Burundi news, le 03/04/2011

Source Iwacu

Léonce Ngendakumana, ancien président de l’Assemblée Nationale : « Le marché des passeports biométriques : une pure mafia »

Écrit par Elyse Ngabire  

Léonce Ngendakumana (Sahwanya Frodebu), ancien président de l’Assemblée nationale de 1995 à 2002, affirme que depuis 1993, aucune loi revoyant à la hausse des prix des documents de voyage n’a été votée. Il défie le ministre Bunyoni de donner les références des lois votées en 2010.


Vous étiez à l’Assemblée nationale lors de la législature passée. Est-ce que les représentants du peuple auraient posé cet acte ?
Depuis 1993, aucune loi en la matière n’a été votée. En 2010, le ministre des Finances a tenté d’expliquer la hausse des prix de plusieurs documents dont les passeports, les laissez-passer et la carte nationale d’identité. Nous avons refusé car ils étaient exorbitants. Mais à notre grande surprise, dans la clandestinité, nous avons entendu que M. Bunyoni avait sorti une ordonnance. Pourquoi se référerait-il à celle-ci alors que nous avons voté une loi ?

Il y aurait donc violation de procédure d’après vous ?
Effectivement. L’ordonnance sort en 3ème position. Lorsque le parlement vote une loi, elle est par la suite promulguée par le Président de la République avec des références. Je donne ma tête à couper, Alain Guillaume Bunyoni n’en dispose pas. Les ordonnances doivent passer au conseil des ministres, pourtant cela n’a pas été fait car la ministre des Finances persiste et signe qu’elle n’est pas au courant.

Estimez-vous que c'est normal que la ministre des Finances ne soit pas informée ?
C’est paradoxal. Une ordonnance qui fait prélever des taxes dans un pays où la ministre ayant dans ses attributions les finances…

Le ministre Bunyoni indique aussi qu’il s’est basé sur le décret de 1989…
Rires…
Pourquoi se cache-t-il derrière un décret qui date de longtemps ? Est-ce qu’il n’évolue pas ? Ce décret n’a plus de place. Quand bien même il l’aurait, il lui donne uniquement le droit de déterminer les conditions et non de fixer les taxes. Tout ce qui concerne les impôts, taxes, budget de l’Etat, etc.,  c’est écrit noir sur blanc que ça relève du domaine de la loi. Il a violé en bonne et due forme la Constitution en son article 159.

Le marché de passeport biométrique, selon M. Bunyoni, est un marché de gré à gré à caractère secret. Qu’en dites-vous ?
Toutes les démarches entreprises par le ministre de la Sécurité publique dans ce dossier sont des procédures mafieuses. Qu’est-ce qui est secret dans la fabrication des documents de voyage ? Est-ce l’achat des munitions de combat ? Un marché qui n’est connu ni du gouvernement, ni du ministère des Finances, ni du parlement, c’est de la pure mafia !

Comment vous interprétez cela ?
C'est-à-dire que le pays n’est pas gouverné. Chacun dans son domaine fait ce qu’il veut sans contrôle de l’autorité hiérarchique. C’est de l’anarchie totale..  

Que pensez-vous des explications de Bunyoni ?
Il a trompé l’opinion. S’il veut honorer le contrat qu’il a signé avec la compagnie Contec Global, qu’il le fasse mais pas derrière le dos des Burundais. Qu’il cesse d’infantiliser des gens. Le peuple n’a rien aujourd’hui. Il est dans la misère indescriptible. Sous d’autres cieux, M. Bunyoni devrait démissionner.