Burundi news, le 21/05/2010

Le Président NKURUNZIZA: le dilemme de sa vie !

 

« On peut tromper quelqu'un tout le temps, on peut tromper tout le monde un certain temps, mais on ne peut pas tromper tout le monde tout le temps ». (Abraham LINCOLN)

 

Le scrutin des communales qui devait se dérouler aujourd'hui 21/05/2010 vient d'être reporté au lundi  24/05/2010 sur décision du Président de la CENI.

 

Cette mesure réjouit les partis de l'opposition ainsi que les observateurs tant nationaux qu'internationaux. Elle déstabilise, par contre, le camp du parti présidentiel dont le plan « informatique » de fraude électorale massive en sa faveur vient d'être déjoué. Le peuple burundais vient de l'échapper belle. Sa vigilance est et sera récompensée!

 

On comprend mieux à présent pourquoi le Président-candidat NKURUNZIZA tablait davantage sur « la volonté de Dieu » plutôt que sur celle de son peuple pour remporter le scrutin présidentiel du 28/06/2010. Le peuple burundais félicite le Président de la CENI et lui suggère de diligenter une enquête approfondie pour identifier tous les concepteurs et exécutants de ce plan diabolique qui n'est rien d'autre qu'une « tentative de putsch électoral »! Même s'il est présumé innocent dans cette affaire, le silence complice du candidat NKURUNZIZA, un de plus, ne plaide pas en sa faveur!

 

On comprend mieux également pourquoi certains médias annonçaient, dès la fin de la campagne électorale des communales, la « récidive du CNDD-FDD » au soir de la proclamation des résultats des élections communales. Ce qu'ils n'ont pas dit, c'est que le candidat NKURUNZIZA a dû s'éloigner du centre ville de Bujumbura pour aller clôturer sa campagne à Kanyosha. De plus il a dû racoler et payer des « taxis-moto » pour faire gonfler le petit nombre de gens à son meeting. Ceci en contraste avec les autres partis qui ont fait une démonstration de force dans Bujumbura mairie.   

 

Être au pouvoir ne donne pas le droit d'être au dessus de la loi. C'est ce que les responsables du parti CNDD-FDD semblent ne pas comprendre. Un petit retour en arrière, en effet,  nous rappelle des faits inquiétants constatés pendant la campagne qui vient de se clôturer, même si certains militants du CNDD-FDD sont accusés de la continuer encore aujourd'hui.

 

Des assassinats à caractère politique, l'emploi illégal du charroi de l'Etat, des distributions d'armes dans certaines provinces, divers actes d'intimidation observés ici et là. Ces faits regrettables  traduisaient une certaine nervosité  de l'administration CNDD-FDD, et tout le monde s'interrogeait sur ce que pensait  le Chef de l'Etat à propos de ce faisceau de faits reprochés à son parti.  Aujourd'hui le peuple commence à comprendre les raisons d'une telle désinvolture!

 

Compte tenu que le bilan désastreux du gouvernement NKURUNZIZA  à plusieurs égards, on peut comprendre que le CNDD-FDD redoute un vote-sanction fort prévisible. Est-ce une raison, pour le Président-candidat NKURUNZIZA, de ne rien dire face à une telle situation intolérable? Quel souvenir faudra-t-il garder du pouvoir CNDD-FDD par rapport à l'impunité?

 

Pas plus tard qu'hier 20/05/2010, les auditeurs de la radio ISANGANIRO ont appris avec stupéfaction, de la bouche d'un porte-parole du parti présidentiel, des choses extrêmement graves. Les militants de ce parti ont reçu la consigne de se rendre aux urnes de bonheur, puis de traîner à côté du bureau de vote dans l'attente des résultats. Le journaliste animateur de l'émission dans laquelle ce responsable du parti était invité, en est resté abasourdi!

 

On voit bien que le CNDD-FDD cherche à provoquer des émeutes, à s'en prendre aux militants des autres partis qui oseraient contester les fraudes « organisées » du parti CNDD-FDD, et ainsi chercher à justifier une reconduction du mandat du Président NKURUNZIZA sans passer par les urnes! Même après 5 ans de pouvoir, ce parti n'a pas encore compris que le peuple burundais n'est ni sot ni défaitiste.

 

Tout le monde connaît les enjeux de l'élection des conseillers communaux: le parti qui en sortira vainqueur sera favori pour remporter le second scrutin, celui de l'élection présidentiel. Le CNDD-FDD ne s'y est trompé: comme il redoute une débâcle, il préfère en empêcher le déroulement, par tous les moyens, y compris la violence, après une fraude « informatique ». Mais le peuple est politiquement mature et ne se laissera pas faire.

 

Le peuple a attendu, en vain, du Président NKURUNZIZA  depuis 5 ans, des mesures concrètes pour mettre fin à l'impunité. Celle-ci a été, au contraire, institutionnalisée. La corruption, son corollaire,  a battu tous les records des années précédentes. Résultat? La misère de la population a atteint un niveau abyssal. La déception du peuple est à la mesure de la sanction qu'il ne va pas manquer d'infliger aux candidats du CNDD-FDD par les urnes!

 

Les silences complices du Président NKURUNZIZA qui était supposé le protéger sont éloquents! A tort ou à raison, ceux-ci  peuvent laisser croire qu'il en est le principal commanditaire, auquel cas il en répondrait, tôt ou tard, devant la Cour Pénale Internationale.

