du refus pour le Bureau de l’Assemblée Nationale d’autorisation des poursuites contre l’Honorable Pasteur MPAWENAYO.

 

Excellence Monsieur le Président, dans un Etat qui se réclame de droit et dont le Gouvernement a adopté un programme si alléchant en matière de promotion et de protection des droits fondamentaux de la personne humaine (Voir le programme du Gouvernement 2005-2010 : p. 9 « 2.3 Axes d’intervention et actions

Promotion du culte du respect des Droits de la personne humaine plus particulièrement du Droit des Droits à savoir le droit à la vie

 

▪ Implications des Institutions Etatiques dans la promotion de la défense des Droits de la personne humaine… » p. 12), cette décision tort dangereusement la loi et pêche contre les principes universels de procédure et fait que les espoirs de respect des droits de la personne humaine s’écroulent.

 

En effet, le juge qui avait déjà été saisi et qui avait suspendu l’instruction en raison de cette entrave constitutionnelle et par conséquent juridique, devait, lui seul analyser l’opportunité de reprendre l’instruction de l’affaire RPS 66 en ce qui a trait aux charges retenues contre le Député Pasteur MPAWENAYO. Il ne revenait juridiquement pas au Parquet Général de la République de reprendre les poursuites sans l’autorisation de la Cour et d’inventer une autre procédure pour lancer un mandat d’arrêt contre le Député ci haut car étant dessaisi par la requête de fixation adressée à la Cour Suprême pour cette fin. Cela a procédé uniquement de la volonté manifeste d’initier impunément l’arbitraire contre l’Honorable Pasteur MPAWENAYO parce qu’il savait parfaitement qu’il était bien compris de ses supérieurs de sorte qu’il ne puisse être inquiété.

 

Excellence Monsieur le Président, le Député Pasteur MPAWENAYO a été victime de l’arbitraire de la Justice parce qu’il a été victime de deux attentats à la grenade à son domicile et il a déposé formellement plainte contre X, comme il se devait, mais seule la première a été reçue mais mal instruite sciemment et a abouti à l’inculpation de ses gardes pour n’avoir pas été à même de prévenir l’agression alors qu’ils ont été agressés en même temps que lui.

 

Pour la seconde plainte, elle n’a pas été enrôlée dans les registres du Parquet Général de la République, et  le Député n’a pas été entendu serait-ce pour relater, à tout le moins, sa version des faits.

 

Il n’a donc, pour ainsi dire, pas le droit d’être protégé par les institutions étatiques particulièrement celle qui, de par l’article 60 de la Constitution est la gardienne « des droits et libertés publiques et qui assure le respect des ces droits et libertés dans les conditions prévues par la loi » (art. 60).

 

Excellence Monsieur le Président, Le Député Pasteur MPAWENAYO, comme si la loi était contre lui, vient d’être transféré de la Prison centrale de BJUBUMBURA à celle de RUTANA pour un seul et unique motif : violer davantage ses droits, cette  fois-ci de détenu.

 

En effet, sa privation de liberté n’a pas répondu au prescrit de la loi et devait, à tout le moins en qualité de détenu, être hébergé dans une prison proche de son juge et attendre qu’il soit définitivement condamné pour qu’il puisse être transféré.

 

Le transfert a été effectué alors que le dossier pendant devant la Cour Suprême est en délibéré pour statuer sur les irrégularités de procédure commises par le Parquet Général de la République.

 

Au départ, la Direction Générale des Affaires Pénitentiaires prétendait que son transfert était du à un programme de réhabilitation de la Prison de MPIMBA mais il s’est avéré par la suite que le motif était mensonger puisqu’il a été transféré seul. Par la suite, elle a inventé un autre prétexte ; qu’il aurait été à la base de la mutinerie à l’intérieur de la Prison mais là aussi, le prétexte a fondu comme de la grêle puisque même les détenus ont plaidé et plaident toujours en sa faveur.

 

Concrètement, Excellence Monsieur le Président, le transfert a été dicté par cette volonté nuisible de violer la loi. Cela trouve son explication dans la décision de transfert qui a été prise par le Directeur Administratif et juridique à la Direction Générale qui n’a même pas été respectée par ceux-là même qui avaient la charge de la mettre en application.

 

En effet, la décision ordonnait que le Député Pasteur MPAWENAYO soit transféré à RUMONGE mais il a été conduit à RUTANA sur ordre du Directeur de la Prison de MPIMBA et du Directeur Général Adjoint de la Police Nationale. Ce transfert est donc une violation de plus de la loi et met en péril les droits des détenus.

 

Excellence Monsieur le Président, même un détenu a le droit d’être respecté et c’est pour cette raison que je vous prie de lui rendre Justice parce que la loi est impersonnelle et générale et la justice impartiale.

 

3.     Pour le Député NKURUNZIZA Gérard.

 

Le Député NKURUNZIZA Gérard n’a pas échappé à la violation concertée de ses droits parce que lui aussi a été victime de ses opinions par rapport aux résultats du congrès illégal de NGOZI.

