Le Burundi sous la menace d’un régime d’exception ?

 

Burundi news, le 03 juillet 2007 

1. POURQUOI FAUT-IL REAGIR VITE ?

 

La nouvelle que vient de publier le média électronique « burundirealite.org » pour attirer l’attention sur l’imminence probable d’un régime d’exception au Burundi donne de la frousse, au propre comme au figuré du terme. Sur fonds de cette actualité terrifiante, il y a évidemment quelques informations clés comme celle concernant la ministre Sinankwa ou celle relative à la vente illégale du jet présidentiel qui n’en finit pas de faire jaser. Nous entendons aussi dire que des opposants issus de partis politiques ainsi que des acteurs phares de la société civile feraient l’objet de menaces de mort.

 

Rappel des bonnes nouvelles

Or, nous avions assisté durant ces dernières semaines à une véritable embellie qui a vu une table ronde des bailleurs de fonds aux résultats finalement prometteurs et la reprise de pourparlers avec le Palipehutu FNL.

On nous vente aussi le recul annoncé du spectre des victimes de la famine et l’on annonce des perspective d’ouverture fort heureuses, par exemple, la visite prochaine de la Présidente de la Suisse à la mi-juillet, une visite qui sera, si elle a lieu, la première de l’histoire du peuple helvétique au Burundi et qui est un autre signe que le pays peut être fréquentable. Malgré tout !

Les lendemains potentiellement chantants ont même inspiré la Tanzanie, elle qui ne comprendrait plus pourquoi il y ait encore des réfugiés burundais sur son territoire, s’apprêterait à fermer les camps d’accueil établis d’ici à la fin 2007.

Et puis, nous à Genève, nous avons assisté samedi, 30 juin dernier, à une manifestation culturelle de solidarité contre la faim au Burundi, une manifestation au cours de laquelle l’on a vu des hutu et des tutsi dansé ensemble, pour la première fois, de mémoire d’homme en Suisse. En plus, cette manifestation était entièrement prise en charge dans son montage comme dans sa réalisation par les Burundais de la deuxième génération, qui avaient même réussi à s’entourer d’un orateur de poigne : le très médiatique Jean Ziegler, rapporteur spécial de l’ONU sur l’alimentation. Ce qui apparaît comme un véritable indicateur d’une évolution positive et irréversible.

 

Un tel chaos après deux expériences démocratiques réussies ?

 

Les tristes nouvelles sur l’imposition d’une loi d’exception feraient voler en éclat ce type d’issues prometteuses. Car cela voudrait dire que le pays s’apprêterait à renouer avec le style des dirigeants autoritaires sans aucune base populaire ; le pays verrait ressurgir des potentats - ivres de sang et forts uniquement pour les deniers publics détournés -, qui prétendraient venir occuper le vide actuel dans un mensonge de « salut national » qui ne peut même plus tromper le dernier de nos cadets.

En fait, le plus grave, c’est que lors de moments pareils, le déclic qui devrait provenir d’hommes intègres, capables de représenter une alternance honorable, peinent à parler, à se manifester, à rassembler et à représenter une véritable ambition pour le pays.  C’est aussi cela l’autre pénible caractéristique de la crise politico-politicienne du Burundi depuis la fatidique journée noire du 21 octobre 1993.

Est-il donc consacré qu’un  peuple a les dirigeants qu’il mérite et que les Burundais de 2007, après avoir vécu deux expériences électorales absolument incontestables,  peuvent s’incliner devant de nouveaux Pinochet(s) ? Non, chers compatriotes !

 

La démarche du Cirid, malgré tout…

Au Cirid (www.cirid.ch, en reconstruction), nous avons pris l’habitude, ces dernières années de dire à notre manière qu’un bon citoyen, ainsi que disait un homme d’Etat, ne devrait pas se limiter à se demander ce que le Gouvernement doit faire pour lui, mais ce que le citoyen doit faire pour son pays, y compris en désavouant son gouvernement si celui-ci se montrait incapable d’avancer, ou indigne de soutien.

Le 22 août 2006, au lendemain des arrestations des deux ex-homme forts du pays, MM. Ndayizeye et Kadege et surtout les tumultes qui ont dû suivre jusqu’à l’ « aggiornamento » de janvier-février passés, nous avions écrit au Président de la République en disant que les plus hautes autorités de l’Etat avaient « tout intérêt à développer un nouveau deal, je veux dire une sorte de contrat civique avec ses opposants et surtout avec les médias ainsi que les organisations de la société civile. Qui sont là, incontournables, qu’on le veuille ou non ». Nous parlions de dialogue national, général et global sur les questions prioritaires et sensibles qui engagent l’avenir immédiat du pays, jusqu’au delà de nos frontières.

Nous savions (parce que nous n’étions pas affiliés au parti présidentiel !), que notre proposition pouvait passer inaperçue, voire purement et simplement ignorée. Pour des raisons corporatistes assez peu fiables, un ministre du gouvernement burundais avait déclaré en novembre 2005 qu’il était « très hostile à toutes les initiatives et ambitions du Cirid » (sic !) au Burundi pour donner raison à des détracteurs qui tentaient, grâce aux dollars de la corruption, de nous intimider, comme c’est encore le cas aujourd’hui.

Mais comme nous savions que notre devoir de contribuer à la réflexion sur la paix au Burundi était une fonction sacrée, non négociable et que les pistes qui ressortaient de notre savoir-faire et de nos analyses  allaient d’ailleurs dans la bonne direction, nous sommes restés têtus et avons même récidivé en avril dernier avec pour seul intérêt : aider à faire avancer le débat sur la paix et la démocratie.

Dans ce même ordre d’idée, nous annonçons le chapitre II de cet article qui aura pour titre : Quatre pistes pour sortir le Burundi du guêpier actuel »

                                                           Genève, 03 juillet 2007

Déo Hakizimana, Président du Cirid (Centre indépendant de recherches et d’initiatives pour le dialogue). Vous pouvez réagir à cet article en envoyant votre message sur : communication@cirid.ch