LA PEUR QUI MENACE LE BURUNDI

Burundi news, le 27/10/2013

Par Gratien Rukindikiza

Quand une épidémie frappe un pays, la psychose gagne tout le peuple, des dirigeants au simple citoyen. Personne n'est épargnée. Les dirigeants doivent garder la sérénité, montrer au peuple qu'ils maîtrisent la situation pour éviter le découragement, voir des actes suicidaires. Dans certains cas, la peur se trouve plus au sommet qu'à la base. Comme disait un écrit dans une académie militaire au Burundi, souviens-toi chef, quand tu t'arrêtes, ils s'assoient. La peur au sommet est dévastatrice, mortelle pour un peuple.

Au Burundi, la peur ronge tous les niveaux. De la base au sommet mais pour des dangers différents, diamétralement opposés, voire le danger du peuple provenant de la peur des dirigeants.

Le Président a peur et le peuple est en danger

La grande peur du Président est de ne plus être au pouvoir. Ceci explique le malheur actuel du peuple burundais. Cette peur a plusieurs origines. Le Président Nkurunziza a du sang sur les mains ou a protégé des gens qui ont tué. Citons les massacres de Muyinga avec le colonel Vital Bangirinama qui vit actuellement en Tanzanie avec un salaire d'un colonel payé par les services de renseignements burundais. Il est parti à l'étranger avec un arrangement du pouvoir de Nkurunziza. Il y a aussi les massacres des hutu du FNL de Bujumbura rural et Bubanza. Il s'agit d'un véritable génocide, un crime contre l'humanité qui devait être puni par la cour pénale internationale. N'oublions pas les massacres de Gatumba en 2012. Enfin, terminons par l'assassinat de Manirumva. Il y a de la matière pour un bon procès pénal. Ainsi, il y a de quoi à avoir peur de lâcher le pouvoir. Nkurunziza tient à garder le pouvoir pour sa protection.

Il y a aussi les dossiers économiques. Le Président Nkurunziza serait impliqué dans le détournement des fonds de vente de l'avion Falcon 50, le dossier des cahiers ougandais; le dossier du pétrole nigérian, le dossier des télécommunications internationales tout récemment, les plantes fruitières au Burundi etc....

Il a déjà amassé beaucoup d'argent pour lui alors que c'était celui du peuple. Comment ne pas être inquiété avec tant de cas de corruption? La peur d'être poursuivi le pousse à rester au pouvoir. Quoi de plus rassurant que de se protéger soi-même! Mais jusque quand?

Cette peur est synonyme de la dictature actuelle. Il veut un troisième mandat, un quatrième, un Président à vie qui finit par hypothéquer même son avenir tout court. Cette peur le met en danger car ses actions peuvent inciter d'autres qui ont peur à une sorte d'autodéfense souvent dangereuse, y compris dans son propre camp.

Le grand conseil au Président Nkurunziza est d'arriver à vaincre cette peur et d'accepter de quitter le pouvoir à la fin de son mandat, sans mettre en danger le peuple burundais.

Les collaborateurs proches du pouvoir

Au Burundi, la démocratie made in CNDD-FDD a apporté une leçon très bien apprise. La chèvre broute là où elle est attachée. Le Président savoure la corruption à son niveau, le ministre à son niveau, le planton à son niveau. Celui qui n'a pas un terrain où il peut brouter s'estime lésé (Ntibamuhaye).

Ces collaborateurs ont aussi peur. Ils ont adapté leurs modes de vie à la corruption. Si demain ils perdent leurs places, ce ne sont pas les salaires perdus qui inquiètent mais l'argent provenant de la corruption qui va manquer. Pour se maintenir  à leurs places, certains ont perdu leur âme. Ils défendent des actes indéfendables, ils se montrent plus courtisans que les valets de la cour de Louis XIV. D'autres recourent à la violence. Ils orchestrent des jeunes de a milice Imbonerakure pour faire peur à l'opposition.

L'opposition a aussi peur de la violence préparée par le pouvoir

La peur du Président n'a pas de limite. Au Rwanda, la peur de Habyalimana a débouché sur un génocide qui a été préparé exactement avec une milice qui ressemble étrangement aux imbonerakure du Burundi au niveau des méthodes et de la haine de l'autrui.

Les militants du FNL de Rwasa sont tués, poussés à l'exil. Cet acharnement est dû à la peur des détenteurs du  pouvoir car Rwasa avait gagné les élections communales de 2010 mais les résultats ont été annoncés autrement. Les militants du MSD sont inquiétés aussi. Les deux partis sont plus visés car ils peuvent constituer un changement avec bien sûr l'alliance des autres partis forts de l'opposition comme le Frodebu, UPD etc.. Celui qui peut remettre en cause le maintien du Président Nkurunziza au pouvoir constitue un danger. Se sentant en danger causé par cette peur de quitter le pouvoir, le Président Nkurunziza se défend et fait de la violence à ses opposants. Ses actes font peur à l'opposition. La politique burundaise s'enferme alors dans un cercle vicieux de la peur, une peur mortelle pour le peuple burundais, une peur qui signifie aussi des massacres de grande envergure.

Le peuple a peur

Le Président a peur, ses collaborateurs ont peur, l'opposition a peur, peut-on demander au peuple de surmonter la peur? Dans les villages, la liberté d'expression est prohibée. Les opposants sont menacés par la milice imbonerakure, sauf dans certains coins où les militants de l'opposition sont organisés pour résister aux imbonerakure.

Le peuple a peur pour la sécurité, la sécurité alimentaire, la sécurité physique et la sécurité pour la génération future.

Les prochaines élections de 2015 font peur au peuple. Le pouvoir ne fait rien pour rassurer. Cela peut expliquer parce qu'il a peur.

Combien de massacres ont -ils été commis à la suite des peurs? Qui peut guérir la peur des Burundais? A chacun d'y répondre.