Burundi news, le 21/08/2009

LA SOCIETE CIVILE, LES INSTRUITS ET LES PROGRAMMES DES CANDIDATS A LA PRESIDENTIELLE DE 2010 AU BURUNDI.

DE Salvator NAHIMANA.

 

Les échanges sur les différents sujets concernant le Burundi sont intéressants à plus d’un titre. Ne dit-on pas que du choc des idées jaillit la lumière !

A écouter parler les uns, le problème ethnique  au Burundi n’en serait pas un. Pour d’autres, c’est un problème qui doit être réglé avant toute vision future sereine de ce pays.

A mon humble avis, la conscience d’appartenir à une ethnie au Burundi s’est forgée petit à petit et a atteint son point culminant en 1972. Je pense qu’aujourd’hui, la majorité des instruits Barundi ont baigné là-dedans. Or, ce sont ces derniers qui sont appelés à diriger le Burundi d’aujourd’hui et de demain. De plus, la constitution qui régit le Burundi actuel a officialisé ces ethnies.

Si les Barundi instruits n’arrivent pas à régler le contentieux de sang entre les Bahutu et les Batutsi, le Burundi peut  encore attendre son véritable développement. Ce contentieux ne pourra se régler que quand les commanditaires des différentes tragédies seront désignés nommément et sanctionnés conformément à la loi. Ainsi, se tarira la globalisation à la burundaise et la naissance de la conscience de responsabilité individuelle aura une base sûre. Car il est honteux et scandaleux d’entendre dire que les Bahutu et les Batutsi ont tué ! Ce sont CERTAINS Bahutu et CERTAINS Batutsi qui ont tué.

Comment se fait-il que tout le monde avance les yeux fermés dans cet amalgame ? Est-il normal que les enfants Barundi qui sont nés et grandis en Tanzanie, au Gabon, ou ailleurs et dont certains ne connaissent même pas le pays de leurs parents continuent à porter ces accusations  sur leurs épaules ?

 

 Certes, cette vision globalisante arrange certains  mais n’est en aucun cas dans l’intérêt de la majorité des Bahutu et des Batutsi. Ces dernières années nous le prouvent.

C’est  seulement après le règlement de ce contentieux que les dirigeants Bahutu et/ou Batutsi seront jugés pour leurs actes et non pour leur ethnie. A ce moment-là, la constitution actuelle sera dépassée et son amendement ne causera aucun souci à qui que ce soit. D’ailleurs, certains partis commencent à mettre en cause cette constitution alors que les raisons qui ont fait qu’elle soit ainsi sont toujours latentes.

Les instruits Barundi devraient comprendre que mettre la charrue devant les bœufs est improductif. Réglons ce contentieux d’abord et les choses seront plus claires.

Le jour où l’impunité ne sera plus de mise, le jour où le citoyen se sentira protégé dans ses biens, il s’épanouira et l’investisseur étranger viendra volontiers travailler avec lui.

Tant que certaines décisions administratives seront perçues comme  ethniques dans le subconscient de la majorité des Barundi, tant qu’on continuera à faire vibrer la corde ethnique aux moments clé de la vie nationale (élections,…), c’est qu’il y a encore un contentieux mal géré.  Une question importante non réglée finit par ressurgir tôt ou tard.

De ce fait, la société civile et les instruits doivent parler d’une seule voix et exiger des candidats à la présidentielle de 2010 un engagement ferme pour liquider ce contentieux. Ne voit-on pas aujourd’hui en Occident les sociétés civiles et les organisations non gouvernementales exiger de leurs candidats un engagement écrit sur leurs politiques de sauvegarde de l’environnement ?

Les Barundi sont assez mûrs pour évaluer les différents programmes puis voter pour celles et ceux qui s’engagent à les conduire vers un avenir prometteur.

En attendant ces engagements, ces Barundi doivent par exemple exiger une évaluation indépendante de l’exécution de l’accord d’Arusha. Cette évaluation dégagera la responsabilité des futurs candidats ou de leur parti politique dans les blocages ou les progrès de l’exécution du contenu de l’accord. Après cette évaluation, les Barundi seraient mieux informés pour leurs choix futurs.

 

De même, les Barundi doivent défendre leur souveraineté. En effet, toute personne d’origine burundaise n’a pas nécessairement la nationalité burundaise.
La loi n°1/013 du 18 juillet 2000 portant réforme du code de la nationalité précise en son article 22 que « Toute personne ayant possédé la nationalité burundaise à titre originaire et l’ayant perdu pour avoir acquis une nationalité étrangère, peut redevenir burundaise à condition d’en faire la demande

et garder sa seconde nationalité.
Le chapitre V de la même loi précise les modalités du recouvrement de la nationalité burundaise. Le chapitre indique à l’article 38 que : « Peut recouvrer la nationalité burundaise par simple déclaration toute personne ayant possédé à titre originaire et l’ayant perdue, par application de l’ancien code de la nationalité, en raison de l’acquisition volontaire d’une nationalité étrangère ». Ce recouvrement résulte d’une déclaration souscrite devant le ministre de la justice (art.39).
Le recouvrement de la nationalité burundaise donne lieu au paiement d’un droit dont le montant est fixé par ordonnance conjointe du ministre des Finances et du ministre de la justice sauf pour les indigents (art.40)
.
Or, il semblerait que cette ordonnance n’existerait pas, ce qui rend cette loi inapplicable pour un certain nombre de personnes. L’ordonnance en question devrait préciser les modalités pratiques à mettre en place par les représentations diplomatiques du Burundi à l’étranger pour que les Tanzaniens, Gabonais, Français, Belges, Américains, Canadiens, … d’origine burundaise régis encore par l’ancien code de la nationalité puissent se conformer à la loi n°1/013 du 18 juillet 2000 s’ils le désirent.

Comment peut-on alors expliquer aujourd’hui qu’il y ait des personnes régies par l’ancien code de la nationalité qui ont des fonctions de souveraineté nationale en l’absence de cette ordonnance ?


Le non respect de la loi est, entre autre, l’un des éléments qui ont conduit le

Burundi dans  la situation  actuelle.
Il serait urgent que les membres de l’exécutif habilités à signer l’ordonnance en question le fassent avant les élections de 2010.

 La CENI pourrait l’exiger pour l’actualisation des listes des électeurs !
Si rien n’est fait, une autre division naîtra et le principe de souveraineté nationale pourra être posé quand on se rendra compte que le Burundi est conduit par des personnes qui ne possèdent pas la nationalité de ce pays.

Il vaut mieux avancer lentement mais sûrement que de brûler des étapes dont les conséquences nous feront reculer une fois de plus. Nous ne pouvons pas construire notre démocratie sur du sable mouvant.

 Même si les problèmes semblent être complexes, un bon leadership permettrait de les résoudre un à un et le progrès, qui lui-même n’est jamais figé mais toujours en perpétuel mouvement sera visible pour la majorité des Barundi.

Il n’est jamais trop tard pour bien faire et toutes les occasions sont bonnes à saisir.