LETTRE OUVERTE POUR LIBERER LE PEUPLE

 Burundi news, le 18/01/2015

Par Gratien RukindikizaPancrace CIMPAYE                                                         Bruxelles, le 17 janvier 2015

Royaume de Belgique

 

 

                                                        A Son Excellence Pierre Nkurunziza

                                                         Président de la République du Burundi

                                                         A BUJUMBURA

                                                         Avec les assurances de ma haute considération

 

 

Objet : Lettre ouverte pour libérer le peuple burundais.

 

Excellence Monsieur le Président,

A l’aube de cette année 2015, permettez-moi de vous présenter mes meilleurs vœux ; le vœux le plus cher dont vous avez besoin étant de pouvoir sortir du palais présidentiel par la grande porte le 26 Août 2015, date de fin de votre dernier mandat. Au terme de votre deuxième et dernier mandat, que le tout puissant vous accorde la grâce de pouvoir vous consacrer entièrement à votre famille et le  temps de continuer à prier pour votre successeur et le peuple burundais.

Excellence Monsieur le Président,

Mon deuxième vœu est que vous répondiez aux inquiétudes de tout un peuple qui a peur que la maladie contagieuse des chefs d’Etat africains de briguer un troisième mandat  ne vous frappe. Certes vous avez raté l’occasion en or de lever tout équivoque à ce sujet le 31 décembre 2014, mais il n’est jamais tard de nous tranquilliser avant la fin de ce mois de janvier.

Comme vous devez vous en doutez votre silence et les déclarations sans équivoque de vos collaborateurs comme le ministre Nduwimana Edouard, le député Joseph Ntakarutimana, vice-président du CNDD-FDD ainsi que le président du CNDD-FDD lui-même, le député Pascal Nyabenda , créent une cacophonie assourdissante. Cette cacophonie traumatise le peuple burundais.

Excellence Monsieur le Président,

Au-delà des mises en garde répétées de l’opposition en générale et de l’ ADC-IKIBIRI en particulier, je vous recommanderais d’écouter très attentivement la voix de l’Honorable Richard Nimbesha ainsi que celle de l’archevêque  de Gitega, Monseigneur Simon Ntamwana. A un moment crucial de notre histoire, ces deux hommes vous exhortent de quitter le pouvoir dignement le 26 Août 2015, vous aurez ainsi libéré tout un peule ! Je dois vous rappeler qu’à un autre moment crucial de l’histoire du Burundi, ce prélat avait eu le courage d’exiger aux décideurs de l’époque ceci : « laisse partir mon peuple ». C’est la même  requête qui vous est adressée aujourd’hui. Vous qui lisez tant la Bible, dans le livre de l’Exode, vous n’ignorez pas les épreuves qu’a enduré le roi d’Egypte qui refusait au peuple d’Israël de partir vers des lendemains meilleurs !

Excellence Monsieur le Président,

Vous avez peur ! La peur de perdre les sirènes du pouvoir ! La peur de perdre l’immunité ! La peur de perdre votre droit de vie et de mort ! C’est clair et limpide ! Il suffit de voir comment vous organiser les élections de cette année pour comprendre que vous voulez les gagner à tout prix. C’est dans cette dynamique qu’en complicité avec la Commission Electorale, inféodée à votre parti, vous voulez confectionner un faux fichier électoral.

C’est cette fraude électorale programmée depuis belle lurette qui vous aviez poussé à exiger le départ du BNUB. Malheureusement vous venez de réaliser, non sans surprise, que la MENUB a pour mission première d’avoir un œil sur le déroulement de ces élections, avant, pendant et après le vote. Comme d'habitude, allez-Vous chasser pour la cinquième fois le représentant de cette institution avant qu'il n'ait commencé sa mission? Cette mission onusienne ne devrait pas cautionner des élections avec un fichier électoral confectionné à la permanence de votre parti politique. La confection d’un fichier électoral est le cœur de toute élection. S’il est confectionné par les soins du seul CNDD-FDD et de votre Commission électorale, le résultat connu d’avance ne pourra déboucher que sur des heurts dont le peuple burundais n’a pas besoin. La légitimité des institutions qui sortiraient de telles élections serait compromise dans un pays où on sent l’électricité en l’air.

