LIBERATION DE SINDUHIJE ET L'HYPOCRISIE DU POUVOIR DE BUJUMBURA 

 

Par Gratien Rukindikiza

 Burundi news, le 27/01/2012

Beaucoup a été dit sur l'arrestation d'Alexis Sinduhije en Tanzanie. Le pouvoir de Bujumbura a commencé par nier le fait d'avoir demandé son arrestation par le biais du porte parole du gouvernement et aussi par celui de la police. Celui de la justice a fini par le reconnaître.

Par ailleurs, le Président Nkurunziza lui-même a écrit une lettre au Président tanzanien pour lui demander d'extrader Alexis Sinduhije.

Arrestation

Alexis Sinduhije est parti de l'Europe pour l'Ouganda. Il a continué sur sa destination finale la Tanzanie. Il était en ordre au niveau de ses papiers. Dans l'avion de Kampala à Dar Es Salam, des indicateurs de la Documentation burundaise,  y étaient. A la descente de l'avion, il a présenté son passeport valide et l'officier de l'immigration a apposé son cachet comme pour tous les passagers. Aucune remarque sur son passeport contrairement à c e qui a été écrit chez certains. C'est juste à l'entrée en territoire tanzanien qu'un groupe de policiers tanzaniens lui a demandé de les suivre. A ce moment, des véhicules burundais tout terrain de la Documentation étaient présents. Un membre de l'ambassade du Burundi en Tanzanie est venu participer à son interrogatoire. Alexis Sinduhije a compris par son faux swahili qu'il était burundais. Il lui a demandé de sortir et il est sorti.

Sinduhije  était accusé d'avoir tué Kassy Manlan en 2001 et aussi d'avoir tué son gardien il y a plus de 8 ans. Beaucoup de tractations au téléphone entre le policier qui l'interrogeait et d'autres gens. Quand il a été présenté à la police centrale, le chef a demandé les charges qui pèsent sur lui et les policiers tanzaniens qui l'avaient arrêté, avaient du mal à les formuler. C'est déjà à partir de ce moment que l'extradition commençait à se compliquer pour les Burundais.

La police tanzanienne, incapable de produire des charges contre Sinduhije

La police tanzanienne, dont certains ont été en complicité avec les services de renseignements du Burundi, a présenté les charges pesant contre Sinduhije au juge dès les premiers jours. Le juge a estimé des charges trop légères pour arrêter une personne. La question principale était de savoir pourquoi une telle personnalité pouvait commettre des meurtres en 2001 et 2003 et rester dans le pays pendant 9 ans sans que le parquet ouvre au moins un dossier.

La police tanzanienne a été incapable de trouver d'autres explications. Le juge a refusé de recevoir Sinduhije, estimant que le dossier ne relève pas de la justice. A la police de se débrouiller.

Cacophonie au Burundi, le Président Nkurunziza soufflant le chaud

Ridicule, bête, voilà comment on peut caractériser la position du gouvernement burundais. Dès le départ, le gouvernement du Burundi n'a pas communiqué. Après quelques jours, le porte parole du gouvernement a affirmé que le Burundi n'est pas impliqué dans cette arrestation de l'opposant politique Alexis Sinduhije. Le porte parole de la police a fait la même déclaration. Cependant, le Président Nkurunziza a envoyé une lettre au Président Kikwete pour demander l'extradition d'Alexis Sinduhije.

Les Tanzaniens ne comprenaient pas  les déclarations officielles du gouvernement burundais qui accusaient les Tanzaniens d'avoir arrêté Sinduhije sans aucune demande de Bujumbura.

Le ridicule ne tue pas. Le porte parole de la justice a déclaré quelques jours avant la libération d'Alexis Sinduhije que le gouvernement burundais avait envoyé un mandat d'arrêt international en Tanzanie. Or, Sinduhije n'a pas été arrêté à l'immigration mais déjà en territoire tanzanien, même s'il avait fait quelques mètres après avoir franchi l'immigration sans aucun problème.