 

Il avait été averti depuis ce congrès qu’un montage contre lui était en train d’être ficelé et qu’il devait être poursuivi pour atteinte à la sûreté de l’Etat comme les Députés Hussein RADJABU et Pasteur MPAWENAYO.

 

Pendant qu’il était encore Député à l’Assemblée Nationale, le montage n’a pas pu opérer comme conçu, il a fallu attendre qu’il soit exclu de l’Assemblée comme ses 21 collègues.

 

Effectivement il a été cueilli par les éléments de la Police basés dans la Province de Kirundo et conduit immédiatement au Parquet Général de la République qui lui a décerné un mandat d’arrêt. L’instruction de son dossier n’a pas été des plus aisées parce que le Magistrat instructeur a inventé une règle de compétence et s’est débarrassé du dossier au profit du Parquet de Kirundo au motif que les faits d’atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat n’ont pas de lien avec sa fonction de député. Avancer pareil argument parce qu’il lui a été dicté c’est finalement ne pas avoir à l’esprit que ses collègues d’infortune les Députés Hussein RADJABU et Pasteur MPAWENAYO sont poursuivis sur la même base légale et des faits similaires mais sont justiciables devant la Cour Suprême comme le prévoit l’article 32 de la loi du 25.02.2005 régissant la Cour Suprême.

 

Le dossier a été transféré au Parquet de Kirundo, histoire de faire retarder l’instruction.

 

Excellence Monsieur le Président, étant donné que la décision du Parquet Général de la République est susceptible d’être soit annulée ou réformée par la Cour Suprême, nous l’avons saisie mais jusqu’à ce jour, après près de trois mois aucune réponse n’a été réservée à notre requête. Ce qui veut parfaitement signifier qu’étant donné que l’attitude a été observée dans les trois cas, la Cour Suprême n’a pas voulu statuer sur les requêtes que nous lui avons soumise : c’est ni plus ni moins un déni de justice répréhensible par la loi du 25.02.2005 régissant la Cour Suprême.

 

Excellence Monsieur le Président, je m’en réfère à Votre Plus Haute Excellence  pour que la saine justice soit rendue aux Députés en ordonnant à la plus haute juridiction du Pays de connaître des affaires qui lui ont été soumises conformément à la loi.

 

Je prie Votre Excellence que dans le cadre de ses plus hautes compétences de Magistrat suprême et de Président du Conseil Supérieur de la Magistrature d’instruire à la Cour de ne se référer qu’à la Constitution et à la loi, d’assurer le respect des droits et libertés publiques dont elle gardienne sans prise de parti politique.

 

J’exhorte Votre Excellence à faire cesser ce déni de justice tant à l’égard des Députés plus haut cités qu’à l’égard de tous les autres détenus poursuivis dans ces affaires, de mettre fin au calvaire que le Service National des Renseignements fait subir aux Députés concernés notamment en ordonnant le retour de l’Honorable Pasteur MPAWENAYO dans ses droits de détenu et en ordonnant à la Présidente de la Cour Suprême d’instruire comme il se doit et conformément à la loi les affaires RPSA 29 gelée par elle alors qu’elle sait qu’il s’agit de l’appel fait légalement par l’Honorable Hussein RADJABU contre l’arrêt RPS 66 qui le condamne à 13 ans de servitude pénale.

 

Votre Excellence est également priée pour qu’elle ordonne à la Présidente de la Cour de se départir de ses agissements qui ne se marient pas avec sa qualité de juge et de lâcher les multiples requêtes initiées à l’occasion de la violation des règles de procédure, des droits de la personne humaine contre les Députés cités plus avant et les autres personnes détenues ou pas victimes des violations de leurs droits par le fait qu’elles sont proches des députés en question ou qu’elles se trouvaient au mauvais moment à l’heure qu’il ne fallait pas.

 

Dans cette attente, je Vous prie de croire, Excellence Monsieur le Président de la République, à l’expression de ma Plus Haute considération.

 

 

Sé/ Maître Prosper NIYOYANKANA

 

 

 

C.P.I.à :

 

- Son Excellence Monsieur le Premier Vice Président,

- Monsieur le Ministre de la Justice et Garde des Sceaux et Vice-Président du Conseil Supérieur de la Magistrature

- Monsieur le Représentant Exécutif du Secrétaire Général des Nation Unies,

- Monsieur le Représentant du Président de l’Union Africaine,

- Madame la Présidente de la Cour Suprême,

- Monsieur le Procureur Général de la République,

- Missions diplomatiques et Consulaires (Toutes),

- Madame Ancille Ntakaburimvo, Juge à la Cour Suprême

- Union Interparlementaire,

- Union Parlementaire Panafricaine,

- Maîtres LUBALA Emmanuel, HAGUMA Jean et Guy MASEELLE,

- Monsieur l’Administrateur Général du Service National des Renseignements

- Human Rights Watch

- Ligue ITEKA

- APRODH