Cette fraude électorale est aussi visible avec cette volonté de vous immiscer dans le fonctionnement des partis politiques de l’opposition en créant des ailes qui doivent être vos caisses de résonance. Le cas pathétique est celui du refus du ministre de l’intérieur, Edouard Nduwimana qui vient d'interdire la réunification du parti UPD-ZIGAMIBANGA. C’est aussi ce projet de destruction de l’opposition qui se cache derrière cette attaque d’une bande lourdement armée à  Cibitoke le 30 décembre 2014. En effet le refus de révéler l’identité des assaillants s’inscrit dans une logique de désigner vous-même les hommes politiques de l’opposition à qui attribuer la paternité de cette rébellion. Ainsi vous allez les arrêter. Ce qui vient de se passer avec l’arrestation arbitraire du leader de la jeunesse de l’ADC-IKIBIRI, Monsieur Patrick Nkurunziza, ce jeudi 15 janvier 2015 répond à cette stratégie. Et dans ce montage, vos services suggèrent à la victime de désigner Alexis Sinduhije, président du MSD, comme le commanditaire de cette rébellion non identifiée. Il ne serait pas étonnant que demain d’autres arrestations au sein de l’opposition soient effectuées. De la même manière, l’instrumentalisation de la justice qui est en campagne de condamnation fallacieuse  des leaders de l’opposition  n’a d’autres visées que de les empêcher de participer aux élections.

Au demeurant vous voulez allez aux élections seul, avec des partis politiques satellites du CNDD-FDD, avec un fichier électoral à vous  et une complicité d’une Commission Electorale qui ne jure que par votre nom. Toute cette fraude électorale est mise en place dans le seul but de garder le pouvoir.

Excellence Monsieur le Président,

Vous avez raison d’avoir peur ! Vous avez raison de vous accrocher à ce pouvoir ! Comme dirait Charles de Gaule « je vous ai compris » ! En effet le registre de votre bilan possède des rubriques des crimes de sang et des crimes économiques qui donnent froid au dos. C’est le cas de :

Ø L’assassinat des trois sœurs italiennes de l’Eglise Catholique à Kamenge;

Ø L'assassinat des sœurs de Kiremba ;

Ø L’assassinat d’Ernest Manirumva avec le dossier du trafic des armes y relatif;

Ø Les massacres de Gatumba avec Nzarabu ;

Ø Les massacres de Muyinga ;

Ø L’incendie criminel des différents marchés,

Ø La vente de l’avion présidentiel FALCON 50 ;

Ø Le marché de l’exploitation du Nickel ;

Ø La taxe sur les communications internationales ;

Ø La vente du port de Bujumbura ;

Ø L’argent du pétrole du Nigeria ;

Ø L’argent de la dette ougandaise remboursée ;

Ø L’argent du terrain où est érigée l’ambassade des Etats Unis ;

Ø Les différents terrains de cultures vivrières que vous vous êtes octroyés à travers tout le pays ;

Ø Le terrain de Mwumba où vous avez érigé le fameux stade en expropriant de paisibles citoyens sans indemnité aucune ;

Ø Etc.

Excellence Monsieur le Président,

Certes ces dossiers sont lourds. Mais la meilleure façon de vous en sortir indemne n’est pas de narguer tout le peuple burundais en voulant rester au pouvoir à vie. Plus vous restez, plus le cercle de vos adversaires va s’agrandir. Regardez autour de vous dans votre propre camp, aujourd’hui vous ne savez plus à qui faire confiance. Avec ces biens mal acquis, vous avez réussi à creuser un fossé entre vos anciens compagnons de lutte démunis et une petite classe de bourgeois.  Dès lors la seule façon de vous en sortir, c’est de négocier à temps votre sortie. Vous êtes le produit d’une négociation : vous êtes entré au pouvoir par la porte des négociations, sortez par la même porte et « laisse partir mon peuple vers des lendemains meilleurs ».

Dans cette dynamique prenez le courage à deux mains et négocie avec l'opposition les préalables à l'organisation des élections apaisées, transparentes, inclusives et régulières. Ces préalables sont la libération des prisonniers politiques, le retour des exilés politiques, la libération de l'espace politique, l'abandon des poursuites judiciaires contre les leaders de l'opposition, l'annulation de la mascarade d'enrôlement des électeurs et la mise en place d'une nouvelle commission électorale paritaire. Si ce cadre n'est pas mis en place pour vider ces préalables, vous aurez des élections chaotiques qui vont ternir de plus belle votre image et hypothéquer votre sortie honorable. Vous aurez refuser de libérer le peuple burundais qui a pourtant soif de savourer les délices des vertus de la démocratie véritable.

Dans l’espoir d’une suite favorable, à cette lettre ouverte, je vous prie d’agréer, une fois de plus, Excellence Monsieur le Président, l’assurance de ma haute considération.

 

Pancrace CIMPAYE