Parlons de choses sérieuses…

 Par The Leadership Institute

Aujourd’hui, la plupart des acteurs politiques burundais sont déjà dans la logique des élections de 2010, et chacun y va de ses chances dans la mesure où il est clair que le CNDD FDD a échoué au cours de son premier mandat.

 

Cet échec du CNDD FDD est contesté par le Président NKURUNZIZA, Jérémie NGENDAKUMANA et d’autres ténors du régime actuel.

 

Cependant, les faits sont là et nous allons vous les exposer dans les lignes qui suivent :

 

1.      La consolidation du CNDD FDD : Un parti politique constitue une machine qui, si elle est bien organisée, peut mener à la victoire électorale et dont le but premier est d’entretenir l’idéologie et les électeurs. Sa structure et sa présence dans tout le pays, sont des facteurs déterminants pour un véritable dynamisme d’un parti politique. C’est dans ce sens que la plupart des observateurs avaient interprété le maintien de l’ancien homme fort du CNDD FDD, l’Honorable Hussein RADJABU, à la tête du Parti au lieu qu’il occupe un des postes de responsabilité dans les nouvelles institutions de la République. Le CNDD FDD semblait vouloir se renforcer en tant que parti politique et s’assurer encore une victoire écrasante aux élections de 2010. Beaucoup d’observateurs avaient admiré l’organisation du CNDD FDD et les politiciens semblaient avoir abdiqué quant à leurs chances réelles de le supplanter et pensaient que ce Parti allait s’imposer pendant plusieurs années. Cette stratégie du CNDD FDD ressemblait à celle des partis comme l’ANC en Afrique du sud et le CCM en Tanzanie : construire un système politique qui s’appuie sur le Parti et non sur les hommes qui occupent des fonctions précises dans les institutions. Cette approche nouvelle sur la scène politique burundaise fut décriée, à tort ou à raison, mais aurait eu au moins le mérite de sauvegarder une unité dans l’idéologie si l’on considère les divisions dues à des alliances d’individus que l’on observe dans les autres partis politiques burundais. D’autre part, nous pensons que le CNDD FDD avait effectivement besoin de travailler davantage dans sa consolidation pour assurer sa véritable mutation d’un mouvement rebelle vers un Parti ayant plus de discipline, d’ouverture et de responsabilités comme parti au pouvoir. Malheureusement, cette transition ne fut pas réalisée : les divisions ne tardèrent pas à naître entre les membres de ce Parti. Le Congrès de NGOZI fut le point culminant de ces divisions et a été fatal pour le CNDD FDD en tant que parti politique. En premier lieu, la responsabilité de la chute du CNDD FDD est à mettre sur le dos du Président NKURUNZIZA. Comme on l’a toujours dit, un Burundi post-conflit n’avait pas besoin d’un parti au pouvoir faible surtout avec les enjeux qui le guettent sur des questions importantes comme le désarmement, la démobilisation, la relance économique, le dialogue national pour le renforcement des institutions et la mise en place de la Commission Vérité Réconciliation. Avec cet agenda, le Président de la République n’aurait jamais du, stratégiquement, accepter les divisions s’installer et orchestrer une cassure aussi totale comme ce fut le cas avec le Congrès de NGOZI. Ce fut une erreur d’appréciation que le CNDD FDD va devoir gérer pendant encore longtemps. Nous ne disons pas que la destitution de Hussein RADJABU à elle seule est responsable de cette cassure. En réalité, nous croyons que la cassure la plus profonde fut dans la vision de ce parti et de ses responsabilités en cette période post-conflit. En effet, le Congrès de NGOZI a ramené le CNDD FDD en arrière sur une question essentielle : celle de l’idéologie. Depuis le Congrès de NGOZI, le CNDD FDD a reculé sur les aspects ethniques, nationalistes et ses structures ont été accaparées par l’ex-branche militaire du mouvement CNDD FDD. Les politiciens du CNDD FDD avec Hussein RADJABU à leur tête ont été ou se sont sentis écartés. A une époque où le CNDD FDD n’était plus un groupe armé mais un parti politique, cet avènement des « militaires » ne pouvait que consacrer les divisions actuelles. A ce titre, nous osons affirmer que le Président NKURUNZIZA, élu avec la casquette CNDD FDD et véritable chef d’orchestre du Congrès de NGOZI, où il est devenu le véritable Chef du CNDD FFD, aura été le leader à qui incombe la désintégration de ce Parti. Il est donc entièrement responsable de l’état actuel de ce Parti : une vraie descente en enfer. Son manque de vision politique, sa brutalité et sa précipitation légendaires répercutent aujourd’hui dans la conduite de ce parti.

