FAUT-IL ENVOYER LES MILITAIRES BURUNDAIS AU MALI?

 Burundi news, le 24/02/2013

Par Gratien Rukindikiza

La guerre du Mali renferme des mystères. Au moment où les islamistes occupaient le Nord du Mali, les pays africains surtout ceux de la CEDEAO se hâtaient lentement. D'autres proposaient des services sans être convaincants. L'intervention de la France a poussé les africains à sortir de leur léthargie. Depuis l'intervention de France, à part le Tchad et le Niger, les autres pays venus à la rescousse du Mali n'ont pas encore lancé leurs troupes dans la bataille. Certains invoquent des problèmes logistiques. Le Burundi a proposé ses services dans ce monde des pays de l'Afrique de l'Ouest.

Le contexte militaire

Militairement, le Burundi n'interviendra pas au Mali pour apporter un plus par rapport aux autres pays voisins qui sont capables d'apporter ce que le Burundi peut. Au niveau de la logistique, chaque pays se débrouille pour envoyer ses troupes. Les fonds n'étant pas encore disponibles. Les Tchadiens et les Nigériens ont pris le chemin le plus court avec leurs moyens en fonçant sur le champs de bataille au Nord. Le Burundi aura besoin de la mise en place du transport des troupes pour arriver à Bamako alors que d'autres militaires présents se plaignent d'un manque de locaux. Comme si sur le front, il y avait des locaux.

Chaque troupe garde son commandement sur le terrain mais doit évoluer en fonction des ordres des généraux français. La France aimerait se retirer pour ne pas s'embourber dans ce sahel. Ce sont les militaires africains qui seraient en première ligne contre les islamistes dont les tactiques semblent aguerris sur le terrain.

La chasse gardée de certains pays

Le souhait du Burundi d'envoyer ses troupes au Mali n'est pas du goût de tous les pays intervenant au Mali. Le Tchad qui marque des points sur le terrain n'aimerait pas que les Burundais qui ont marqué les points en Somalie viennent récupérer leur "victoire". Certains officiels haut placés tchadiens  ne s'en cachent pas.

Le commandement des troupes africaines est confié à un général nigérian. Le Nigéria a toujours été l'ossature d'une force de cette région nommée Ecomog. Le Burundi viendrait perturber un commandement déjà unifié d'autant plus qu'il ne pourra pas constituer une force autonome comme celle des Tchadiens.

La perception des autres pays

Dans plusieurs milieux, des interrogations ne manquent pas sur cette volonté des Burundais alors qu'ils ont plusieurs milliers de militaires en Somalie. Certains y voient une raison pécuniaire. Or, l'argent manque pour le Mali. La France a déjà dépensé 70 millions d'euros et frappe à la porte de son voisin allemand pour l'aider à financer cette guerre.

D'autres spécialistes pensent que cette volonté peut être liée à une politique intérieure instable. En intervenant en Somalie et au Mali, le pouvoir burundais pourrait se permettre la violation des droits de l'homme, les tricheries aux élections dans l'impunité. Si la visite du Président Nkurunziza en France s'inscrit dans cette volonté d'aller au Mali, notre cher Président n'aura pas compris les enjeux de la Francafrique.

La mauvaise gestion des fonds des militaires envoyés en Somalie, une fuite en avant

Le Burundi est pointé du doigt par les bailleurs des fonds de l'Amisom de sa mauvaise gestion des fonds destinés aux militaires envoyés en Somalie. Il y a une semaine, des députés burundais étaient en Somalie. Ils ont eu la malchance de demander à l'Amisom le pourquoi des transferts en retard des fonds pour ces militaires. Ils ont eu la réponse à la hauteur. C'est l'Etat burundais qui magouille au niveau de ces fonds. Les transferts se font à temps mais tout se complique à Bujumbura. Non seulement il y a une mauvaise gestion mais aussi la comptabilité de ces fonds est mal tenue. Les députés présents l'ont bien entendu.

D'une manière générale, à chaque sortie de fonds destinés à chaque militaire, celui-ci signe. Au Burundi, un seul signe pour 10 militaires. Est-ce que chaque militaire reçoit ce qui lui est destiné? C'est la question que certains responsables de l'Amisom se pose.  On sait que des militaires participant à ces opérations se plaignent toujours à leur retour à Bujumbura. L'argent manque des mois après la mission parce qu'il a été utilisé à d'autres fins.

De l'argent des militaires a été mis sur un microcrédit. Paradoxalement, on trouve cinq comptes pour un seul militaire. Personne ne donne une explication convaincante. Certains se demandent si réellement l'intervention en Somalie ne profiterait pas à ceux qui restent à Bujumbura plutôt que ceux qui sont engagés sur les champs de bataille.

Les militaires burundais se plaignent de vétusté de leurs camions. Le Burundi a bel et bien reçu l'argent pour acheter des véhicules neufs de transport de troupes. Pourtant, on trouve des camions qui tombent en panne en Somalie. Cependant, les Ougandais qui ont eu les mêmes fonds ont des véhicules neufs.

Espérons que cette manne guerrière pour certains dignitaires à Bujumbura ne les pousse pas à envoyer des troupes au Mali.