NKURUNZIZA A BRUXELLES

 

Burundi news, le 28/10/2009

  Par Nzobambona Victor

Artificiel et léger

 

 

D’abord pour entrer dans la salle de conférence , c’était pire qu’à Zaventem pour aller aux USA. Une  fouille systématique avec détecteur d’armes etc. De mémoire de Burundais de la diaspora c’était jamais vu. Des policiers en tenue, en civil, grouillaient partout. Certains étaient nerveux. De fait, les services de la présidence  avaient  indiqué que « le président burundais était en danger à Bruxelles ! » Et les Belges ont pris au sérieux l’avertissement.

C’est un président qui a peur qui a finalement rencontré les Burundais, avec une heure de retard, justement à cause des files nées desdites fouilles. Et un monsieur du  protocole, sourire  en coin a tout de suite indiqué la couleur : « nta guterana amajamabo ». Comprenez : pas de question gênante.

Quand le président a parlé, c’était un discours  pour parler des « réalisations ». A l’écouter, au Burundi  tout baigne, tout se reconstruit, tout est beau.  La corruption, les assassinats, les problèmes de partis politiques empêchés de tenir des réunions, le cas de Radjabu  en prison,  l’assassinat d’Ernest Manirumva, les progrès dans l’enquête sur Falcon, les problèmes de la REGIDESO avec le ministre de tutelle, rien de tout ça. Des problèmes concrets qui assaillent les Burundais le président n’en évoquera aucun. 

Il parle des « faranga zinakuya nyingi »(les sous tombent) en évoquant les 2 millions d’Euros promis par la Belgique( en « oubliant » qu’ils seront donnés au PNUD pour les élections), à l’évocation de ces deux millions, les courtisans ont lancé une salve d’applaudissement. Les Burundais de Bruxelles ont eu bien sûr droit à la fable sur l’avocat solution à   la misère économique burundaise,  remède de tous les maux et gage de la beauté présidentielle : « turi beza kuko twisiga amavuta avuye mu mavoka» ( je suis beau parce que je met sur mon visage l’huile issue de l’avocat) Et les courtisans de lancer des applaudissements nourris.    Et puis il ya eu une séance vidéo où, entre autres, plusieurs minutes étaient consacrées aux talents footballistiques du président et, ce qui était marrant, lorsque le président  marquait un but,  les  courtisans  lançaient des applaudissements…

Un micro « sauteur »

Le clou de la comédie a été la séance des questions. Des personnes avaient été au préalable  choisies pour poser des pseudos questions. Là encore, aucune question gênante. Les Burundais ont eu droit à expérimenter un micro intelligent. En effet, le micro dans les mains d’un jeune CNDD-FDD, très connu, sautait des doigts levés dans la salle et tombait  par « hasard » sur quelqu’un avec une « belle »question. Le micro « sauteur » évitait soigneusement le coin du  groupe des partisans de l’Honorable Radjabu,   qui ont demandé en vain la parole. La pièce de théâtre, mal jouée, s’est terminée par une prière sous les huées. Certains regrettaient déjà d’avoir perdu leur temps. « C’est quoi ce président qui a peur des questions de ses citoyens ? » entendait-on dans la salle.

Les courtisans et tous les autres prédateurs qui grouillent autour du président , eux affichaient un sourire de vainqueur.  Pour avoir refusé la parole à des personnes qui avaient des véritables questions, ils  pensent  avoir réussi la séance d’infantilisation. Effectivement,  le président n’a répondu à aucune question  qui préoccupe réellement les Burundais, puisqu’elle n’a  pas été posée. Voilà la démocratie.

Nkuruziza a laissé à Bruxelles l’image d’un président qui a peur de ses propres citoyens, dont certains l’ont élu. Il a laissé l’image d’un président déconnecté, qui croit que  le voir marquer un but dans une vidéo fait de lui un héros du développement.

 Il a été remarqué aussi que c’est un chef d’Etat très bien « protégée » par une nouée de prédateurs et courtisans qui  dressent un bouclier entre lui et les citoyens. Mais plus grave :  il est apparu comme un président léger et artificiel ,  qui fait tout pour éviter les questions essentielles.