QUEL MODE DE PRESIDENCE DU PRESIDENT NKURUNZIZA? 

Par Gratien Rukindikiza

Burundi news, le 19/02/2010

Le jour de l'investiture d'un Président, son mode de présidence peut se dévoiler. Ses propos retracent la façon dont il va diriger le pays. Ses propos peuvent rassurer, inquiéter, semer des doutes etc... Les discours sont souvent préparés à l'avance et les erreurs sont en principe voulues par provocation.

Le Président Nkurunziza a commencé sa Présidence en affirmant qu'il a été élu par Dieu, que le peuple a assumé la mission de Dieu. Il a aussi dit que la prière sera privilégiée en alternance avec le travail. Pourtant, personne n'a jamais vu un pays développé par les prières.

Sous la coquille de l'escargot, le Président Nkurunziza observe

Depuis le limogeage de Radjabu, certains observateurs se demandent si le Burundi a un dirigeant, capable d'assumer les choix du pays. Qui décide? Grande question que se pose même au sein du CNDD-FDD. D'emblée, on pourrait dire que c'est le Président. Or, dans les faits, le pouvoir se trouve là où chaque ministre, chaque conseiller à la Présidence l'exerce.

Le Président Nkurunziza l'a déjà dit. Lorsqu'il y a la tempête ou s'il y a une question épineuse, il se met sous la coquille d'escargot jusqu'à la fin du problème.

Difficile de travailler avec le Président Nkurunziza, disait un ministre

Alors que les autres Présidents sont envahissants dans les dossiers pour connaître en détail la mise en exécution des projets, le Président Nkurunziza semble absent. Un membre du gouvernement  me disait qu'un jour, il était avec le Président pour discuter des volets de financement international. Après 10 minutes, le Président Nkurunziza lui a demandé d'arrêter son exposé pour prier afin de trouver la solution à la question de la Banque Mondiale. A la fin de la prière, le membre du gouvernement a voulu continuer son exposé. A sa grande surprise, le Président a piqué une colère. Pour lui, il était hors de question de continuer à traiter une question déjà soumise à Dieu. Le membre du gouvernement a demandé alors l'attitude à prendre face aux envoyés de la Banque Mondiale. Le Président lui a dit de partir et de voir comment leur dire (Uzoraba ingene ubabwira).

N'y a -t-il pas un ministre dans ces jours qui court derrière le Président pour une question de fonds? Pauvre ministre qui ne sait pas que le Président le fait exprès car il ne veut pas affronter la question pour donner une réponse.

Un autre ministre disait que les ministres n'ont pas besoin du Président. de toute façon, il n'aide pas dans le règlement des problèmes. Chaque ministre doit se débrouiller. Certains disent qu'il ne s'intéresse pas aux dossiers. Il n'hésite pas à confier la présidence des conseils des ministres au 1 er vice-Président Yves Sahinguvu pour aller jouer au football ou prier.

L'autonomie laissée au ministre est un couteau à double tranchant. Si les initiatives sont heureuses, c'est le Président qui les revendique. Si les initiatives sont malheureuses, le limogeage peut s'en suivre.

Le cas du ministre de l'énergie et mines limogé

Le ministre de l'énergie et mines limogé est un cas d'école. Même si le Parlement l'a accusé d'avoir voulu brader les deniers de l'Etat, il ne s'est pas permis de poser un tel acte sans autorisation du Président. Par preuve, le parti CNDD-FDD, parti au pouvoir l'avait soutenu et l'a lâché au moment où le limogeage du gouvernement était envisagé.

L'ex ministre de l'énergie et mines avait reçu l'instruction du Président d'abandonner les 36 milliards de francs bu au profit du Rwanda surtout. La raison principale aurait été un accord verbal entre le pouvoir rwandais et le pouvoir burundais selon les explications que le ministre a reçues. Le Burundi a besoin d'un financement de la BAD, dirigé par le Rwandais Kaberuka. Le Burundi a besoin aussi de redorer son image après des rapports négatifs sur le pays. Sans oublier aussi que le Burundi a été pointé du doigt par un rapport des experts du conseil de sécurité des Nations unies qui accusait certains dignitaires du pouvoir d'être complices du FDLR. En cédant les 36 milliards, le Burundi obtiendrait un soutien du Rwanda en matière financière via la BAD, en matière politique pour améliorer l'image du pouvoir.

Malgré l'exécution d'un ordre, le ministre s'est vu limogé du gouvernement. Cela ressemble  à l'ex ministre, surnommé Diego, qui a vendu le Falcon 50 sur ordre du Président et qui a été limogé quand le dossier a été dans la presse.

Est-ce que le Burundi a besoin d'un Président chargé de jouer au football et de prier? La réponse est non.