La mobilisation

Le pouvoir de Bujumbura a d'abord perdu au niveau de la communication. Les cafouillages ne pouvaient que profiter à Alexis Sinduhije. En plus, l'opinion publique tanzanienne a basculé du côté de Sinduhije. les médias tanzaniennes appelaient la Tanzanie à ne pas jouer le jeu de la dictature de Bujumbura. De plus, le pouvoir tanzanien n'appréciait pas que le Burundi fasse arrêter un opposant sur leur sol par des combines en recourant aux autorités intermédiaires.

En Europe, en Amérique, les médias ont souvent parlé de l'arrestation de Sinduhije. La mobilisation a été faite aussi par des amis, des membres de sa famille, des sympathisants burundais et étrangers aussi.

Fausses rumeurs sur cette arrestation

Alexis Sinduhije avait un passeport en ordre contrairement à ce qui a été dit. Avec ce passeport, il est sorti du transit de l'aéroport d'Entebbe, il a pu entrer en France.

Les autorités burundaises ont su qu'il allait en Tanzanie après plusieurs informations d'une rencontre prévue en Tanzanie avec les chefs des partis de l'opposition. Certains policiers tanzaniens travaillant pour les renseignements burundais, par le biais de l'ambassade en Tanzanie, ont donné aux renseignements burundais la compagnie d'aviation et l'heure d'arrivée de son avion. C'est ainsi qu'ils étaient à l'aéroport pour l'attendre.

Le Président Nkurunziza était au courant de tout et il a écrit une lettre pour demander l'extradition, contrairement à ses proches qui affirment qu'il n'était pas au courant.

Alexis Sinduhije n'a pas été escorté dans l'avion par la police tanzanienne. Il a été tout simplement libéré et le gouvernement tanzanien lui a réservé une place dans un avion qui allait directement à Kampala en sortant libre  du cachot.

La libération

La libération a été un grand soulagement pour ses amis, sa famille et ses sympathisants. Elle a été une douche froide pour les tenants de son extradition comme Adolphe Shimirimana et Manisha.

Les services des renseignements burundais ont envoyé des gens à Kampala pour payer des tueurs à gages chargés de l'éliminer.

Sa libération marque l'échec de Nkurunziza. C'est surtout dès l'arrestation de Sinduhije un échec de la paix. Nkurunziza venait de répondre aux évêques burundais. Les évêques devaient comprendre un message tel que "Circuler, rien à faire pour le dialogue".

Il n' y a plus de dialogue possible au Burundi. Si Nkurunziza veut négocier avec les opposants, il devra le faire à l'extérieur. Il a montré qu'il a une dose de violence, de méchanceté et surtout de malhonnêteté, ce qui est grave pour celui qui se dit très croyant.

Il y a des morts partout dans le pays. Le peuple n'a pas beaucoup de choix pour survivre. Il devra résister par tous les moyens. Aucun dirigeant n'a jamais vaincu son peuple. Plus le réveil est dur, plus la violence à l'égard du pouvoir est aussi dure.

La police et le ministère public tanzaniens dans le collimateur de la justice

 L'avocat d'Alexis Sinduhije a porté plainte contre le procureur général de la République et l'inspecteur général de la police pour avoir maintenu Sinduhije en garde à vue sans comparaître en justice. Les deux personnes devront s'expliquer sur le motif de leurs agissements le 31 janvier 2012. C'est une leçon de l'indépendance de la justice tanzanienne à la justice burundaise.

L'argent gaspillé alors que le peuple meurt de faim

Le peuple burundais est très pauvre. Dans certains coins du pays, la famine est récurrente. Le pays manque d'argent, de production, d'eau potable etc.... Par ailleurs, le pouvoir se permet de corrompre des fonctionnaires d'autres pays dans le but d'assassiner ou mettre en prison les opposants. Le Président Nkurunziza est prêt à marcher sur les Burundais, les écraser pour sauver son pouvoir et surtout pour qu'il continue à s'enrichir illégalement.