QUAND LA POLITIQUE RUINE L'ECONOMIE

Par Gratien Rukindikiza

Burundi news, le 29/03/2010

Il ne suffit pas d'avoir de bonnes idées pour construire un grand parti politique. Les projets ne suffisent pas pour accéder au pouvoir. Un parti politique a besoin de se faire connaître. Ses dirigeants doivent se déplacer, consommer, intervenir au profit de certains membres dans la nécessité ou même des cadres qui ont arrêter de travailler pour s'occuper du parti politique. Tout cela exige de l'argent. Or, les politiciens ne sont pas des millionnaires. Les cotisations ne sont pas suffisantes pour supporter les dépenses des partis politiques.

Les hommes d'affaires au secours des hommes politiques

Même si la question est tabou, ce n'est un secret pour personne que les politiciens entretiennent des relations parfois étranges avec des hommes d'affaires. Je ne suis pas en train de mettre les pieds dans les plats mais il est du domaine des médias de percer ce mystère.

Tous les politiciens qui comptent ont dû à un moment ou à un autre, au Burundi ou à l'étranger, faire recours aux commerçants ou hommes d'affaires. Chez les Anglo saxons, le lobbying en politique se fait au grand jour.

Si les hommes d'affaires interviennent au profit des hommes politiques, c'est qu'ils espèrent gagner des marchés si le camp soutenu gagne. D'autres préfèrent juste garder le marché acquis avant les élections pour ne pas être inquiétés. Il y a toujours des intermédiaires pour que les politiciens ne s'affichent pas avec les hommes d'affaires, deux mondes qui s'adorent mais leur amour est caché au petit peuple.

Au Burundi, une société ougandaise a été intermédiaire dans la vente du Falcon 50. La même société sous un autre nom vient d'acquérir des mines d'or à Muyinga. La même société a trempé dans le dossier des cahiers ougandais. Elle n'est pas étrangère aux nouvelles plaques d'immatriculation dont les prix ont flambé. C'est cette société qui financera une bonne partie de la campagne du Président Nkurunziza s'il arrive à se faire élire par diverses manoeuvres au CNDD-FDD d'autant plus que Rufyikiri a été désigné par le conseil des sages. Certains comités du CNDD-FDD, selon  quelques militants, auraient déjà annoncé que Nkurunziza ne sera pas leur candidat.

Quand la politique ruine l'économie

Cet amour entre les hommes d'affaires et les hommes politiques est un amour de raison. Les hommes d'affaires ne lorgnent pas sur leurs bénéfices. S'ils doivent débloquer un milliard, il y aura un payeur. Ils devront contourner les douanes ou les impôts avec la complicité du pouvoir. Si c'est un parti de l'opposition soutenu, l'homme d'affaires devra s'arranger pour augmenter les prix dans des situations monopolistiques. Au Burundi, on sait que la concurrence dans les affaires n'existe pas. Personne ne baisse les prix pour prendre les marchés au concurrent. Ils préfèrent garder les mêmes prix et garder les mêmes marchés.

Le perdant dans ce jeu d'amour passager est le peuple. Le pouvoir ne cherche pas à comprendre pourquoi les caisses sont vides tant que les politiciens ont eu leurs parts à la source. Cette situation est inflationniste aussi sans créer de croissance car l'argent sert à être dépensé dans des domaines non productifs.

La campagne électorale ou la fièvre politique comme celle d'aujourd'hui est improductive économiquement. Plusieurs jeunes sont des militants actifs des partis politiques. Ils sont les fers de lance. Au lieu de travailler pour créer des richesses, ils dépensent leur temps à faire la propagande. Politiquement, rien à dire, c'est une bonne cause. Economiquement, le pays perd beaucoup. Le pays a besoin de renouer avec la croissance, la création de l'emploi, l'augmentation de la productivité. Or, aujourd'hui, la politique crée un effet inverse. Les élections se produiront au moment de la récolte des produits vivriers et du café. La campagne de café de juin et juillet sera occultée par celle politique. Il est fort à parier que les moyens seront plus pris par la politique que par le café, source des devises du pays.

Depuis 2010, les hommes d'affaires sont incertains sur l'avenir politique du Burundi. En cas d'incertitude, pas d'investissement. C'est plutôt les affaires spéculatives, commerciales qui ne créent pas beaucoup de valeur ajoutée qui sont prisées. Or, le Burundi a besoin des industries de transformation, de conservation des produits  pouvant être exportés. Le Rwanda exporte sa bière insongo, sa farine de manioc. J'ai beau faire des milliers de kilomètres en occident, difficile de tomber sur un produit made in Burundi. Le retard ne fera que se creuser. Les politiciens devraient s'abstenir de critiquer les hommes d'affaires sur l'absence d'investissement. Il suffit de créer un climat de confiance, de paix, de bonne gouvernance pour que le pays se transforme.

La politique peut faire tout. Sauver ou ruiner l'économie. Or, le peuple vit de l'économie et non de la bonne parole. La vielle femme que le Président Nkurunziza a lavé les pieds pour imiter Jésus, ignore que le geste sur ses pieds a coûté plus de 20 millions de francs bu. L'ironie de l'histoire, personne ne sait si elle avait de quoi manger en rentrant. La moitié de cet argent aurait suffi pour construire une belle maison pour cette femme. Le carburant du cortège présidentiel, les frais de mission des accompagnateurs, les réceptions, les missions de préparation de la visite, tout a coûté au moins 20 millions de francs bu. Voilà des pieds qui ne portent même pas de chaussures qui valent cher. Un trésor pour celui qui a dépensé tant d'argent du peuple burundais pour les laver. Si cette femme le savait et qu'elle avait un bon avocat d'affaires, elle aurait exigé au moins 10 millions de francs pour laver ses pieds, véritables pieds en or. Une richesse en or ignorée.