 

2.       La Question des Corps de Défense et de Sécurité : Jadis considérée comme l’une des armées les plus élitistes et disciplinées en  Afrique, l’armée burundaise en 2005, venait de passer plus d’une décennie en guerre et l’intégration des mouvements armés dans le cadre des accords de paix constituait un espoir pour la Nation toute entière de voir émerger des forces de défense et de sécurité nationalistes, professionnels et répondant aux attributions qui leur sont assignées dans le contexte d’une démocratie et d’un Etat de Droit. Malheureusement, aucun de ces objectifs n’a été réalisé.

 

En effet :

 

-         La discipline fait défaut : On ne compte plus les bavures commises par des éléments de la Police et de l’armée, sans oublier celles des agents du Service national de renseignement. Le pire étant que la plupart de ces bavures restent largement impunies.

-          La formation et l’équipement des agents laisse à désirer. Les policiers et soldats burundais sont parfois en haillons et cela se traduit par un faible moral des troupes qui ne se sentent pas valorisées par l’Etat. L’absence d’une formation commune entre les ex-combattants et les anciens FAB ne renforce pas leur modus operandi et maintient des frustrations quant aux postes de responsabilité. Il y a un minimum requis pour diriger certaines activités de l’armée ou de la Police

-         L’instrumentalisation des forces de Police et de certains militaires par le parti CNDD FDD ont compromis la question de la neutralité de ces corps vis-à-vis de la Politique. L’autre corollaire de cette institutionnalisation étant le maintien des clivages ethniques dans ces corps.

-         L’armée et la Police étant les garants de la Loi et de l’Ordre Constitutionnel, leur neutralité est une condition sine qua non pour la consolidation de la démocratie.

-         La démobilisation doit continuer mais doit se faire  dans le contexte de la professionnalisation et de la modernisation de nos forces de sécurité. Or, on n’observe aucune dynamique dans ce sens dans la volonté du gouvernement NKURUNZIZA. Par ailleurs, même la stratégie de démobilisation semble traîner des pieds car elle n’a pas été  bien conçue pour bien intégrer la composante « Réinsertion ». Et rappelez-vous que le Président NKURUNZIZA est le Président de la Commission Nationale chargée du programme DDR.

 

 

3.      La Politique Etrangère du Burundi : le Gouvernement NKURUNZIZA n’a pas dérogé à la pratique des régimes passés visant à considérer que les postes dans les ambassades burundaises à l’étranger sont des postes à pourvoir pour récompenser certains et écarter d’autres. Comme si nos ambassades étaient de simples standards téléphoniques au lieu d’être des instruments d’une politique étrangère dynamique et axée sur la coopération au développement et le marketing du Burundi sur le plan international. Les faibles performances du gouvernement NKURUNZIZA en politique étrangère sont dues à un manque de stratégie appropriée dans ce domaine. Le Burundi, en tant que pays, a besoin d’une vraie stratégie de politique étrangère sur laquelle s’appuierait nos dirigeants pour assurer un regain de dynamisme de notre coopération. La diplomatie doit être active et disposer d’une feuille de route pour chaque partenaire du Burundi. Ainsi, on se pose la question de savoir, par exemple, si nos ambassadeurs alertent le gouvernement sur la dégradation de l’image du pays dans leurs pays respectifs car le gouvernement semble ne pas comprendre que son image est ternie.

 

Plus grave encore, le Président NKURUNZIZA a relégué au second plan la sous région dans sa politique étrangère. Quand on connaît le rôle  de la sous région dans le processus de paix burundais, on remarque une absence de dynamisme entre les relations du Burundi avec la sous région. C’est à croire que le centre d’intérêt du Président NKURUNZIZA s’est déplacé ailleurs. Seul le Président KIKWETE de la Tanzanie a effectué une visite officielle au Burundi. Ni Kagame, ni Kabila, ni Museveni, ni Mbeki, Kibaki, ni Mwanawasa, ni Meles Zenawi, personne dans la sous région n’a encore effectué une visite officielle au Burundi. Plus surprenant encore, quand on connaît le rôle joué par la RDC dans la lutte du CNDD FDD, le Président NKURUNZIZA n’a pas encore effectué une visite en RDC ! Drôle d’ingratitude pour ceux qui ont contribué à la réussite du processus de paix. Aujourd’hui, les pôles d’intérêt du Président NKURUNZIZA sont au Soudan et dans les milieux des born-again un peu partout au monde.