 

Je ne voudrais pas lister ici tout ce que le CNDD-FDD a tenté de faire, sans succès, pour faire obstacle au processus électoral de cette année. Pourquoi un tel acharnement à refuser la démocratie sans laquelle il n'aurait pas accédé au pouvoir en 2005? Pourtant, dans une démocratie, les élections pluralistes et transparentes constituent le meilleur moyen de légitimer tout pouvoir. Dès lors, on peut se demander pour quelles raisons le CNDD-FDD ne semble pas s'y être suffisamment préparé à temps. On a compris qu'il avait préférer concocter un plan secret de tricherie électorale!

 

A la lumière de la décision de la CENI, on comprend mieux aussi la décision insensée du gouvernement NKURUNZIZA d'expulser  l'auteur du rapport accablant de « Human Rights Watch » au lieu de prendre des mesures concrètes pour corriger les points faibles stigmatisés dans ce rapport ? La vérité blesse!

 

A quelques semaines de la fin de son mandat, le gouvernement aurait pu se montrer moins irascible. Cela d'autant plus que son successeur pourrait très bien annuler la mesure incompréhensible et contestée par l'opinion publique, les partis de l'opposition et les associations de défense des droits de l'homme!

 

Y aurait-il un lien entre cette expulsion de la représentante de « HRW » au Burundi et le fait que le Président-candidat NKURUNZIZA soit  prêt à tout pour ne pas perdre les élections, selon son entourage ? Aurait-il déjà oublié comment il y a accédé? Par la volonté du peuple, et non par celle de « son Dieu ».

 

Par la même volonté du peuple, il peut le quitter, puisque que je sache, il est démocrate! Je persiste à dire que  les expulsions d'observateurs des droits de l'homme ne donnent pas une bonne image du Burundi dans le concert des nations.

 

La première campagne vient de s'achever, mais la fièvre électorale du moment ne tombera pas avant la proclamation officielle des résultats du 23/05/2010. Je refuse de m'imaginer, une seule seconde, que le Président-candidat NKURUNZIZA cautionne   la distribution d'armes, les assassinats d'opposants et cherche à intensifier la campagne de terreur pour créer un climat d'insécurité. Ce qui me gêne, par contre, c'est qu'il détient le pouvoir et les moyens de stopper net cette recrudescence  de violence,  mais qu'il ne s'en sert pas. On est en droit de se demander pourquoi.

 

Que penser des tueurs à gages « repentis » qui mettent le CNDD-FDD en cause dans cette criminalité, souvent anonymement par peur ? Certains passent aux aveux, une fois appréhendés par des opposants. D'autres encore viennent, semble-t-il,  se confier à des responsables  de l'opposition pour  demander protection.

 

On peut  se réjouir que, jusqu'à présent, toute tentative du CNDD-FDD d'empêcher le déroulement paisible du processus électoral ait échoué. Pourquoi?

 

Tout simplement parce d'abord, même les militants du CNDD-FDD sont découragés et désertent en masse pour aller gonfler les rangs du FNL, du MSD et de l'UPD principalement. Ce sont les transfuges qui alertent les responsables de l'opposition. Voilà pourquoi tous les stratagèmes criminels « secrets » que le CNDD-FDD  essaie de mettre en oeuvre sont, fort heureusement, éventés à temps. C'est un bon signe de mutation sociale et politique, car les Burundais n'ont pas envie de replonger dans les affres d'une guerre fratricide, comme l'y incite un certain allié du CNDD-FDD, Pasteur HABIMANA.

 

Compte tenu du contexte électoral du moment, j'en appelle aux démocrates de tous bords, y compris celles et ceux du CNDD-FDD pour qu'ils  constituent des comités mixtes d'autodéfense pacifique afin d'appréhender et désarmer tout auteur de violence dont tout commanditaire présumé, qui qu'il soit, devra en répondre devant les instances judiciaires habilitées, tant nationales qu'internationales, dès la fin de ces élections.

 

En attendant, et comme preuve  de bonne foi de sa part, le Président-candidat NKURUNZIZA est mis devant ses responsabilités constitutionnelles pour garantir, par des mesures concrètes et vérifiables,  la sécurité de tous ses gouvernés  et de toute personne se trouvant sur le territoire national jusqu'à la fin de son mandat. Comme beaucoup de mes compatriotes je l'implore pour   que,  dès aujourd'hui jusqu'au 28/08/2010, plus une seule goutte de sang ne soit versée pour des raisons politiques.

 

Il serait mieux avisé d'abandonner toute tentative de fraude électorale qui risquerait de ternir son image déjà défraichie auprès  d'une certaine opinion tant nationale qu'internationale. Qu'il se résolve à accepter, pas seulement du bout des lèvres, le verdict des urnes, après des élections libres, justes, transparentes. S'il s'entêtait, il perdrait le peu de crédibilité qui lui reste. Il a l'obligation morale de dissiper tout soupçon! Sa responsabilité est historique!

 

Le pouvoir qui sortira de ces élections en cours devrait avoir, entre autres priorités, la réhabilitation de l'indépendance de la justice pour faire  juger quiconque aura une quelconque responsabilité dans la perturbation du processus électoral, sous le pouvoir en place aujourd'hui. Entre l'honneur et l'ignominie, le Président NKURUNZIZA est face au dilemme de sa vie: le choix lui appartient!

 

NZIBAREGA Bernard