LE PROCES VOULU PAR RADJABU FINIT PAR L’EMPORTER
Burundi news, le 20 octobre 2006
Par Gratien Rukindikiza
La manipulation des informations pour écarter des rivaux est un art. On ne s’improvise pas du jour au lendemain expert de montage de scénario. Souvent, les services de renseignement manipulent les informations, les citoyens pour arriver à un but, soit protéger le pouvoir, soit éliminer les opposants.
Au Burundi, le procès des faux putschistes tourne au cauchemar pour le pouvoir.
Au commencement, il y a un voyage qui a tout accéléré. Le président du parti au pouvoir CNDD-FDD, Radjabu, était en voyage en Belgique. Une rumeur lancée par le Président de la République avait fini par se faire oublier. Le putsch dénoncé par le Président de la République avait été critiqué par plusieurs milieux politiques. La Présidence avait pratiquement retiré ce qui avait été dit à Karuzi au mois de février 2006.
Radjabu voulait mettre en prison tous ceux qui ont été un obstacle pendant leur lutte. Il fallait s’imaginer un stratagème pour arriver à ses fins. Il a manipulé les services secrets et les cadres du parti. Il avait promis de fournir des preuves à son retour de la Belgique. L’ancien Président Ndayizeye, l’ancien vice-Président Kadege, le colonel Ndarisigaranye et d’autres furent arrêtés pour complot contre l’Etat. Ce soi-disant putsch serait en ce moment, d’après certaines informations fiables, l’œuvre de plus de 30 officiers tous originaires des provinces Bururi, Makamba et de la commune Ryansoro, d’où un certain parfum de régionalisme.
La liste était constituée sous la supervision des hommes de confiance de Radjabu. Au moment où Mugabarabona était arrêté, la liste recevait de nouveaux inscrits. Je me garderai de donner les noms de ces officiers qui auraient été jetés en prison tout étant innocents. Sur le bon vouloir d’un ou deux généraux, ou d’un ministre membre du CNDD-FDD, un officier ou un civil pouvait se retrouver sur la liste. Alexis Sinduhije était mis sur la liste par le ministre Karenga Ramadhani.
Au retour de la Belgique, les preuves ont manqué. Le général Adolphe Nshimirimana avait pensé que Radjabu fournirait les preuves. Il fallait confectionner à la hâte. Le commandant Rudadi a essayé de sauver les meubles mais maladroitement. Le pouvoir a changé de juges de la cour suprême pour placer les militants du CNDD-FDD dans cette cour.
La parodie judiciaire actuelle ressemble beaucoup à une pièce de théâtre mal réalisée. Le commandant Rudadi, pièce maîtresse de l’accusation au départ, a innocenté les militaires. Le ministre de la défense a déclaré qu’aucun militaire n’a pas participé de près ou de loin à ces préparatifs de putsch supposé. Un putsch sans militaires, du jamais vu. On s’imagine Ndayizeye et Kagede armés de machettes et lances monter à l’assaut du palais présidentiel gardé par plus de 3 000 militaires. Un véritable western à la Burundaise !
Ndayishimiye, alias Maconco, a accepté de charger les autres accusés moyennant 200 millions de francs bu. Après tout, il avait déjà été emprisonné pour escroquerie, cette fois-ci il a choisi d’escroquer l’Etat avec la complicité de la Documentation. Les accusations manquent de précisions, Buyoya cité, alors que les faits sont datés au moment où il était aux Etats-Unis.
La justice s’emballe. Le procureur général fait siennes les accusations de Maconco et accuse tour à tour le ministre de la défense, le chef d’Etat major Rwandais Kabarebe, bras droit du Président Kagame et Salim Saleh, petit frère du Président Ougandais. Le général Nkunda du Congo n’est pas épargné.
Le procureur général a complètement perdu la tête. Même si la ministre des affaires étrangères tente de calmer le jeu sans y parvenir. Un procureur général ne peut pas répéter ce que dit un accusateur sans y croire. Si Maconco avait dit qu’il avait préparé le putsch avec Radjabu, est-ce que le procureur général l’aurait répété ? Je ne crois pas.
Si Buyoya, Niyoyankana, Kabarebe avaient réellement voulu faire un putsch au Burundi, il y aura peu de chances de suivre un tel procès aujourd’hui. La question aurait été de se savoir où seraient le Président Nkurunziza et surtout Radjabu. Quand on prend ses rêves pour la réalité, on a intérêt à les garder pour soi.
Ce procès est riche en mensonges. Le prévenu Mugabarabona a complètement oublié ceux qui l’ont interrogé le premier jour. L’Administrateur adjoint de la Documentation, le colonel Kiziba l’a vu le troisième jour. Toutes ses déclarations ont été faites le premier jour. Or, il affirme dans le procès que c’est Kiziba qui l’a menacé. Pourquoi ne dénonce-t-il pas ceux qui l’ont poussé ou manipulé ?
Les preuves d’accusations sont les seules déclarations de Maconco. Pourquoi Ndayizeye, Kadege et autres ont-ils emprisonnés et non les 30 officiers ? Pourquoi le pouvoir n’a –t-il pas lancé des mandats internationaux contre le général Kabarebe avant le juge Bruguère ? Radjabu aurait pu porter le mandat au Président Rwandais Kagame quand il l’a rencontré. Sauf qu’il a rencontré Kagame sur convocation et non invitation contrairement à ce qu’on laisse croire.
Ce faux putsch finit par avaler ses concepteurs. Radjabu est isolé. Son bras droit Jean Petit a été limogé de la Documentation par le général Adolphe Nshimirimana. Il ne bénéficie plus d’une couverture des services secrets et est devenu vulnérable. Ce limogeage contre le gré de Radjabu est à la base des rumeurs entretenues par les proches de Radjabu qui disaient que le général Adolphe Nshimirimana n’est plus le patron de la Documentation. Tout a été fait pour le faire discréditer auprès du Président de la République, en vain.
Le congrès de Gitega sonne le glas pour Radjabu. Les cadres du parti n’hésitent plus à le critiquer ouvertement. La présidence du parti est à pourvoir. Des noms circulent. Chez les proches de Radjabu, c’est l’inquiétude qui domine. Ils adoptent le profil bas.
Le grand perdant dans ce procès des faux putschistes est Radjabu. Il est emporté par une idée qu’il croyait le faire arriver au pouvoir. Il avait trop misé et il perd tout dans le jeu tragique.
La rédaction souhaite un bon congrès aux militants du CNDD-FDD. Le peuple est derrière vous. Sauvez le pays pour éviter que les autres le fassent à votre place.