 

4.      La Question de la Sécurité et des Droits de l’Homme : aucun gouvernement responsable ne peut accepter que ses citoyens meurent tous les jours, non pas de maladie naturelle, mais ASSASSINES. Le gouvernement NKURUNZIZA a lamentablement échoué dans la protection de ses citoyens et parfois ce sont mêmes les agents de l’Etat qui sont responsables de ces assassinats en TOUTE IMPUNITE. Quant aux tueries qui incombent aux FNL, c’est le gouvernement NKURUNZIZA qui devrait poser le préalable d’un cessez-le-feu et faire preuve d’intransigeance quand il s’agit de tueries contre des populations civiles non armées. Le FNL n’a aucune légitimité à continuer à tuer des civils et c’est le premier que le gouvernement devrait obtenir dans le cadre des négociations. L’insouciance du gouvernement face aux multiples morts de paisibles citoyens est une vraie honte. Tout comme, le gouvernement NKURUNZIZA est largement et indiscutablement responsable des multiples cas de violation des droits de l’homme : rappelons l’impunité qui caractérise toujours les cas de tueries de Muyinga, de Kinama, les tortures contre l’ex-président KADEGE, Evariste KAGABO …pour ne citer que ceux-là. Un tel gouvernement ne rassure pas quant à son engagement à faire respecter l’Etat de Droit et les droits de l’homme.

 

5.      La Relance Economique : L’anarchie caractérise la conduite de la politique économique du Burundi et se solde par un faible taux de déboursement de l’aide à la reconstruction promise au Burundi et par la série de mesures populistes dont le Président NKURUNZIZA s’est fait le champion toutes catégories. Par ailleurs, l’instabilité dans la conduite des réformes économiques compromet largement le dialogue avec les institutions de Bretton Woods sans oublier le manque de crédibilité de l’Etat dans la gestion de ses propres ressources ou de celles de l’aide. Les burundais sont donc condamnés, avec le régime NKURUNZIZA, à rester dans l’extrême pauvreté alors que lui-même et ses proches collaborateurs s’enrichissent à vue d’œil. Avec un tel environnement, la relance économique ne sera jamais au rendez-vous durant le mandat du CNDD FDD.

 

6.      Les Performances de nos Institutions Républicaines : sur ce chapitre, nous citerons les crises au sein du Parlement et du Sénat, l’instrumentalisation de la Justice et les instabilités dans les différents ministères. Tout cela ruine le fonctionnement et l’efficacité de l’Etat à servir le Burundi

 

7.      La question du « Hutu Empowerment » : cette expression vise les aspects relatifs au rétablissement de certains équilibres ethniques en faveur des Hutus par une politique bien pensée et cohérente avec les autres réformes politiques en cours. Ainsi, nous déplorons, par exemple,  le manque de stratégie pour former des cadres militaires hutus dans des académies étrangères afin de leur permettre d’arriver aux niveaux de formation de leurs collègues tutsis. Cela compromet un certain équilibre dans certains postes de commandement militaire et le complexe de supériorité ou d’infériorité ne contribue pas à l’harmonie dans ce corps.

 

Dans le domaine de la Justice, le pouvoir CNDD FDD, au lieu de promouvoir et de favoriser l’émergence d’une nouvelle classe de magistrats hutus et tutsis intègres et incorruptibles, se borne à exploiter le peu de magistrats hutus en les corrompant et portant ainsi ombrage aux espoirs de réforme de notre système judiciaire : l’intégration de hutus dans le système judiciaire n’est pas une fin en soi si elle ne s’accompagne pas d’une d’une vraie réforme de cette institution qu’est la JUSTICE.

 

Le Hutu Empowerment signifie aussi la mise en avant de la question de l’excellence dans les nominations des cadres de l’Etat, tout comme le HUTU Empowerment ne signifie pas non plus l’exclusion des TUTSIS dans les structures du Parti CNDD FDD ou de l’Etat. Nous avons ramené cette question du HUTU EMPOWERMENT pour répondre à ceux qui au CNDD FDD aiment ramener des prétextes ethniques pour justifier ceci ou cela, mais aussi pour exploiter la sensibilité ethnique en vue des élections de 2010. NKURUNZIZA n’a rien fait pour honorer ni les HUTUS ni les TUTSIS par une politique rationnelle pour rassurer les uns et les autres. Bien au contraire !

 

Cette liste des manquements du CNDD FDD n’est pas exhaustive mais nous savons que certains diront que ce bilan négatif est prématuré. Pour notre défense, nous disons ceci : on a perdu tout espoir que le pouvoir NKURUNZIZA va se corriger et se reprendre.

 

Au contraire, d’ici à 2010, le bilan sera encore plus NEGATIF. Nous parions dessus mais demandons que 2010 ne soit pas un autre exercice électoral inutile et raté avec l’avènement d’une autre dictature.

 

Pour cela, nous allons nous engager, dans les jours à venir, dans une réflexion sur la définition des défis qui attendent tout pouvoir au Burundi ainsi que les attributs que nous pensons que les burundais devraient rechercher dans les prétendants au pouvoir pour l’avènement d’un BON LEADERSHIP au Burundi. Un LEADERSHIP progressiste et visionnaire qui doit ramener le Burundi dans le concert des Nations et le sortir du club des FAILED STATES.