QUAND LE POUVOIR PORTE PLAINTE CONTRE LUI MEME DANS LE DOSSIER INTERPETROLE

 

Burundi news, le 06/03/2011

Par Gratien Rukindikiza

On le croyait déjà réglé, voilà le dossier Interpétrole qui revient par un cafouillage au niveau de la justice. Ce dossier change de forme en fonction du ministre des finances, de la justice et des luttes internes au sein du parti au pouvoir. Nous ne reviendrons pas sur le fond du dossier. Ce qui nous intéresse pour le moment est la forme.

Un protocole a été signé et a servi au procureur général pour un non lieu

Le Président Nkurunziza a désigné une commission paritaire Interpétrole et la Présidence pour étudier tout le dossier afin de soumettre au procureur général un document qui lui servira pour trancher. Le seul audit qui sert de référence à l'Olucome est un audit fait par un cabinet international qui n'a pas interrogé tous les protagonistes. Les failles de cet audit ont été soulignées. Ce qui est dommage, le président de l'olucome Gabriel Rufyiri parle plus qu'il écrit. Il est difficile de retrouver les traces de ses déclarations à la radio. Le site de l'Olucome manque de matière alors que son président fait une déclaration par semaine en moyenne. La dernière publication date de janvier 2011 sur le site de l'Olucome. Or, il a soulevé plusieurs dossiers depuis janvier 2011. Il serait préférable qu'Olucome s'engage à publier ses déclarations avec des explications plus convaincantes et non émotionnelles.

Cette commission paritaire a rédigé un rapport confidentiel. Burundi News n'a pas pu s'en procurer. Contient-il des informations confidentielles? Oui, car le contrat d'origine date de l'embargo. Ce qui s'est fait pendant l'embargo est du domaine du secret défense car il s'agissait de permettre à l'armée d'avoir du carburant au moment où les pays voisins, officiellement, empêchaient le Burundi d'importer. Burundi News respecte le domaine de secret défense et s'engage à ne pas révéler les informations se rapportant à la manière de contourner cet embargo. Ce sont ces informations qui expliquent en réalité ce dossier Interpétrole qui ne sera jamais débattu en public avec tous les éléments. Le Burundi se retrouverait dans une mauvaise position par rapport à la région. No comment!

Ce protocole signé engage la Présidence et donc le pouvoir Nkurunziza. Dans ce protocole, Interpétrole s'engageait à payer les douanes 600 millions de francs bu et le gouvernement burundais débloquait la caution de 6 milliards de francs bu d'Interpétrole. Comme nous l'avons déjà dit, dans le monde des corrompus, ce chèque a aiguisé l'appétit des gens notamment le gouverneur de la BRB et d'autres personnes au ministère des finances. Alors que le procureur général demandait au gouverneur de la BRB de débloquer ce chèque, un avocat du gouvernement a porté plainte directement en justice en citation directe. Quelques jours après, il a été démis de ses fonctions par le Président.

Rebondissement, une autre citation directe du nouvel avocat

Le nouvel avocat vient de saisir la justice en citation directe. La date est fixée par la justice. Un avocat du gouvernement porte plainte contre un protocole signé par des conseillers du Président, approuvé verbalement par le Président et aussi par le procureur général de la République.

Inédit dans l'histoire de la justice. Qui accuse? C'est en principe le ministère public. Or, le ministère public est accusé par un ministère public bis via un avocat du gouvernement.

En général, celui qui porte plainte doit avoir déjà son dossier. L'avocat du gouvernement crée une surprise. Au début de l'audience, il déclare qu'il n'est pas prêt pour ce procès comme s'il n'était pas au courant de la procédure qu'il a déclenchée. Il demande le report en juin 2011 alors que les avocats de la défense demande au plus un mois.

Manque de crédibilité du pouvoir

Au niveau de la forme, il ressort que le pouvoir n'est nulle part. Comment se peut-il qu'un avocat du gouvernement porte plainte contre un protocole du pouvoir sans que des démissions ou limogeages s'en suivent? Pourquoi le ministère de la justice n'explique-t-il pas le motif de ces rebondissements.

Le peuple a besoin de savoir une chose. Est-ce que la société Interpétrole doit de l'argent ou pas? Si oui, combien avec des documents à l'appui. Les tergiversations du pouvoir ne font que compliquer la compréhension des Burundais. Si la Présidence mandate des gens pour analyser un dossier, si le Président approuve un dossier, si le procureur prononce un non lieu et que le dossier se retrouve en justice, il y a lieu de se poser la question du sérieux du pouvoir. Au delà du fond, la forme et  la façon de faire laissent perplexe. On ne peut pas demander aux investisseurs de venir investir au Burundi au moment où aucune règle de droit ou de commerce n'est respecté. L'Etat burundais devait comprendre que la main mise sur la justice par l'exécutif ne produit pas souvent les effets escomptés. Laissez la justice travailler librement, elle vous défendra. Ce n'est pas Radjabu qui dira le contraire.