IL FAUT SAUVER LA POLICE BURUNDAISE

Par Gratien Rukindikiza

Burundi news, le 30/05/2009

Dans un pays, le système étatique peut avoir des problèmes dans le fonctionnement. Le pouvoir peut être corrompu. Le socle de la nation reste en général les corps de la sécurité surtout la police et l'armée. Si les deux sont dans un état lamentable avec un pouvoir dictatorial et corrompu, c'est soit la révolte, soit la rébellion qui s'en suit.

Au Burundi, l'Armée nationale reste le garant de la démocratie. Elle joue le rôle républicain et cela grâce au commandement surtout à une personnalité qui l'a marquée. Le général Niyoyankana a été chef d'Etat Major de l'Armée du temps de la Présidence du Président Buyoya et aussi du Président Ndayizeye. Il est aujourd'hui le ministre de la défense. Cette longévité et aussi la discipline et l'ordre dans ce corps sont à l'origine de ce rôle républicain. Je suis convaincu que l'homme a joué un rôle clé et la nation burundaise lui sera reconnaissante.

La police, source d'insécurité

La police nationale est le  maillot  faible de la sécurité. Elle est en véritables lambeaux. Elle implore pitié. Certains de ses dirigeants avouent sous couvert d'anonymat qu'ils sont incapables de la sauver mais en profitent pour s'enrichir de la position notamment en passant par  les effectifs fantômes de la police. Il est difficile de commander une police dont les effectifs étaient inconnus aux dirigeants. Il y avait dans cette police, plus de 1000 policiers fictifs qui étaient payés par les deniers publics mais en réalité, l'argent allait dans les poches de dirigeants au pouvoir.

Cette police est le fruit d'un mélange raté de trois corps et d'une rébellion. La gendarmerie nationale, l'ancienne  police (police municipale, la police pénitentiaire,  la police judiciaire et la police nommée PAFE ont fusionné sans harmoniser  les formations et méthodes de travail. Le CNDD-FDD a préféré mettre ses meilleurs éléments et anciens rebelles dans l'armée alors que les nouveaux arrivés ont été envoyés à la police. Les commandants de cette police, eux -mêmes non formés, n'ont pas voulu mettre en  place des formations destinées surtout aux anciens rebelles. Les grades ont été attribués sans faire attention aux compétences et au niveau d'études. Un  officier qui ne sait pas lire le français n'a pas de place dans cette police au niveau de son grade.

Pour maintenir cette police dans le giron du pouvoir et l'empêcher de faire son travail dans la neutralité, le pouvoir lui a donné des chefs dévolus au parti CNDD-FDD. Ainsi, la police est commandée plus au CNDD-FDD qu'à la direction centrale. Combien de fois la police est intervenue sur ordre des dirigeants du CNDD-FDD pour empêcher les réunions autorisées des partis politiques? Combien de fois cette police est intervenue pour des raisons privées de certains ténors du CNDD-FDD? Des centaines de fois ou plus.

L'état dans lequel se trouve la police arrange le pouvoir car il en aura besoin pour intimider la population lors des élections. Cette police est devenue une source d'insécurité. Quand elle intervient, elle fait peur au lieu de rassurer. Les gens préfèrent ne pas faire appel à cette police qui agit en certains endroits en véritables milices. Certaines autorités qui avaient la sécurité de la police ont fini par la refuser.

Qui pourra sauver la police?

Cette police jouit d'une certaine impunité. Les actes de brutalité envers la population ne sont pas punis. Le commandement de la police fait tout pour la couvrir. C'est même ce commandement qui devrait faire de l'ordre.

La direction de la police nationale est très absente. Le directeur général de la police n'a aucune envie de se fâcher avec le pouvoir qui lui a donné cette place. Il aurait aimé l'avoir avant du temps du Président Ndayizeye à qui il était allé vendre son ethnie hutu. A la grande surprise, l'ancien Président Ndayizeye a vu au Sénat un ancien hutu qui se présentait comme tutsi. Comme quoi, ces histoires d'ethnies ne servent qu'à endormir le peuple. Les dirigeants ont oublié de dire aux Burundais que la vraie ethnie est la nation burundaise. Le reste, certains y entrent et sortent comme ils veulent. Au moins, voilà un progrès!

Il est difficile de sauver cette police au moment où ceux qui devraient la sauver, sous prétexte de l'insécurité, envoient épouses et enfants dans les pays scandinaves pour se déclarer des réfugiés. C'est un véritable spectacle de voir une famille expliquer aux autorités du pays qu'elle est chassée par la police, le système étatique au moment où le mari est un des responsables de cette insécurité et de cette police.

La motivation de sauver cette police pourra manquer d'autant plus que la caisse qui intéressait les dirigeants de la police a suivi l'ancien directeur général de la police Bunyoni devenu ministre. La direction générale de la police ne gère plus les approvisionnements de cette police. Les haricots, l'huile, les uniformes seront surfacturés au ministère de la sécurité publique. La grogne monte à la direction générale. La police n'est plus intéressante.

Cette police laissée à l'abandon se révèlera un jour dangereux pour la nation burundaise. Il n'est pas exclu que les bagarres police armée reviennent comme en 1965. Il n'est pas non plus exclu que cette police échappe à ceux qui voulait la manipuler. Ne pas sauver cette police est suicidaire pour le pouvoir et dangereux pour le peuple.

Cette police sera sauvée par un changement du pouvoir après les élections de 2010. Le peuple attend ce salut.