
Burundi news, le
15/12/2010
Réclamez la libération d'un journaliste
(Source: AI)
Le 13 décembre 10
Jean-Claude
Kavumbagu, rédacteur en chef de l'agence de presse en ligne Netpress, est
maintenu en détention depuis juillet pour avoir laissé entendre que les forces
de sécurité burundaises ne sont pas en mesure de défendre le pays. Il n'a pas
été jugé et sa seconde requête de libération sous caution a été rejetée en
novembre.
Le 12 juillet 2010, le lendemain d'attentats suicides commis à Kampala, en
Ouganda, Jean-Claude Kavumbagu a publié un article dans lequel il mettait en
cause la capacité des forces de sécurité burundaises à protéger le pays
d'attaques terroristes. Les attentats en Ouganda ont été revendiqués par le
groupe armé islamiste somalien Al Shabaab, qui a également menacé d'attaquer le
Burundi en représailles de la participation du pays à la Mission de l'Union
africaine en Somalie (AMISOM).
Dans son article, Jean-Claude Kavumbagu indiquait : "l'inquiétude était
réelle à Bujumbura et tous ceux qui [ont entendu parler des attentats] hier à
Kampala étaient convaincus que si les miliciens [d'Al Shabaab] voulaient tenter
"quelque chose" dans notre pays, ils réussiraient avec une facilité
déconcertante tellement nos forces de défense et de sécurité brillent plus par
leur capacité à piller et à tuer leurs compatriotes qu'à défendre notre pays".
Jean-Claude Kavumbagu a été arrêté le 17 juillet. Il a été interrogé sans la
présence d'un avocat et accusé de trahison avant d'être envoyé à la prison
centrale de Mpimba, à Bujumbura.
La trahison est un crime passible de la réclusion à perpétuité mais, aux termes
du droit burundais, ce chef d'inculpation ne peut être appliqué qu'en temps de
guerre. Jean-Claude Kavumbagu a également été inculpé de diffamation et de
violation de la Loi burundaise sur la presse. Amnesty International le considère
comme un prisonnier d'opinion, détenu seulement pour avoir exercé son droit à la
liberté d'expression. Son incarcération pourrait nuire à l'exercice du droit à
la libre expression au Burundi et pousser d'autres journalistes à s'autocensurer
afin de se protéger de toute arrestation arbitraire et de tout placement en
détention.
La demande de libération sous caution de Jean-Claude Kavumbagu a été rejetée le
6 septembre. Lors de l'audience en appel contre cette décision, qui a eu lieu le
9 novembre, la défense a argué que la violation de la Loi sur la presse et la
diffamation ne justifiaient pas un placement en détention provisoire, et que la
trahison n'était pas un chef d'accusation valable. Le 11 novembre, la Cour
d'appel de Bujumbura a néanmoins confirmé la détention provisoire de Jean-Claude
Kavumbagu. Le 6 décembre, ses avocats n'avaient pas reçu de copie du jugement et
attendaient l'annonce de la date du procès.
La prison centrale de Mpimba est surpeuplée et insalubre, et les conditions de
vie sont loin de respecter les normes internationales.
DANS LES APPELS QUE VOUS FEREZ PARVENIR LE PLUS RAPIDEMENT POSSIBLE AUX
DESTINATAIRES CI-APRÈS (en français, en anglais, en kirundi ou dans votre propre
langue) :
-
faites
part de votre profonde inquiétude quant au fait que Jean-Claude Kavumbagu
soit détenu pour trahison et diffamation en raison de ses critiques visant
les forces de sécurité burundaises ;
-
exhortez
les autorités à le libérer immédiatement et sans condition, car il s'agit
d'un prisonnier d'opinion détenu seulement pour avoir exercé son droit à la
liberté d'expression ;
-
rappelez-leur que le Burundi est partie à la Charte africaine des droits de
l'homme et des peuples ainsi qu'au Pacte international relatif aux droits
civils et politiques, et qu'il est par conséquent tenu de respecter le droit
à la liberté d'expression.
ENVOYEZ VOS APPELS AVANT LE 17 JANVIER 2011 À :
Président
Monsieur Pierre Nkurunziza
Président de la République
Présidence de la République, Boulevard de l'Uprona, Rohero I, BP 1870,
Bujumbura, Burundi
Fax : +257 22 24 89 08
Formule d'appel : Monsieur le Président,
Ministre de la Justice et Garde des Sceaux
Madame Ancilla Ntakaburimvo
Ministre de la Justice et Garde des Sceaux
Ministère de la Justice et Garde des Sceaux, BP 1880Bujumbura, Burundi
Fax : +257 22 21 86 10
Formule d'appel : Madame la Ministre,
Copies à :
Procureur général de la République
Monsieur Elyse Ndaye
Procureur Général de la République
Parquet Général
BP 105
Bujumbura, Burundi
Fax : +257 22 27 30 53
Veuillez également adresser des copies aux représentants diplomatiques du
Burundi dans votre pays. Vérifiez auprès de votre section s'il faut encore
intervenir après la date indiquée ci-dessus. Merci.
