UN PRESIDENT QUI COUTE CHER AU PEUPLE BURUNDAIS

Par Gratien Rukindikiza

Burundi news, le 16/01/2009

Il y a des fonctions qui exigent un sens de travail et qui demandent aussi l'analyse des dossiers. Les Présidents des sociétés sont payés pour faire du bénéfice, pour satisfaire les actionnaires. Quand les actionnaires sont mécontents, les dirigeants sont remerciés. Il en est de même des actionnaires populaires. Le Président de la République dirige le pays au nom du mandat du peuple qui est le seul détenteur des actions de la société Burundi.

Un Président occupé à un travail inadéquat

Le Président Nkurunziza est dit souvent absent des bureaux de la Présidence de la République. Il lui arrive de ne pas  diriger le conseil des ministres alors qu'il est au Burundi; ce qui serait très choquant pour un président du conseil d'administration qui ferait l'habitude de ne pas diriger le conseil d'administration. Le Président est souvent occupé à planter des avocatiers, le travail que peut faire le simple paysan de Ruzo ou de Muyebe. Ce métier ne requiert aucune technicité pour que le Président y consacre plus de temps qu'il ne consacre à rencontrer les fonctionnaires en dehors des corps de sécurité. Le Président de la République a un salaire actuellement de 5 millions de francs bu. En prenant un exemple d'une journée prise pour planter cent avocatiers suivi d'un match de football, un avocatier aurait coûté 192 307 francs bu si je prends 26 jours travaillés. Peut-on s'imaginer payer un paysan qui pourrait planter 100 avocatier et le payer 192 307 frs bu par jour? Chacun se spécialise dans son métier. Si un Président était élu pour planter les avocatiers et jouer au football, on aurait voté pour un paysan footballeur.

Au moment où le Président de la République est occupé par des avocatiers, les dossiers s'entassent, d'autres sont réglés par des conseillers animés par d'autres intérêts. N'a-t-il pas oublié qu'il avait nommé un directeur général d'un poste juteux pour limoger celui qui l'occupait alors que le décret signé était rangé dans le bureau du directeur de cabinet deux mois durant? Le plus étonnant, c'est qu'il a été poussé par certains de revoir la copie et le décret signé a été annulé sans que celui qui était limogé s'en aperçoive. Celui qui a signé a le droit d'annuler sa signature. Ca nous rappelle un autre Président avec des similitudes!

Il n'est pas rare que des dossiers soient signés avec le tampon et les décrets appliqués alors que le Président n'a pas vu les dossiers, faute de temps. Le Président doit faire son travail et laisser la place aux professionnels des métiers. Si son métier ne lui plaît pas, le champs est libre pour aller planter les avocatiers, jouer au football et prier tout en laissant la place à celui que le peuple désignera.

Un Président qui gère à la place des ministres

Le budget de l'Etat est affecté en général aux ministères. La Présidence reçoit sa part de fonctionnement. Rarement un Président s'est arrogé les pouvoirs du ministre de la solidarité nationale, du ministre de la santé, du ministre de l'agriculture, du ministre des sports, de l'évêque nationale de l'église du déclin etc...

Le Président de la République gère un budget de 2 milliards de francs Bu destinés  à l'appui des bonnes initiatives. Or, on se rend compte que cet argent est distribué pour faire une campagne électorale et en plus, sa gestion est opaque. Une bonne partie de cet argent se retrouve dans les poches des fidèles du pouvoir qui  construisent de belles villas à Bujumbura au moment où les habitants de Kirundo meurent de faim. En réponse à cette famine qui pousse les Burundais au Rwanda, le Président Nkurunziza n'a pas ouvert sa caisse pour les aider. Il vient de visiter la province de Kirundo et a distribué une dizaine de sacs de haricots et de riz. Inimaginable si ce n'est que se moquer du peuple burundais.

Cet argent aurait pu servir à garantir qu'il n'y ait plus de malades emprisonnés dans les hôpitaux, à promouvoir une agriculture. Le Président n'a pas mission de distribuer des aides, il a des ministres pour le faire.

Après avoir signalé (Par Burundi News) que la Présidence recevait de l'argent du pétrole du Nigéria, le porte parole du Président a accepté que cet argent rentre et qu'il est géré par le Président à l'abri des regards de ce peuple insolent qui regarde dans l'assiette du Président d'après ce porte- parole qui rappelait que les enfants ne regardent pas ce qui est dans l'assiette du père. Une drôle de conception du rôle de père de ce porte- parole qui justifie que le père peut se permettre de manger alors que les enfants ont faim. Les milliards de francs bu s'ajoutent alors à cette caisse privée du Président de la République.

A titre de comparaison, l'argent géré par le Président de la République à l'abri des regards est l'équivalent de l'aide de la France au Burundi dans le cadre bilatéral. On pourrait en conclure que la France aide le citoyen Nkurunziza à construire ses maisons dans son village de Ngozi. Le peuple burundais attend alors l'aide de la France. Si on ajoute l'argent du pétrole nigérian, le Président peut exonérer les citoyens burundais de l'impôt sur le revenu et diminuer les taxes sur le pétrole du fonds routier sur le carburant. La contrepartie se trouverait dans cet argent volé au peuple.

