Burundi news, le 06/04/2010
Lettre ouverte aux responsables du parti CNDD-FDD
à Bujumbura
par NZIBAREGA Bernard
Madame, Monsieur,
Je m'adresse à vous à double titre: tout d'abord en tant que votre compatriote, mais aussi en tant que « inararibonye » compte tenu de mon âge: j'ai plus de 60 ans!
Le contexte politique du moment mérite une attention particulière de la part des mandataires du pouvoir que vous êtes. Le monde entier a les yeux rivés sur chacun de vos faits et gestes politiques et scrute la façon dont vous gérez la fin de votre mandat et comment vous préparez soit le passage du témoin au parti vainqueur du prochain scrutin présidentiel, soit la reconduction de votre mandat actuel pour 5 ans encore.
Sans vouloir m'ériger en donneur de leçons, je m'interroge sur les raisons profondes d'un certain accès de fièvre qui commence à se manifester chez des auteurs d'articles publiés sur votre site depuis 3 ou 4 jours. Ces articles s'en prennent principalement à RUKINDIKIZA Gratien, à Marie-France CROS, à Pancrace CIMPAYE. Je me permets de penser que les électeurs que nous sommes, allons avoir bientôt l'occasion de désigner démocratiquement nos dirigeants. Ayez à coeur de mériter la confiance du peuple, sans trop vous attarder sur ce qu'écrivent les uns et les autres sur vous. Rappelez-vous: vous êtes observés à la loupe, surtout en ce moment crucial. Mettez un point d'honneur à réussir ce tournant historique.
Comme dit plus haut, je viens à vous en compatriote et en « inararibonye », contrairement à d'aucuns qui vous prêtent de mauvaises intentions telles que la volonté de votre parti de perturber le déroulement pacifique des scrutins ou même de fausser les résultats qui en sortiront.
Moi j'ai la faiblesse de faire confiance en votre sens de l'honneur sans lequel vous ne seriez pas arrivés au pouvoir de la manière que tout le monde sait.
Je n'ai pas eu connaissance de votre programme politique sur lequel vous avez été portés au pouvoir en 2005. Ce n'est pas le plus important. Votre bilan, après 5 ans parle de lui-même. Charge à vous de le rappeler au peuple, face à l'opposition qui a le droit de vous le contester conformément à leurs droits démocratiques. En bon père de famille, votre parti doit veiller à garantir la meilleure préparation possible de ces scrutins qui approchent à grands pas.
En compatriote et en « inararibonye », puisque l'heure de la compétition a sonné, permettez-moi de vous poser une question-clé, qui s'adresse à tous les compétiteurs politiques: « Que ferez-vous en cas d'échec électoral de votre parti »? La réponse à cette question qui n'est pas banale va déterminer l'avenir, la paix, la stabilité, la fierté retrouvée du peuple burundais.
En compatriote et en « inararibonye », je me permets d'inviter chacun d'entre vous à y réfléchir sérieusement, puis à passer le message à tous vos militants. L'histoire vous jugera à votre juste valeur! La même invitation s'adresse à tous les compétiteurs politiques. A l'issue d'un match sportif, il y a toujours UN seul gagnant (individu ou équipe)! Et l'honneur de tout sportif battu est de reconnaître sa défaite et de féliciter le vainqueur, dès lors que la compétition a été loyale. L'avantage que vous avez sur les autres concurrents, c'est de mettre en avant votre bilan qui parlera de lui-même pour damer le pion à vos adversaires! Aucun compétiteur sérieux ne peut se permettre de sous-estimer ses adversaires. Même si chacun court pour arriver le premier, on ne doit jamais exclure l'hypothèse d'une défaite!
Mais, en tant que votre compatriote et « inararibonye », je me permets de faire appel à votre sagesse pour rester fair-play si vous ne gagnez pas les élections. Votre acceptation, de bonne grâce, des résultats proclamés par la CENI vous honorera et vous fera entrer dans le club fermé des dirigeants africains qui s'inclinent devant la volonté du peuple!
Bien sûr, votre victoire n'est pas à exclure. Mais si jamais les Burundais ne vous renouvelaient pas leur confiance qu'ils avaient placée en vous en 2005, soyez prêts à considérer l'échec comme une occasion en or qui vous serait offerte pour améliorer votre projet de société pendant toute la législature, en étant dans l'opposition. Ce ne serait pas un moindre challenge! Ce serait une excellente occasion de préparer votre come-back au sommet de l'état. Votre responsabilité actuelle et future est historique, ne l'oubliez pas.
En compatriote et en « inararibonye » je me permets de vous inviter à en prendre la mesure. En effet, les Barundi, dans leur majorité, sont convaincus que vous ne ferez rien pour gêner ou freiner le processus électoral qui vient de commencer et qui promet d'être animé! Puisse-t-il constituer une fête permanente durant laquelle les enfants de la même nation vont enfin fraterniser, pour de vrai, autour de la cohabitation harmonieuse entre soeurs et frères. Ne privez pas le peuple de votre précieuse contribution à cette fête populaire: il vous en saura gré.
En tant que votre compatriote et « inararibonye », j'observe que la majorité de vos militants, celle de tous les partis politiques de l'opposition, celle de l'armée et de toutes les forces de sécurité, celle de la société civile, celle de toutes les couches de la population, celle de toutes les institutions laïques, religieuses et autres.... voteront, à n'en pas douter, pour le ou les candidats dont le projet de société sera axé sur certains thèmes-phare tels que l'impunité, la corruption, la justice pour tous, le respect scrupuleux des droits de l'Homme, le développement économique et social.
Je ne suis encarté à aucun parti, mais je ne veux pas voter idiot! Le « parti des non-encartés » est majoritaire au Burundi comme ailleurs! Mettez donc en avant votre projet de société qui, couplé à votre bilan des 5 ans de pouvoir devrait constituer un atout majeur pour votre famille politique.
Rassurez et confondez tous vos détracteurs, par des actes concrets et vérifiables, en promettant aux Burundais et au monde que vous respecterez le verdict des urnes, même si, pour ma part, je n'en doute point pour l'instant! J'en connais d'autres comme moi qui n'en doutent pas non plus! Nous espérons que vous ne nous décevrez pas.
Je vous remercie de m'avoir prêté oreille et vous souhaite plein de succès.