INFORMATIONS GÉNÉRALES
Au Burundi, les médias sont particulièrement actifs et les journalistes
continuent de critiquer le gouvernement malgré ses efforts pour les réduire au
silence. Les autorités burundaises utilisent la détention provisoire prolongée
et le harcèlement judiciaire et sont à l'origine de violations du droit
burundais, notamment en matière de procédures, dans le but de restreindre la
liberté d'expression de façon abusive. Le Burundi est partie à la Charte
africaine des droits de l'homme et des peuples et au Pacte international relatif
aux droits civils et politiques, deux traités qui garantissent le droit à la
liberté d'expression.
Le gouvernement burundais est particulièrement sensible aux critiques visant ses
forces de sécurité. Le groupe armé islamiste somalien Al Shabaab a menacé
d'attaquer le Burundi et l'Ouganda en représailles de la contribution de ces
deux pays à la Mission de l'Union africaine en Somalie (AMISOM), une opération
de maintien de la paix mandatée pour protéger les institutions du gouvernement
fédéral de transition somalien. Les attentats du 11 juillet à Kampala, en
Ouganda, revendiqués par Al Shabaab, ont tué 74 personnes qui s'étaient
rassemblées pour regarder la finale de la Coupe du monde de football, et en ont
blessé 70 autres.
Jean-Claude Kavumbagu a été arrêté le 17 juillet par le colonel David Nikiza, le
commandant de la région ouest, qui lui a montré un mandat d'amener. Jean-Claude
Kavumbagu a été accusé de trahison, définie par l'article 570 du Code pénal
burundais comme suit : "tout Burundais qui, en temps de guerre [..],
participe sciemment à une entreprise de démoralisation de l'Armée ou de la
Nation ayant pour objet de nuire à la défense nationale". Jean-Claude
Kavumbagu a également été accusé d'imputations dommageables (diffamation) aux
termes de l'article 251 du Code pénal, ainsi que de violation de l'article 50 de
la Loi de 2003 sur la presse (loi n° 1 025 de novembre 2003 régissant la presse
du Burundi).
Le 30 juillet, Jean-Claude Kavumbagu a été amené devant le Tribunal de grande
instance de la mairie de Bujumbura. Son avocat a demandé qu'il soit libéré sous
caution, avançant que son placement en détention provisoire n'était pas requis
au vu du droit burundais. Le tribunal ne s'est pas prononcé dans cette affaire à
ce moment-là car l'un des juges avait été muté dans une autre juridiction deux
jours plus tôt et avait attendu la date du procès pour informer le tribunal de
sa mutation, ce qui a attiré les critiques de 10 organisations de la société
civile qui se sont exprimées dans un communiqué conjoint. L'audience n'a pu
reprendre qu'en septembre, après les vacances judiciaires du mois d'août.
La demande de libération sous caution de Jean-Claude Kavumbagu a finalement été
entendue le 1er septembre. Le tribunal a rendu son jugement le 6 septembre,
décidant que Jean-Claude Kavumbagu serait maintenu en détention afin de pouvoir
être interrogé au cours de l'enquête. Lors de l'appel, qui a eu lieu le 9
novembre, la défense a réclamé la libération conditionnelle en arguant qu'aux
termes du droit burundais, les deux chefs d'inculpation (violation de la Loi sur
la presse et diffamation) ne justifiaient pas un placement en détention
provisoire. Elle a également avancé que pour que Jean-Claude Kavumbagu soit
accusé de trahison, le Parquet devrait annoncer que le Burundi était en guerre
le 12 juillet. Le représentant du procureur général a reconnu que tel n'était
pas le cas mais il a ajouté que c'était à la cour de décider. Le 11 novembre, la
Cour d'appel de Bujumbura a néanmoins confirmé la détention provisoire.
Jean-Claude Kavumbagu a été considéré comme prisonnier d'opinion plusieurs fois,
la plus récente datant de 2008 : il avait été accusé de diffamation. Il avait
écrit dans un article que le coût engendré par le voyage du président Nkurunziza
pour se rendre à la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques de Pékin avait
entraîné des retards dans le versement du salaire de certains fonctionnaires. Il
avait été maintenu en détention provisoire pendant sept mois avant d'être
acquitté en mars 2009. Le procureur a fait appel et l'affaire n'est pas encore
classée.