Un Président qui bloque l'économie nationale

Le Président est à l'aise dans les travaux manuels. Chacun sa spécialisation. Or, ses déplacements, ses loisirs, ses spectacles de prière bloquent l'économie du pays. Les commerçants se lamentent, la circulation des biens et des services en pâtissent. En général, il est sur les routes plus de 3 jours par semaines et les forces de sécurité bloquent les voies pour permettre au Président de passer. Ce sont des voies  de communication qui sont bloquées, les marchandises sont livrées avec retard, les voyageurs arrivent en retard, certaines activités sont bloquées. C'est de la valeur ajoutée à l'économie qui se perd. Le pays perd cette valeur ajoutée sans que ces déplacements soient bénéfiques pour le peuple.

Tout le Burundi en parle avec amertume. Un Président qui fait bloquer des voies comme Ngozi Muyinga ou Muramvya Gitega pour qu'il fasse du vélo sur ces routes avec une escorte gigantesque pendant plus d'une heure. Or, les véhicules et les  camions ne peuvent pas emprunter d'autres voies car le pays n'en dispose pas beaucoup. Si tout le pays doit s'incliner pour permettre au Président de rouler à vélo, le peuple s'est trompé et Monsieur Nkurunziza  s'est trompé. Le peuple a commis une erreur en votant pour les députés et sénateurs qui l'ont élu et Mr Nkurunziza s'est trompé en se présentant pour un job qu'il n'aime pas. Espérons que le peuple a compris le message que le Président ne cesse de lui faire comprendre. Si vous voulez élire un Président, ne pensez plus à celui qui a d'autres passions incompatibles avec la fonction présidentielle.

Ces Bikoraniro, sorte de rassemblement pour la prière, plutôt de danses et de chansons autour du Président de la République, sont des pertes de temps pour le peuple. Les ministres, les généraux, les directeurs généraux, les hauts cadres de l'Etat doivent participer à ces rassemblements qui durent 3 jours. Qu'on soit musulman, catholique, athée, etc..., on doit participer si on n'a pas d'autres motifs légitimes. Le comble, ce sont trois jours de travail chômés, priés et payés. Ne pas y participer équivaut en quelque sorte à une démission. Certains ministres confient en privé qu'ils sont dégoutés d'aller contempler  le Président de la République se rouler par terre devant ce monde. Dans ce genre de rassemblement, les retards ne sont pas acceptés. Le 1er vice Président a été en retard à Gatumba. Le Président était déjà sur place et causait avec quelques généraux à qui il a confié que le 1 er vice Président était resté en ville chercher les restes (Kunuranura) avant de venir, ce qui explique son retard.

Un Président, synonyme de corruption

Au CNDD-FDD, les détournements sont monnaie courante. Une moindre remarque a sa réponse : "Qui ne vole pas ici"? Au moins le 2 è vice Président Ntisezerana s'est déchargé en disant au Président Nkurunziza les yeux dans les yeux qu'il remboursera les quelques trente millions de francs bu du parti quand le Président aura remboursé le Falcon. Les dossiers ne manquent pas en partant du Falcon, des plaques d'immatriculation, des passeports, du carburant nigérian, des cahiers ougandais etc... Qui dit mieux?

Cette corruption généralisée fait que la fonction de la Présidence attire beaucoup de gens contrairement au temps passé. "Qui ferait moins que le Président Nkurunziza"? C'est la phrase qui revient. Ce qui intéresse les gens et désolant, c'est de voler plus et travailler moins. Ce n'est plus gagner plus et travailler moins.

Ce Président coûte cher au peuple burundais. Au lieu d'aider le peuple à sortir de la misère, c'est le peuple qui aide le citoyen Nkurunziza à quitter définitivement de la modestie et à rentrer dans le royaume des riches. Bravo le peuple. Cependant, rien n'est acquis. On a vu des gens riches redevenir des démunis à la suite des erreurs commises et aussi du mal causé aux autres. Personne n'aurait pensé que Mobutu aurait été enterré en catimini loin de sa terre et que son argent disparaitrait dans des banques occidentales. Personne ne maitrise l'avenir et le futur nous réserve des surprises.

Un Président qui crée des faux putschs

Nous tenons à informer les Burundais que le Président Nkurunziza est en train de préparer un autre faux putsch comme celui de Ndayizeye-Kadege. L'information circule et le Président n'hésite pas à informer les gens qu'il rencontre. Le putsch aurait un caractère ethnique selon le Président. Ces faux putschs font que le Président nous coûte cher aussi car la cohésion nationale en pâtit. L'ancien Président Buyoya est visé au moment où il est au sommet de la considération par la communauté internationale. Je ne suis pas du tout un partisan de Buyoya, loin de là. Mais, il n'est pas dans mes habitudes de ne pas défendre ceux qui sont victimes de la barbarie et de la dictature même si ils ont été à un certain moment à la place de l'oppresseur.

Ces informations diffusées par le Président Nkurunziza et son entourage ont plusieurs buts. D'une part, elles préparent des arrestations à caractère ethnique pour contrecarrer le FNL en faisant comprendre qu'il y a un péril tutsi. D'autre part, il s'agit aussi de casser au sein du CNDD-FDD les contestataires en leur montrant que le "danger impose une cohésion au sein du parti". Des mensonges circulent dans la ville de Bujumbura pour citer tel ou tel autre Burundais au courant des préparatifs de putschs alors qu'ils ne sont même pas au courant. Il n'est pas exclu que demain, des arrestations commencent à s'opérer pour focaliser tous les regards du côté de ces faux putschistes pour faire oublier les déboires du pouvoir et refuser de libérer des prisonniers politiques et d'opinion comme Alexis Sinduhije, Kavumbagu, Rududura, Radjabu etc... C'est dans ce climat que le Président Nkurunziza ferait le ménage au CNDD-FDD dans la grande stupeur des concernés.